À l’initiative du sénateur Loïc Hervé, président du groupe d’études « Société numérique, nouveaux usages, nouveaux médias » du Sénat, une délégation sénatoriale s’est rendue dans la PME Advanced Schema, spécialiste du big data.
Revue Politique et Parlementaire – Vous avez récemment visité la PME Advanced Schema, entreprise de services du numérique spécialiste du big data. Quel était le but de cette rencontre ?
Loïc Hervé – Ma volonté de président du groupe d’études « Société numérique, nouveaux usages, nouveaux médias » du Sénat est de proposer à mes collègues sénateurs des visites de terrain dans des entreprises qui évoluent dans les domaines sur lesquels nous travaillons, notamment le big data.
Nous avons eu la chance de pouvoir être accueillis par les dirigeants d’Advanced Schema, de visiter leur entreprise et d’échanger avec eux sur les réalités qu’ils connaissent.
Être parlementaire, être législateur nous oblige à ce travail pour que la loi soit la plus adaptée voire la plus favorable au développement des nouvelles technologies. Nous vivons une nouvelle révolution industrielle, la quatrième, et la France se doit d’être au rendez-vous.
RPP – Comment avez-vous perçu cette visite et qu’en avez-vous retiré ?
Loïc Hervé – Cela a été pour nous le confortement d’une véritable prise de conscience : il y a dans notre pays des entreprises qui sont leaders dans leur domaine. Ces entreprises méritent d’être davantage connues des responsables politiques. Cela est d’autant plus nécessaire que le rôle des parlementaires est, de mon point de vue, de créer les conditions les plus favorables à leur développement.
À ce titre, les questions de formation professionnelle, de fiscalité, de R&D nous intéressent au plus haut point.
RPP – De nombreux chefs d’entreprise regrettent la méconnaissance des parlementaires à l’égard du monde de l’entreprise. Comment rapprocher le Parlement des entreprises ?
Loïc Hervé – Je crois qu’il nous faut être concrets et à l’écoute des chefs d’entreprise et des salariés. Et quoi de mieux que d’organiser ce type de visite d’entreprises, le plus souvent possible.
Je viens d’un territoire, le département de la Haute-Savoie, où le monde de l’entreprise et les élus se connaissent bien. Quand chacun est dans son rôle, quand chacun se connaît et se respecte, on peut aller très loin et accompagner le développement de notre tissu économique.
RPP – Vous présidez le groupe d’études sénatorial sur la société numérique. Quels sont les sujets particuliers sur lesquels travaille ce groupe ?
Loïc Hervé – Notre approche est avant tout sociétale. Le numérique va bouleverser les équilibres dans bien des domaines, au-delà même de l’économie.
C’est toute la richesse d’un groupe transversal comme le nôtre que de pouvoir aborder ces sujets avec des expertises variées et des approches différentes.
RPP – On reproche souvent aux élus leur déficit de culture numérique et leur manque de maîtrise des enjeux dans ce domaine. Comment expliquez-vous ce décalage entre les élus d’une part, les citoyens et les entrepreneurs d’autre part ? Que préconisez-vous pour que les parlementaires se saisissent davantage de la question numérique ?
Loïc Hervé – L’un des devoirs du Sénat est d’être bien en phase avec les bouleversements du monde. Le numérique change notre rapport à l’individu, au collectif, au temps, à l’argent.
On doit évoquer les choses sur un plan à la fois philosophique, mais aussi de manière très concrète pour adapter la législation de notre pays aux évolutions majeures que la révolution numérique engendre.
Il nous faut penser le numérique différemment.
J’ai la chance de sièger comme membre de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL). Dans cette instance, je puis vous assurer que je mesure grandement les évolutions, leur ampleur et surtout leur rapidité.
RPP – Le projet de loi pour une République numérique a été co-rédigé par des citoyens. Êtes-vous favorable à ce type de conception et pourquoi ?
Loïc Hervé – La méthode employée par Axelle Lemaire sur ce texte est intéressante. Le projet de loi République numérique était un texte assez technique et débattu sans polémique. Pour autant, le fait d’avoir associé en amont à la rédaction même de ce texte tous ceux qui pouvaient y contribuer a été pour moi une vraie bonne idée.
Je ne suis pas sûr que la chose soit transposable sur tous les textes, mais il nous faut porter une réflexion sur la manière d’écrire la loi. Je sais que Gérard Larcher, président du Sénat, y est très attentif.
RPP – La défiance des citoyens envers les institutions n’a jamais été aussi forte. Pensez-vous que l’ouverture des données publiques, qui permet une plus grande transparence de leur fonctionnement, rétablira leur confiance ?
Loïc Hervé – Quand on pense au fossé béant qui existe entre nos concitoyens et les élus et à la manière d’y répondre, on évoque souvent des solutions institutionnelles. Je crois que c’est une erreur car c’est largement insuffisant.
Il faut repenser les choses plus profondément et notamment se poser la question de la manière dont les décisions sont prises.
Oui, je crois que le numérique exige aussi de repenser la démocratie dans notre pays et sur le continent européen. Les citoyens l’attendent.
Loïc Hervé
Sénateur de la Haute-Savoie
Propos recueillis par Florence Delivertoux
Photo : Sénat