Vilipendée, conspuée, décriée, combattue, la Ve république a résisté, résiste et continuera de résister. Ce 4 octobre 2023, elle soufflera sa 65e bougie. Qui aurait pu l’imaginer ?
Dans une France initialement réputée pour son instabilité constitutionnelle, peu avaient parié sur une telle longévité. Après avoir connu le régime d’Assemblée unique, la Convention, le Directoire, le Consulat, l’Empire, le retour des Bourbons sur le trône, la Monarchie de Juillet, la Deuxième République, le second Empire, la Troisième République, le régime autoritaire de Pétain avant de retrouver une quatrième République chétive, la France s’est enfin dotée d’une véritable Constitution en 1958.
Inspirée du théoricien de Bayeux, le solitaire de Colombey, la Ve République a su freiner cette décadence de l’Etat débutée sous la IIIe et accélérée sous la IVe.
En instaurant un véritable « monarque républicain » indépendant et doté de réels pouvoirs, la Constitution de 1958 a redonné à la France un chef et redoré son image à l’international.
A la croisée du régime présidentiel et parlementaire, la Ve République offre une certaine souplesse permettant de résister aux crises politiques majeures. En 1968, le pouvoir présidentiel de dissolution qu’elle prévoit permet au général de Gaulle de tourner la page de plusieurs semaines de manifestations. Quand survient le décès du président Pompidou en 1974, elle permet d’assurer la continuité d’un Etat fort par l’intérim du président du Sénat. En 1986, 1993 et 1997, elle a su comme le disait Edouard Balladur surmonter « l’épreuve de vérité » avec les différentes cohabitations. Après 1988, elle continue de résister aujourd’hui aux secousses de la majorité relative.
Toutefois, dans une société en pleine mutation, la Ve République est amenée à s’adapter au risque de s’exposer aux procès en déconnexion ou en essoufflement.
S’adapter sans perdre son identité. Tel sera l’énorme défi du président de la République qui tentera après l’échec de 2018 de lancer dans les mois à venir une série de réformes constitutionnelles avec notamment l’inscription de l’IVG, la question de la Nouvelle Calédonie, l’autonomie de la Corse, la décentralisation ainsi que le recours au référendum.
Ce travail devra se faire avec toute la rigueur intellectuelle et la finesse politique loin de l’agitation médiatique gardant toujours à l’esprit cet avertissement de Montesquieu « Il est parfois nécessaire de changer certaines lois mais le cas est rare et, lorsqu’il arrive, il ne faut y toucher que d’une main tremblante ».
Carlyle Gbei
Journaliste politique
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