Les Français sont appelés à voter pour renouveler leurs exécutifs départementaux et régionaux ce dimanche. Dans cette drôle de campagne, où le sanitaire et le régalien se sont invités, loin des compétences locales, c’est bien l’horizon proche de 2022 qui était dans toutes les têtes.

Il sera peut-être difficile de tirer des conclusions trop hâtives d’un scrutin dont la bulle médiatique aura tout fait pour essayer de densifier l’intérêt. Il n’en demeure pas moins qu’il conviendra d’observer de près les mouvements de la tectonique électorale, à commencer par le niveau de participation dont les sondages nous annoncent, à ce stade, un nouveau record d’abstentions pour ce type de consultations. Sans doute la mobilisation sera t-elle néanmoins supérieure à celle des municipales, mais cependant plus faible qu’à l’occasion à périmètre territoriale similaire que celle de 2015.
Le parti du désengagement sera encore une fois le premier parti de France, ce qui n’est bon ni pour les futurs élus, encore moins pour la vitalité démocratique. Ce droit de retrait citoyen est un signe d’alerte dont on aurait tort de mésestimer la signification. Il s’inscrit dans la durée et atteste d’une désaffection constante qui témoigne d’un processus sourd de délégitimation du politique.
L’autre enseignement sondagier permet de distinguer les forces en dynamique de celles qui peinent à susciter de l’attractivité. À ce jeu, une seule offre est en mesure de trouver un motif de satisfaction dans les études qui ont égrené ces dernières semaines : le Rassemblement national en mesure de sortir en tête du premier tour et en capacité de l’emporter dans une, voire deux régions. Toutes les autres offres, à l’exception relative des Verts, demeurent sur la défensive, certaines s’escrimant à conserver leurs bastions (c’est le cas de LR et du PS ), d’autres à limiter la casse à l’instar de la République en marche qui pourtant a contribué à fortement nationaliser le scrutin en déléguant nombre de ses ministres sur le terrain. Une troisième caractéristique semble également se dégager, la notabilisation territoriale, phénomène à vrai dire ancien, n’a peut-être jamais été aussi prégnante, laissant de côté les marques nationales pour décupler le rayonnement personnel d’élus territoriaux qui ne doivent qu’à leur implantation les principaux actifs de leur capital politique. Les intentions de vote pour nombre de présidents sortants paraissent en témoigner.
Pour autant les indications des sondages ne font pas une élection. L’alchimie électorale reste un processus complexe qui peut à la marge redresser bien des pronostics . De la forge électorale à venir on retiendra essentiellement les signaux faibles ou forts de ce qu’ils dessinent dans l’entrelacs des résultats comme perspectives pour 2022 . Selon la loi des vainqueurs et des défaits, on en tirera à n’en pas douter des lectures différentes, mais il en restera quoiqu’il arrive un dépôt qui orientera pour une part les batailles futures.
Arnaud Benedetti
Rédacteur en chef de la Revue Politique et parlementaire
Professeur associé à l’Université Paris Sorbonne