De l’émancipation à la mise en accusation, deux anciens Premiers ministres d’Emmanuel Macron ont franchi le pas. Edouard Philippe et Gabriel Attal libèrent leurs coups. Gabriel Attal reproche au président de la République « une forme d’acharnement à vouloir garder la main » tandis que le maire du Havre presse le président d’annoncer dès maintenant sa démission prochaine, une fois un budget enfin adopté.
La fin d’un mandat présidentiel est toujours difficile. A l’exception de Georges Pompidou terrassé par la maladie, sous la Cinquième République, les présidents ont toujours eu le choix d’essayer de réassurer leur lien avec les Français ou de préparer leur succession avec une certaine autorité.
De Gaulle a quitté le pouvoir de sa propre initiative, après l’échec de son référendum.
Valéry Giscard d’Estaing tout comme Nicolas Sarkozy n’ont pas non plus connu le long étiolement du pouvoir d’un président sortant interdit de se représenter. Ils ont pu choisir de retenter d’obtenir la confiance des Français. Leur mandat s’est achevé à cause de leur échec à la présidentielle.
Emmanuel Macron lui ne peut pas se représenter. Son autorité politique sur son camp en est fortement fragilisée. C’était aussi le cas de François Mitterrand et de Jacques Chirac. Ils n’étaient pas non plus en capacité de se représenter, ils étaient contraints par l’âge ou la maladie. Mais à la différence d’Emmanuel Macron, ils ont accepté cette situation. Leur parcours était suffisamment riche pour que leur voix soit entendue et respectée par leurs potentiels héritiers.
Le seul à ne pas avoir pu se représenter, contrairement à son ambition, c’est François Hollande. S’il a décidé de renoncer en décembre 2016, à quelques mois de l’échéance, c’est à cause de la contestation interne des frondeurs et d’un très proche, un certain Emmanuel Macron.
La situation d’Emmanuel Macron président aujourd’hui n’est pas sans rappeler celle de François Hollande subissant les coups d’un Brutus qu’il avait propulsé sur la scène politique en le nommant ministre de l’Économie, tout comme Macron président a propulsé Philippe et Attal sous les projecteurs de Matignon.
Ce précédent est peut-être la raison pour laquelle le président de la République se défie autant de l’ambition de ceux qu’il promeut à ses côtés. C’est bien quand il a commencé à faire figure de présidentiable qu’Edouard Philippe a été jugé encombrant à Matignon et qu’il a dû démissionner. Cette défiance présidentielle s’est accélérée en 2022, dès que le temps politique du quinquennat a basculé vers la présidentielle à venir. Les présidentiables se multiplient alors dans sa propre famille. C’est à ce moment-là qu’il fait des choix politiques incompréhensibles. Il démissionne Borne pour la remplacer par Attal dont il scie les jambes par la dissolution. Pourtant, l’histoire se répète. Les fils survivent. Gabriel Attal et Edouard Philippe se rehaussent en tapant sur Macron. Il « s’acharne à vouloir garder la main », accuse le premier. Il s’est « servi des institutions au lieu de les servir » insiste le second. Emmanuel Macron est poignardé par ses fils, ils ont tout appris de lui.
Marie-Eve Malouines
Editorialiste