Après son passage en commission avant les vacances de printemps, la loi travail a fait son entrée dans l’hémicycle le 3 mai dernier. Une arrivée remarquée sur fond de manifestation et d’échanges tendus au sein du palais Bourbon.
Malgré les nombreuses modifications apportées a la version initiale pour apaiser et rassurer aussi bien les citoyens que les partenaires sociaux, le texte peine à convaincre. Le rapporteur du projet de loi, Cristophe Sirugue, député PS de Saône-et-Loire a estimé dans une interview donnée au Parisien, lundi 2 mai, qu’il « manque 40 voix pour obtenir une majorité et voter la loi ». Même si le gouvernement répète que le recours au 49.3 est pour l’instant à exclure, il n’en reste pas moins qu’il va devoir, s’il souhaite faire passer la loi, accepter de nouvelles concessions. Les députés ont jusqu’au 17 mai pour changer le texte. Près de 5 000 amendements ont ainsi été déposés et annoncent une bataille parlementaire à venir à la fois compliquée et passionnante.
La loi travail divise toujours à gauche
Même si la plupart des députés socialistes, les radicaux de gauche et les écologistes favorables au gouvernement voteront le texte, cette coalition ne parviendra pas à réunir la majorité absolue. Au sein du groupe SRC, les frondeurs restent en effet opposés au projet de loi. Dans un communiqué la motion B du parti socialiste a expliqué que « Ce projet n’est pas utile pour la France et pour l’intérêt général, il n’est pas conforme aux réformes que l’on attend d’un gouvernement de gauche. »
D’autres députés socialistes ne comptent pas voter le texte en l’état. Le manque de clarté de certaines mesures autour des licenciements économiques notamment est « une ligne rouge pour beaucoup ». Les membres de la majorité ne veulent en effet pas voter une réforme qui facilite les licenciements et veulent donc travailler sur le périmètre d’appréciation des difficultés économiques.
Plus à gauche, le texte reste inacceptable et ne trouvera pas de soutiens. André Chassaigne, qui préside le groupe GRD, a demandé le retrait du projet de loi travail qu’il qualifie d’« un des plus régressifs que l’on est eu depuis des décennies » pour la protection des salariés.
À droite, on regrette le texte initial
L’équilibre trouvé par François Hollande et Manuel Valls sur cette réforme après les semaines de mobilisation qui s’enchaînent depuis janvier n’a visiblement pas convaincu à gauche, pas qlus qu’à droite. Au contraire, bon nombre de députés qui trouvaient le projet intéressant y sont aujourd’hui opposés. Guillaume Larrivé, porte-parole du parti Les Républicains et député de l’Yonne, a affirmé que « la loi El-Khomri est inutile parce que le gouvernement à refusé de choisir », « du perdant-perdant qui ne satisfait ni la gauche conservatrice ni la droite réformatrice ». Les députés UDI ont quant à eux été jusqu’à proposé un contre projet de loi contenant, entre autres, un retour progressif au 39h.
Le 49.3 et la censure
Avec des députés LR, UDI, FG ainsi que les écologistes et les frondeurs, cette probable dernière grande réforme du quinquennat semble mal engagée. Il apparaît en effet compliqué qu’une modification du texte, même en profondeur, arrive à convaincre largement. L’exécutif pourrait donc recourir a l’arme législative qu’est le 49.3. Utilisé en 2015 sur la loi Macron, il est susceptible d’être de nouveau à l’ordre du jour dans les semaines à venir. Dans ce cas, une motion de censure pourrait être largement votée, à droite comme à gauche.
Les prochains jours risquent d’être de plus en plus compliqués pour l’exécutif qui va devoir éviter que le passage à l’Assemblée nationale de la loi travail ne se transforme en impasse et n’enterre définitivement cette réforme.
Alexandre Gavard