80 % des personnes âgées souhaitent pouvoir rester vivre le plus longtemps possible chez elles. Mais très souvent les logements nécessitent d’être adaptés. L’Agence nationale de l’habitat encourage la réalisation de travaux d’amélioration et accorde des aides financières aux propriétaires occupants ayant des revenus modestes. Rencontre avec sa présidente, Nathalie Appéré.
Revue Politique et Parlementaire – Pouvez-vous nous présenter l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et ses missions ?
Nathalie Appéré – L’Agence nationale de l’habitat est un établissement public placé sous la tutelle des ministères en charge du Logement et de l’Habitat durable, du Budget et de l’Économie.
Notre mission est d’améliorer le parc de logements privés existants. L’Anah accorde des aides financières pour la réalisation de travaux sous conditions à des propriétaires occupants, bailleurs et copropriétés en difficulté.
Elle est partenaire des collectivités territoriales pour des opérations programmées (OPAH). Et opérateur de l’État dans la mise en œuvre de plans nationaux.
Les principaux axes d’intervention sont la lutte contre l’habitat indigne et très dégradé, le traitement des copropriétés en difficulté, la lutte contre la précarité énergétique et l’adaptation du logement aux besoins des personnes âgées ou handicapées.
Le budget annuel de l’Anah est de l’ordre de 500 millions d’euros.
RPP – La loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement privilégie le maintien à domicile des personnes âgées, mais cela nécessite adaptation et sécurisation du logement. Comment l’Anah sensibilise-t-elle les seniors et leur famille sur l’utilité d’effectuer des travaux ?
Nathalie Appéré – Pour sensibiliser les personnes âgées sur l’utilité d’effectuer les travaux, l’Anah s’appuie sur le guide « Mon chez moi avance avec moi ».
En mars 2015, l’Anah a publié et diffusé un guide à destination des personnes âgées qui souhaitent aménager leur logement. Élaboré avec l’aide d’ergothérapeutes, ce guide pratique livre des réponses claires, illustrées d’exemples concrets de travaux simples à faire réaliser dans chaque pièce du logement en fonction de la situation ou des besoins des ménages.
Grâce à des conseils, astuces, repères sur les coûts des travaux, les aides possibles, les contacts des organismes dédiés… ce guide donne l’essentiel des informations pour lancer un ménage dans un projet de travaux. Il peut également sensibiliser les aidants sur les travaux qui peuvent être réalisés pour améliorer le confort et la sécurité des personnes âgées dont ils s’occupent. Ce guide est téléchargeable sur le site de l’Anah (anah.fr).
RPP – Quel rôle l’Anah joue-t-elle auprès des propriétaires occupants et des propriétaires bailleurs qui souhaitent adapter leur logement et quelle(s) aide(s) leur accorde-t-elle ?
Nathalie Appéré – Le rôle de l’Anah est d’accompagner les propriétaires occupants ou bailleurs dans la réalisation de travaux d’adaptation. Pour cela, l’Anah apporte des conseils (via le guide mentionné ci-dessus) et octroie des aides pour financer l’ingénierie d’accompagnement et les travaux.
En ce qui concerne l’accompagnement du ménage, il s’agit d’une condition nécessaire à la réussite d’un projet. Cet accompagnement permet de définir le projet de travaux, d’assurer qu’il est en adéquation avec les besoins du ménage et d’effectuer le montage des dossiers de subvention pour le financement des travaux (aides de l’Anah et autres aides).
En secteur diffus (hors secteur programmé) l’aide est octroyée aux propriétaires et s’élève à 500 € environ par logement, en secteur programmé (OPAH (opération programmée d’amélioration de l’habitat) ou PIG (programme d’intérêt général)) mis en œuvre par une collectivité, l’aide est octroyée à la collectivité elle-même qui prend en charge le coût de l’accompagnement des ménages.
En ce qui concerne le financement des travaux, pour les propriétaires occupants, l’aide est conditionnée aux revenus des ménages. Pour les ménages modestes, l’aide s’élève à 35 % du montant des travaux et pour les propriétaires occupants très modestes, l’aide s’élève à 50 % du montant des travaux. Dans les deux cas, le montant des travaux est plafonné à 20 000 € HT.
Pour les propriétaires bailleurs, l’aide s’élève à 35 % du montant des travaux. Ce montant est plafonné à 750 € HT/m². Le recours au loyer maitrisé est préconisé.
RPP – Comment l’Anah accompagne t-elle les collectivités locales qui envisagent de développer un parc de logements adaptés aux personnes âgées ?
Nathalie Appéré – Pour les collectivités qui souhaitent développer un parc existant de logements adaptés. l’Anah leur octroie des subventions pour la mise en œuvre d’opérations programmées (OPAH ou PIG) d’une durée de trois à cinq ans soit dans le cadre d’un projet de territoire (projet de requalification urbaine d’un quartier ancien dégradé ou projet de revitalisation rurale), soit dans le cadre d’un projet à visée sociale ou technique pour répondre aux objectifs du PDALHPD (plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées) par exemple (PIG à l’échelle d’un département).
Ces aides permettent de financer des équipes pluridisciplinaires chargées notamment d’accompagner les ménages tout au long du processus d’adaptation du logement (repérage, information ou sensibilisation sur les aides existantes, diagnostic du logement et de la situation de la personne, préconisations de travaux, aide à la demande de devis, aide à la sélection des entreprises, montant des dossiers de subventions). Ces opérations programmées peuvent également inclure des actions de lutte contre l’habitat indigne, de lutte contre la précarité énergétique par exemple.
L’aide à l’ingénierie des opérations programmées s’élève entre 35 et 50 % du montant de l’ingénierie pendant la durée de l’opération. Le montant de l’ingénierie est plafonné à 250 000 € par an. À cette aide, s’ajoutent des primes complémentaires octroyées en fonction des résultats.
Par ailleurs, l’Anah travaille actuellement à la publication d’un guide à destination des collectivités sur la mise en œuvre d’une politique locale d’adaptation des logements (de l’observation jusqu’à la mise en œuvre de partenariats).
RPP – Comment l’Anah travaille-t-elle avec les autres acteurs publics (conseils départementaux et régionaux, intercommunalités, Cnav, etc.) mobilisés en faveur du maintien des personnes âgées à domicile ?
Nathalie Appéré – Avec les collectivités locales, comme indiqué précédemment, nous les accompagnons dans la mise en œuvre de leurs politiques. Pour chaque opération programmée, l’Anah signe un contrat avec la collectivité locale maître d’ouvrage de l’opération, contrat dans lequel la collectivité s’engage sur les actions qu’elle va mener au titre de l’adaptation des logements et l’Anah s’engage à accompagner financièrement l’opération.
Avec les acteurs nationaux du monde du vieillissement, nous avons établi des partenariats spécifiques.
Avec la Cnav, une convention signée en 2010 et un rapport interministériel remis en 2013 à la ministre en charge du Logement et à la ministre déléguée aux Personnes âgées ont permis d’établir un partenariat autour de trois axes de travail :
- L’information et la sensibilisation des personnes âgées et aidants : notamment avec la publication d’un guide grand public de sensibilisation aux travaux d’autonomie ;
- La simplification du parcours du demandeur : avec la mise en place d’un diagnostic du logement commun à l’Anah et à la Cnav dans le cadre d’un dossier de demande d’aide unifié ;
- L’égalité de traitement territorial : promouvoir les opérations programmées avec un volet autonomie.
Par ailleurs, il est apparu nécessaire de renforcer le partenariat de l’Agence avec les trois principaux régimes de retraite : la Cnav pour le régime général, la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole et le Régime social des indépendants. Le 10 juillet 2015, l’Anah et les trois régimes ont signé, pour une durée de trois ans, une convention nationale de partenariat qui a pour objectif l’anticipation des conséquences du vieillissement en répondant aux besoins des personnes âgées qui désirent rester vivre à domicile, dans de bonnes conditions et le plus longtemps possible.
Ce partenariat repose sur le principe de complémentarité. Cette collaboration permettra de mieux articuler les actions et démarches dans les domaines de l’anticipation et de la prévention de la perte d’autonomie, en ciblant prioritairement des actions visant la préservation de l’autonomie à domicile ainsi qu’une meilleure coordination locale des dispositifs de communication et de financement.
Les actions en matière de partenariat se sont poursuivies le 5 juillet 2016 puisque l’Anah a signé une nouvelle convention multipartenariale avec l’État, la Cnav, la CNSA, la FFB, la CAPEB, l’USH et Soliha notamment.
Cette convention est structurée autour de quatre objectifs :
- Amplifier l’effort financier pour l’adaptation des logements du parc privé ;
- Accélérer la mobilisation des bailleurs sociaux dans le parc public ;
- Améliorer les compétences des entreprises et artisans du bâtiment ;
- Améliorer le parcours de tout citoyen souhaitant adapter son logement.
Ainsi, l’ensemble des acteurs de la chaîne d’intervention pour l’adaptation des logements sont réunis et se mobilisent pour faciliter le parcours de la personne âgée dans ses démarches.
RPP – L’Anah est membre de droit des conférences des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie qui se mettent en placent dans chaque département. Quels sont le rôle et l’apport de l’Anah à ses conférences ?
Nathalie Appéré – La conférence des financeurs est une instance de coordination des financements locaux visant à développer les politiques de prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées pour :
- Établir un diagnostic des besoins des personnes âgées de 60 ans et plus résidant sur le territoire départemental ;
- Recenser les initiatives locales ;
- Définir un programme coordonné de financement des actions individuelles et collectives de prévention, en complément des prestations légales ou réglementaires.
C’est donc un lieu de coordination institutionnelle. À ce titre, l’Anah participe à la conférence en apportant sa connaissance sur les besoins des ménages et en expliquant son mode d’intervention : ses aides pour l’installation d’équipements spécifiques dans les logements des personnes âgées et sur les modalités de financement afin de contribuer à une meilleure coordination de l’action avec l’ensemble des partenaires.
Nathalie Appéré
Présidente de l’Agence nationale de l’habitat
Députée-maire de Rennes
Propos recueillis par Florence Delivertoux