La décision du Président de la République le 9 juin dernier de dissoudre l’Assemblée nationale devait officiellement clarifier la situation politique française. Cette arme constitutionnelle aurait pu s’avérer salvatrice pour le Chef de l’Etat dans son objectif de reprendre la main, mais le scénario a quelque peu tourné…Le calcul de l’Elysée était pourtant clair : par l’usage de la disruption si chère à E.Macron, il y avait plus à y gagner qu’à y perdre..
Echiquier politique éclaté façon puzzle
Dans l’absolu, redonner la parole aux Français comme dans toute démocratie qui se respecte va bien dans le sens de cet objectif de clarification. Mais la double consultation législative n’a pas eu le résultat escompté. Le paysage politique est à la suite de ce scrutin, plus atomisé comme jamais dans la Vème République, il ne l’a été. Les forces politiques n’ont plus que de nom le mot « forces » tant elles apparaissent à bout de souffle, exténuées, éclatées façon puzzle par le verdict des urnes. Certes certains partis et mouvements se sont renforcés mais pas suffisamment pour assurer une majorité parlementaire et donc gouvernementale stable.
Un gouvernement démissionnaire qui dure
La trêve olympique, prétexte à des mouvements de lignes qu’espérait le Chef de l’Etat pour faire avancer l’idée d’une coalition semble bien loin et n’a en rien, fait avancer quoi que ce soit. Cela fait maintenant presque 2 mois que les élections ont eu lieu et malgré le cataclysme des résultats pour la majorité sortante, rien n’a bougé ni du côté du gouvernement, ni du côté de la présidence de l’Assemblée nationale… En dépit de cette façade immobile, le corps électoral français, lui, a changé. Le problème se pose donc en termes de représentation. Quand il existe un décalage trop important entre la base et ses représentants, l’Histoire ancestrale comme contemporaine nous l’a déjà montré à maintes reprises, l’équilibre et la stabilité ne sont plus aussi solides et le risque est grand d’un basculement vers une défiance et une perte de légitimité généralisée.
Isolé dans sa tour d’ivoire
Si l’éclatement des partis autres que Renaissance a eu du bon pour le Chef de l’Etat, si la droite républicaine s’est entredéchirée, comme à gauche entre LFI et le Parti socialiste, le Maître des horloges y a laissé de sa superbe dans cette décision. Certains tabous ont même sauté comme l’évocation d’une destitution du Président par le Parlement prévue dans l’article 68 de la Constitution et donc potentiellement possible…Les alliés traditionnels comme le Centre, les sociaux-démocrates ou encore la droite républicaine en dépit de leur impatience, montrent des signes de méfiance voire de défiance envers le locataire de l’Elysée. L’impression est que le Président devient soudainement conscient de l’impasse qu’il a lui-même autoritairement faire prendre à l’ensemble des acteurs politiques et qu’il ne sait pas ou plus vraiment quelle direction suivre, ni à quel saint se vouer.
L’arroseur arrosé ?
Le constat factuel est rude. l’impatience et le doute gagnent du terrain, la parenthèse olympique terminée et le retour de vacances des Français en ce début de septembre vont contribuer très certainement à ce que le Président de la République reconsidère à postériori sa décision de la dissolution et s’en morde les doigts…à moins que, sorti de son chapeau, le nom d’un Premier ministre ne fasse l’unanimité…Comme le mentionnait fréquemment , dans ses écrits, Saint Thomas d’Aquin, Nullus tenetur ad impossibile traduit par à l’impossible, nul n’est tenu.
Frédéric Dosquet,
Docteur en sciences de gestion, Hdr (direction de thèses doctorales),
Professeur Eklore School of Management,
Auteur de 19 livres dont Marketing et Communication politique, EMS, 3eme édition.
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