Alain Tranchant, ancien Délégué départemental de mouvements gaullistes en Vendée et Loire-Atlantique,
président-fondateur de l’Association pour un référendum sur la loi électorale, réagit aux propos d’Agnès Buzyn parus dans Le Monde.
L’Histoire retiendra que le mardi 17 mars 2020, au lendemain de la convocation de 46 millions de Français à un premier tour d’élections municipales précédant de 24 heures un confinement général du pays, Mme Buzyn, ancienne ministre de la Santé de M. Macron, largua une véritable bombe à retardement qui n’a pas fini de produire ses effets.
Si le microcosme y voit la conséquence dépressive d’une défaite électorale pourtant programmée, il est aussi permis de penser que Mme Buzyn n’entend pas porter le chapeau, seule, de l’impéritie d’un pouvoir beaucoup plus occupé par le vote, “quoi qu’il en coûte”, de sa réforme des retraites, mettant notamment dans la rue robes noires et… blouses blanches, que préoccupé par la préparation de la terrible épreuve d’un choc sanitaire se répandant progressivement sur l’ensemble de la planète.
En déclarant à un grand quotidien du soir : “Le 11 janvier, j’ai envoyé un message au Président sur la situation”, Mme Buzyn en a trop dit ou pas assez dit.
Les Français sont en droit de connaître la teneur de son message au Président Macron.
Plutôt que de “ronger son frein”, de confesser : “je savais que la vague du tsunami était devant nous”, et d’ “avertir Edouard Philippe que les élections ne pourraient sans doute pas se tenir”, Mme Buzyn aurait dû démissionner avec pertes et fracas, clamer haut et fort les motifs de son départ du gouvernement.
Pour parler comme M. Chevènement, elle a préféré “fermer sa gueule”, rentrer dans le rang, puis porter les couleurs bien pâles de “La République en marche” à l’élection municipale de Paris.
Ce n’est certainement pas parce que les Français sont assignés à résidence qu’ils doivent être béats d’admiration devant leurs gouvernants. Surtout quand, jour après jour, ils constatent les conditions déplorables dans lesquelles les soignants de notre pays sont amenés à intervenir.
Toutes choses étant égales par ailleurs, nous sommes en 1940, abrités derrière nos certitudes et nos exceptions françaises : puisque nous avons le meilleur système de santé, il ne peut rien nous arriver.
Sauf que la ligne Maginot est en train de céder, et que des personnels soignants sont à leur tour contaminés. En 1940, c’est “la force mécanique” qui faisait défaut. Aujourd’hui, ce sont les masques et les vêtements de protection qui manquent à nos combattants du front.
Mme Buzyn est passée à côté de son 18 juin.
Sa démission, le 11 janvier, aurait frappé les esprits et la France aurait disposé de deux mois supplémentaires, une éternité en l’occurrence, pour se préparer au combat contre le coronavirus.
N’en déplaise à M. Macron, les mots d’Emile de Girardin, en 1849, retentissent aujourd’hui comme un réquisitoire sévère : “Gouverner, c’est prévoir ; et ne rien prévoir, c’est courir à sa perte”.
N’assumant pas ses erreurs de communication – “La vie continue. Il n’y a aucune raison de modifier nos habitudes de sortie” (déclaration du 7 mars 2020), se réfugiant pas très courageusement derrière “les scientifiques”, qui n’auraient donc rien vu venir, et daubant malencontreusement sur “toutes celles et tous ceux qui avaient prévu tous les éléments de la crise, une fois qu’elle a eu lieu”, le président de la République méritera les “félicitations” du pays, pour reprendre sa formule, le jour où il nous démontrera que l’envoi de 17 tonnes de masques en Chine, en janvier 2020, était la marque de la clairvoyance de son gouvernement. Car quand la crise fut venue, la France se trouva fort dépourvue.
Alain Tranchant
Ancien Délégué départemental de mouvements gaullistes en Vendée et Loire-Atlantique
Président-fondateur de l’Association pour un référendum sur la loi électorale
Photo : Alexandros Michailidis, Shutterstock