Les évènements qui secouent le Moyen-Orient imposent une adaptation permanente, tant les situations sont fluctuantes.
- Le 7 Octobre 2023, c’est l’attaque surprise du Hamas de Gaza contre la partie sud d’Israël avec un lourd bilan de 1.160 morts et la prise de 240 otages, entrainant une riposte énergique de l’armée israélienne.
- Le 17 Septembre 2024, le Hezbollah lance depuis le Liban des missiles sur le nord d’Israël. Tel Aviv répond par des prouesses techniques uniques et d’intenses bombardements visant l’organigramme du mouvement avec l’élimination de ses dirigeants, la destruction des infrastructures et des dépôts d’armes. La partie sud du pays, puis la banlieue de Beyrouth et la plaine de la Bekaa sont visées, avec des actions sur les aéroports de Damas et d’Alep.
- Le 2 Octobre2024, l’Iran ne reste pas inactif. Il se manifeste par l’envoi d’une pluie de missiles sur Israël, en soutien à ses affidés chiites du Hezbollah libanais et aux Houtis du Yémen.
Le Conseil de Sécurité à New-York est très préoccupé dans l’attente des ripostes annoncées de Tel Aviv pour répondre aux attaques de missiles iraniens. Les cibles privilégiées pourraient être :
- les sites nucléaires iraniens, avec la centrale de Bucheer construite par les Russes.
- Les infrastructures militaires du pays, notamment les pas de tir d’où sont partis les missiles.
- les champs pétrolifères.
Les menaces de bombardements israéliens, voire américains, inquiètent déjà. Elles ne seraient pas sans répercussions sur l’économie mondiale toujours très dépendante des hydrocarbures des pays producteurs du Moyen-Orient qui constituent 60% des réserves mondiales.
Le Yémen chiite allié de l’Iran tient le détroit du Bab el Mandeb. C’est une autre menace, d’abord sur les transports maritimes vers le canal de Suez, mais potentiellement sur les câbles sous-marins qui empruntent ce passage et qui sont un lien stratégique pour les liaisons internationales.
L’Iran est une vieille civilisation qui entend continuer à marquer l’histoire.
Aujourd’hui, le pays dispose d’une maitrise technologique certaine. Leurs chercheurs sont de grande valeur dans tous les domaines, dont celui de la recherche nucléaire, avec de réelles avancées.
Il s’est également doté d’un très opérationnel complexe militaro-industriel avec des produits de dernière génération. Sont notamment fabriqués des missiles, des drones utilisés en Ukraine ou des minis sous-marins particulièrement adaptés aux sabotages des câbles immergés de télécommunications.
Conscient des dangers qui pèsent actuellement sur le pays, l’Iran ne lésine pas dans ses provocations en déclenchant des salves de missiles contre Israël.
La riposte de Tel Aviv est attendue car elle lui permettrait d’atteindre un triple objectif, à savoir :
- apparaitre comme le seul défenseur des Palestiniens, vu l’absence de réactions significatives des autres pays musulmans et le silence quasi-total actuel des rues arabes, si promptes habituellement à se manifester.
- assumer sa position de cible privilégiée de l’aviation israélienne soutenue par le grand Satan américain et profiter de ces menaces pour faire appel au nationalisme des Iraniens autour du régime.
- attendre stoïquement cette dangereuse perspective pour se poser en martyrs. La martyrologie a toujours été propre aux Chiites depuis la bataille de Kerbala en 680 où Hassan et Houssain, petits- fils du Prophète Mohamad, ont été tués. Cette tragédie est commémorée tous les ans pendant la fête de l’Achoura avec les impressionnantes scènes de flagellations qui l’accompagnent.
Le Moyen-Orient demeure toujours une zone compliquée. Sa position stratégique et ses importantes ressources d’hydrocarbures montrent que tout ce qui peut troubler sa stabilité inquiète le monde.
Les grandes puissances de l’Est et de l’Ouest ne peuvent qu’être impliquées par son devenir.
Les Etats-Unis, inébranlable soutien d’Israël, sont omniprésents dans la zone, en permanence avec leur armada en Méditerranée, la Vème flotte à Bahrein, la base aérienne d’Al Udeid au Qatar et les unités à Djibouti à l’entrée du détroit du Bab el Mandeb et du Yémen des chiites Houtis.
La Russie, toujours concernée par la Syrie et un projet de base à Port Soudan sur les bords de la Mer Rouge, garde des relations privilégiées avec Téhéran.
Les Japonais, mais surtout les Chinois, sont solidement implantés à Djibouti, poste d’observation sur le trafic dans la Mer Rouge par où transite leur important commerce maritime.
La France, pour sa part, demeure à Djibouti mais également dans les Emirats Arabes Unis, en Irak et en Jordanie pour son aviation.
L’Italie y est également présente et des pourparlers sont actuellement en cours pour une implantation russe, turque et saoudienne.
Par sa position géostratégique, le non règlement de crises inhérentes à la zone, les oppositions religieuses entre chiites et sunnites, le Moyen-Orient fait et fera encore longtemps l’actualité.
La volonté inébranlable de Tel Aviv de profiter de la situation pour éradiquer les menaces palestiniennes de Gaza, du Liban, mais aussi de la très surveillée Cisjordanie, montre que les opérations en cours se poursuivront jusqu’à la fin.
Les Israéliens ne cherchent pas la paix. Leur but final est la sécurité.
Les Palestiniens, eux, restent avec leur problème.
De part et d’autre, les ressentiments demeurent
François Besson
Membre de l’Académie des Sciences d’Outre – Mer