Du 23 au 26 mai, les citoyens des 28 pays de l’Union européenne ont élus leurs représentants au Parlement européen. Deux spécialistes, Gérard Le Gall, analyste politique, et Bruno Cautrès, chercheur CNRS au Cevipof et enseignant à Sciences Po, décryptent pour la Revue Politique et Parlementaire le scrutin européen.
Revue Politique et Parlementaire – Au regard des résultats du scrutin du 26 mai (montée des Verts, effondrement des Républicains, participation en hausse) les sondages ont-ils « buggé » ?
Bruno Cautrès – L’abstention est toujours difficile à mesurer correctement par le biais des sondages. C’est la raison pour laquelle les instituts de sondages ne mesurent plus l’abstention par une question aux réponses binaires. Depuis plusieurs années, on mesure plutôt la probabilité de participer en utilisant une échelle codée de 0 à 10. Le niveau de participation est ainsi estimé à partir des seuls répondants qui donnent la note 10 à cette échelle. Prenons l’exemple de l’enquête électorale du Cevipof, réalisée en partenariat avec Le Monde, La Fondation Jean Jaurès et l’institut Ipsos : nous avons publié quelques jours avant les européennes la dernière vague de notre enquête qui indiquait que 42 % des personnes interrogées pouvaient être qualifiées de « certaines de participer » (note de 10 sur l’échelle de probabilité de voter). En appliquant l’intervalle de confiance (la marge d’erreur) à cette estimation, nous avons publié que 42 à 45 % des Français pourraient participer au scrutin du 26 mai. Si la participation s’établit finalement à 50,12 %, il faut remarquer que les suffrages exprimés (les votants moins les votes blancs et nuls) ne s’établissent qu’à 47,85 %, une donnée qui n’est pas si éloignée de la limite supérieure de notre intervalle de confiance.
Enfin, les sondages avaient parfaitement enregistré que l’intérêt pour la campagne électorale et l’intention de participer allaient croissant dans les deux ou trois dernières semaines avant le 26 mai.
En revanche, le problème est plus sérieux avec la sous-estimation du vote Jadot et la sur-estimation du vote Bellamy. Ce qui est le plus surprenant au plan statistique est le fait que cette erreur d’estimation ait été à peu près constante dans le temps et les différentes enquêtes des différents instituts. L’erreur statistique est une donnée de base de l’estimation par sondage mais normalement l’erreur est aléatoire, elle fluctue aléatoirement autour de la « vraie valeur », celle que l’on observe le jour de l’élection. Si l’erreur n’est pas chaotique et aléatoire c’est qu’un problème de mesure ou d’échantillon est répliqué à chaque fois que l’on observe. Habituellement, deux explications peuvent être avancées : la première concerne les échantillons ou les bases de données à partir desquelles les échantillons sont tirés. Mais cette explication bute sur un problème : les électorats écologistes et de centre-droit ne sont pas ceux qui pourraient venir à être sous-représentés dans les bases de données. Il s’agit d’électorats à fort capital culturel, social et économique, des populations habituellement assez « captives » pour répondre à des enquêtes d’opinions sur la politique. L’autre explication tient peut-être aux techniques et choix qui sont faits au moment des « redressements » des échantillons : s’il est tout à fait naturel et normal de « redresser » un échantillon, les données de référence qui servent à effectuer ces « redressements » peuvent avoir un effet important. Enfin, il ne faut pas négliger qu’une forte incertitude sur leur choix final était parfaitement enregistrée par les sondages en ce qui concerne notamment les électorats potentiels du centre-droit et des écologistes. Dans l’enquête du Cevipof publiée quelques jours avant le scrutin, seuls 63 % des Français indiquaient que leur intention de vote était définitive. Ce pourcentage était de 65 % chez les électeurs potentiels de la liste LR et de 39 % chez ceux de la liste EELV.
Gérard Le Gall – L’histoire des soirées électorales reste à écrire ! Depuis l’affirmation des sondages d’opinion au milieu des années 60, elle est jalonnée d’approximations plus ou moins fortes entre les ultimes intentions de vote et le verdict des urnes. Sans trop remonter dans le temps, on évoquera la présidentielle de 1995 et, naturellement, le « 21 avril » 2002 avec, dans les deux cas, la question de l’ordre d’arrivée au premier tour. Il reste que sur la longue durée, la production sondagière est en France de bonne qualité.
Pour ma part, je juge inappropriée la notion de « bug » même s’il est évident que des écarts de 4 à 5 points pour les listes LR et EELV interrogent. Avant d’esquisser une proposition, constatons que l’ordre d’arrivée et les pourcentages des deux premières listes, après de nombreux chassés-croisés, a été confirmé à l’aune des marges d’erreur comme la poussée de la participation des derniers jours, idem pour un ultime mouvement favorable à l’écologie politique. Notons que, malgré l’importance des écarts, point de polémiques dans les médias.
Pour être honnête, seuls les responsables des instituts pourraient nous instruire à propos des « souvenirs de votes » sur tel ou tel candidat au premier tour de 2017. Ainsi, retrouve-t-on le débat récurrent autour de la question des pondérations. Gageons que 2019 va, désormais, beaucoup servir à tous les contempteurs des sondages et aux futurs candidats en difficulté !
RPP – Quels principaux enseignements peut-on tirer du scrutin de 2019 au regard des précédentes consultations européennes en France et en Europe ?
Gérard Le Gall – Rappelons qu’il a fallu attendre 22 ans après le Traité de Rome (1957) pour voir élu au suffrage universel direct un Parlement européen. Rappelons encore que depuis 1979, contrairement au traité, chaque pays de l’UE élit ses représentants selon des modalités propres respectant le plus souvent toutes les potentialités de la proportionnelle.
L’édition 2019 s’inscrit moins dans la continuité que dans le changement.
Pour exemple une continuité au regard de l’abstention toujours puissante sans être pour autant une défiance, mais bien plus une indifférence. Un changement dans une continuité s’illustre avec force dans la confirmation d’un nouvel ordre électoral en France, comme en Europe. La restructuration du système des partis en 2017 poursuit ses effets dévastateurs, comme jadis en 1984 la nouvelle phase de déclin du PCF (11 ,2 %) et l’émergence visible du FN (11,0 %), puis l’affirmation des Verts en 1989 (10,7 %), des turbulences au sein des droites durant la décennie 90, le retour des écologistes en 2009 (16,3 %). Autre continuité à l’échelle européenne depuis 1979, malgré les élargissements et la montée du nationalisme, le leadership des deux principales forces le PPE et le PSE demeure.
A contrario un fort changement se lit en 2019 sur quelques aspects essentiels. On ne perçoit pas en France de véritable « vote sanction » à l’endroit des gouvernants contrairement à 2014. Il semble aussi que pour la première fois, en fin de campagne, l’enjeu européen ait pris l’ascendant sur la dimension nationale dans les motivations du vote. Sans doute faut-il y voir l’entrée en campagne du président Macron. Enfin, en France comme dans les autres pays de l’UE, on soulignera la montée en puissance dans le débat public d’enjeux européens comme l’environnement, les migrations, le terrorisme…
Bruno Cautrès – L’augmentation de la participation est importante en France et dans de nombreux pays européens. Ce n’est pas la première fois que la participation augmente aux élections européennes en France par rapport à l’élection précédente, mais cela n’avait jamais été dans une telle mesure. Si l’on peut déceler ici une progressive incorporation et pénétration de l’enjeu européen dans nos vies démocratiques, il n’en reste pas moins vrai que seuls 50 % des Français ont participé. Cette donnée s’inscrit dans une tendance plus large : en dehors de la présidentielle, de nombreux scrutins en France ont vu la participation s’établir à des niveaux faibles ou nettement moins importants qu’à la présidentielle.
Mais le résultat le plus spectaculaire des européennes en France est le double effondrement de la liste LR et de la liste de la France insoumise.
Ce double effondrement survient alors même que ces deux formations avaient misé sur des têtes de liste jeunes et nouvelles en politique. En aspirant l’électorat du centre-droit (et certains de ses bastions sociologiques comme les travailleurs indépendants ou les catholiques), la République en marche s’inscrit de plus en plus comme une nouvelle synthèse « néo-giscardienne » : libérale, centriste, européenne et modernisatrice. Paradoxalement, cette nouvelle synthèse devrait à terme dégager un espace politique potentiel pour la gauche, à condition que celle-ci sache renouveler son agenda et ses leaders.
En faisant le choix de Raphaël Glucksmann, le PS a fait un pas dans cette direction mais tout reste à faire. L’effondrement de la liste de la France insoumise marque un très grave échec pour Jean-Luc Mélenchon qui n’est pas parvenu à capitaliser sur son très bon score de la présidentielle. Plus que jamais la question de la division à gauche et d’un horizon d’une « nouvelle union des gauches » va se poser. La gauche française est divisée sur l’économie et sur l’Europe, comment peut-elle inventer une nouvelle alliance ou synthèse ? Après tout, les logiques de différenciation n’étaient pas plus faibles entre le milieu des années 1960 et le début des années 1980.
Pour la droite, l’heure des choix dramatiques approche : les très importantes différences entre les sociologies des électorats LR et RN rendent presque impossible « l’union des droites ». Ne les réunissent, et encore, que les questions d’identité nationale ou de restauration de contrôle des frontières.
RPP – Par-delà la récurrente confirmation de la sociologie de l’abstentionnisme, quelle lecture strictement politique peut-on faire de la faible participation en France et en Europe ?
Gérard Le Gall – Avant de répondre à la question, permettez-moi de manifester une forme d’humeur en raison d’une présentation euphorisante du surplus de participation qui passe à 49,9 % contre 42,6 % en 2014 et voit un retour à… 1989 ! Pour un peu la France aurait soudain manifesté un vif intérêt pour la chose européenne et la campagne électorale et aurait livré une forme de satisfecit au travail de la Commission et des 28 chefs de l’État de l’UE. La vérité des chiffres est plus cruelle quand dans 8 régions métropolitaines sur 13 et dans 42 départements sur 96 plus de la moitié des électeurs ne se sont pas exprimés malgré une offre record, 34 listes ! Observons de surcroît, comme par le passé, des pourcentages d’abstention accablants dans les quartiers populaires des métropoles et des villes moyennes. Et de forts indices d’indifférence à l’Europe chez les plus jeunes de nos compatriotes. Malgré ces notables réserves qui montrent le chemin à parcourir pour démocratiser l’Europe et réconcilier tous les citoyens avec elle, on voudra retenir la bonne nouvelle de l’élan participatif en France comme dans la plupart des 28 pays.
Pour la France, l’intensification du désir de voter dans la dernière semaine paraît moins liée à un intérêt accru pour la campagne, contrairement à la dernière présidentielle, aux débats télévisés peu regardés, que par l’entrée fracassante du président de la République invitant à faire le « bon choix » en France pour l’Europe. Sans oublier la forte politisation du dernier semestre liée à l’omniprésence des thèmes véhiculés par les « gilets jaunes » et le Grand débat. On peut aussi se réjouir en Europe du regain d’intérêt pour les questions géopolitiques en regard du retrait des USA, de l’affirmation de la Chine sur notre continent, des positions russes en matière diplomatique et de la question majeure du terrorisme. Sans oublier les obsédantes questions des migrants et des périls environnementaux. 2019 livre peut-être ici un signe d’une affirmation d’une conscience européenne.
RPP – La situation électorale de la gauche en France s’explique t-elle d’abord par ses divisions ou par sa faible capacité à répondre aux demandes de l’électorat ?
Bruno Cautrès – La gauche en France est historiquement divisée par des questions idéologiques et son rapport à la gestion de l’économie de marché « capitaliste ». Son unité s’est faite sur le combat pour l’égalité et la justice redistributive, dans une synthèse néo-keynésienne et social-démocrate qui a en même temps provoqué de la division et des tensions. L’intégration de la France dans l’économie-monde et dans les logiques européennes a accentué ces tensions ; au cours des quinze ou vingt dernières années, la gauche a pu en partie gérer ces tensions et divisions en étant très solidement « cimentée » par les questions sociétales. Être de gauche ce n’est pas seulement être en faveur de la justice sociale, c’est aussi être culturellement tolérant et largement favorable aux valeurs que l’on qualifie de post-matérialistes. Mais la période qui s’est ouverte par le crise de 2007/2008 a exacerbé la demande politique au plan national. Le thème des frontières est revenu sur le devant de la scène et les inquiétudes dans le domaine de l’immigration ont pris davantage d’importance.
Gérard Le Gall – Pour bien comprendre l’état actuel de la gauche, on doit remonter à 2012 quand, victorieuse, elle sort divisée de la présidentielle. Elle le sera plus encore tout au long du quinquennat. En 2017, une gauche-radicale, la France insoumise, s’affirme dans le pays et supplante, pour la première fois depuis quarante ans, le socialisme réformiste. Dans la perspective des européennes, les appels à l’union venant du PS et du PCF, contraires à la tradition pluraliste de la gauche au tour unique depuis 1979, pouvaient paraître incongrus dans un scrutin proportionnel et plus encore en regard des divergences sur l’Europe.
La France insoumise défiant le clivage gauche-droite depuis 2012 va connaître un lourd échec (6,3 %). Elle le doit à sa volonté de changer les traités européens, à quelques ambiguïtés thématiques et à la forme d’expression de son leader. Surmontant le risque d’un score fatal inférieur à 5 %, la liste PS-Place publique-Nouvelle Donne conduite, pour la première fois, par un non-socialiste, Raphaël Glucksmann, paraît rassurée sans faire mieux qu’à la présidentielle de 2017 (6,2 %). Côté Génération.s de Benoît Hamon, plein d’espoir dans les vertus d’un discours novateur sur le programme et d’une liste européanisée, l’échec est patent (3,3 %) contrairement à EELV autre tenant de la ligne autonome (13,5 %). Pour sa part, le PCF, soucieux d’affirmation, échoue malgré de bonnes prestations de son candidat (2,5 %).
Au soir du 26 mai, la gauche non-écologique va découvrir à travers la cartographie un paysage dévasté.
Voici peu la géographie électorale, spécialité française, distinguait les « fiefs » et les « terres de mission ». Aujourd’hui, il faudrait le plus souvent évoquer des « traces » électorales. Ainsi, FI ne passe la barre des 10 % dans aucune région, une seule fois au niveau départemental (Ariège, 10,8 %). Le seuil des 8 % n’est franchi que dans 8 départements. Le PS réussit plus de 10 % dans les Landes, dépasse 8 % dans 15 cas et compte 20 départements avec moins de 5 % dont le Pas-de-Calais (4,8 %) et les trois départements de l’ex-Picardie. Au niveau des villes dirigées par un édile socialiste, on note des scores supérieurs à la moyenne nationale du PS. Au total, la gauche non-écologiste n’a pu faire face au nouvel ordre du monde au plan social, économique, sociétal et régalien – elle paraît subir, incapable d’offrir une véritable alternative crédible.
RPP – Que pensez vous de l’analyse post-électorale de Jacques Julliard sur l’avenir de la gauche formulée, le 3 juin dernier dans son carnet mensuel du
Figaro, sous le titre « La gauche : battue et remise en selle » ?
Gérard Le Gall – De la lecture du carnet de l’historien, dont je partage souvent les analyses, je retiens l’hommage à Simone Weil, la philosophe, plus qu’à ses intuitions électorales. Sans questionner ici ses considérations autour du « vote refuge » ou du « vote utile », à mes yeux double manifestation de rationnalité consubstantielle au jeu politique en démocratie, plus encore aujourd’hui qu’hier, je m’interroge, ni sur le fait patent « que la gauche est battue », ni sur une possible « remontée en selle », ni sur un « retour dans le jeu », mais sur la temporalité de la vision et sur l’incarnation du cavalier ! Prenons conscience que, même avec l’accélération de l’histoire, il faudra beaucoup de temps à la gauche pour effacer ou enjoliver l’image très négative aux yeux de l’opinion du précédent quinquennat. Idem pour un PS aujourd’hui dans les bas fonds de la popularité pour retrouver son statut d’antan face à une FI convalescente mais pas encore morte et à une écologie politique, au score peut-être flatteur, en proie aux démons d’une nouvelle puissance et à l’affirmation urbi et orbi de vérités jusqu’alors jamais pleinement exprimées. Quant à la convocation pour 2022 de l’ex-président Hollande, s’il vend « beaucoup de livres » il stagne à un moyen ou bas niveau dans les « cotes d’avenir » ou de « bonne opinion », contrairement à son prédécesseur Nicolas Sarkozy. Aussi, invitons l’historien Jacques Julliard, grand spécialiste de la gauche, à nous aider à mesurer le risque d’un déclin historique du Parti socialiste après ceux avérés du Parti radical puis du Parti communiste.
RPP – Comment peut-on apprécier le score de la liste Renaissance soutenue par le président de la République ?
Bruno Cautrès – Contrairement à de nombreux commentaires qui ont été faits, je ne pense pas que ce résultat soit très spectaculaire. Il faut d’abord redire ici, comme l’a d’ailleurs très vite reconnu Édouard Philippe, que lorsque l’on arrive en seconde position d’une élection c’est qu’on l’a perdue. Mais surtout, il s’agissait d’une liste LaREM-MoDem-Agir. Or, aux dernières européennes de 2014, le MoDem (alors allié à l’UDI) avait
réalisé presque 10 % des exprimés. On aurait donc pu s’attendre à ce que la liste de LaREM totalise près de 30 % des voix. Par ailleurs, l’implication directe, explicite et permanente du président de la République en faveur de la liste emmenée par Nathalie Loiseau aurait pu conduire à un meilleur résultat.
La liste soutenue de manière directe par le président de la République a donc été battue, même si c’est par moins d’un point, par un jeune inconnu de 23 ans…
Si le résultat honorable de la liste de LaREM, permet à Emmanuel Macron de sauver l’essentiel et de pouvoir peser comme il le souhaite au niveau européen, la crise démocratie et sociale spectaculaire que nous avons vécue au cours des derniers mois en France, n’est pas terminée et le résultat des européennes ne laisse pas entrevoir un soutien massif des Français à l’étape 2 du mandat d’Emmanuel Macron.
Gérard Le Gall – Contrairement aux autres listes en compétition, l’appréciation nécessairement comparative dans le temps est chose plus que délicate dans la mesure où LaREM n’existait pas avant 2017. Le MoDem-UDI présentait des listes en 2014 dans les 7 euro-régions et réunissait 9,9 % des suffrages. Dès lors, comme par défaut, une comparaison avec le premier tour de la présidentielle de 2017 s’impose mais, à mes yeux, avec beaucoup de prudence entre une élection majeure pour le peuple français, à forte participation et une consultation de « second rang » avec une très forte abstention. Cette fois, contrairement au 23 avril 2017, le FN devenu RN conquiert la première place (23,31 %) et devance la liste du président de 205 213 voix, soit 22,41 %. Cet échec du pari présidentiel, fort risqué, peut-il néanmoins être interprété, dans une élection sans enjeu direct de qualification ou de désignation, en défaite ? Le faible écart donne en partie la réponse. Il convient de rappeler un contexte d’impopularité présidentielle qui pouvait prédisposer à un fort « vote sanction ». Dès lors ne décrocher que de 1,6 point par rapport à la présidentielle peut relever de la performance. Cependant, point de mystère, les études d’opinion comme la lecture des résultats département par département, ville par ville, vont illustrer ce quasi équilibre national par un double phénomène, plus ou moins compensatoire, d’un départ ou d’un retour vers la gauche, surtout écologiste, et un sensible apport de la droite libérale pas nécessairement bourgeoise.
RPP – Comment interpréter le faible résultat de la liste de la droite parlementaire menée par François-Xavier Bellamy ?
Gérard Le Gall – Le score de la liste Union de la droite et du centre soutenue par Les Républicains est la surprise absolue de ce scrutin. Jamais depuis 1979 les héritiers successifs du gaullisme et d’une partie du centre (UMP) jusqu’au parti républicain n’avaient rassemblé aussi peu de suffrages, 1 920 530 électeurs (8,48 % des suffrages exprimés). C’est deux fois moins que lors de la primaire de la droite en vue de désigner son candidat pour 2017. Parmi les « contreperformances » du passé, rappelons que Chirac concurrencé par Veil (24,7 %) rassemblait en 1979 16,1 %, Sarkozy (12,5 %) en 1999 était concurrencé par Pasqua (13,1 %) et par Bayrou (9,2 %). Cette fois, point de véritable concurrence directe, n’était celle de Dupont-Aignan (3,5 %), Lagarde (2,5 %), Asselineau (1,2 %), voire de Philippot (0,6 %).
La sociologie de l’électorat Bellamy reproduit en modèle très réduit celle de la droite parlementaire avec des faiblesses chez les personnes âgées, les catégories supérieures, les milieux populaires et chez les catholiques pratiquants préférant nettement la liste du Président. Il faut désormais une lecture très fine de la cartographie électorale pour retrouver du relief dans les ex-bastions de la droite. L’explication de cet échec historique prendra nécessairement beaucoup de temps. On peut néanmoins esquisser quelques hypothèses de réflexion.
Si la personne de François-Xavier Bellamy n’apparaît pas en cause, son choix par un Laurent Wauquiez impopulaire contenait en lui-même les prémices d’un score médiocre. Cette préférence pour un intellectuel, aux idées personnelles souvent au rebours de l’idéologie dominante, comme de celle d’une fraction sans doute majoritaire de la droite républicaine sur les questions de société, comportait un risque majeur.
De fait, le résultat final de LR s’inscrit dans la lignée des deux échecs présidentiels de 2012 et de 2017.
Il se comprend en résonnance avec une crise stratégique plus ou moins explicite, doublée d’une crise programmatique après le soutien du drastique programme économique de Fillon largement soutenu à la primaire puis amendé dès les législatives, comme autour de fractures idéologiques sur beaucoup de questions sociétales. Au cours de la campagne, une vision claire de l’Europe n’est pas apparue. On n’oubliera pas aussi la crise morale, qui sera réactivée lors du prochain procès de François Fillon comme de nombreuses affaires UMP qui taraudent aujourd’hui LR. Voici, outre la forte séduction exercée par Macron sur une partie de l’électorat du PR, quelques considérations susceptibles d’éclairer la double fuite de suffrages vers LaREM, le RN et l’abstention.
Bruno Cautrès – Les Républicains ne parviennent pas à se remettre de l’échec politique et moral de François Fillon en 2017. Le traumatisme a été très important parmi les militants, les sympathisants et les électeurs ; le sentiment que leur famille politique n’a pas su être au rendez-vous d’une élection imperdable domine toujours leur analyse de la situation politique dans leur camp. Cet électorat a été en partie attiré après la présidentielle par le soutien à Emmanuel Macron : le choix d’Édouard Philippe comme Premier ministre et l’entrée au gouvernement de poids lourds venant des Républicains (sur les questions économiques et budgétaires) a envoyé des signaux très importants à l’électorat du centre-droit. La gestion de la crise des « gilets jaunes » par Emmanuel Macron, avec un fort prisme sur la question de l’ordre public, a envoyé également d’autres signaux forts à cet électorat très sensible au respect de « la loi et l’ordre ». Emmanuel Macron avait également envoyé de nombreux signes aux catholiques depuis le début de son mandat. Dans ce contexte, le choix de François-Xavier Bellamy comme tête de liste LR correspondait aussi à l’espace politique restant aux LR une fois les questions économiques largement préemptées par Emmanuel Macron auprès de l’électorat de centre-droit. Si le jeune philosophe a réalisé une campagne considérée comme intéressante par tous les analystes, notamment car il a su imposer son style nouveau, il ne pouvait sans doute pas grand-chose contre les tendances lourdes qui ont fait basculer vers LaREM de nombreux électeurs LR. En investissant moins les questions économiques que les questions théoriques sur l’identité, les LR ont sans doute fait une erreur importante.
RPP – Le résultat de la liste EELV s’inscrit-il dans la norme des précédents scrutins européens ?
Bruno Cautrès – Le bon résultat de la liste EELV est en fait intermédiaire entre leur résultat de 2014 et celui de 2009 lorsque les listes écologistes (avec Daniel Cohn-Bendit) avaient fait un peu plus de 16 % et surtout talonné celle du PS. Si la thématique du climat et de l’écologie a été incontestablement une donnée importante de ces européennes en France et en Europe, il ne faut pas non plus en tirer trop vite de grandes conclusions : EELV, en tant que parti politique, est une machine faible. Le nombre d’adhérents se situe sous les 10 000 dans le meilleur des cas. Par ailleurs, les écologistes réalisent souvent de bons scores aux européennes puis s’effondrent aux élections nationales suivantes. En revanche, rarement l’écologie politique aura eu comme aujourd’hui une « structure d’opportunité » aussi favorable pour devenir un acteur stratégique des recompositions politiques en cours. Mais les écologistes devront à terme choisir leurs alliés dans la perspective des élections municipales puis régionales et ces choix pèseront de tout leur poids au moment de la prochaine présidentielle.
Gérard Le Gall – Le score de la liste EELV est, avec celui de LR, la surprise du scrutin. Confirmant son statut de formation dotée de la meilleure image, elle parvient à se hisser au troisième rang avec 3 052 406 électeurs et 13,47 % des suffrages exprimés, loin devant ses concurrents de gauche mais aussi loin derrière les listes LaREM-MoDem-Agir et le RN. Cette surprise fut lente à se dessiner durant la campagne, mais on pouvait sentir au fil des mois une volonté chez Yannick Jadot de faire turbuler le système en se référant à un nouvel ordre de valeurs afin de construire un leadership idéologique. S’inspirant des Grünen allemands plus pragmatiques, apparemment ses maîtres à penser et à agir, il a pu imposer à sa base une ligne autonome par rapport à tous. Il convient cependant de mesurer la performance électorale à l’aune de l’impératif écologique qui s’impose désormais partout et à tous.
L’écologie politique est en effet coutumière, entre périodes normales, de fulgurances électorales comme en 1989, 1992-1993 et plus récemment 2009, parfois sans lendemain. Par-delà les vicissitudes électorales, la famille écologique conserve au fil des décennies ses traits sociologiques : un vote urbain, un vote fortement corrélé au diplôme. Toutefois si EELV a obtenu chez les jeunes des pourcentages sensiblement plus élevés que sa moyenne nationale et que ses concurrents, on aurait tort d’évoquer un irrésistible élan de la jeunesse qui, rappelons le, a beaucoup moins participé que ses aînés. Le succès écologiste peut se lire aussi dans une géographie électorale qui confirme des traditions. La liste passe le seuil des 15 % dans 4 régions : Bretagne, Pays de la Loire, Corse avec l’appoint de régionalistes et Auvergne-Rhône-Alpes ainsi que dans 18 départements. L’écart de 3 points avec le score national de 2009 – sans compter, à l’époque, les 3,7 % d’écologistes indépendants, supérieurs à la liste de 2019 Urgence écologie (1,8 %) – se traduit par une forte décote géograhique plus ou moins intense selon les régions.
Le camp écologiste est aujourd’hui à un carrefour.
Son attitude post-électorale, empreinte de grandes ambitions, (voir le journal Le Monde du 6 juin 2019 : « Nous voulons conquérir et exercer le pouvoir ») paraît confirmer, voire amplifier, sa volonté d’autonomie. Pour être à la hauteur de cette ambition, les écologistes devront, rapidement, accomplir une mue considérable de leur culture politique et connaître, dans la perspective de la conquête du pouvoir, le choc d’un nécessaire tournant réaliste.
RPP – La confirmation du vote Rassemblement national par rapport à celui du Front national en 2014 est-il, selon vous, le signe d’une progression ou simplement d’une consolidation du « populisme » en France au cours de la dernière décennie ?
Gérard Le Gall – La victoire du Rassemblement national, qui a pu apparaître comme une revanche de 2017, un effacement du calamiteux face à face de l’entre-deux tours avec Emmanuel Macron, une assurance d’être le premier parti de France et dès lors le premier parti d’opposition, mérite expertise.
En toute hypothèse, une revanche de 2017 ne pourrait s’accomplir qu’en 2022. Quant à l’effacement d’une piètre image de Marine Le Pen née du débat qui portait sur des interrogations autour d’une incarnation de la fonction suprême et d’une crédibilité gouvernementale notamment économique, 2019 apporte peu d’éléments nouveaux, malgré un renoncement tardif à supprimer l’euro. Si le statut de premier parti d’opposition doit, plus que jamais, lui être reconnu, sans doute faut-il attendre 2022 – présidentielle et législatives – pour décerner un trophée de premier parti de France.
En vérité, pour apprécier lucidement grandeur nature l’actuelle situation du RN et dissiper des interprétations hâtives, convient-il de pratiquer un retour en arrière. N’en déplaise à ceux qui érigent Macron en divine providence pour le RN et réciproquement, la grande période électorale frontiste est 2012-2017. Des preuves ? 24,9 % en 2014 aux européennes, 25,3 % en 2015 aux départementales, mieux encore, la même année, aux régionales 27,7 % quand le FN rassemble 6 018 904 voix, soit 700 000 voix de plus qu’en 2019 ! Et à la fin du précédent quinquennat : 21,3 % le 26 avril et 33,9 % le 7 mai 2017.
Ce faisceau de rappels électoraux, avec précisons le un taux de participation aux régionales semblable à celui de 2019 et quasi semblable aux départementales 2015, montre que l’édition 2019 n’est pas la meilleure implantation du RN. Un succès, la première place, peut-être aussi un trompe l’œil, comme la victoire de l’UMP aux européennes en 2009. Il peut également masquer des stagnations ou des reculs entre deux rendez-vous du même type. Ainsi, on retiendra d’une comparaison rigoureuse entre les performances lors des dernières européennes 24,9 % en 2014 et 23,3 % en 2019 un recul, parfois sensible, dans 9 régions sur 13 et dans 60 départements sur 96. Aussi inclinerais-je vers une stabilisation à haut niveau avec une bonne reproduction électorale d’une élection l’autre, une sociologie assez constante avec un très fort soutien dans les couches populaires, un enracinement plutôt stable dans les départements métropolitains et une géographie d’excellence dans 3 régions : Hauts-de-France, Paca et Grand Est.
Bref, je ne perçois pas une nouvelle marche ascendante vers une conquête du pouvoir. En toute hypothèse, la question des alliances se présente aujourd’hui pratiquement dans les mêmes termes qu’auparavant.
Bruno Cautrès – C’est à la fois une progression et une consolidation.
Le vote RN repose aujourd’hui sur un véritable ancrage géographique et sociologique.
C’est un « vote de classe » au sens fort du terme : les pourcentages de vote RN parmi les milieux populaires, chez les travailleurs précaires et pauvres, sont à des niveaux très élevés.
La géographie électorale du vote RN est également assez impressionnante car l’on constate que les bons scores du vote RN ne sont plus seulement cantonnés dans ses bastions habituels du Nord-Est et du Sud-Est.
RPP – Les études d’opinion pré-électorales relatives à l’attitude des Français vis-à-vis de l’Union européenne trouvent-elles leur traduction dans les votes du 26 mai ?
Bruno Cautrès – Oh combien oui ! J’avais publié dans le journal Le Monde une analyse approfondie du rapport des Français à l’intégration européenne, montrant que nous étions parmi les pays les moins favorables à davantage d’intégration européenne. Si la demande d’action publique de niveau européen s’exprime vis-à-vis des questions climatiques et des questions migratoires, cela ne veut pas dire un souhait d’intégration européenne dans d’autres domaines. En particulier en France, tout ce qui touche aux questions régaliennes et aux questions de l’État protecteur en matière sociale, fait l’objet d’une demande d’action au niveau national davantage qu’européen.
RPP – Quels sont les gagnants et les perdants de la consultation en France et en Europe ?
Gérard Le Gall – Parlons d’abord de la France. Contrairement à certains lendemains électoraux, la lecture binaire que vous me suggérez appelle des réponses claires, toutefois difficiles à hiérarchiser. Parmi les gagnants je placerais volontiers Emmanuel Macron parce qu’il aurait pu, tout simplement, être le grand perdant ! Son score mérite en effet d’être resitué dans une période historique qui restera parmi les plus difficiles de la Ve République. Début décembre 2018, certains s’interrogeaient sur ses chances de parvenir aux termes de son mandat. Le deuxième gagnant est bien sûr le RN. Il aurait pu mériter le premier rang si, en tête, il avait nettement fait mieux qu’en 2014, ou égalé en voix sa meilleure performance de 2015 aux régionales. Le troisième est EELV, mais loin de la situation de 2009, en ce sens il devra confirmer.
Les perdants sont nombreux. Assurément le premier est LR car le choc dévastateur risque de libérer dans le mouvement des forces jusqu’ici refoulées. Le second est à l’évidence FI victime d’une déroute non prévisible à ce niveau. Son leader, très affaibli à l’automne par son comportement, devrait pouvoir redresser la barre s’il parvient à gérer politiquement et personnellement la forte demande de radicalité qui sourd des profondeurs du pays. Le PS confirme sa piètre performance de 2017 et paraît se réjouir en rêvant, à défaut de l’hégémonie du passé, d’une sorte de cogestion de la gauche. De leurs côtés Génération.s, l’UDI, DLF, le PCF, Urgence écologie, l’UPR et les Patriotes devraient revoir leur stratégie en pratiquant fusions et regroupements au risque d’être inaudibles. Restent les « gilets jaunes » à classer parmi les perdants, quand Alliance jaune ne recueille que 0,5 % tandis que les listes qui leur sont apparues « proches » – RN, FI, DLF, PCF – ont toutes connu, à l’exception du RN, des résultats très en deça de leurs espoirs nés de la nouvelle conjoncture. L’hypothèse d’une contre-productivité de leur « bienveillance » à l’égard des « gilets jaunes » n’est pas à écarter !
RPP – Et en Europe ?
Gérard Le Gall – L’UE est gagnante car l’accroissement de la participation doit renforcer sa légitimité. La lecture binaire qui précède est peu applicable à l’Europe. Néanmoins, pour la première fois depuis 1979, le PPE comme les sociaux-démocrates, tous deux en repli, sont désormais en situation de majorité relative. Plus globalement, toutes les grandes familles politiques ont connu, dans beaucoup de pays, de fortes turbulences. La montée du nationalisme et de l’écologie politique dans certains pays fait mécaniquement reculer scrutin après scrutin, depuis deux ou trois décennies, la plupart des partis dits « de gouvernement ». La France, l’Allemagne et l’Italie, pour des raisons variables, en sont de parfaites illustrations. Le succès de Orban en Hongrie, théoricien et praticien de l’illibéralisme, est impressionnant (52,3 %) comme celui éloquent de Salvini après un an de pouvoir (33,6 %) au détriment du Mouvement 5 étoiles. À contre courant, le PSOE en Espagne (32,8 %) confirme les très récentes élections législatives, et comme le PS au Portugal, est en position de force (33,40 %) en dominant, largement, l’un comme l’autre, les gauches radicales.
RPP – En France peut-on projeter les résultats du 26 mai dans la perspective des échéances électorales à venir ?
Gérard Le Gall – Chacun sait ou devrait savoir que la prospective est, en général, un exercice périlleux, plus encore dans l’ordre électoral. Parmi les écueils à éviter, il convient de ne pas transposer mécaniquement des résultats présidentiels ou européens sur des échéances locales très personnalisées et très contextualisées. Assurément, les élections municipales de 2020 vont être un laboratoire passionnant pour l’expérimentation, in vivo, de stratégies électorales comme pour l’observation du comportement des électorats. La nouvelle donne issue de la dernière présidentielle corrigée par les européennes va agiter les esprits. Elle risque de perturber les jeux locaux à droite comme à gauche. D’autant que EELV, LaREM et RN paraissent ne pas exclure des stratégies d’opportunité !
Quant à l’horizon 2022, s’il convient d’être prudent sur son issue, les européennes 2019 confirment mon intuition d’une probable reproduction de l’édition 2017.
J’en fais, comme mode de raisonnements à venir, mon hypothèse stratégique.
RPP – À l’aune des résultats en Europe comment peut-on dessiner la mandature 2019-2024 au Parlement européen ?
Bruno Cautrès – On ne peut tirer que peu d’enseignements sur cette question pour le moment. La fin de la domination des partis du centre-droit et sociaux-démocrates sur le Parlement européen, la montée en puissance des libéraux-centristes et la confirmation de la percée réalisée dès 2014 par les droites nationalistes et populistes, montrent que le Parlement européen, à l’image des vies politiques dans de nombreux pays, devient plus éclaté et morcelé. Il est clair qu’Emmanuel Macron souhaite prolonger au plan du Parlement européen la recomposition politique entamée avec son élection en France. Mais son affaiblissement interne ne contribue pas pour le moment à renforcer sa position externe. Même s’il marque des points avec l’arrivée d’une délégation de députés européens « marcheurs » au sein du groupe libéral-centriste, rien ne nous dit que cela va bouleverser la vie politique du Parlement européen et surtout rendre l’Europe plus directement en réponse des préoccupations des Européens. Tout reste à faire.
Gérard Le Gall – Avec une nouvelle donne en Europe et a priori une volonté de rompre avec l’alliance automatique PSE-PPE, PPE-PSE, le Parlement européen peut connaître une démocratie politique plus ouverte. Il peut aussi découvrir les délices et les poisons des assemblées parlementaires sans majorité stable. Il susciterait, un temps, un regain d’intérêt de la part des citoyens européens, mais pourrait accroître l’impuissance de l’institution à l’heure des grands périls. À ce jour, les tractations de coulisse pour former des alliances se font à l’insu de l’électeur. Sous cet angle des progrès pourraient être accomplis pour l’avènement d’une démocratie et d’une vie politique européennes plus transparentes.
Bruno Cautrès
Chercheur CNRS au Cevipof
Et
Gérard Le Gall
Analyste politique
(Propos recueillis par Arnaud Benedetti)