A l’été 2024, la France vibrait au rythme des Jeux Olympiques et Paralympiques, portée par un formidable élan de mobilisation en faveur d’une société plus inclusive. Un an plus tard, force est de constater que cette dynamique marque le pas, laissant place à une France toujours plus fracturée socialement et tripolarisée politiquement. L’enthousiasme des JOP semble s’être évanoui, et avec lui, l’opportunité de consolider les valeurs de cohésion, d’inclusion et d’intégration dont notre pays a tant besoin.
Une société en proie à la défiance et aux inégalités
Notre quotidien est désormais marqué par une défiance généralisée : envers l’État, nos élus, la République, et même les entreprises. Les déclarations incendiaires, à l’image encore de celles récentes de Mme BINET et de M. ROUSSEL dépeignant des « patrons pourris« , affaiblissent le dialogue social et n’ont fait qu’aggraver cette méfiance. Cette fracture se double d’une société de plus en plus inégalitaire, où ceux qui travaillent peinent à vivre décemment, confrontés à d’importantes dépenses contraintes, à un accès difficile à la culture et à la mobilité, tandis que d’autres bénéficient d’une kyrielle d’aides.
À cela s’ajoute une société endettée qui peine à répondre aux attentes qualitatives de ses citoyens en matière de sécurité, de santé et d’éducation. Rétrospectivement, les grandes causes nationales, telles que le mentorat, la « nation sportive » ou la santé mentale, ne sont souvent que des effets d’annonce. Faute de moyens et d’une véritable force d’entraînement, elles se limitent à des initiatives individuelles, du bénévolat isolé et des financements privés atomisés. Le cas du handicap est emblématique de cet immobilisme. Si les mentalités ont progressé, les barrières persistent dans la cité (transports, logement, écoles, etc.), au sein des entreprises, dans le sport et les collectivités publiques.
Les avancées concrètes sont trop lentes pour être véritablement tangibles.
L’urgence d’apaiser la société
Notre vie politique est en proie à une crispation et une hystérisation alarmantes, marquées par la radicalisation, le renforcement des extrêmes et même l’importation de conflits internationaux, comme le conflit israélo-palestinien.
Cette tension irrigue également notre vie quotidienne, avec la recrudescence du narcotrafic, l’insécurité dans les écoles, la montée de l’antisémitisme…
Sur le plan économique, au lieu d’engager résolument nos entreprises dans le partage de la valeur, la réforme des retraites sans cesse remise sur le métier, le niveau de vie en baisse et les difficultés croissantes des entreprises, avec un nombre de défaillances en hausse, nourrissent ce climat anxiogène. Dans ce contexte de fatalisme, de manque d’enthousiasme politique et de projets fédérateurs, tous les regards du vieux monde sont rivés sur la prochaine élection présidentielle, dans l’espoir d’un chef de l’État, deus ex machina, disposant d’une majorité parlementaire stable ou, à défaut, d’une opposition structurée et claire. Ô présidentielle, suspends notre crise… Cet espoir est évidemment vain.
C’est là que l’entreprise et les entrepreneurs ont un rôle crucial à jouer. L’entreprise est l’ultime refuge du collectif, le dernier rempart d’une société apaisée et un moteur de la relance du débat public. Elle doit s’ouvrir davantage à la société, encourager ses forces vives – entrepreneurs et salariés – à participer activement à la vie de la cité dans les territoires. Elle doit aussi affirmer publiquement ses valeurs, même si cela dérange. Il en va de l’émergence de nouvelles forces vives dans un débat public qui, autocentré, s’est dangereusement refermé sur lui-même.
L’esprit des JOP, cet élan inclusif et participatif, ne doit pas être oublié. Il est temps de raviver cette flamme et de construire une société plus unie, plus solidaire et plus responsable. Collectivement, nous pouvons redonner vie à cet élan inclusif et apaiser les fractures de notre société. Il y a urgence.
Bernard Cohen-Hadad