A mi-mandat du quinquennat d’Emmanuel Macron et à quelques mois des municipales, Jacky Isabello, Cofondateur de l’agence Coriolink, revient sur les divisions qui secouent La République en marche !
Voltaire aimait répéter : « Je m’arrêterais de mourir, s’il me venait un bon mot ». Le Président Macron serait plutôt de ceux préférant choisir la fin au lieu de renoncer à une bonne parole. Or, les nombreuses maladresses langagières qui l’ont vu provoquer l’effroi dans le petit monde des gazettes lors des premiers 18 mois de son mandat sont la source d’une énergie en train de dévitaliser l’ensemble de son jeune et scoliotique parti politique. En effet, LREM appréhende les élections municipales dans un grand désarroi. Les dissidences en série chez les « marcheurs », pour paraphraser le titre d’un article du journal Le Monde daté du 8 novembre, sont en train de pourrir la charpente de la matrice partisane LREM en construction, dont la seule doctrine connue celle du « en même temps » produit désormais la plus dévastatrice des forces en politique, la terrible force centrifuge. Comment un jeune Président, élu contrairement à tous les pronostics, aura-t-il prouvé, sans le désirer, la véracité de la prophétie des Cassandre qui, durant la dernière campagne présidentielle, prédisaient qu’un Président sans expérience ne tiendrait pas la distance sur 5 ans ? A l’origine, les petites phrases inutiles de Macron offre la trace d’ADN preuve de l’éclatement qui se produit au sein même du mouvement La République en marche!. Retraçons étape par étape les lézardes qui corroborent la théorie de la malfaçon !
Pourquoi ce mouvement vit-il des dissidences qui s’installent partout en France ?
Tels des virus, l’ensemble des bastions géographiques, ayant souvent placé le candidat Macron en tête à la dernière présidentielle, sont gagnés par un syndrome de division collective.
La ville de Metz est la dernière en date, mais demain et les jours suivants d’autres cités viendront noircir le tableau des villes perdues avant même d’avoir entamé la moindre initiative de campagne collective.
1. Primo : la dissidence connue sous l’expression « dissidence Villani » aura été un signal à la désobéissance politique. Le Concept inventé par le philosophe Thoreau, et confessons qu’il n’a aucune parentèle avec les querelles macronistes, résume parfaitement les drames relatés par les médias. Les témoignages issus des troupes de LREM sont parfois plus accablants que ceux dont « l’ancien monde » avait su être le mauvais exemple.
2. Deuxio : LREM, sortie d’une « annus horribilis » du fait de la « mini-révolution » des gilets jaunes, n’a pas trouvé l’énergie de faire régner l’ordre parmi des troupes déstabilisées à la manière dont l’a été la majorité des Français. Aucun chef n’a montré sa capacité à « cheffer » comme l’a théorisé le Président Chirac, père de cette délicieuse formule. Lorsque MM. Macron, Philippe, Legendre et Griveaux lui-même, dit-on dans les rangs macronistes, ont refusé de sanctionner M. Villani, Stanislas Guerini se serait imposé de facto en tant que chef du parti s’il avait affirmé sa capacité à « cheffer » et à prendre de lui-même les décisions difficiles. J’ai l’outrecuidance de penser qu’il n’est rien de douloureux pour celui qui se remémore M. Churchill devant justifier à la nation l’hécatombe de la bataille des Dardanelles en 1915.
3. Tertio : un mouvement des gilets jaunes naissant qui s’est nourrit du rejet des arrogances macronistes. Ces hordes en jaune agacées, entre autre, par les petites phrases d’un Président encore drapé dans les atours convaincus d’un super techno capable d’affirmer sur un ton injonctif que chacun de ses sujets peu trouver « un job » en traversant tout simplement la rue. Ces ministres, soutiens de la première heure, tels MM. Hulot et Collomb, déçus par le manque d’ambition écologique pour l’un et par l’amateurisme avec lequel « les mormons » se sont occupés de l’affaire dite « Benalla » pour l’autre.
4. 2017 cette « annus mirabilis », faite d’une campagne durant laquelle les planètes macronistes se sont alignées sans écart, et animée du sentiment que tout est désormais possible pour la troupe de grognards architectes de la désignation par le peuple du Président le plus jeune de la Ve République, aura été un « shoot » d’euphorisant injecté à l’ensemble de la foule macroniste sans que quiconque ne s’inquiète des effets secondaires.
A mi-mandat, car se fête ou se note sur l’agenda cette date importante pour un mouvement politique, rien ne va plus ! La victoire aux élections municipales n’a rien d’évident. Chaque étape rappelée ci-dessous implique un effet toxique sur les séquences suivantes. Aussi, la promesse d’un futur groupe majoritaire LREM au Sénat ferait sourire le moins avisé des experts de la carte électorale et François Patriat rengainer son porte-monnaie à l’idée de parier à nouveau sur ce résultat. Le poison de la rancœur s’instille dans les têtes de celles et ceux grisés par la promesse d’un nouveau monde.
Les parlementaires de la majorité s’écartent lentement formant deux icebergs qui se regardent face à face, l’un à droite et l’autre à gauche d’un océan qui promet sinon la fronde au moins la division.
La malédiction du gouvernement Jospin en 2002 aura été de ne pas saisir que la bonne santé économique du pays n’empêchait pas le peuple de craindre pour son avenir sur des sujets dits régaliens, comme la sécurité et l’immigration. Celle de Macron, si l’en en croit l’état de son navire de croisière LREM promis à devoir mener la campagne de 2022, pourrait être de se laisser également bercer par les promesses d’une économie en voie de guérison, alors que s’installe profondément une dépression et donc l’incapacité à mener les prochains combats. Tout dispose d’un potentiel effet papillon dans l’univers de la politique. Les petites décisions ont souvent de très lourdes conséquences.
Jacky Isabello
Cofondateur de l’agence Coriolink
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