La très répandue thèse kantienne de la « paix démocratique » s’appuie sur le présupposé calcul rationnel du citoyen réticent à un engagement dans les conflits armés. C’est oublier que la donne a changé depuis la mise en œuvre de la « révolution dans les affaires militaires ». C’est ce qui nous amène à rechercher la causalité de la désinformation dans un contexte d’engagements militaires à coût humain allié négligeable, et lorsque le pouvoir politique engage une idéologie contre un ennemi planétaire. Reste que la démocratisation et la saturation informationnelles ont entraîné un changement de paradigme remettant en cause le monopole du pouvoir de désinformer, mais permettant dans le même temps de radicaliser l’opinion publique et de faire échec à un véritable débat public.
Il est possible de décider d’une guerre au sein d’un cercle restreint de détenteurs du pouvoir exécutif, puis de l’annoncer et de l’expliquer a posteriori. Mais le pouvoir de déclarer la guerre attribué au Parlement dans les constitutions des démocraties libérales est souvent justifié par l’importance du débat public préalable à toute décision engageant les citoyens. En théorie, l’on évoque l’argument selon lequel les élus sont amenés à privilégier la paix et la résolution pacifique des conflits à l’engagement armé, parce qu’ils ont besoin de l’assentiment des citoyens rationnels et calculateurs des coûts et avantages d’une guerre. C’est là l’essence du paradigme de la « paix démocratique ». Les mutations techno-militaires datant de la fin des années 1980 ont-elles modifié les termes de l’équation pour rendre le débat impraticable et la guerre plus aisée et plus fréquente ?
D’autre part, le maillon intermédiaire entre le citoyen et le calcul rationnel est l’information. Cette dernière est avant tout imparfaite et son acquisition a un coût. Est-il dans ce cas plus aisé de recourir à l’information prête à consommer, souvent biaisée et parfois erronée ? La désinformation suffit-elle à obtenir une mobilisation pro-guerre dans l’opinion publique ? Ou faut-il aussi que la société soit déjà engagée dans une guerre idéologique ?
Enfin, les mutations dans l’univers médiatique, avec la prolifération de la communication horizontale en lieu et place de la communication verticale, permettent-elles à la société de prendre ses distances avec la décision de guerre ou au contraire offrent-elles l’opportunité de radicaliser l’opinion publique ?
La réponse à ces questions se fait à travers la confrontation entre un certain nombre de notions qui sont elles-mêmes objet d’amples débats : il est question de démocratie, de guerre, d’information et de désinformation, d’opinion publique, de débat public. Chacun de ces termes connaît de nombreuses définitions et certains sont contestés dans leur existence même.
Enfin, les présupposés de départ sont tous sujet à débat. À titre d’exemple, les paradigmes de la paix démocratique et de l’individu calculateur rationnel ont fait l’objet de nombreuses critiques et remises en cause. De même, l’idée selon laquelle il existe une « opinion publique » au singulier n’a de pertinence que dans deux cas : lorsque l’on veut identifier les représentations dominantes, et lorsque l’on cherche à connaître l’effet d’autres variables sur des représentations communes à une société, ou influentes au sein de celle-ci.
La paix démocratique et le citoyen rationnel
Afin de mieux rendre compte des effets de la désinformation sur les engagements internationaux des « démocraties », nous partons de la proposition kantienne selon laquelle seuls les régimes où la décision d’entrer en guerre dépend de l’assentiment des citoyens tendent vers la paix ; ces derniers doivent « réfléchir beaucoup » avant de donner cet assentiment car ils en supportent les conséquences1.
Pour débuter le raisonnement, il faut partir d’un schéma simplifié à deux modèles : les « démocraties » et les « dictatures », si l’on transpose les termes de l’opposition kantienne entre « régime républicain » et régime despotique »2. Cela suppose que l’on définisse la démocratie en y associant les quatre critères que sont l’État de droit, la garantie des libertés et droits fondamentaux, l’élection des instances investies du pouvoir politique et le pluripartisme, tout en faisant le raccourci du débat au sujet de son authenticité en tant que démocratie3.
Selon la typologie kantienne, la distinction entre régime républicain et régime despotique est aussi une distinction entre deux ressorts symétriquement opposés de la décision politique. D’une part, la décision d’entrer en guerre suppose l’assentiment des citoyens et d’autre part elle s’appuie sur la seule décision du despote dont les intérêts privés sont l’ultime référence. Dans les deux cas, la décision s’appuie sur un calcul rationnel.
Dans le régime républicain, les citoyens doivent confronter les sacrifices résultant de la guerre avec l’intérêt que ceux-ci peuvent en tirer ; ainsi, la balance penche plus facilement en faveur de la paix, vu le déséquilibre entre sacrifices et avantages.
À l’inverse, le despote a des intérêts distincts de ceux de l’État et dispose des ressources de ce dernier comme d’une propriété privative : le sacrifice qu’il doit consentir du fait de la guerre est marginal ou nul ce qui rend la décision en faveur de celle-ci plus aisée.
Ce raisonnement suppose des citoyens capables d’un calcul rationnel coût/avantage et d’une information « parfaite ». Les conclusions du paradigme kantien nous laissent supposer que le citoyen est capable d’avoir une perception de ce que serait la réalité du sacrifice induit par la guerre.
De ces présupposés l’on arrive à la conclusion que seule une alliance entre régimes républicains (en langage kantien) ou démocratiques (si l’on transpose cela dans le langage des think tanks cités) en vue de résoudre les différends et conflits par les méthodes pacifiques permettrait d’instaurer la paix à l’échelle planétaire.
Les conclusions qu’en a tiré la pensée libérale triomphante dès l’effondrement des régimes « communistes » d’Europe de l’Est étaient déjà résumées dans les thèses de Michael Doyle4 :
- Les démocraties sont par essence réticentes à la guerre, car le pouvoir exécutif est limité et comptable envers les citoyens chez qui l’on suppose un calcul rationnel coût/avantage en faveur de la paix ;
- Ce paradigme est valable pour les relations entre démocraties qui se subordonnent à des modes pacifiques de résolution des conflits. Cette théorie est souvent vérifiée à partir de l’énumération des cas empiriques de relations entre démocraties (l’absence de guerre entre la Suède et la Norvège, le Danemark et l’Allemagne, le Canada et les États-Unis etc.) ;
- La plupart des guerres menées par les démocraties le sont à l’encontre d’États non-démocratiques5. La possibilité de guerres avec les États non-démocratiques part d’une présupposition selon laquelle personne n’est à l’abri de la légèreté avec laquelle des dictateurs auront décidé d’entrer en guerre.
Cette relation de causalité entre démocratie et paix est renforcée par la thèse d’origine schumpetérienne qui établit un lien de causalité entre capitalisme et paix. La culture du capitalisme déplace la compétition des conquêtes militaires vers la conquête pacifique des marchés et modifie les critères d’émulation au sein des classes dominantes6. Cette thèse a ses prolongements anthropologiques dans les développements de Francis Fukuyama, au motif que, dans la société capitaliste, la volonté de puissance des élites se détourne de la guerre vers l’activité économique et le commerce7. C’est le fondement théorique de la doctrine de l’expansion démocratique (Democratic Enlargement) de Clinton-Lake dont le pilier est le soutien aux démocraties appuyées sur l’économie de marché (Market Democracy)8.
Mais supposons que le jugement des citoyens des « démocraties de marché » s’appuie sur un calcul coût-avantage et que les deux principales composantes du coût d’une guerre soient le coût financier et le coût humain.
Si nous prenons le cas d’une opération militaire extérieure d’une grande puissance, le coût financier réside dans le sacrifice des dépenses budgétaires civiles au profit des dépenses militaires à travers la réduction des premières et/ou l’accroissement de la pression fiscale. Mais il existe deux autres possibilités qui ont pour effet de réduire l’effet immédiat perceptible de ces dépenses et de biaiser le calcul rationnel des citoyens : l’endettement ou le financement de la guerre par d’autres États. La première solution est adoptée par le gouvernement fédéral américain suite à l’invasion de l’Irak en 20039, tandis que la seconde l’a été lors de l’offensive de janvier 199110.
Quant au coût humain, il est représenté par les pertes militaires et civiles. Prenant le cas des guerres menées par les États-Unis depuis 1950, John Muller établit une corrélation inverse entre l’évolution du nombre de pertes résultant d’un engagement armé et le soutien de l’opinion publique à ce dernier11. Toutefois, selon une étude empirique menée par Christopher Gelpi, Peter Feaver et Jason Reifler, il n’existe pas de corrélation linéaire entre l’accroissement du nombre des pertes humaines dans une guerre et la baisse du soutien à celle-ci dans l’opinion publique12. D’autres variables interviennent, dont essentiellement l’estimation de l’issue de cette dernière en termes de réussite ou d’échec politique. De même, la variable « réussite » est combinée à un enjeu politique, idéologique, culturel de l’engagement militaire13.
L’opinion publique des démocraties et le soutien aux guerres à faible coût
Toutefois, la révolution dans les affaires militaires dont les effets sont visibles dès la guerre du Golfe de janvier-février 1991 donne la possibilité aux citoyens américains d’envisager la guerre avec la même légèreté que le despote de Kant. Cette révolution permit dans un premier temps de creuser l’écart entre les capacités de l’armée américaine, d’une part et celle de la plupart des armées conventionnelles des pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine d’autre part14. À l’automne 1990, avant que ses effets ne soient visibles sur le terrain, les débats du Congrès américain sont ponctués de critiques et d’hésitations, car l’opinion publique est encore hantée par le précédent vietnamien. Le déroulement de la guerre en janvier-février 1991 aura révélé un autre rapport de force avec un ratio de 1 à 380 entre les pertes américaines inférieures à 390 morts et les pertes irakiennes civiles et militaires estimées à plus de 110 00015. La nouvelle donne stratégique permet d’énoncer l’idée de guerres tendant vers « zéro pertes », ce qui affecterait le calcul coût/avantage.
La réduction du coût humain rend plus aisé le soutien des citoyens d’une démocratie à un engagement dans les conflits armés.
En ce qui concerne l’invasion de l’Irak de 2003, 73 % des Américains interrogés soutiennent cette dernière au cours des trois semaines de guerre conventionnelle (en mars-avril 2003), en référence au précédent irakien de janvier-février 199116. L’opinion publique majoritaire approuve une guerre conventionnelle marquée par le déséquilibre dans le rapport des forces et qui ne peut qu’aboutir à une victoire américaine inéluctable, rapide et peu coûteuse17.
Face à un calcul coût/bénéfice très avantageux, les citoyens jugent de l’opportunité d’un engagement armé en fonction de leurs systèmes de représentations et de valeurs, ainsi qu’en fonction de leurs aspirations pour la scène internationale. Le positionnement de chacun d’entre eux dépend de facteurs sociaux, culturels et politico-idéologiques. Plusieurs niveaux de motifs interviennent pour expliquer le soutien à ces nouvelles formes de guerre :
- Les motifs de type humanitaire : l’intervention face aux exactions, aux crimes à l’encontre des civils aux génocides (Bosnie, Kosovo) ;
- Les motifs liés à la nature du régime politique adverse : la restauration de la démocratie ou la chute d’une dictature (Haïti, Irak, Libye) ;
- Les motifs liés aux intérêts nationaux stratégiques : neutraliser la menace terroriste ou celle liée aux armes de destruction massive (Afghanistan, Irak).
Il est également possible d’opposer le profil interventionniste idéaliste qui admet l’engagement militaire en faveur d’idéaux démocratiques ou humains, au profil nationaliste-réaliste qui s’en tient aux intérêts stratégiques de la nation.
Toutefois, d’autres catégories interviennent portant sur les modes d’action et les règles d’engagement. L’on peut opposer ceux qui privilégient le respect de la souveraineté des États et la non-ingérence dans leurs affaires intérieures à ceux qui défendent le principe de l’ingérence humanitaire ou démocratique. De même, les multilatéralistes qui privilégient l’action dans le cadre des alliances institutionnalisées et des organisations internationales s’opposent aux unilatéralistes pour lesquels l’intérêt national suffit à justifier l’intervention militaire.
L’opinion publique manipulée, le modèle hégémonique et l’enthousiasme pour la guerre
Si l’on admet que l’information est toujours imparfaite et qu’elle a un coût croissant, cela explique la tendance à chercher un raccourci dans les idéologies influentes18. Or l’édification du système de représentations dépend d’une double influence exercée par les élites politiques et les médias, ce qui mène à une relation triangulaire élites politiques-médias-opinion publique. Dans ce cas, comme l’établit Francesco Olmastroni, l’on peut être en présence, soit d’un système de représentation hégémonique capable d’assurer le continuum pouvoir politique-médias-opinion publique, soit d’une pluralité de systèmes de représentations compétitifs où l’élite au pouvoir doit faire face à des systèmes concurrents19.
Edward Herman et Noam Chomsky favorisent, dans le cas des États-Unis, l’hypothèse du continuum hégémonique élite-médias-opinion publique, pour les raisons suivantes20 :
- La mainmise des monopoles capitalistes sur les médias à travers les acquisitions successives et l’élévation du seuil pour les nouveaux entrants ;
- Les sources d’information primaire légitimes sont limitées à quelques agences reconnues par les détenteurs du monopole médiatique ;
- L’acharnement des élites et médias dominants contre les messages médiatiques dissonants ou hostiles à travers les procédures abusives et les démarches d’intimidation politico-judiciaire ;
- Le contrôle idéologique et la guerre idéologique contre les courants dissonants et les acteurs politiques et médiatiques neutres ou insuffisamment engagés.
Il s’agit d’autant de facteurs qui expliquent comment l’opinion publique peut soutenir toute nouvelle guerre décidée par l’élite dirigeante et légitimée par un continuum hégémonique politico-médiatique qui a les moyens de marginaliser ou de neutraliser les messages dissonants21.
Les procédés de désinformation sont multiples et font des mises en perspective trompeuses dans l’agencement des informations, à la fabrication d’informations erronées en s’appuyant sur des références et circuits faisant autorité.
Dans Manufacturing Consent, Noam Chomsky nous donne un exemple de perspective déformante de l’actualité. En 1980, l’assassinat du père Jerzy Popieluszco dans la Pologne communiste fait l’objet de 100 articles de presse, contre seulement 16 articles sur l’assassinat du père Oscar Romero par le pouvoir militaire salvadorien. Dans la même période, l’assassinat de 95 prêtres et religieuses par les autorités et les milices proches des pouvoirs militaires alliés en Amérique latine n’a fait l’objet que de 73 articles de presse et de 8 titres en première page contre 10 en ce qui concerne le père Popieluszco22. Cela nous permettrait-il d’envisager un calcul de la valeur politique pondérée d’une vie humaine en fonction des occurrences médiatiques et politiques ?
Le processus de désinformation passe également par la fabrication des énoncés d’information, si l’on prend le cas de la période précédant l’invasion de l’Irak de mars 2003. Deux informations démenties ultérieurement ont joué un rôle dans la mobilisation de l’opinion publique américaine : celle concernant la détention par l’Irak d’armes bactériologiques, ainsi que d’un programme nucléaire23 et celle concernant une présumée rencontre en avril 2001 à Prague entre des diplomates irakiens et les organisateurs des attentats contre les tours jumelles.
Ces deux informations sont construites en référence à des sources réputées crédibles, et selon les méthodes d’énoncé qui font autorité dans la presse : services de renseignements officiels et rapports, éléments documentaires, et déclarations officielles de membres de gouvernements.
L’opinion publique dominante aux États-Unis a donné crédit à ces deux informations, démenties bien après l’invasion américaine, et dont chacune est perçue à elle seule comme un casus belli :
- L’Irak dispose d’armes bactériologiques et développe un projet nucléaire militaire24, ce qui a justifié la « guerre préventive », sur la base d’une menace future mais certaine et en s’appuyant sur l’idée d’un seuil de non-retour lorsque toute guerre contre l’Irak serait impossible ;
- Mohamed Atta, l’organisateur des attentats du 11 septembre 2001, a rencontré Ahmed Khalil Ibrahim Samir al-Ani, ancien diplomate et secrétaire d’Ambassade à Prague, quelques mois plus tôt. Cette information, diffusée par les services de renseignements américains, est démentie puis confirmée par le ministre de l’Intérieur tchèque25. En janvier 2003, plus de 50 % des sondés donnent crédit à cette allégation qui aurait suffi à les convaincre de la responsabilité de l’État Irakien26.
Reste que l’impact de ces deux informations est amplifié par la nouvelle guerre idéologique qui a pour effet de justifier la politique de l’ « aggressive engagement ». Mais il existe plusieurs systèmes de représentations engagés dans cette guerre : celui qui lie le terrorisme à des réseaux politiques internationaux, mais le déconnecte des croyances religieuses27, celui qui en trouve l’extension dans l’ « islam politique » et celui, le plus radical, qui énonce la thèse de la guerre civilisationnelle avec le monde musulman28.
Reste que, quel que soit le système d’interprétation, l’état de guerre idéologique explique le développement de trois processus belligènes29 :
- L’internationalisation de la confrontation à travers la construction d’un ennemi planétaire ;
- La construction d’un champ politique international binaire et le bannissement des zones grises et des acteurs neutres ;
- L’assimilation à l’ennemi d’un plus grand nombre d’acteurs et d’entités politiques connexes, dont les États de l’ « axe du mal (Irak-Iran-Corée du Nord)
Enfin, dans certaines conditions, le quatrième processus belligène est l’ethnicisation de la guerre idéologique, si l’on utilise l’acception la plus large du terme, lorsque le discours cible à l’intérieur de la société étatique une population incarnant l’ennemi intérieur.
Toutefois, l’état de guerre idéologique est compatible avec le modèle hégémonique et anéantit le débat public autour des choix stratégiques. En ce qui concerne le positionnement de l’opinion publique dans la guerre d’Irak de 2003, le moment culminant de la phase hégémonique est mars-avril 2003, c’est-à-dire le moment où s’achève la guerre conventionnelle. Au niveau du processus décisionnel, il y a convergence entre la Présidence et le Congrès, mais aussi entre une diversité de groupes de pression et sources d’influence idéologiques gravitant autour de l’Administration présidentielle et partisans du « Regime Change ». Toutefois, les différents acteurs décisionnels qui partagent cet objectif consensuel vont diverger en ce qui concerne la gestion de la transition politique, ce qui nous oriente progressivement vers un modèle pluraliste contrôlé et de type oligopolistique30.
La démocratisation de l’information et la radicalisation des guerres idéologiques
Avec les médias numériques et le développement des réseaux sociaux, la production de l’information échappe en partie au contrôle des monopoles établis et des normes dominantes d’élaboration de l’information. Au modèle vertical se superpose un modèle horizontal où les seuils d’entrée dans la sphère de production et de diffusion de messages sont considérablement réduits. D’autre part, la relation verticale locuteur (actif)-auditeur (passif) laisse place aux boucles d’interaction où le dernier peut aussi produire des énoncés d’information.
La démocratisation de l’information a pour conséquence la saturation informationnelle qui contraste avec les situations antérieures de rétention de l’information, car elle offre une multitude de discours divergents au sujet d’une même et unique situation de fait31.
La saturation informationnelle peut induire une plus grande vulnérabilité à la propagande politique, à travers l’accroissement du stress et de l’anxiété, la destruction de la confiance en soi, la réduction des capacités cognitives et de filtrage de l’information, la paralysie de l’esprit analytique et la déconcentration32. La réduction des facultés cognitives permet d’affaiblir la capacité à identifier, discerner, trier et composer les représentations. Elle permet d’accroître le niveau de confusion33. Il s’en suit un filtrage déficient de l’information et un accueil moins discriminé de celle-ci, ce qui ouvre la porte à l’acceptation d’informations peu ou pas fondées34.
C’est pourquoi le continuum hégémonique peut encore dominer l’opinion par la saturation informationnelle, lorsque la rétention d’information n’est plus possible. Entre la première et la deuxième guerre irako-américaine, l’on est passé d’une stratégie de contrôle-rétention de l’information à une stratégie de saturation en information amie (friendly information). En 1991, les informations relatives au champ de bataille irakien sont monopolisées ou presque par les services d’information militaires. Peu de choses sont connues à l’exception de ce qui est montré par ces derniers. Le scénario qui se déroule de l’autre côté de la barricade est quasiment ignoré. Un exemple : le scandale des soldats américains touchés par de lourdes pathologies révélées moins de deux années plus tard, permet de découvrir que l’armée américaine a fait usage de bombes à uranium appauvri (les Mini Nukes)35. Inversement, l’invasion de 2003 donne lieu à une saturation en information amie : les conférences de presse du Général Tommy Franks sont régulières et la mobilisation des différents médias, y compris numériques, est assez forte.
Toutefois le processus de démocratisation-saturation informationnelle a également comme effet de diversifier les discours et de faciliter la circulation d’informations divergentes. Les premières informations au sujet d’attaques chimiques contre la Ghouta de Damas en août 2013 ont permis aux déclarations officielles occidentales d’en imputer la responsabilité aux forces gouvernementales syriennes. Mais ces informations ont aussitôt été contredites par d’autres, divergentes, ce qui explique le désaccord entre le Congrès et l’Administration présidentielle, entre la Maison Blanche et le Pentagone et à l’intérieur des services de renseignement au moment où il est question de préparer une offensive militaire en Syrie36.
Le processus de diversification des sources d’information ne représente toutefois pas un obstacle aux engagements militaires d’une « démocratie » lorsque le système politique favorise la concentration du pouvoir de décision. Si la déclaration de guerre suppose le vote du pouvoir législatif, ce qui rend inévitable le débat public, la plupart des engagements armés ne sont plus qualifiés de « guerres », et relèvent de la compétence du pouvoir exécutif. C’est la raison pour laquelle dans chaque pays, le pouvoir législatif tente d’y imposer des limites, afin de mieux contrôler l’élan guerrier des chefs d’État ; tel est le cas, par exemple, du War Power Act de 1973 aux États-Unis et qui limite l’engagement dans des hostilités à soixante jours en l’absence d’approbation du Congrès. Cette limitation laisse entière la question des limites du pouvoir exécutif dans les engagements militaires de courte durée. L’une des questions débattues à la suite de l’élection présidentielle de 2016 est celle du pouvoir sans partage qu’a le Chef de l’État d’user de l’arme atomique37.
La guerre est possible, même si les conditions de mobilisation de l’opinion ne sont pas réunies, lorsque du fait de la concentration du pouvoir de décision et de l’influence d’un nombre limité d’institutions et de groupes de pression, l’exécutif juge qu’un engagement militaire de courte durée est possible. C’est dans cette catégorie qu’entrent les attaques de drones et les assassinats ciblés à l’étranger38. L’intervention militaire en Libye aurait pu en faire partie, mais sa plus longue durée a entraîné une bataille judiciaire entre le Président et le Congrès au sujet du non-respect du War Power Act.
Toutefois, le changement qualitatif introduit par les médias numériques permet le développement de nouvelles communautés d’idées. Cette nouvelle forme de communication horizontale consolide l’interaction entre interlocuteurs à opinions proches ou identiques et éloigne les interlocuteurs à opinions divergentes ou opposées, ce qui favorise la constitution de groupes homogènes39. Ainsi, la constitution de communautés d’idées homogènes peut certes créer une rupture avec le consensus politique dominant, mais elle peut dans le même temps s’approprier une guerre idéologique dominante en l’amplifiant, notamment par la fabrication d’un ennemi intérieur et l’ethnicisation du conflit, ajoutant au conflit armé international des lignes de clivages avec un ennemi intérieur. À ce sujet, dès 2008, une grande partie du leaderhip Républicain aux États-Unis a abandonné la politique du « Regime Change » au Moyen-Orient, et s’est montré sceptique au sujet des « Printemps arabes », tout en développant un discours offensif à l’encontre des « ennemis intérieurs » de l’Amérique40. C’est ce qui explique entre autres choses la surenchère des réseaux sociaux visant à présenter Barack Obama, soit comme un crypto-marxiste, soit comme un musulman dissimulé, soit comme un Afro-américain animé par la haine des valeurs américaines41.
Cette dimension n’est pas propre à l’ère des médias numériques et des réseaux sociaux.
Rechercher une population hostile « dissimulée » derrière l’ennemi idéologique est un exercice plus ancien, et les grilles de lectures ethnicisantes que les courants nationalistes ont fait des révolutions marxistes et des mouvements socialistes dans l’Europe de l’entre-deux-guerres étaient très fréquents42. Il en est de même des processus d’ethnicisation des conflits idéologiques observés au cours des périodes bipolaire et post-bipolaire à l’échelle mondiale – le slogan du triple péril noir-métis-communiste en Afrique du sud43, la stigmatisation des Tutsis au Rwanda, des Indiens Mayas au Guatémala, etc. –44.
Il reste que les médias numériques ne sont pas de simples accélérateurs des guerres idéologiques. Leur originalité consiste à favoriser le développement d’une attitude « post-vérité » qui efface les frontières entre information et désinformation. Cette posture part d’une défiance vis-à-vis de la connaissance experte, des canaux institutionnels et des méthodes scientifiques communément admises de production et de transmission de l’information. En ce sens elle représente une rupture en termes d’attitude cognitive. Mais à la différence des ruptures proposées par les épistémologies relativistes ou par l’ « anarchisme épistémologique »45, elle fait le raccourci des procédures d’élaboration des connaissances, rejette l’univers scientifique des experts et adhère à la maxime pragmatiste « est vrai ce qui conforte mes propres attentes »46. Cette attitude contribue à la clôture sémantique et idéologique de la communauté d’idées, à une radicalisation de la guerre idéologique et à une annihilation du débat public.
Or, les nouveaux médias offrent également l’opportunité inverse d’une plus grande ouverture et Trevor Diehl, Brian Weeks et Homero Gil de Zuniga établissent que la communication interactive que ces médias favorisent consolide le débat démocratique et permet de développer le sens de l’argumentation, lorsqu’elle est émancipée de toute manipulation politique47
. L’interaction entre les interlocuteurs de cette communication horizontale est constitutive d’un débat public lorsque plusieurs conditions sont réunies : parmi ces conditions l’on peut évoquer l’ouverture du groupe, la diversité des positions exprimées, le développement des arguments divergents et l’incitation à la confrontation des idées.
Fouad Nohra
Maître de conférences HDR à l’Université de Paris
- Selon Emmanuel Kant décréter la guerre c’est pour les citoyens « décréter contre eux-mêmes » toutes les calamités de la guerre, de savoir, de cornbattre en personne ; de fournir de leurs propres moyens les frais de la guerre, de réparer péniblement les dévastations qu’elle cause… ». Emmanuel Kant, Projet de paix perpétuelle, Jeansen et Perroneau, 1796, p 25. ↩
- Emmanuel Kant établit la distinction entre république et démocratie. La première répond à la question des fondements et du type de légitimité du pouvoir politique, tandis que la seconde définit le mode d’exercice de ce dernier. ↩
- Il s’agit d’une définition que l’on retrouve tout autant dans la Freedom House que dans les écrits d’Adam Przeworski ou encore dans le Polity IV Project. Adam Przeworski,, et al., Democracy and development: Political institutions and well-being in the world, 1950-1990, Cambridge University Press, 2000 ; Monty Marshall, Keith Jaggers and Ted Robert Gurr, Polity IV project: Political regime characteristics and transitions, 1800-2002,University of Maryland, 2002. Le débat au sujet de la démocratie est tel, durant la période bipolaire, que Raymond Aron exprime sa réticence à parler de régime démocratique et utilise le terme de « pluralisme constitutionnel » ou de système « technocratique » pour qualifier les régimes politiques d’Europe occidentale. Raymond Aron, Démocratie et totalitarisme, Gallimard, 1965. ↩
- Michael W. Doyle, « Kant, Liberal Legacies, and Foreign Affairs », Philosophy & Public Affairs, Autumn, 1983, vol. 12, n° 4, pp. 323-353. ↩
- Cette proposition est infirmée empiriquement par les références de Christopher Layne aux guerres passées entre démocraties libérales : Christopher Layne, « Kant or Cant: The Myth of the Democratic Peace , International Security, Fall, 1994, vol. 19, n° 2, pp. 5-49. ↩
- En référence à la conclusion de Joseph Schumpeter « Dans le monde dominé par les valeurs capitalistes… les guerres de conquête et de rapines, ou tout simplement toute politique étrangère aventureuse, ne peuvent être perçues que comme des perturbations de la vie quotidienne ou comme des manquements exceptionnels aux véritables fins de la société », Joseph Schumpeter, Impérialisme et classes sociales, Flammarion, 1984, p 115. ↩
- Francis Fukuyama, The end of history and the last man, Simon and Schuster, 2006. ↩
- Douglas Brinkley, « Democratic Enlargement: The Clinton Doctrine », Foreign Policy, Spring, 1997, n° 106, pp. 110-127. ↩
- Uri Friedman, « Fighting terrorism with a credit card », The Atlantic, September 12, 2016, https://www.theatlantic.com/international/archive/2016/09/cost-wars-iraq-afghanistan/499007/ ↩
- Spitting the check, when allies helped pay for the Middle East war, NBC News, September 16, 2014, https://www.nbcnews.com/storyline/isis-terror/splitting-check-when-allies-helped-pay-middle-east-war-n203756 ↩
- John Mueller, « Public Support for Military Ventures Abroad: Evidence from the Polls », in John Norton Moore and Robert F. Turner, eds, The Real Lessons of the Vietnam War: Reflections Twenty-Five Years after the Fall of Saigon, Durham, N.C., Carolina Academic Press, 2002. ↩
- Christopher Gelpi, Peter Feaver, Jason Reifler, Paying the Human Cost of Wars, American Public Opinion and Casualties in Military Conflicts, Princeton University Press, 2009. ↩
- Ibid. ↩
- Ladite Révolution dans les affaires militaires consiste à l’introduction d’une quatrième dimension de la guerre aux côtés des trois autres (terrestre, maritime, aérienne), celle de l’information (précise, exhaustive, en temps réel). Elle permet une plus grande flexibilité et coordination entre les unités et s’appuie sur la transmission de l’information entre elles en temps réel. Elle s’accompagne d’une évolution rapide de la précision des frappes et d’une mutation dans la structure des forces armées au profit des ingénieurs et logisticiens. Lothar Ibrügger, The Revolution in Military Affairs, NATO Parliamentary Assembly, November 1998, http://www.iwar.org.uk/rma/resources/nato/ar299stc-e.html ↩
- Congressional Research Service, American Wars and Military Operations Casualties: Lists and Statistics, July 29, 2020, https://crsreports.congress.gov/ ; International Physicians for the Prevention of Nuclear War, « The Human Costs of the Gulf War, Will History Repeat Itself in Iraq? », https://ippnw.org/pdf/gulfwarfacts.pdf ↩
- https://news.gallup.com/poll/1633/iraq.aspx ↩
- En effet, pendant les trois semaines de guerre conventionnelle, l’armée américaine perd moins d’une centaine de ses effectifs. Matthew Goldberg, « Death and Injury Rates of U.S. Military Personnel in Iraq », Military Medicine, vol. 175, April 2010, pp. 220-226. ↩
- Anthony Downs, « An economic theory of political action in a democracy », Journal of political economy ,65.2, 1957, pp. 135-150. ↩
- Francesco Olmastroni, Framing war: Public opinion and decision-making in comparative perspective, Routledge, 2014. Selon l’auteur, lorsque l’élite au pouvoir échoue à imposer son système de représentations, trois solutions s’offrent : l’affrontement avec le système concurrent, la production de nouveaux cadres conceptuels qui cherchent à s’imposer à l’opinion et l’adaptation aux cadres de représentation dominants au sein de l’opinion publique. ↩
- Edward S. Herman et Noam Chomsky, Manufacturing consent: The political economy of the mass media, Random House, 2010. ↩
- James McCartney et Molly Sinclair McCartney, America’s war machine: Vested interests, endless conflicts, Macmillan, 2015. Dans le cas des États-Unis l’inflation du budget du Pentagone, multiplié par trois entre 1990 et 2008, ainsi que de son personnel (plus de 2 millions d’employés), est en soi un facteur entretenant la motivation pour l’engagement dans les conflits armés, mais permet de développer les contrats bénéficiant au complexe militaro-industriel, lui-même influent au Congrès et auprès du Pentagone. ↩
- Edward S. Herman et Noam Chomsky, op. cit., pp. 206-20. ↩
- Thomas Ricks, Fiasco – L’aventure américaine en Irak, Michalon, 2008 ; Michael Gordon, Judith Miller, « Threats and Responses: The Iraqis; U.S. Says Hussein Intensifies Quest for A-Bomb Parts », New York Times, September 8, 2002, A1. ↩
- http://documents.theblackvault.com/documents/iraq/iraq-wmd-nie-01-2015.pdf ↩
- Patrick E. Tyler, John Tagliabue, « Czechs confirm Iraqi agent met with terror ringleader » The New York Times, October 27, 2001. ↩
- Althaus Scott, Devon M. Largio, « When Osama Became Saddam: Origins and Consequences of the Change in America’s Public Enemy #1 », Political Science & Politics, October 2004, pp. 795-799. ↩
- Kurt Campbell, Zbigniew Brzezinski, Brent Scowcroft, Campaign against Terrorism, Center for Strategy and International Security, September 2001. ↩
- Pat Robertson, « The roots of terrorism and the strategy for victory, », Address To the Economic Club of Detroit, March 25, 2002, in http://www.cc.org ↩
- Fouad Nohra, « Mutation de l’univers médiatique et fabrication de l’ennemi : la figure du musulman dans les paradigmes de la pensée identitaire du XXIème siècle », Entertainment, Droit, médias arts et culture, 2019/4, pp. 224-235. ↩
- Pour ce qui concerne les sources d’influence, l’on peut établir la convergence entre le complexe militaro-industriel, l’industrie pétrolière, les sociétés de reconstruction (Halliburton), la Coalition chrétienne des États-Unis (Christian Coalition of America), l’American Israeli Public Affairs Committee (AIPAC) et les représentants de l’opposition irakienne, avec comme pivot de l’élaboration doctrinale de la stratégie de guerre le Project for A New American Century (PNAC). ↩
- À titre d’exemple, sur Google l’on trouve 738 millions de liens avec le mot clé Donald Trump, 137 millions avec Barack Obama, 7,7 millions avec Bachar al-Assad, 2,6 millions avec Jeanine Anez, etc. ↩
- R. Renjith, « The effect of information overload in digital media news content », Communication and Media Studies, vol. 6, n° 1, Jan-Jun 2017, pp. 73- 85. ↩
- Alex Young, « Too much information, ineffective information collection », Harvard International Review, August 2013, http://hir.harvard.edu ↩
- Parmi les recherches développées au sujet de l’effet négatif de la saturation informationnelle sur le lieu du travail : L. P. Robert, A. R. Dennis, 2005, « Paradox of richness: A cognitive model of media choice », IEEE Transactions on Professional Communication, vol. 48, n° 1, pp. 10-21. D’autres théories mettent en évidence la capacité d’adaptation à la saturation informationnelle : K. K. Stephens, J. Davis, 2009, « The social influences on electronic multitasking in organizational meetings », Management Communication Quarterly, vol. 23, n° 1, pp. 63–83. ↩
- Christine Abdelkrim-Delanne,« Guerre du Golfe, la sale guerre propre », Le Monde Diplomatique, février 2001. ↩
- Jacques Baud, Gouverner par les fake news, 30 ans d’infox utilisées par les Occidentaux, éd. Max Millet, 2020. ↩
- « No One Should Have Sole Authority to Launch a Nuclear Attack: Leaving the decision to strike to the president alone is dangerous », Scientific American, August 1, 2017, https://www.scientificamerican.com/article/no-one-should-have-sole-authority-to-launch-a-nuclear-atack/ ; « By the Way, Donald Trump Could Still Launch Nuclear Weapons at Any Time », Wired, 11/17/2020, https://www.wired.com/story/donald-trump-nuclear-weapons-system-reform/ ↩
- Amos N. Guiora, « Accountability and Decision Making in Autonomous Warfare: Who is Responsible? », Utah Law Review, vol. 2, 2017, pp. 394-422. ↩
- Jonathan Bright, « Explaining the emergence of fragmentation on social media: the role of ideology and extremism », Journal of Computer-Mediated Communication, 23 (2018) 17-33 © 2018. ↩
- Fouad Nohra, « Un autre regard sur la droite américaine : l’apport du courant antiétatique, du courant libertarien au Tea Party », Pascal Chaigneau (dir.), Enjeux Diplomatiques et Stratégiques, Economica, 2012, pp. 34-44. ↩
- Andrew C. McCarthy, How Obama Embrasses Islam’s Sharia Agenda, Encounter Broadside, 2010. En 2015, 43 % des Républicains et 54 % des partisans de Donald Trump sont persuadés que Barack Obama est musulman,
https://www.washingtonpost.com/news/acts-of-faith/wp/2015/09/14/a-startling-number-of-americans-still-believe-president-obama-is-a-muslim/ ↩ - Un exemple de discours ethnicisant à outrance le conflit avec la Russie Bolchévique est l’ouvrage de Denis Fahey. Denis Fahey, The Rulers of Russia, Printed in USA, 1940. ↩
- René Lefort, Afrique du sud, Histoire d’une crise, La Découverte, 1977. ↩
- Étienne Balibar et Immanuel Wallerstein, Race, nation, classe : les identités ambiguës, La Découverte, 2018. ↩
- Paul Feyerabend, Contre la méthode, Seuil, 1976. ↩
- Fouad Nohra, « La post-vérité : révolution intellectuelle ou pathologie de la pensée politique ? », Entertainment, Droit, médias arts et culture, 2019/1, pp. 8-19. ↩
- Trevor Diehl, Brian Weeks, Homero Gil de Zuniga. « Political persuation and social media: tracing direct and indirect of news use and social media », New media & Society, 2016, vol. 18(9), pp. 1875-1895. ↩