Il y a des drames qui exigeraient un peu de réflexion à défaut de recueillement. Au lieu de quoi les vociférations qui ont accueilli la tragédie de Nanterre en disent long sur l’état de notre classe politique. Oublions un instant l’émotion naturelle et regardons le spectacle.
La rue s’est enflammée, des quartiers entiers sont livrés au pillage… mais l’extrême gauche a refusé d’appeler au calme. Disons les choses : cette gauche-là haineuse, radicale mais indulgente à l’égard des islamistes et des incendiaires, s’est définitivement disqualifiée. En n’ayant pas le cœur de défendre la République, elle en est devenue l’ennemie.
Que certains socialistes fassent route avec de tels irresponsables me semble intolérable. C’est hélas clair : ils ouvrent le chemin à une extrême droite répressive et anti démocratique. À croire que certains le souhaitent !
A droite une joie mauvaise s’est aussi emparée des esprits : harro sur le gouvernement ! Aucun de ses leaders ne s’est demandé s ‘ils n’étaient pas un peu responsables du désastre, s’ils avaient été à la hauteur du problème durant toutes les années où ils ont été aux commandes.
Quant au gouvernement il met en avant les sommes importantes qui ont été investies dans ces quartiers au cours des dernières années. C’est une réalité. Mais la solution du problème est largement ailleurs. Les jeunes de ces territoires il faut d’abord les respecter puis les intégrer dans un tissu social qui les motive. La politique du carnet de chèques ne suffit pas.
La réponse doit passer par une police de proximité et un réseau associatif à la hauteur du problème.
En supprimant les emplois aidés – pour de maigres économies – les pouvoirs publics ont abandonné ce terrain. Ils récoltent aujourd’hui ce qu’ils ont refusé de semer hier.
Personnellement j’aimerais surtout que la gauche de gouvernement se réveille. Qu’elle fasse taire les braillards et qu’elle propose concrètement les mesures à prendre pour ramener les jeunes dans la citoyenneté tout en restaurant l’autorité de l’État. La gauche de Jaurès ne confondait pas le peuple et la rue. Il faut relire son admirable « discours à la jeunesse » en 1903, plus que jamais actuel. Lui savait défendre à la fois la justice et l’autorité, la liberté et le droit, inséparables piliers de la République.
Bernard Attali