Le gouffre entre les citoyens et leurs représentants semble plus que jamais infranchissable, à tel point que beaucoup aujourd’hui parlent d’une crise démocratique qui pourrait en 2017 placer le FN au pouvoir. Personne à droite comme à gauche ne parvient à trouver de solutions convaincantes. Et si elle était simplement ailleurs ? La Civic-Tech serait-elle la réponse à la crise profonde que nous traversons ?
Chaque arrivée technologique s’est toujours accompagnée de croyances dans son potentiel à transformer la société. C’est notamment le cas du numérique qui, sur bien des aspects a déjà bouleversé notre quotidien. Internet s’est rapidement imposé dans le champ politique, mais ce n’est que très récemment que la question du numérique et de la démocratie s’est particulièrement développée.
Les Civic-Tech : redonner le pouvoir au peuple grâce au numérique
Le numérique peut donc changer notre rapport à la démocratie et aux pratiques politiques. C’est en tout cas ce que pense un certain nombre de startups et d’associations appelées Civic-Tech. Chaque jour, elles sont plus nombreuses à proposer des solutions pour redonner du pouvoir aux citoyens en utilisant les nouvelles technologies.
Toutes n’ont bien sûr pas la même fonction et surtout le même objectif. Certaines jouent essentiellement un rôle d’information, voire de contrôle des politiques, d’autres se proposent carrément de présenter des candidats aux élections présidentielles.
Il sera parfois facile de considérer certaines Civic-Techs comme peu ancrées dans la réalité, peu pragmatiques, et toutes ces initiatives ne seront pas forcément une réussite… Mais la question n’est même pas là. C’est avant tout la richesse et la capacité d’innovation qui se développent autour de cette question de la démocratie et du numérique qui doit profondément nous interpeller sur le besoin de changer de réinventer nos pratiques et notre rapport à la citoyenneté. Qu’elles veulent davantage contrôler les députés, permettre plus de transparence, présenter des candidats à des élections, dépasser le clivage gauche-droite.. Toutes les Civic-Techs partagent un point commun : celui de croire en la capacité d’Internet de remettre le citoyen au cœur de la société et du débat démocratique.
Panorama de quelques Civic-Tech
Les Civic-Tech qui permettent plus de transparences :
- Voxe.org : permet de comparer les programmes des candidats à des élections partout dans le monde. La start-up lancée en 2012 s’est considérablement développée et permet aujourd’hui de mieux informer les citoyens sur les différences entre des candidats dans de nombreux pays.
- La fabrique de la loi : cette plateforme permet de suivre l’ensemble du processus législatif. Consulter la chronologie, et comparer les amendements…
Les Civic-Tech qui souhaitent présenter des candidats :
- LaPrimaire.org : il s’agit d’utiliser Internet pour organiser dans le cadre des élections de 2017 à la présidence de la République une primaire ouverte. L’objectif est de « permettre aux Français de choisir librement, de manière transparente et démocratique, les candidats qu’ils souhaitent voir se présenter à l’élection présidentielle de 2017 ».
- Ma Voix : leur objectif est « d’hacker l’Assemblée nationale en 2017 ». Pour cela, il propose de tirer au sort des candidats pour les législatives. Ces derniers devront suivre les consignes de vote que les citoyens leur donneront à travers un site Internet.
Les Civic-Tech qui souhaitent plus de contrôle par les citoyens :
- Parlement et citoyen : une civictech qui donne la possibilité de s’investir dans le processus législatif en proposant des idées, mais aussi en interagissant avec des députés. C’est en quelque sorte un lobby citoyen.
- GOV : c’est une application qui permet de noter les représentants politiques et de proposer des sondages. L’idée est de permettre aux citoyens, directement sur leur smartphone, d’exprimer leurs opinions politiques au quotidien.
Les Civic-Tech qui souhaitent plus de relations au niveau local :
- Fluicity : l’application permet aux citoyens de s’investir dans les débats locaux. L’objectif est de permettre aux collectivités de mieux comprendre les besoins des citoyens grâce au numérique. Les citoyens peuvent quant à eux être plus écoutés par les élus avec qui ils peuvent interagir.
- TellMyCity : Cette solution permet aux citoyens de faire remonter de manière simple et rapide une information vers sa ville. Cette information est ensuite automatiquement fléchée vers les services en question qui disposent d’outils permettant de suivre l’évolution de la demande.
D’autres Civic-Tech :
- Belem : cette start-up a développé pour Nous Citoyens une solution de vote « blockchain », c’est-à-dire sécurisée, transparente et efficace.
- Fullmobs : cette plateforme se propose de mobiliser les citoyens en ligne ou en physique sur des campagnes ciblées.
En mai dernier, Axelle Lemaire, secrétaire d’État chargée du Numérique, a reçu en les acteurs français de la Civic-Tech à l’Assemblée nationale lors d’un #mardidigital. L’objectif : initier les parlementaires à ces nouvelles pratiques. La modernisation des institutions est désormais à l’ordre du jour, notamment avec les engagements pris dans le cadre du partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO) que la France préside jusqu’en 2017. Anne Hidalgo a annoncé en juin la création d’un nouvel incubateur dédié aux start-ups «citoyennes», sur le modèle du Civic Hall de New York.
Les Civic-Tech représentent plus de 5 milliards d’euros sur le plan mondial, sur un marché global des dépenses institutionnelles dans les technologies de l’information de presque 23 milliards d’euros. En 2017, les candidats à l’élection présidentielle et aux législatives pourront-ils faire abstraction de ce mouvement ?
Alexandre Gavard