Dirigeants et écrivains, philosophes et historiens ont, à travers de vifs échanges, participé à la Cité des Débats à Saint-Raphaël du 29 septembre au 1er octobre. Pour cette 3ème édition, le thème retenu a été : « Savoir, pouvoir et démocratie ». Gianmarco Monsellato, président de Deloitte France et Afrique francophone, qui a participé à l’une des tables rondes, décrypte les grands enjeux abordés. Entretien.
Revue Politique et Parlementaire – Comment concilier savoir, pouvoir et démocratie ?
Gianmarco Monsellato – « Savoir pour prévoir, afin de pouvoir », écrivait Auguste Comte. Le savoir est à la base de toute démocratie saine : c’est la connaissance qui permet la prise de décision rationnelle et éclairée, au fondement de toute action politique ; et c’est la connaissance qui confère aux peuples la capacité de bien élire leurs représentants.
Pour autant, il faut se méfier des dangers du philosophe-roi : à l’âge de l’horizontalité, de la montée des individualismes et de la revendication de connaissances « plurielles », des exigences nouvelles se font jour, qui placent le pouvoir politique face à la nécessité de recréer du commun, plus proche du « nudge » que de l’autorité.
Nos démocraties modernes doivent refaire de l’éducation la pierre angulaire d’un projet collectif, et revitaliser le lien social et la confiance des citoyens envers le pouvoir politique.
Les CivicTech, Conventions Citoyennes ou autres exercices renouvelés de démocratie participative réinventent autant le rapport au pouvoir que les modèles de partage et de transmission du – ou des – savoirs.
RPP – L’appréhension du leader en politique est-elle la même que celle en entreprise ?
Gianmarco Monsellato – Le responsable politique comme le dirigeant d’entreprise est soumis à une dictature du court terme et doit gérer des parties prenantes multiples, aux intérêts divergents, pour inscrire son action dans la durée – création de valeur, progrès social, prospérité…
Mais si le dirigeant peut s’affranchir de la pression immédiate du consensus, tout en faisant la pédagogie de son action, le leader politique n’a d’autre choix que de faire adhérer la majorité à son projet. De même, il ne peut choisir de ne s’adresser qu’à une partie des citoyens, là où l’entreprise a des clientèles cibles.
Je constate que les entreprises performantes ont fait évoluer leurs modes de prise de décision, en avance sur le politique dont le fonctionnement tend à s’inspirer de modèles de gestion de l’entreprise obsolètes.
Liés par un destin commun, le dirigeant et le politique doivent malgré tout conserver leurs registres de discours et d’action propres.
Si l’entreprise endosse une responsabilité sociale de plus en plus forte, il y a une solennité propre à l’action publique et au service de l’intérêt général.
Gianmarco Monsellato
Président de Deloitte France et Afrique francophone
Propos recueillis par Mathilde Aubinaud