A moins de deux mois des élections européennes, Emmanuel Macron publie ce mardi une tribune dans des journaux de tous les pays de l’Union européenne. Réaction de Patrick Martin-Genier, spécialiste des questions européennes et internationales, enseignant en droit public à Sciences-Po, administrateur de l’Association Jean Monnet.
En publiant une tribune dans toute la presse européenne, Emmanuel Macron reprend son bâton de pèlerin sur l’Europe.
L’Europe, c’est la marque de fabrique ou « l’ADN » du président de la République. Elu en 2017 dans un contexte de montée importante des partis populistes et nationalistes en Europe, il avait, lors de son élection, suscité un espoir considérable. Quelques mois après, il prononçait deux discours structurants sur l’Europe dont celui de la Sorbonne le 26 septembre 2017, dans lequel il annonçait un certain nombre de priorités et formulait des propositions précises.
Hélas, depuis l’année dernière, les nuages se sont amoncelés sur la scène européenne. On peut citer entre autre l’arrivée d’un gouvernement populiste en Italie, la montée de la violence en politique, de la xénophobie et de l’antisémitisme, un contexte douloureux qui rend difficile le débat politique serein, préalable indispensable pour la poursuite de la construction européenne. Par ailleurs, alors que le brexit n’est pas encore soldé, le couple franco-allemand bat de l’aile.
Emmanuel Macron et Angela Merkel ont été très affaiblis sur la scène intérieure au cours de ces derniers mois, rendant encore plus difficile une vision commune et ambitieuse de l’Europe.
Alors que la crise des « gilets jaunes » n’est pas encore finie et que le grand débat national n’est pas encore clos, il était urgent pour le président français de repartir à l’offensive. C’est chose faite avec cette tribune publiée dans toute la presse européenne.
On y sent l’idée européenne chevillée au cœur et son ambition pour l’Europe est intacte. Il lance de nouveau un certain nombre de propositions qui sont au nombre d’une dizaine, qui passe par la création de structures ou autres organismes telle l’agence de protections des démocraties, la banque européenne pour le climat ou encore un conseil européen pour l’innovation.
En s’adressant aux peuples européens, Emmanuel Macron n’ignore pas que ses propositions ne recevront pas nécessairement l’accord de ses pairs du Conseil européen.
Les évènements de ces derniers mois ont montré la forte réticence de certains Etats vis-à-vis des positions de la France et les désaccords sont importants qu’il s’agisse de la future politique agricole commune ou du budget de la zone euro dont certains ne veulent pas entendre.
Mais quarante ans après la première élection du Parlement européen au suffrage universel direct, le fait que le chef d’Etat d’un pays majeur de l’Union européenne s’adresse aux peuples européens pour susciter un débat, apparaît très pertinent.
Patrick Martin-Genier
Essayiste spécialiste des questions européennes et internationales
Enseignant en droit public à Sciences-Po
Administrateur de l’Association Jean Monnet