Emmanuel Macron découvre les vertus du deal. Un deal à la manière d’un défi, d’une gageure. Invité d’une télévision, il lance mardi dernier à l’intention de Donald Trump désormais obsessionnel sur la question : « le prix Nobel de la paix n’est possible que si vous arrêtez ce conflit ».
Ce conflit, c’est bien sûr la guerre à Gaza. De la tribune de l’Assemblée générale des Nations Unies, lorsqu’il reconnait solennellement l’État de Palestine, Emmanuel Macron a des mots forts : « la paix passe par la reconnaissance par chacun de la légitimité de l’autre ». De fait, cela relève de l’évidence. Il n’y a pas d’alternative sauf à admettre l’éradication de l’une des parties, ce qui n’est bien sûr pas concevable. Mais la tâche s’annonce herculéenne. Depuis le pogrom du 7 octobre, la population israélienne ressent très majoritairement l’idée d’un État palestinien comme une menace existentielle. Le Hamas, a beau se féliciter bruyamment de cette reconnaissance, il n’est pas davantage favorable à une solution à deux États. La revendication d’une Palestine « from the river to the sea » implique par définition la destruction de l’État d’Israël.
Emmanuel Macron sait bien qu’après le temps du symbole doit venir celui de l’action et là, c’est Donald Trump qui a les cartes en mains. Absent lors du discours de son homologue français, le président américain a repris toute la semaine au mot près l’argumentaire de Benjamin Netanyahu, assimilant la reconnaissance d’un État palestinien à « un cadeau fait au Hamas ».
Allié indéfectible d’Israël, le président américain a pourtant souvent oscillé sur ce dossier comme sur beaucoup d’autres, multipliant régulièrement les injonctions contradictoires envers Tel Aviv. En Iran, il a soutenu les frappes israéliennes avant de les arrêter. Sur Doha, il les a condamnées, appelant le Premier Ministre israélien à « faire attention », tout en reconnaissant comme « un objectif louable » l’élimination des dirigeants du Hamas.
Donald Trump fluctue parce qu’il sait qu’il ne peut prendre le risque de s’aliéner ses alliés arabes qui le somment d’obtenir de Benjamin Netanyahu la fin de la guerre. En cas d’annexion de la Cisjordanie, ces États arabes modérés, ceux qui entretiennent des relations diplomatiques avec Israël, seraient bousculés par leurs opinions publiques, poussés à la rupture et à de nouvelles confrontations. Ils sont à l’inverse prêts à participer au déploiement d’une mission de stabilisation à Gaza, en lieu et place de l’armée israélienne et au financement de la reconstruction du territoire.
Donald Trump avance avec des idées simples et parfois débridées, comme son projet de Riviera, mais il se sait sur un champ de mines. Lundi, les deux hommes se rencontreront. Benjamin Netanyahu tentera de gagner du temps. Celui-ci est en réalité compté. Emmanuel Macron n’a pas tort de le proclamer : le temps est venu !
Geneviève Goëtzinger
Présidente de l’agence imaGGe
Ancienne directrice générale de RFI
Membre de l’Académie des Sciences d’Outremer
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