
Le chef de l’Etat ne cesse, depuis qu’il a été porté en 2017 à l’Elysée, d’expliquer entre autres que la souveraineté est en fin de compte un fardeau qu’il faudrait partager pour être plus fort et protecteur afin d’affronter les rugissants de la mondialisation.
Outre que la position n’est pas nécessairement celle d’une très grande partie de nos partenaires européens, faut-il encore, si telle est la conviction présidentielle, qu’il en assume toutes les exigences et qu’il ne déroge pas à la règle de solidarité que ses principes induisent. L’UE a fait le choix de l’atlantisme, elle l’a fait sous une autre forme en son temps pour défendre ses libertés, elle le fait aujourd’hui surtout par héritage historique, sans pour autant tirer toutes les conséquences d’une situation qui n’est pas celle de la guerre froide.
Emmanuel Macron est l’otage d’un système d’alliances qu’il promeut mais dont il croit pouvoir user selon les circonstances avec une plasticité l’autorisant à procéder à certains pas de côtés.
Tout se passe comme si, guidé par une sorte de maniérisme diplomatique, il voulait s’en référer à une histoire qu’il n’est pas en mesure d’assumer, faute de moyens et de volonté. La vérité c’est qu’il le fait d’une telle manière qu’il apparaît aussi peu crédible qu’inefficace ; ce n’est pas de Chine et confronté au géant qu’il convient de tenir un propos sur le « suivisme » européen car c’est là symboliquement signifier plus une infériorité qu’affirmer une indépendance. Tout le problème est que le Président aspirant à faire entendre la différence française, ou même la nuance, le fait dans des conditions inadaptées d’une part mais surtout d’autre part en ne s’en donnant pas les moyens dans l’ensemble de ses décisions sur le plan national. De Gaulle était l’ouvrier inlassable de l’indépendance parce qu’il n’avait de cesse de solidifier sur tout le spectre régalien et stratégique l’arc de la souveraineté ; tout le contraire et l’inverse des politiques publiques de l’actuel président qui semble oublier que pour être indépendant il faut d’abord être souverain. Une vérité élémentaire qui ramène à l’état de velléités les déclarations présidentielles qui ne peuvent ainsi dissimuler leur inextinguible fragilité…
Arnaud Benedetti
Rédacteur en chef de la Revue Politique et Parlementaire
Professeur associé à l’Université Paris Sorbonne