Le phénomène de « délocalisations internationales d’activité » – sous l’idée intuitive de « transfert », de « déplacement » spatial d’activité à l’étranger afin de bénéficier dans un monde ouvert et hétérogène d’avantages comparatifs par rapport à la localisation initiale, en termes de coût de production tout particulièrement – ne cesse d’accaparer tout le devant de la scène française dans le cadre de la mondialisation contemporaine.
Cela est vrai dans l’Hexagone depuis les années 1970 et surtout depuis les années 1990 avec le capitalisme financier mondialisé qui s’installe alors à plein à la recherche de toujours plus de rentabilité. Quelques exemples de délocalisations qui ont marqué cette période : on pense au cas Hoover, filiale du groupe américain Maytag Corporation qui décide en 1993 de « transférer » les activités de son établissement français de Côte-d’Or (Longvic près de Dijon dans son usine écossaise de Cambuslang ; et peut-être plus encore – cet exemple va frapper notre opinion publique – au « déplacement » par Majorette de sa production de petites voitures en Thaïlande. En liaison avec ces cas, les rapports – on s’en souvient – vont se multiplier (J. Arthuis 1993,…) pour dénoncer « l’horreur » des délocalisations, qui deviennent synonymes de restructurations, de licenciements, de pertes d’emplois,… Et simultanément vont fleurir les propositions de « solutions » face à ces méfaits des délocalisations qu’on n’entend pas accepter sans broncher.
C’est à l’examen des « solutions » que l’on a pressé les pouvoirs publics de mettre en œuvre qu’on voudrait consacrer cette réflexion. Pour montrer malheureusement que dans notre économie mondialisée contemporaine il y a impossibilité des politiques visant à supprimer les délocalisations internationales d’activité ; mais aussi prouver qu’il y a difficulté des politiques s’attachant à lutter contre ces délocalisations.
L’impossibilité dans notre économie mondialisée contemporaine des politiques visant à supprimer les délocalisations internationales d’activité
Deux types de « solutions » semblent se proposer pour éliminer les délocalisations internationales d’activité : la solution « nationale », ou – à l’autre extrémité en quelque sorte –, la solution « mondiale ».
On a peu de peine à montrer l’impossibilité de supprimer les délocalisations internationales d’activité dans ces deux directions.
L’impossibilité dans notre économie mondialisée contemporaine des politiques pour tenter de supprimer les délocalisations avec une solution « nationale ».
L’espace international de notre économie mondialisée contemporaine n’est pas un espace « plat », « homogène »…, mais il est encore et aussi un espace différencié de Nations avec des écarts et des disparités – disparités de coût de production en particulier – qui offre des opportunités de délocalisations internationales à nos firmes.
Pour éliminer ces opportunités de délocalisations qui s’ouvrent à nos entreprises, il faut – on le perçoit sans difficulté – « cadenasser » en quelque sorte l’espace national.
« Notre » espace national – par rapport au reste de l’espace international de telle sorte que devienne possible demain – avec et par ce repli national – la suppression à terme des délocalisations internationales d’activité.
- La présentation la plus complète de cette perspective de suppression à terme des délocalisations avec cette solution « nationale » est sans aucun doute fournie chez nous par le projet des « démondialistes » (A. Montebourg)1. On a bien en effet avec ce projet des « démondialistes » la volonté d’éliminer les délocalisations en se « défaisant » de l’engrenage de la mondialisation libérale qui enfante ces délocalisations, et ceci tout à la fois par la « sortie de l’international et la construction du national ».
La « sortie de l’international » ? Il s’agit – pour les « démondialistes » – de se déconnecter au mieux de la mondialisation libérale en ralentissant sinon en stoppant tout à la fois les flux internationaux « réels » et les flux externes « financiers », par utilisation de la taxation, du contrôle, de la protection – le protectionnisme est central dans cette perspective –, utilisés comme outils pertinents pour sortir de la tyrannie du libre échange international.
La « construction du national » ? Dans le même temps où l’on se protège, il faut « fortifier » au mieux l’intérieur. Les « démondialistes » souhaitent remplacer en effet la logique externe du marché mondial, de la spécialisation et de la division internationale du travail par une logique de production interne : il faut bien pour cela s’attacher à « reterritorialiser » les productions, « relocaliser » les systèmes productifs.
- Au vrai, on a peu de peine à montrer le caractère pour beaucoup irréel de la tentative de supprimer à terme les délocalisations avec cette perspective « nationale »… tant est irréelle la « déconstruction » envisagée par les « démondialistes » au travers de la réduction sinon l’arrêt du flux externe ainsi qu’au travers le renforcement de l’auto centrage économique interne.
Insistons en particulier sur le caractère irréel de la sortie de l’international avec l’utilisation de la protection douanière face aux caractéristiques des systèmes productifs et du commerce international actuel. On a vu se développer en effet – on a parlé de délocalisation directe partielle – une « décomposition » des processus de production dans le cadre de la division internationale verticale du travail. Nos grands groupes industriels internationaux – en France et en Occident – ont été amenés à spécialiser leurs sites de productions sur l’ensemble de la planète et à multiplier les échanges internationaux entre eux – d’où l’essor du commerce international « intra-groupe », avec donc un segment de la fabrication du produit qui est délocalisé et non la totalité d’un cycle de production d’une marchandise. Ajoutons que la stratégie de recentrage des firmes sur leur métier de base à des fins de plus grande efficacité va amener les entreprises à « externaliser » de plus en plus depuis les années 1990 (celles on l’a dit du « capitalisme financier triomphant ») tout ou partie de leur activité, qu’il s’agisse de s’approvisionner à partir d’un fournisseur étranger ou (et) de s’approvisionner à partir d’un sous-traitant étranger (et on sera ici avec de la délocalisation indirecte des activités de productions dont on comprend vite l’intérêt par rapport au cas précédent puisqu’il n’y a pas nécessité d’un investissement direct à l’étranger de la part de la firme).
Bref, face à ces chaînes de production qui se sont de plus en plus délocalisées de façons directe et indirecte, on voit mal la possibilité pour un pays – fut-il le nôtre – de mettre en place une politique nationale de protection… (sans réaction des autres nations)… pour éliminer à termes les délocalisations.
Il y a bien, oui, impossibilité à supprimer demain les délocalisations avec cette « solution nationale ».
L’impossibilité dans notre économie mondialisée contemporaine des politiques pour tenter de supprimer les délocalisations avec une solution « mondiale »
Les auteurs, ici, sont toujours très conscients que l’économie mondialisée actuelle n’est pas encore une véritable économie mondialisée, unique, homogène. Et que c’est précisément cette fragmentation de la planète qui demeure – avec des écarts persistants – qui apporte à nos entreprises des opportunités de délocalisation dans ce monde ouvert.
D’où pour eux la nécessité pour éliminer les délocalisations porteuses de tant de maux : désindustrialisation, chômage… de mettre en place un Etat (Gouvernement) mondial unique assurant l’unification, l’homogénéisation de la planète.
- Deux voies sont proposées – elles ne sont pas exclusives l’une de l’autre – pour la mise en place demain d’un Etat (Gouvernement) mondial.
– Il est pour certains indispensable – pour se doter au final d’un Etat mondial – de favoriser le prolongement, l’amplification et la transformation à terme de « blocs » régionaux existant homogènes en en seul « bloc » à l’échelle planétaire. On sait en effet que l’on a eu la construction, elle n’est pas terminée, de grands ensembles qui ont déjà représenté une première unification et homogénéisation de leur espace. Ainsi en va-t-il pour la construction européenne. Mais se sont multipliés aussi depuis la fin des années 1980 les ensembles régionaux en Amérique, dans le Pacifique,… qui contribuent chacun à leur niveau, pour et sur eux-mêmes, à accroître l’homogénéisation du monde.
Par « intégration » de tous ces blocs régionaux homogènes, par « union » de ces sous-ensembles à l’échelle de la Terre, on va ainsi tout « naturellement » parvenir à créer une sorte de grand ensemble économique planétaire, un gouvernement mondial unique fédéraliste.
– Une autre perspective va consister – seule ou en complément de la perspective précédente – à préparer l’éclosion d’un gouvernement mondial par développement et extension de l’architecture internationale actuelle.
On a – après la Seconde Guerre mondiale – des nations souveraines et indépendantes sur la scène internationale. Mais ces nations ont déjà reconnu leur interdépendance et cherché à organiser leur coopération. L’ONU et ses conférences, mais aussi le FMI, l’OMC… sont l’expression d’une volonté de « constructivisme » mondial que l’on ne va avoir de cesse d’améliorer pour exprimer toujours mieux « l’intérêt général de la planète ». La gouvernance mondiale et le nouvel ordre mondial vont encore se renforcer avec la création de nouvelles instances de régulation. Pourra ainsi « naître » à terme – les NTIC y aideront – un véritable Etat mondial, une véritable communauté politique mondiale dans l’esprit souhaité par exemple par Eva Thelisson : « Vers un Etat mondial via Internet »2.
- On n’a que peu de mal à déceler le caractère irréaliste pour beaucoup de cette solution « mondiale » visant à supprimer les délocalisations en unifiant l’espace mondial actuel hétérogène avec à terme un Etat (gouvernement) mondial unique. Il n’y a pas en effet possibilité et réalité d’une progression inévitable, inéluctable vers un gouvernement (Etat) mondial, progression qui balaierait demain à terme les Etats-Nations.
On ne peut pas passer sans douleur, sans qu’on s’en « aperçoive » à un gouvernement (Etat) mondial auquel on arriverait ainsi dans un « fauteuil » après avoir congédié les Nations. Il restera toujours en effet la nécessité d’un « saut » final ; il y aura toujours des Nations – cette « donnée invincible et mystérieuse » dont aimait à parler Malraux – qui seront là à veiller à ne pas franchir ce pas et à ne pas faire ce « saut », trop heureuses en outre de pouvoir mettre en avant la potentielle « tyrannie » globale d’un « mammouth » étatique mondial entendant gouverner l’ensemble des peuples de la planète.
Observons que ce projet d’un Etat (gouvernement) mondial unique bienveillant sur une planète homogène dont serait banni tout problème de concurrence, de divergence d’intérêts, se retrouve au final dans tous les grands courants de pensée, chez les fondateurs socialistes marxistes et non-marxistes d’hier et d’aujourd’hui3, et même – cela peut surprendre – chez Frédéric List, le théoricien du « système national d’économie politique »4 qui croit possible à terme « l’association finale des peuples » dans une « confédération universelle de l’avenir ».
Mais on ne peut pas ne pas percevoir le caractère idyllique de tous ces projets avec au final un Etat (gouvernement) mondial sur une planète unique, homogène, totalement et définitivement réconciliée. Il s’agit bien en effet le plus souvent, au vrai, de rêves ou d’utopies comme c’est le cas chez Ch. Fourier, P.J. Proudhon,…
Les difficultés dans notre économie mondialisée contemporaine des politiques visant à lutter contre les délocalisations internationales d’activité
On prend acte ici de l’impossibilité d’éliminer, de supprimer les délocalisations internationales d’activité (cf. le point précédent). Mais on n’entend pas pour autant accepter sans broncher les délocalisations avec leurs aspects négatifs : disparition d’emploi sur le territoire national,… Pour ce faire, les pouvoirs publics vont s’attacher de longtemps maintenant, en France plus spécialement, à des politiques de lutte contre les délocalisations visant à freiner sinon à arrêter ces transferts pénalisant d’activité à l’étranger.
On peut montrer pourtant les difficultés de ces politiques publiques tant – on mesure la facilité et la fragilité de cette distinction – « directes » qu’ « indirectes ».
Les difficultés dans notre économie mondialisée contemporaine des politiques « directes » de lutte contre les délocalisations internationales d’activité
- On devine bien l’esprit des politiques directes de lutte contre les délocalisations internationales d’activité : il va s’agir pour les pouvoirs publics de tenter de « dissuader » au mieux directement – politiques « anti-délocalisations » – les chefs de firmes de se lancer dans des transferts d’activité à l’étranger alors qu’ils y auraient avantage en termes de coût de production… en leur apportant une aide de nature à compenser le « surcoût » qu’ils ont à garder leur activité sur le territoire national.
– On aurait bien sûr à rappeler ici par le détail, dans l’esprit indiqué à l’instant ci-dessus, le contenu de ces politiques directes de lutte contre les délocalisations : on parle aussi volontiers de politiques « défensives » contre les délocalisations.
La mobilisation des pouvoirs publics contre les décisions potentielles de délocalisation des chefs de firme qu’on entend prévenir au mieux, s’est d’abord faite dans le domaine industriel. On pense notamment et surtout pour illustrer cet effort public, à la politique fiscale ciblée mise en place dans le cadre de la loi de finances de 2005 : pour retenir les entreprises en France, inciter celles qui sont tentées par les délocalisations à rester sur le territoire national, il a été institué un crédit de taxe professionnelle de 1 000 € par an et par emploi préservé pour une durée de trois ans. Pour rester compatible avec les règles de la concurrence européenne, le dispositif a été plafonné à 100 000 € par entreprise sur l’ensemble des trois années. Il conviendrait de mentionner ici également l’effort des pouvoirs publics pour préciser les « zones exposées à délocalisation » et l’aide à la ré-industrialisation… qui s’inscrit dans une logique de prévention des délocalisations, mise en place pour y parvenir.
Mais on a eu aussi des mesures pour amoindrir sinon empêcher les risques de délocalisation dans les services : face à la délocalisation massive des « centres d’appel » allant s’installer pour l’essentiel dans les régions et pays francophones (Maghreb,…) à la recherche de salaires plus bas qu’en France, les pouvoirs publics ont proposé en décembre 2004 un « Plan d’action », bataille relancée en 2010-2012,…
- Ces aides, ces mesures ont-elles été efficaces ? Les entreprises ont-elles été dissuadées de délocaliser ? Force est de reconnaître que les différents dispositifs qui ont été mis en place par les pouvoirs publics n’ont pas vraiment « accroché » et, en règle générale, n’ont pas pu faire obstacle à la « tentation » délocalisatrice de firmes que l’on voulait enraciner davantage sur leur territoire. Les raisons ? Les finances publiques n’étant pas extensibles autant qu’il apparaîtrait souhaitable, les aides et mesures mises en place ont été trop modestes et n’ont pas été de nature à changer grand-chose sinon à la marge aux décisions d’entrepreneurs de délocaliser ou non, compte tenu en particulier des écarts de coûts de production existant entre le territoire national et tel ou tel pays étranger pouvant accueillir avec « bonheur » l’industrie ou la composante industrielle de la firme en cause, ou tel ou tel centre d’appel.
Les difficultés dans notre économie mondialisée contemporaine des politiques « indirectes » de lutte contre les délocalisations internationales d’activité
- Les pouvoirs publics ne cherchent plus ici directement – c’est le cas précédent – à dissuader le chef de firme de tel ou tel secteur, de telle ou telle zone qui envisage une délocalisation en lui apportant aide et mesures – politique « défensive anti-délocalisation » on l’a dit – de nature à le rendre plus compétitif sur place et à le persuader donc qu’il peut continuer son activité de façon valable – comprenons rentable – sur le territoire national.
Les pouvoirs publics vont au vrai, dans la perspective ici en vue, tenter de persuader l’ensemble des chefs d’entreprise de l’industrie et des services qu’ils n’ont plus besoin d’avoir recours de façon obligée à des transferts d’activité, à des délocalisations parce qu’ils ont en effet mis en place pour l’économie nationale une politique générale très active, très volontaire d’amélioration de la compétitivité « prix » et de la compétitivité « hors prix » (avec l’innovation) telle qu’il n’est plus ainsi pressant pour nos firmes de déplacer à l’étranger tout ou partie de leur activité de production ou d’approvisionnement pour y trouver des avantages significatifs.
La politique « indirecte, offensive, antidote aux délocalisations » est bien la politique industrielle très active mise en place par les pouvoirs publics français après la crise de 2007-2008, depuis le début des années 2010 (Etats généraux de l’industrie en mars 2010), la politique de réindustrialisation compétitive sur le modèle allemand.
Le modèle allemand ? On le qualifie de « modèle industriel d’offre compétitive orientée vers les exportations ». On devrait bien sûr ici rappeler plus en détail ce modèle allemand initié par le Chancelier Gerhard Schroder en 2003-2005 qui fait pour nos voisins d’Outre Rhin le choix de la compétitivité à partir du territoire national, le choix d’un modèle d’industrie compétitive lancé à la conquête du monde extérieur par les exportations de produits haut de gamme et de qualité. Et on devrait montrer – le modèle allemand s’imposant à vous comme modèle de référence –, les efforts similaires, plus tardifs, trop tardifs, plus limités, trop limités sans doute entrepris par la France pour restaurer la compétitivité industrielle du « site » France (avec notamment le CICE, le Pacte de responsabilité,…).
- Reste pourtant à bien marquer – on a maintenant ici à insister sur le volet « difficulté » de cette politique – que cette voie indirecte n’est pas la voie royale espérée de lutte contre les déplacements, les transferts internationaux d’activité qui sont le cœur et au cœur des délocalisations dans notre économie mondialisée contemporaine. Il faut bien voir en effet que l’Allemagne, citée en modèle, est devenue – redevenue compétitive dans les années 2000 en maîtrisant les coûts de production de son secteur manufacturier de deux façons :
– en ayant recours chez elle à une réelle modération salariale (il faudrait sans doute ajouter à cette politique de rigueur salariale une politique budgétaire restrictive) ;
– en ayant simultanément recours à la sous-traitance industrielle de proximité dans les pays de l’Est, avec, dans ces pays des coûts salariaux moindres.
Il est sûr que notre voisin a fait appel à la délocalisation, à la sous-traitance, à « l’outsourcing » des produits et des composantes de produits dont la fabrication n’était pas compétitive sur son sol. L’Allemagne s’est tournée massivement pour ce faire vers les pays de l’Est de l’Europe, délocalisant une grande partie au vrai de son industrie en Europe centrale (République Tchèque, Slovaquie, Hongrie,…) et se contentant d’assembler sur son territoire. Ils ont bien conservé l’assemblage et la maîtrise technologique chez eux de ce qui est fabriqué chez leurs voisins, avec une économie très significative se faisant par les coûts de fabrication. L’Allemagne redevenue au centre du continent de la nouvelle géographie de l’Europe, a reconstitué son « hinterland » naturel, la « Mitteleuropa » d’autrefois (Europe du milieu, Europe centrale) avec un réseau d’entreprises sous-traitantes pour l’industrie allemande lui permettant de bénéficier d’une sous-traitance de proximité avec des coûts avantageux tout en gardant pour elle les fonctions d’assemblage, de recherche et de développement, de commercialisation sous le label prestigieux qui n’est plus au vrai « Made in Germany », mais plus exactement « Made by Germany »5.
Il est clair que l’augmentation de la compétitivité de nos entreprises, grâce à des coûts de production allégés, passe aussi dans l’hexagone – à l’heure où la fabrication de nos produits est de plus en plus « Made in monde »6 – par des délocalisations indirectes, des délocalisations « externalisées » par appel à des fournisseurs ou (et) des sous-traitants étrangers ; et les pays du Maghreb (Maroc,…) sont un peu pour la France l’équivalent de ce que sont les pays d’Europe centrale et occidentale (les PECO) pour l’Allemagne.
Au total – on espère en avoir convaincu – les délocalisations « internationales » d’activité, consubstantielles à « l’internationalisation » de nos économies en étant tout à la fois un symptôme et un facteur, sont bien un phénomène pérenne, inéliminable et dans tous les cas difficilement maîtrisable dès lors que l’on est dans un monde hétérogène et ouvert, marqué par une très forte concurrence extérieure.
Pierre Pascallon
Professeur agrégé de faculté (honoraire)
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- Cf. P. Pascallon, Les démondialistes pourraient-ils demain nous sauver ?, L’Harmattan, 2012. ↩
- Cf. E. Thelisson, Vers un Etat mondial via Internet, PRU Découverte 2012. ↩
- On verra en ce sens J. Attali, Demain qui gouvernera le monde ?, Pluriel, 2010. ↩
- Cf. F. List, Système national d’économie politique – 1841 traduction française, Gallimard, 1998. ↩
- Désormais en effet, chaque produit “Made in Germany” contient en moyenne 60 % de valeur ajoutée produite par un sous-traitant à bas coût de l’Europe centrale. ↩
- Cf S. Berger, Made in monde. Les nouvelles frontières de l’économie mondiale, Seuil, 2006. ↩