En 1993, Jean-Paul Kauffmann se rend sur l’île de Sainte-Hélène. Quelques années plus tard, en 1997, il publie La Chambre noire de Longwood, un récit sur la captivité, l’enfermement et la fin de vie de Napoléon. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, il revient, notamment, sur les raisons de son intérêt pour l’Empereur.
Revue Politique et Parlementaire – D’où vient cet intérêt pour Napoléon ?
Jean-Paul Kauffmann – Je pourrais invoquer le hasard, mais il y avait probablement une nécessité qui dormait dans mon inconscient. Mon premier livre avait pour sujet les îles Kerguelen. On m’a collé une étiquette : spécialiste des îles. Par la suite, un magazine m’a proposé de partir à Sainte-Hélène. J’ai accepté en premier lieu parce qu’on n’y accédait alors que par bateau. Comme pour les Kerguelen, la traversée dure trois semaines. L’attente, l’ennui, ce sont des notions que l’on a perdues depuis que l’avion nous livre d’un coup d’aile les destinations les plus éloignées. La figure de Napoléon n’est venue qu’en second, avec tout de même une vraie curiosité. À quoi donc peut ressembler cette petite île où il est mort le 5 mai 1821 ? Je ne veux pas créer chez ceux qui n’y ont jamais mis les pieds un sentiment de frustration, mais il est pratiquement impossible de se représenter cette captivité si on n’est pas allé sur place.
Dans les biographies, seuls me passionnent le début et la fin. L’ enfance est essentielle, mais les faits réels font souvent défaut. Cela vaut particulièrement pour Napoléon où beaucoup de circonstances ont été inventées après coup pour les besoins de la légende. Les dernières années sont intéressantes car elles dévoilent souvent le sens et les secrets d’une existence. La vraie légende s’est créée à Sainte-Hélène alors que la quotidienneté y était très prosaïque. Ce que rendent bien les témoignages de Gourgaud et de Bertrand qui l’ont accompagné dans son exil. L’ennui et le désœuvrement apparaissent comme la véritable toile de fond de cette fin de vie. À Gourgaud il confie par exemple : « Il faudrait pouvoir s’endormir et ne se réveiller que dans un an ou deux. » Aveu presque incroyable chez un homme qui n’avait vécu que pour l’action. Pour répondre exactement à votre question, mon intérêt pour Napoléon trouve essentiellement son origine dans cette captivité. C’est l’homme vaincu qui m’a intéressé. L’homme désarmé, l’homme nu. Cet aspect de l’homme « vrai », dépouillé n’avait pas échappé à l’intéressé : « Grâce à mon malheur, on pourra me juger à nu. » Par son calvaire, Napoléon descend de son Olympe pour rejoindre l’ordinaire communauté humaine.
L’objet le plus émouvant de Longwood est cette baignoire où à la fin il passait le plus clair de ses journées.
Vaincu, certes, mais finalement victorieux. À Sainte-Hélène, il a perdu, mais son coup de génie est d’avoir retourné la situation. Il a confondu ses ennemis et triomphé des tracasseries de son geôlier, Hudson Lowe, dont le rôle exécrable n’est pas mince dans l’édification de la légende. On a raison de dire que la bataille la plus éclatante qu’il ait remportée est celle de Sainte-Hélène. Une bataille contre le temps. Un combat morose, quotidien. Il a duré cinq ans et demi. Au temps de sa gloire, il disait à ses interlocuteurs : « Je puis tout vous donner, sauf du temps. » Précisément à Sainte-Hélène, il lui faut « tuer le temps ». Quand on pense que dans le jardin de Longwood, il s’amusait comme un enfant à tenir le tuyau d’arrosage pendant que ses compagnons pompaient, on mesure le vide qu’il fallait combler. Selon Ali, l’un des domestiques, jamais Longwood ne fût aussi animé que pendant ces travaux. Mais ces périodes d’excitation ne duraient pas. Il y a parfois un côté Bouvard et Pécuchet dans cette captivité. Napoléon et ses compagnons vont d’expériences en expériences et ne connaissent à la fin que des déconvenues. Ces déceptions sont dues en grande partie à la rivalité existant entre les quatre compagnons de l’Empereur : Las Cases, Gourgaud, Montholon et Bertrand. Ils se détestaient. Gourgaud était le plus insupportable. Bertrand, le plus désintéressé, le plus fidèle, mais aussi le plus terne et le plus ennuyeux. Son témoignage sur la captivité, qui n’a été publié qu’après la dernière guerre, est le moins connu et le plus passionnant dans l’apparente trivialité du quotidien.
RPP – Pourquoi dites-vous qu’il est impossible de comprendre cette captivité si l’on n’est pas allé sur place ?
Jean-Paul Kauffmann – Sainte-Hélène est une île minuscule, un caillou au milieu de l’Atlantique Sud – pour prendre un ordre de grandeur, plus petit, par exemple, que l’île d’Oléron. Mais un caillou très fréquenté. Tout bateau revenant d’Inde ou de l’Extrême-Orient s’arrêtait à Sainte-Hélène, appelée alors l’ « auberge de l’océan ». Wellington y avait fait escale lorsqu’il servait en Inde. C’est lui qui a suggéré cette île comme lieu de détention.
Lorsqu’on le découvre pour la première fois, le site de Longwood est très impressionnant. La maison est située sur un plateau battu par les vents alizés, souvent plongé dans la brume, très humide, les vêtements se recouvraient de moisissure et il fallait passer au poêle les cartes à jouer toutes molles.
Ce lieu impossible, une torture pour un Méditerranéen comme Napoléon, contraste avec le reste de l’île, beaucoup plus aimable.
Je trouve à cette maison un côté poignant qui ne tient pas seulement à la figure du prisonnier. Il y a des lieux qui se dévoilent d’emblée par leur aspect inquiétant. On dira que c’est une façon littéraire d’envisager le drame qui s’y est joué, mais Longwood est le lieu littéraire par excellence. C’est une maison hantée, peuplée de fantômes – la littérature n’étant qu’une autre croyance aux fantômes. Peut-être aussi parce qu’elle n’a pas été muséifiée. L’isolement de l’île explique ce parfum d’authenticité, même si la maison a été pour une large part reconstituée. L’esprit demeure, et l’on peut dire qu’il souffle intensément sur cette ancienne fermette, très simple, élémentaire, en dépit de sa disposition labyrinthique – on a ajouté des pièces les unes aux autres sans plan établi pendant la captivité. D’où son aspect quelque peu secret favorisant les conciliabules et l’espionnage. Dans cette maison, chacun surveillait l’autre, Napoléon étant d’ailleurs assez friand des potins concernant sa petite cour. Tout cela pour dire que si Napoléon était mort en Angleterre ou quelque part en Europe, les adorateurs et les fétichistes de l’Empereur auraient probablement endommagé ce lieu de pèlerinage. Longwood est un lieu très fragile. Las Cases l’appelait la « maison de carton ».
RPP – Vous avez publié La Chambre noire de Longwood, un récit sur la fin de vie de Napoléon. Pourquoi vous êtes-vous inspiré de cet épisode précis ?
Jean-Paul Kauffmann – C’est l’histoire d’une frustration. Sur le bateau m’emmenant à Sainte-Hélène, j’avais emporté une énorme documentation sur la captivité de Napoléon. Je crois beaucoup à l’imprégnation. J’étais totalement pénétré par mon sujet, et quand il m’a fallu écrire mon article pour ce magazine, j’ai éprouvé un profond désappointement. Tant d’impressions, tant de faits à rapporter ! Et j’avais si peu de place. On m’aurait donné la moitié du magazine que je n’aurais pas été satisfait. Il faut reconnaître que le lieu est inspirant. Un sujet comme celui-là se présente une ou deux fois dans l’existence.
Après un tel voyage, impossible de tourner la page.
J’ai hésité pendant presque une année et les notes que j’avais prises n’étaient pas destinées à l’écriture d’un livre. L’enfermement, la captivité, c’est un sujet qui ne m’est pas tout à fait inconnu, mais justement je ne voulais pas non plus être enfermé dans cet état, alimenter moi-même ma condition d’ex-otage, qui s’avère pesante à la longue. D’ailleurs comment comparer ma détention et celle de Napoléon ? Ce serait a priori présomptueux, et pourtant, l’expérience m’a appris que tous les enfermements se valent. J’ai fini par me jeter à l’eau. Je reconnais aujourd’hui que ma propre histoire a beaucoup joué dans la décision de me lancer dans l’écriture d’un livre. Je ne pouvais envisager extérieurement ce lieu de détention. Évidemment, je ne me suis pas identifié au prisonnier, mais je crois en partie avoir compris le sens de cette tragédie. Il est certain que Napoléon a souffert au-delà de ce qu’on peut imaginer. Il avait avec lui des compagnons, mais il était seul, profondément seul. Impossible de se confier à quiconque. Cet abandon aurait été indigne de son rang. Les formes, le protocole, c’est tout ce qu’il lui restait. Pour cette raison, il était intransigeant sur l’étiquette et sur la façon dont il fallait s’adresser à sa personne (Sire, Votre Majesté). Un visiteur anglais, Raffles, ayant obtenu une audience avec le prisonnier note : « A l’égard de sa suite, il reste aussi distant qu’un Empereur sur son trône. » Le seul qui, intellectuellement, pouvait lui donner la réplique, Las Cases, quittera l’île en 1816. Son départ l’a beaucoup affecté. Un dimanche, il s’ennuyait tellement qu’il se mit à regretter l’absence d’un prêtre : « Cela nous eût fait passer un instant de la journée ».
Je précise qu’aucune vraie allusion à ma propre histoire n’est faite dans le livre. Il y a des clins d’œil, on peut y voir parfois des sous-entendus. J’avoue que cela a constitué pour moi une sorte de jeu, une forme d’understatement. En littérature, je préfère les écrivains qui ne nomment pas directement les choses. J’ai voulu m’en inspirer.
Après ce voyage à Sainte-Hélène, j’aurais pu m’en tenir là sur Napoléon, mais un autre hasard – qui n’en est peut-être pas un – m’a conduit dans l’enclave russe de Kaliningrad, l’ancienne Prusse Orientale. À l’origine, j’y allais pour faire un reportage sur l’ancienne Königsberg, patrie d’Emmanuel Kant. Sur place, j’ai appris incidemment que s’y trouvaient deux champs de bataille, Eylau et Friedland, des lieux, là encore, qu’on n’avait pas l’habitude de visiter, l’enclave russe étant zone interdite jusqu’en 1991. D’emblée, évidemment, Eylau m’a attiré.
C’est une étrange bataille, incertaine et sanglante, où Napoléon a failli tout perdre.
Il est à noter qu’à Sainte-Hélène le captif, qui ne se faisait jamais prier pour raconter ses combats, se comporte bizarrement lorsqu’on évoque devant lui Eylau. Il parle volontiers de Waterloo, cette défaite deviendra même chez lui une obsession, reconstituant sans cesse la bataille pour rechercher l’erreur. « Journée incompréhensible », finira-t-il par trancher. Mais pour Eylau, il fait un blocage. C’est un très mauvais souvenir pour lui, l’une des batailles les plus dangereuses de son règne. Il sera à deux doigts d’être capturé et ne devra son salut qu’à la fameuse charge de cavalerie de Murat, la charge sans doute la plus impressionnante de l’histoire militaire européenne. Cette demi victoire – ou demi défaite – sera vite éclipsée par Friedland quatre mois plus tard. Mais Eylau va retentir dans ce destin comme un mauvais présage. Pour la première fois, l’homme qui croyait en son étoile a la révélation que la chance l’a abandonné.
Pour moi, Eylau et Sainte-Hélène sont intimement liés. Au fond, Eylau est un Waterloo qui a réussi, le déroulement des deux batailles étant presque identique. Ce qui m’a intéressé à Eylau c’est le site pratiquement intact. L’église au pied de laquelle Napoléon dirigeait la bataille existe toujours. C’est un lieu saisissant. Le sol expulse boulets de canons, fusils, squelettes. Il rumine comme un volcan. On marche sur les morts. Toute proportion gardée, cela ressemble à Verdun par le côté funèbre.
RPP – Que pensez-vous des polémiques actuelles sur la commémoration du bicentenaire de la mort de Napoléon ?
Jean-Paul Kauffmann – Elles ne m’ont pas étonné. Je m’attendais à ce que le rétablissement de l’esclavage en 1802 soit sinon au centre de la commémoration du moins l’objet d’une vive controverse. À Sainte-Hélène, il donne d’ailleurs l’impression d’avoir oublié cette affaire, s’indignant de la condition faite à un esclave nommé Tobie, un jardinier d’origine malaise, enlevé et vendu. Scandalisé, il qualifie cet acte d’ « horrible forfait », ce qui est quelque peu hypocrite de sa part.
Rappelons, si besoin en était, qu’on ne peut juger Napoléon à l’aune de nos valeurs. Était-il de droite ou de gauche ? À mon avis, la question ne se pose pas en ces termes. Il était ailleurs. C’est un problème presque insurmontable, car le personnage échappe à toute classification. Bien sûr, il était macho, despotique, autolâtre, soucieux de sa seule gloire, j’en oublie certainement. Il apparaît comme le cleptomane de la Révolution, s’appropriant ses principes tout en les détournant. Il en est à la fois l’héritier et le fossoyeur. On connaît la fameuse déclaration consulaire du 25 septembre 1799 : « La Révolution est fixée aux principes qui l’ont commencée : elle est finie. » Elle est finie, mais elle continue. Un historien de gauche comme Georges Lefebvre, influencé par la lecture de Marx, n’hésitera pas à soutenir que la dictature napoléonienne imposée à la France était nécessaire à la préservation de l’œuvre révolutionnaire après l’échec de la Terreur. Napoléon ne remettra jamais en cause par exemple le principe d’égalité civile, conquête majeure de la Révolution. La Constitution de 1804, qui fonde le pouvoir impérial, résume toute l’ambiguïté du personnage et du régime : « Le gouvernement de la République est confié à un empereur. » Je sais bien qu’il y a l’exemple des empereurs romains, qui se considéraient en principe comme des mandataires de la collectivité, chargés de diriger la République, mais ils se voyaient aussi comme des personnages sacrés.
À l’évidence, nous avons affaire ici à une aporie : la nature du phénomène Napoléon est impossible à résoudre.
Chacun s’est d’ailleurs créé son propre mythe du personnage, il ne saurait y avoir de conclusion en raison de la multitude de visions individuelles. La polémique était tellement attendue dans un pays comme le nôtre, qui adore ce genre de débats ! Cela tient plus de la joute oratoire que de la discussion de fond. Chacun sait en lui-même qu’il est illusoire de juger le personnage avec notre regard d’aujourd’hui tant cette époque apparaît éloignée de la nôtre. Il y a plutôt quelque chose d’éminemment dépaysant, voire d’exotique, chez cet homme qui au demeurant parlait assez mal notre langue, confondant les mots section et session, armistice et amnistie. À Gourgaud, il confiera : « Je suis Italien ou Toscan plutôt que Corse. » Les rares fois où il s’entretiendra avec son geôlier Hudson Lowe, il ne s’exprimera qu’en italien.
La part insaisissable de Napoléon apparaît de son vivant, physiquement j’entends. Mais elle me semble significative. De nombreux témoins, comme Bourienne, qui fut son compagnon à Brienne, puis son secrétaire, sont frappés par le fait qu’aucune peinture de Napoléon n’est ressemblante. Ils ne se l’expliquent pas. Quelque chose chez lui échappe à la description et à la classification.
RPP – Quel message de Napoléon pour notre temps ?
Jean-Paul Kauffmann – À un tel destin, faut-il trouver à tout prix un enseignement ? J’avoue que je suis assez versatile sur ce point. Victor Hugo disait qu’il est impossible de porter un jugement définitif sur Napoléon. Le personnage est innombrable, on peut puiser à sa guise dans ce destin. Au-delà de son œuvre, que l’on cite à juste raison – modernisation et unification de la France, Code civil, etc. –, je m’attarderai volontiers à plusieurs paradoxes. On ne peut mettre en doute la nature despotique du régime. L’Empire a traqué sans relâche ses opposants, muselé la presse, mais l’idée que le pouvoir absolu ne saurait s’exercer sans cruauté vaut-elle pour Napoléon ? Bien sûr, il y a le massacre de Jaffa, l’assassinat du duc d’Enghien, les atrocités commises en Espagne, le mépris pour la vie humaine, toute cette chair à canon pour la gloire d’un seul homme. Mais peut-on qualifier pour autant l’Empire de pouvoir sanguinaire ? Je ne le pense pas. Oui, il a aimé le pouvoir, il l’avoue et le revendique et, quand il précise : « C’est en artiste, moi, que je l’aime », on peut le croire. Je ne sais pas s’il a fait de sa vie un chef d’œuvre, on peut en discuter, mais il en a été en tout cas l’interprète le plus talentueux, il l’a « joué » comme un artiste. En même temps, il lui est arrivé de se dévaloriser. Il tiendra un propos très curieux après sa visite à l’île des Peupliers, chère à Jean-Jacques Rousseau : « L’avenir apprendra s’il n’eût pas mieux valu, pour le repos de la terre, que ni Rousseau, ni moi, n’eussions jamais existé. »
Ce que j’apprécie chez lui, c’est la lucidité, même si malheureusement elle vient après coup.
Le soldat de fortune sait qu’il est un aventurier ; au fond de lui, il a conscience que rien n’empêchera le désastre final. C’est la thèse de Jacques Bainville, l’homme de l’Action française, auteur d’une remarquable biographie de l’Empereur. Selon lui, Bonaparte est l’homme qui va très vite comprendre sa propre histoire, il en a soudain la révélation après Lodi – il utilise une très belle image, c’est comme s’il quittait la terre des mortels pour s’élever dans le ciel : « Je voyais déjà le monde fuir sous moi, comme si j’étais dans les airs » –, il s’avise alors que rien ne lui résiste, désormais tout est possible. Pendant un temps, il saura parfaitement dominer ce destin hors du commun, puis il va chuter comme Alexandre et comme tous les autres du fait de sa démesure et de son orgueil. À Sainte-Hélène, il analyse clairement cet hubris qui fut sa perte : « Je voyais clairement arriver l’heure décisive. L’étoile pâlissait, je sentais les rênes m’échapper, et je n’y pouvais rien ». L’adversité semble l’avoir rendu perspicace sur lui-même. Comme il l’avouera un jour à Montholon : « Le malheur a son bon côté, il ramène dans le vrai ; que de convictions il réduit à l’état d’erreur ! que de conséquences il transforme en rêves fantastiques ».
Est-ce que l’intelligence napoléonienne peut servir d’exemple pour les temps présents ? Nous avons beaucoup d’hommes politiques dont on vante l’intelligence. Cela suffit-il ? C’est sans doute l’imagination qui aujourd’hui fait défaut. Napoléon possédait au plus haut point cette invention et cette créativité. « L’imagination gouverne le monde », affirmait-il. Il ajoutait aussi que cette même imagination pouvait faire perdre les batailles. À l’époque de Napoléon, les « y a qu’à » et les « faudrait que » existaient bien sûr. Il leur disait : « Avez-vous des remèdes ? Donnez m’en. Vous n’en avez pas ? Taisez-vous ». Certaines de ses observations sont toujours d’actualité : « Le premier devoir du prince, sans doute, est de faire ce que veut le peuple, mais ce que veut le peuple n’est presque jamais ce qu’il dit ».
Jean-Paul Kauffmann
Journaliste, écrivain
Propos recueillis par Arnaud Benedetti