Le 11 juillet 2022 a véritablement marqué le début de la 16e législature (2022-2027). C’est en effet lors de cette séance que l’Assemblée a pour la première fois été amenée à s’exprimer sur un texte.
Les parlementaires peuvent voter de différentes façons : soit à main levée, ce qui est le mode normal de votation, soit en cas de doute sur la comptabilisation effectuée par le président de séance, par assis et levé, soit par scrutin public1. Celui-ci permet de publier le nom des votants et le sens du vote qu’ils ont émis. Il peut être de droit, comme lorsque le vote porte sur la responsabilité du Gouvernement ou que la Constitution exige une majorité particulière2, ou être demandé par le Gouvernement, la commission saisie au fond, par un président du groupe ou son représentant, par le président de séance ou par la conférence des Présidents3. Du 11 au 13 juillet se sont ainsi succédés 16 scrutins publics. Le premier a porté sur la motion de censure déposée par la NUPES, les suivants étaient relatifs au projet de loi maintenant provisoirement un dispositif de veille et de sécurité sanitaire en matière de lutte contre la covid-19 et le dernier, du 13 juillet 2022, portait sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2021. Si le vote sur la motion de censure devait donc obligatoirement faire l’objet d’un scrutin public, les autres sont le résultat d’une demande expresse. Ce qui n’est pas anodin et justifie notre intérêt pour ces quelques scrutins.
Les enseignements du scrutin public relatif à la motion de censure
Conformément à la Constitution, seuls les votes favorables à la motion sont recensés. L’analyse du scrutin présente sur le site de l’Assemblée nationale ne fournit donc pas, contrairement aux autres analyses, de comptabilisation des abstentions ou des votes contre, qui ne sont pas possibles, seulement par groupe le nom des députés qui ont voté la motion de censure.
L’analyse nous permet ainsi de constater que les groupes de la majorité n’ont pas soutenu la motion de censure : aucun député des groupes qui se sont engagés à soutenir le Gouvernement n’ont cherché à le censurer. Rien d’inhabituel ici, comme la phrase précédente le laisse entrevoir : appartenir à la majorité suppose de ne pas soutenir les motions de censure, ce serait un motif d’exclusion du groupe. Une procédure d’exclusion avait ainsi été lancée sous la 14e législature lorsque 26 députés socialistes avaient signé une motion de censure répondant à l’utilisation de l’article 49 al. 3 par le Gouvernement Valls4.
De même, les députés de la majorité ne sont pas censés s’opposer aux textes financiers du Gouvernement. Ainsi, le 13 juillet, aucun député de la majorité n’a voté contre le projet de loi de règlement, bien au contraire, tous les présents ont soutenu ce texte.
Un vote de rejet pourrait en effet être sanctionné par le groupe. Ainsi, en 2018, S. Nadot a-t-il été exclu du groupe LREM suite à son refus de voter le budget5. Il s’agit là des marqueurs qui indiquent que le député, ou le groupe si la consigne est majoritairement respectée, appartient à la majorité. Par voie de conséquence, le député de l’opposition doit, lui, refuser la confiance au Gouvernement et refuser de soutenir ses lois de finances.
2e enseignement : les groupes d’opposition n’appartenant pas à la NUPES n’ont pas souhaité joindre leurs voix aux députés de gauche. Il ne s’agit pas là d’une surprise dans la mesure où dès le dépôt de la motion le 5 juillet, ils avaient annoncé qu’ils ne voteraient pas la censure. On constate ici que la discipline de vote a unanimement été respectée : aucun élu du RN n’a brisé l’unité, pas plus que les élus républicains ou ceux du groupe Libertés Territoires Outre-Mer et Indépendants. Il est vrai que la forme du scrutin où seuls les députés favorables à la motion sont appelés à voter, facilite l’obtention de l’unité. Aussi, il faudra confirmer ce respect unanime de la discipline de vote par les groupes de droite et du centre lors des prochains scrutins publics6.
Enfin, 3e enseignement : seuls 145 des 151 députés appartenant à l’intergroupe de la NUPES (LFI, Socialistes, GDR et Ecolo) ont voté la censure. La discipline de vote a été unanimement respectée dans le groupe LFI, qui avait pris l’initiative de la motion de censure et qui se signale habituellement par un respect unanime des consignes, chez les Ecolo et au sein du groupe GDR. Cela n’a pas été le cas au sein du groupe socialiste : 6 députés de ce groupe ayant choisi de ne pas voter la censure. Les élus socialistes sont pourtant soumis à une stricte discipline de vote, d’autant plus forte que les indisciplinés sont des membres à part entière du groupe et non des membres rattachés qui pourraient bénéficier d’une plus grande liberté. Cette rupture relativement importante de la discipline de vote, le groupe ne comptant- rattachés compris- que 31 membres c’est 1/5 de son effectif qui a choisi de briser l’unité, atteste la faiblesse du groupe socialiste qui ne parvient pas à faire respecter une consigne d’opposition au Gouvernement alors que le groupe est statutairement un groupe d’opposition. Faiblesse qui permet de douter que les indisciplinés subiront la sanction qui s’agissant d’un tel vote de censure serait l’exclusion7. Le groupe ne peut se permettre de se priver de députés expérimentés8 et la perte de quelques députés lui ferait perdre son rang de 6e groupe de l’Assemblée au profit du groupe Horizons qui actuellement compte un député de moins seulement que le groupe socialiste.
Le scrutin annonce également la difficulté pour l’intergroupe d’afficher en toute occasion son unité.
Les députés hostiles à l’accord électoral, à l’image des 6 députés socialistes défaillants lors de ce scrutin, ne tarderont pas à manifester leur désaccord avec une consigne d’unité qui transformerait leur groupe en supplétif de LFI. Il convient toutefois, pour l’heure, de ne pas exagérer l’indiscipline qui ne concerne que 6 des 151 députés de la NUPES, soit moins de 4% de son effectif total. LFI a ainsi réussi à s’affirmer comme le groupe moteur de l’opposition de gauche : principal groupe de ce courant politique, à l’initiative des textes9 et bénéficie de l’unité des députés de gauche.
Si l’objet des votes suivants était moins important, puisque l’existence du Gouvernement n’était pas en jeu, leurs enseignements se révèlent tout aussi instructifs. Il convient de distinguer le scrutin public portant sur la motion de procédure des scrutins publics pourtant sur le fond.
Les enseignements du scrutin public relatif à la motion de rejet préalable
Cette motion de procédure vise à faire constater que le texte n’est pas en état d’être examiné par l’Assemblée ou qu’il est contraire à la Constitution. Il s’agit d’un mécanisme d’obstruction habituel puisque son adoption permet, comme son nom l’indique, de rejeter le texte avant tout examen, et que le débat y afférent peut se révéler chronophage. Dans le cas présent, le scrutin public a été demandé par la présidente du groupe LFI, à l’origine de la motion et l’analyse du scrutin révèle la position de chacun des participants : vote pour, vote contre, abstention ou non-votant.
Cette dernière mention permet de désigner des députés qui, bien que physiquement présents dans l’hémicycle, ont souhaité ne pas participer au scrutin. Choix qui manifeste leur hostilité à la consigne de vote de leur groupe, ou le fait que leur position ne leur permet pas de participer au vote. C’est le cas des députés appelés au Gouvernement qui, démissionnaires de leur mandat, ne peuvent participer au scrutin. C’est également le cas du Président de séance qui traditionnellement ne participe pas au vote qui se déroule sous sa présidence, afin de manifester la neutralité qui s’attache à sa fonction. Usage parlementaire formulé par l’adage qui veut que « le président n’a pas de parti quand il préside ».
Ainsi, S. Chenu, député RN et président de séance lorsque a été discutée la motion de rejet préalable, tout comme le lendemain C. Fiat, députée LFI, ont choisi de ne pas participer au scrutin.
La nouvelle législature marque ainsi la volonté des députés, quel que soit leur groupe, de respecter les usages qui encadrent l’exercice du pouvoir par les responsables de l’Assemblée. Attitude qui contraste avec celle de l’Exécutif, qui depuis le mois d’avril a soumis ces usages à une pratique disruptive.
Mais là n’est pas l’enseignement le plus important, ce scrutin révélant une continuité dans l’organisation interne des groupes parlementaires qui se traduit notamment par le respect quasi unanime des consignes de vote.
L’analyse du scrutin révèle que les députés ont été très disciplinés, seuls les députés du groupe LR s’étant divisés entre les 3 options possibles : vote pour (3 députés), vote contre (23 députés) et abstention (2 députés). Aucune autre division n’est constatée dans les autres groupes : 116 des 172 membres de Renaissance ont voté contre la motion de rejet, comme 35 des 48 membres du Modem et 17 des 30 membres du groupe Horizons et apparentés. Les autres groupes ont unanimement soutenu la motion de rejet : 73 et 89 députés RN ont voté dans ce sens, tout comme 70 des 75 députés LFI, 12 des 31 membres du groupe Socialistes et apparentés, un des 23 membres du groupe Ecolo, 11 des 22 membres du groupe GDR et 3 des 16 membres du groupe Libertés Indépendants Outre-Mer et Territoires.
Les groupes inscrits dans la majorité parlementaire ont donc soutenu le texte gouvernemental quand tous les autres ont cherché à le rejeter… Cette situation aurait dû conduire à l’adoption de la motion de rejet préalable, les forces soutenant le Gouvernement ne détenant qu’une majorité relative, encore affaiblie par l’impossibilité pour les membres du Gouvernement démissionnaires de leur mandat parlementaire de participer au scrutin (17 membres de Renaissance, 4 du Modem et un de Horizons). Les députés soutenant le Gouvernement sont donc in fine 228 et ceux inscrits dans l’opposition, 31810. Si tous les députés d’opposition avaient participé au vote, la motion de rejet aurait pu être adoptée (y compris sans le vote des 62 membres du groupe LR qui s’est divisé sur le sujet).
Mais les chiffres évoqués plus haut pour attester le respect de la discipline de vote montrent que tous les députés n’ont pas participé au scrutin. Donnée qui a pu entraîner l’échec de la motion de rejet préalable. Cela est dû à différents éléments et en premier lieu, à l’organisation interne des groupes parlementaires. Ces derniers organisent le travail parlementaire afin de mutualiser les compétences et d’éviter que tous les parlementaires ne soient toujours tous en séance. Concrètement, le mois de séance et le groupe sont divisés en 4 et chaque partie du groupe se voit assigner une semaine de séance au cours de laquelle les parlementaires doivent siéger, chacun détenant procuration d’un député absent qu’il pourra utiliser lors des scrutins publics solennels11.
L’équilibre politique de l’Assemblée est ainsi respecté, dans la mesure où tous les groupes adoptent cette même organisation qui permet de ne pas épuiser trop rapidement les parlementaires.
L’organisation des tours de garde a ainsi été particulièrement visible le 13 juillet lors du vote du projet de loi de règlement. A cette occasion, en moyenne, entre un quart et la moitié des groupes ont participé au scrutin, ce qui a permis au texte d’être adopté par les seules voix des groupes majoritaires alors que tous les autres groupes se sont unanimement opposés au texte budgétaire. Vote qui leur a permis de manifester sans équivoque leur appartenance à l’opposition. Unanimité qui n’a pourtant pas permis l’échec du texte puisque tous les députés des groupes d’opposition n’ont pas participé au scrutin.
Les autres scrutins publics ont confirmé que ces tours de garde n’étaient pas identiquement possibles au sein de tous les groupes. Il semble en effet, dans cette situation de majorité relative, que les députés de la majorité se doivent d’être plus mobilisés, afin d’être toujours physiquement plus nombreux que les députés d’opposition si ceux-ci respectent les tours de garde. Ainsi, lors du vote de la motion de rejet préalable, 116 et 155 députés Renaissance en capacité de voter ont participé au scrutin, tout comme 35 des 44 membres du Modem en capacité de voter et non seulement la moitié du groupe. De la même manière, les premiers groupes d’opposition ont cherché à afficher leur unité et leur volonté de s’opposer au Gouvernement. Ainsi, 73 des 89 membres du RN ont exprimé un vote hostile et 70 des 75 membres du groupe LFI se sont également opposés au texte gouvernemental. Les autres groupes semblent moins mobilisés : on constate ainsi que seul un député du groupe Ecolo s’est opposé au texte12. Même retenue chez les députés du groupe Libertés Indépendants Outre-Mer et Territoires qui n’ont été que 3 sur 16 à exprimer leur opposition. Constat qui s’applique également aux députés du groupe Socialistes et apparentés.
Les tours de garde seuls ne peuvent donc plus expliquer les chiffres de la participation… les usages de la discipline de vote ou le poids des calculs politiques le peuvent.
Les usages de la discipline de vote tout d’abord : il est habituel de constater que les parlementaires hostiles à la position partagée par la majorité des membres de leur groupe sont invités à minorer leur hostilité en ne brisant pas ouvertement la consigne, mais en s’abstenant ou en ne participant pas au vote.
Ainsi lorsque la participation au scrutin s’avère faible, il est possible d’estimer que tous les parlementaires ne partageaient pas la consigne adoptée lors de la réunion du groupe parlementaire.
Ainsi, si on peut estimer en application des principes organisationnels exposés plus haut que le groupe GDR a unanimement voté la motion de rejet même si seulement 11 des 22 membres se sont exprimés, il est difficile d’étendre cette conclusion au groupe Ecolo, dans la mesure où un seul député a défendu l’opposition, les autres choisissant de ne pas s’exprimer, sans pour autant exposer la division du groupe.
Une autre explication peut être avancée : celle du retour des calibrages des votes caractéristiques de la 4e République. A l’époque, les responsables des groupes se concertaient avant les votes afin de manifester leur hostilité au Gouvernement sans pour autant atteindre la majorité absolue qui l’aurait juridiquement contraint à la démission. Hormis les 2 principaux groupes d’opposition RN et LFI qui souhaitent s’affirmer dans le rôle d’opposant principal, les autres groupes d’opposition semblent avoir cherché à manifester leur unité, ce qui explique qu’aucune dissidence ne soit dénombrée (hormis au sein de LR) et à s’inscrire sans équivoque dans l’opposition. La consigne majoritairement suivie (sauf chez les RL) étant de s’opposer au texte gouvernemental en soutenant la motion de rejet, sans pour autant paralyser l’action de l’Assemblée. Rejeter le texte du Gouvernement aurait empêché l’Assemblée d’améliorer le texte examiné. Le Gouvernement a, en effet, engagé la procédure accélérée et dans ce cas, le texte ne connaît qu’une seule lecture dans chaque chambre avant la réunion de la CMP et la recherche d’un compromis. Adopter la motion de rejet préalable aurait conduit le Gouvernement à considérer que l’Assemblée avait effectué sa 1ère lecture et qu’il serait possible de passer à la phase de conciliation dès la fin de l’examen sénatorial13.
Manifester la force de l’opposition à cette occasion n’aurait pas permis de participer à l’écriture de la loi et allait à l’encontre de l’intérêt de l’Assemblée.
Sans doute les scrutins à venir nous permettront de définir les contours de cette ligne de conduite et de cet intérêt de l’Assemblée. Les scrutins publics des 12 et 13 juillet, portant cette fois sur le fond sont également instructifs.
Les enseignements des autres scrutins publics
Les 14 autres scrutins publics ont porté sur des amendements, sur des articles ou sur la totalité des projets examinés.
Dix scrutins ont ainsi porté sur des amendements dont certains ont pu être adoptés de manière consensuelle, manifestant la volonté de la majorité de chercher le compromis afin d’obtenir l’adoption de l’ensemble du texte, alors que le Gouvernement ne dispose que d’une majorité relative. Ainsi, l’amendement numéro 37 visant à modifier l’article 2, présenté par Ph. Gosselin, député Les Républicains, a-t-il été adopté par 386 voix contre une seule opposition. De même, l’amendement numéro 67 à l’article 3, porté par M. Karamanli, députée socialiste, a-t-il été adopté par 250 voix pour, 11 voix contre… et 69 abstentions.
D’autres votes montrent que le consensus n’a pas été possible et le rejet du texte sur lequel portait ce vote rappelle que le Gouvernement est minoritaire. Tel a été le cas lorsque les députés ont choisi de rejeter l’article 2 du projet de loi. Seuls 195 députés Renaissance, Modem et Horizons ayant soutenu le texte, alors que 219 députés NUPES, RN et LR ont choisi de voter contre. La coalition des oppositions n’a pas permis au Gouvernement de faire valider, lors de cette première lecture, sa rédaction du texte. Toutefois celui-ci a rapidement affirmé qu’il comptait réintroduire ces dispositions, par amendement ou par le truchement de sa majorité, lors de la discussion au Sénat.
D’autant que cette hostilité manifestée à l’encontre d’un seul article n’a pas entraîné le rejet de l’ensemble du texte. Ainsi, le dernier scrutin public de ce 12 juillet 2022 portait sur l’ensemble du texte et a conduit à son adoption. 221 députés de la majorité ont soutenu le texte quand 187 députés de l’opposition seulement ont choisi de voter contre et 24 de s’abstenir.
Le cumul des abstentions et des non-votants, qu’ils soient le fait de l’organisation des tours de garde ou des calibrages des votes, indique que les députés de l’opposition non pas tous souhaité rejeter le texte.
C’est le cas du groupe LR qui s’est divisé entre votes pour (31), votes contre (8) et abstention (6). Mais également du groupe socialiste dont les 14 votants ont choisi de s’abstenir, manifestant ainsi que la consigne de vote du groupe était de ne pas s’opposer ouvertement au texte du Gouvernement. La volonté de ne pas nuire à l’Assemblée peut expliquer ce choix, le rejet pur et simple du texte ne permettant pas de tenir compte des amendements des députés et de leur apport au texte alors que la phase de conciliation se profile rapidement.
On peut opérer le même constat le lendemain lors du vote relatif au projet de loi de règlement : si les oppositions se sont unanimement prononcées contre le texte, la mobilisation ne leur a pas permis de rejeter celui-ci. Elles refusent ainsi les critiques d’opposition stérile, conscientes que le rejet du texte en 1ere lecture ne signifie pas que le Gouvernement ne dispose pas des armes pour restaurer son texte, alors que mathématiquement elle aurait pu s’opposer au 1er texte budgétaire de la 16e législature.
Conclusion
L’analyse de ces scrutins publics permet de tirer différents enseignements : la volonté des groupes de gauche d’afficher une unité dans leur opposition : tous ont majoritairement voire unanimement voté les motions de censure et de rejet. Attitude qui permet à LFI d’afficher, pour le moment, son leadership. De la même manière, on constate une forte mobilisation des députés de la majorité qui, s’ils veulent permettre l’adoption des textes du Gouvernement, se doivent d’être présents en séance lors de l’examen et surtout lors des votes.
Cette mobilisation devra perdurer tout au long de la législature. Cela peut soit entraîner une rigidification de la discipline de vote du principal groupe de la majorité, soit contraindre le Gouvernement à l’associer davantage à l’élaboration des textes.
En ce début de mandat, l’unité du groupe Renaissance semble être surtout le résultat de la dramatisation des relations majorité/opposition par les responsables du gouvernement14.
Ces quelques scrutins ont également permis de révéler la position sensible du groupe LR qui a refusé de signer un contrat de législature avec la majorité Ensemble, mais doit faire face à un Gouvernement majoritairement composé de ministres issus de ses rangs, portant certaines valeurs auxquelles ils ne peuvent systématiquement s’opposer.
Au-delà des équilibres politiques, les 16 premiers scrutins publics de la 16e législature ont montré le refus des oppositions de jouer le chiffre et fait émerger la notion d’intérêt de l’Assemblée, dont les contours doivent encore d’être définis. Mais il semble que les calculs politiques devront céder face à la nécessité de préserver le poids de l’Assemblée dans le processus législatif. Ce qui nous paraît comme l’enseignement le plus important de ces quelques votes.
Dorothée Reignier
Maître de conférences en droit public, Sciences Po Lille/CERAPS
- En cas de désignation de personne, comme lors de l’élection du Président de l’Assemblée, le scrutin est secret. Art. 63 RAN. ↩
- Art. 65 al. 4 du RAN, qui prévoit également un scrutin public en cas d’application de l’art. 50-1 de la Constitution. ↩
- Il s’agit alors d’un scrutin public ou solennel, qui porte sur l’ensemble du texte. ↩
- D. Reignier, La fin de la discipline partisane, Pouvoirs, n°163, 2017/4, p. 113 à 126. ↩
- D. Reignier, Les formes de l’indiscipline partisane au Parlement, in F. Davansant, A. Louis et I. Thumerel, Discipline et indiscipline parlementaires, Institut Francophone pour la Justice et la Démocratie, 2000. ↩
- Voir infra. ↩
- Art 4.3.2 et 4.4.2.3 des statuts du Parti socialiste. ↩
- 5 des 6 indisciplinés, dont l’ancienne présidente du groupe, ont en effet déjà effectué plusieurs mandats. ↩
- Motions de censure et de procédure et il est possible de souligner par ailleurs que deux propositions de lois de la présidente de ce groupe ont également été signées par les députés de l’intergroupe. ↩
- Compte non tenu des 9 députés non-inscrits. ↩
- Lors des scrutins publics ordinaires, les prescriptions de l’ordonnance du 17 novembre 1958 s’imposent : seul un député malade, confronté à un événement familial grave, à un cas de force majeure, s’étant vu confier une mission temporaire par le Gouvernement ou participant aux travaux d’une assemblée internationale, peut déléguer son vote. Il convient de noter qu’en dehors du scrutin portant sur la motion de censure, aucun des votes suivants n’a été un scrutin solennel. ↩
- Même si certains ont opéré une rectification de vote indiquant qu’ils souhaitaient voter pour la motion de rejet préalable, ces rectifications n’ont pas d’incidence sur le résultat du scrutin . ↩
- Voir le précédent suite à l’adoption de la question préalable au projet de loi OGM le 13 mai 2018. ↩
- E. Borne affirmant « l’heure est grave » après le vote ayant entraîné le rejet de l’article 2 de son projet de loi : https://www.tf1info.fr/politique/covid-19-feu-vert-de-l-assemblee-nationale-pour-le-projet-de-loi-sanitaire-l-opposition-fait-retirer-un-article-cle-2226229.html
O. Veran, quant à lui, dénonce la « fusion fraternelle » du RN et de LFI : https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/vaccin/direct-premier-couac-a-l-assemblee-pour-la-majorite-francois-braun-veut-se-battre-pour-retablir-le-projet-du-gouvernement-sur-le-pass-sanitaire-au-senat_5253787.html. ↩