Dans nos campagnes, le silence est parfois plus assourdissant qu’en ville.
Derrière les paysages apaisants et les liens de proximité qu’on aime mettre en avant, se cache une réalité douloureuse et trop souvent ignorée : nos jeunes souffrent. Et beaucoup, en silence.
En France, la santé mentale des adolescents et jeunes adultes est déjà en crise : troubles anxieux en hausse, dépressions précoces, idées suicidaires qui se multiplient. Mais en milieu rural, cette crise prend une dimension plus grave encore.
Pourquoi cette aggravation ?
Parce qu’ici, l’accès aux soins spécialisés relève souvent du parcours du combattant. Les psychologues sont rares, les délais d’attente s’étendent sur des mois, et les centres médico-psychologiques se trouvent parfois à plus d’une heure de route.
Parce qu’ici, la stigmatisation est plus forte : dans une petite commune, on hésite à pousser la porte d’un cabinet, de peur que “tout le monde le sache”. Le « qu’en dira-t-on » freine encore plus les démarches.
Parce qu’ici, l’isolement est double : géographique, mais aussi social.
Des défis immenses pour nos jeunes
Nos jeunes ruraux doivent faire face à une accumulation de difficultés :
- Manque de débouchés professionnels et sentiment d’avenir bloqué
- La difficulté de se déplacer
- Pression scolaire ou économique plus forte quand les solutions sont limitées
- Accès réduit aux loisirs, à la culture et à l’ouverture sur le monde
- Impression persistante d’être “à l’écart” d’un pays qui avance ailleurs
Ces tensions pèsent lourd sur l’estime de soi. Certains décrochent du système scolaire ou du monde du travail. D’autres, malheureusement, basculent vers des gestes irréversibles.
Agir, c’est possible
Nous ne pouvons plus nous contenter de constater la situation. Agir n’est pas une option : c’est un devoir collectif.
Cela passe par :
- La multiplication d’espaces d’écoute dans les communes rurales (maisons des jeunes, permanences mobiles, lignes d’écoute dédiées)
- La formation des enseignants, éducateurs, associations et élus pour repérer les signaux d’alerte
- Des campagnes locales pour briser le tabou autour de la santé mentale
- Le développement de la téléconsultation, à condition d’assurer un accès internet de qualité partout
Un enjeu de vitalité territoriale
La santé mentale n’est pas un luxe : c’est un pilier de l’égalité des chances.
Prendre soin de nos jeunes, c’est investir dans la vie même de nos territoires. Si nous voulons que nos campagnes restent vivantes et attractives, nous devons commencer par protéger ceux qui en sont l’avenir.
Le temps n’est plus à l’attente. Le temps est à l’action.
Rosie Bordet
Cheffe d’entreprise
Adjointe au maire de Saint-Georges de Reintembault (Ille et Vilaine)