Encore Bayrou ! Se sont sûrement esclaffés les membres de la majorité présidentielle en découvrant ce dimanche sa dernière interview dans le JDD. Quatre jours après la présentation de la feuille de route de la première ministre et à l’orée des manifestations du 1er mai , le patron du Modem a une nouvelle fois pris à partie la méthode du gouvernement sur la réforme des retraites.
Pour François Bayrou, « Le gouvernement s’est laissé prendre au piège ». De quel piège est-il question ? Selon le maire de Pau, « On a accepté sans réagir que l’on accrédite dans l’esprit des Français l’idée que notre système de retraites était aujourd’hui équilibré, et que la réforme ne concernait que d’éventuels déficits pour les années à venir ». En effet, le Haut-Commissaire au plan regrette que le gouvernement ne se soit pas largement servi du rapport produit par ses services mettant en avant le « déficit structurel important » du système de retraites évalué à 30 milliards d’euros.
Depuis le lancement des débats sur la réforme des retraites, François Bayrou s’est révélé comme le chantre de la méthode pédagogique.
Cela dit, le problème des retraites se trouve-t-il réellement dans la méthode ? Non ! Les français ont largement compris les enjeux. Cette opposition relève non seulement du désenchantement grandissant entre le peuple et ses élites mais bien plus, du fait de l’émergence d’une nouvelle société post-covid avec son nouveau rapport au monde du travail. Remuer le foulard de l’écroulement des finances publiques dans ce contexte apparaît malheureusement comme un cri dans le désert. Et en tant que politicien expérimenté, François Bayrou le sait très bien. Alors que l’exécutif entend tourner la page de cette longue et périlleuse page des retraites, on se demande bien : quel est donc le message que le maire de Pau a-t-il bien voulu faire passer ?
À dire vrai, François Bayrou espérait à l’issue de cette période trouble un changement de tête à Matignon.
En effet, pour rappel, au lendemain des législatives, il militait déjà pour une personnalité plus « politique » à la tête du gouvernement. Une manière de prêcher pour sa propre chapelle ? Cette proposition a été toutefois déclinée par le chef de l’Etat ; Elisabeth Borne a été reconduite dans ses fonctions en juin 2022. Cité récemment parmi les potentiels successeurs d’Elisabeth Borne, le patron du Modem se dit « passionné » par l’idée mais la croit « impossible ». Impossible évidemment lorsqu’on est pas encore sollicité. Le message est clair : par cette nouvelle intervention médiatique qui intervient après la présentation de la feuille de route d’Elisabeth Borne à qui le chef de l’Etat a réaffirmé toute sa confiance, François Bayrou voulait à la fois marquer son désaccord sur ce choix présidentiel et se relancer dans la course à Matignon.
Alea Jacta est !
Carlyle Gbei
Journaliste politique