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dans N°1101, Politique

La science peut-elle tout expliquer ?

Etienne KleinParEtienne Klein
3 mars 2022
La science peut-elle tout expliquer ?

En 1939, Albert Einstein, invité à prendre la parole au séminaire de théologie de l’université de Princeton, déclara : « Il est indéniable que des convictions ne peuvent trouver de confirmation plus sûre que l’expérience et une pensée consciente claire. On ne peut sur ce point que donner raison aux rationalistes extrêmes. Mais le point faible de cette conception est que les convictions indispensables pour agir et porter des jugements ne peuvent en aucun cas être obtenues par cette seule voie scientifique avérée. La méthode scientifique ne peut en effet rien nous apprendre d’autre qu’à saisir conceptuellement les faits dans leurs déterminations réciproques. Le désir d’atteindre à une connaissance objective fait partie des choses les plus sublimes dont l’homme est capable. Mais il est d’autre part évident qu’il n’existe aucun chemin qui conduise de la connaissance de ce qui est à celle de ce qui doit être1. »

Le père de la relativité a presque tout dit là : grâce à la démarche scientifique, nous sommes devenus capables d’acquérir des connaissances objectives sur le monde, ce qui est en soi une prouesse, mais pour autant, la science ne peut pas tout, contrairement à ce qu’avaient espéré les scientistes radicaux, les « rationalistes extrêmes » comme les appelle Einstein. Ceux-là pensaient que la science pourrait répondre à l’ensemble des questions que nous nous posons, y compris à celles que nous qualifions de philosophiques ou de métaphysiques : au bout du compte, elle parviendrait à expliquer non seulement l’univers physique, mais aussi la vie et la conscience dans tous leurs aspects, nous prescrivant ainsi ce qui est bon ou mauvais. Philanthropes souvent zélés, fascinés par les succès de la science, ils avaient su trouver des accents lyriques pour annoncer que leur nouvelle déesse finirait par apporter une heureuse réponse à toutes les interrogations qui nous tourmentent, et éclairerait ainsi nos vies dans leur ensemble. Par leur entremise, l’esprit scientifique attira sur lui le préjugé d’une compétence universelle.

L’universel que les sciences mettent au jour est par essence incomplet

Plus de quatre-vingts ans après la conférence d’Einstein, un tel optimisme se fait plus rare, même si on continue d’entendre des propos exagérément enthousiastes : régulièrement, des physiciens théoriciens aux allures de cadre supérieur de chez Méphistophélès affirment qu’ils sont en passe d’encapsuler le monde dans leur grosse cervelle, de faire entendre sous la forme d’une équation unique le poème admirable qui sans cesse scande l’univers, bref de découvrir la « Théorie du Tout » qui permettra une description à la fois exacte et totalisante de ce qui est.

Mais on ne peut pas honnêtement promettre que la science nous mènera aussi loin. Car, au fond, les sciences ne traitent vraiment bien que des questions… scientifiques !

Or celles-ci ne recouvrent pas l’ensemble des questions qui se posent à nous. Du coup, l’universel que les sciences mettent au jour est, par essence, incomplet. Il n’aide guère à trancher les questions qui restent en dehors de leur champ. En particulier, il ne permet pas de mieux penser l’amour, la liberté, la justice, les valeurs en général, le sens qu’il convient d’accorder à nos vies. Par exemple, le fait de savoir de façon certaine qu’il y a dans chaque atome le même nombre de particules de charge positive que de particules de charge négative ne nous indique guère quel usage nous devrions faire de la parité en politique. L’universel que produisent les sciences ne définit pas davantage la vie telle que nous aimerions ou devrions la vivre, ni ne renseigne sur le sens d’une existence humaine : Comment vivre ensemble ? Comment se tenir droit et au nom de quoi le faire ? De telles questions sont certes éclairées par la science, et même modifiées par elle – un homme qui sait que son espèce n’a pas cessé d’évoluer et que l’univers est vieux de 13.7 milliards d’années ne se pense pas de la même façon qu’un autre qui croit dur comme fer qu’il a été créé tel quel en six jours dans un monde qui n’aurait que six mille ans –, mais leur résolution se fait au-delà de son horizon.

Ce n’est que dans la seconde moitié du XXe siècle qu’on a vraiment pris conscience qu’il existe une ligne de partage entre science et valeur, et ce constat a sournoisement modifié notre rapport à la science. Chez ceux qui l’apprécient pour ce qu’elle est, il a engendré une sorte de dégrisement salutaire, libérateur même. Mais chez les autres, ce dégrisement a pris la forme d’un sentiment de déception, dû à un malentendu : on avait chargé la science de tâches morales ou politiques qu’elle est impuissante à remplir. Les questions relatives à nos valeurs, m’a-t-on souvent expliqué à la fin de mes conférences, sont celles qui nous importent le plus, car c’est autour d’elles que nous déterminons nos actes, construisons nos aspirations, nos projets. Dès lors, si la science se montre incapable de nous fournir les références dont nous avons besoin, si elle éclaire le vrai mais sans pouvoir lui conférer un sens, il n’y a rien d’étonnant à ce que nous relativisions ses conquêtes, ou n’y prêtions que peu d’attention.

Il faut entendre l’argument, mais aussi s’en méfier, car il peut mener tout droit à la marginalisation des savoirs scientifiques. De plus, l’idée selon laquelle la science n’aurait pas de conséquences sur le plan moral n’est vraie que d’un point de vue strictement logique : on ne peut pas déduire une affirmation de type moral uniquement à partir d’assertions factuelles. Mais, d’un point de vue social, politique et psychologique, c’est plutôt le contraire qui s’est produit : au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, en Europe, puis un peu partout dans le monde, la science a joué un rôle d’acide, dissolvant progressivement certaines croyances enseignées par les autorités supposées naturelles, qu’il s’agisse du clergé, de la monarchie ou de l’aristocratie. Il suffit de repenser à Galilée, qui a souffert pour les droits de la raison et de l’expérience face aux dogmatismes de toutes sortes, et dont les idées ont fini par triompher. La science n’énonce certes pas ce que nous devons penser, mais à propos des choses ou des phénomènes qui relèvent de sa compétence, elle a d’autant plus d’autorité pour nous indiquer ce que nous ne pouvons plus croire, et comment agir sur certains phénomènes.

La connaissance scientifique a ceci de paradoxal qu’elle ouvre des options tout en produisant de l’incertitude, une incertitude d’un type très spécial : nous ne pouvons pas savoir grâce à nos seules connaissances scientifiques ce que nous devons faire d’elles.

Par exemple, nos connaissances en biologie nous permettent de savoir comment produire des OGM mais elles ne nous disent pas si nous devons le faire ou non. C’est affaire de valeurs, et la science n’édicte pas de valeurs. Mais cela ne l’empêche pas d’en avoir une, et même plusieurs. La plus importante tient à ce qu’elle peut, dans certaines situations, faire des « découvertes philosophiques négatives » : certains de ses résultats modifient les termes en lesquels certaines questions philosophiques se posent, apportent des contraintes, et s’invitent ainsi dans des débats qui leur sont a priori extérieurs. Cela les rend éminemment précieux, et fait du même coup de la science un « trésor d’incomplétude ». Qui oserait de nos jours disserter sur la matière en restant à Aristote, sans jamais évoquer la découverte de l’atome auquel le philosophe ne croyait pas ? de la nature du « réel » sans faire référence aux leçons révolutionnaires de la physique quantique ? de la structure de l’espace-temps sans tenir compte des équations de la théorie de la relativité ? Certaines avancées scientifiques obligent la réflexion philosophique à se remobiliser, à ouvrir de nouveaux chemins de pensée, parfois à carrément se corriger.

C’est parce qu’elle n’embrasse pas toutes choses que la science devient féconde

Une connaissance objective de la nature ne saurait suffire à résoudre les problèmes généraux de la cité, ni à étancher les aspirations de notre âme, ni à fournir de son propre élan une sagesse qui nous parle. La politique, l’éthique, la spiritualité et la philosophie nous demeurent absolument et définitivement indispensables. Dont acte. Mais cette incomplétude de la science ne signifie pas son échec ! Au contraire même, puisqu’elle est précisément la condition de sa fulgurante efficacité : c’est parce qu’elle n’embrasse pas toutes choses que la science étreint bien et devient féconde. Il lui faut circonscrire son objet, le délimiter, de sorte que cet objet ne peut être d’emblée la totalité de ce qui est. Et cela ne saurait constituer un argument pour ne plus s’intéresser aux résultats, que nulle autre démarche de connaissance, ni aucune tradition philosophique ou religieuse n’ont pu obtenir avant elle ni ne peuvent aujourd’hui contester. Les connaissances que produit la science sont, en ce sens, extraordinaires. Certes, elles ne peuvent guère éclairer le sens de nos vies, mais ce qu’elles révèlent est singulier, unique. La science est souveraine dans son ordre, maîtresse des réponses aux questions délimitées qui sont les siennes. Nous devons en prendre acte. Car comment croire que le rejet de la connaissance scientifique deviendrait ipso facto pourvoyeur de sens, de vitalité existentielle, de ressourcement spirituel ? Porteur de croyances régénératrices ? Opérateur de salut pendant qu’on y est ?

Jeter hors du bain de la culture, par dépit ou par fanatisme, les savoirs scientifiques reviendrait implicitement à considérer l’ignorance comme le meilleur remède à nos tourments existentiels ou métaphysiques.

Ce serait absurdement rejeter tous les résultats de la science au seul motif que les attentes du scientisme ne se sont pas réalisées. Or le scientisme est une idéologie que la science peut susciter mais n’implique nullement. Simplement, sous couvert de triomphe de la raison et en vue du bonheur de l’humanité, on a, à certaines époques, présenté la science comme la nouvelle idole, porteuse d’un projet métaphysique, celui du dévoilement complet de l’Être. Mais ce projet n’est qu’une illusion, que Nietzsche avait fort bien dénoncée : « Il existe un fantasme profond, écrivait le bouillant philosophe, qui vient au monde, pour la première fois, dans la personne de Socrate : la croyance inébranlable que la pensée, en suivant le fil conducteur de la causalité, peut atteindre jusqu’aux abîmes les plus lointains de l’être et qu’elle est à même non seulement de connaître l’être, mais encore de le corriger. Cette sublime puissance d’illusion métaphysique est attachée à la science comme un instinct2. » C’est cet attachement instinctif qu’il faut défaire : la science n’est ni bonne ni mauvaise, et elle ne nous adresse pas la parole. Elle ne nous a donc rien promis, ni ne s’est engagée sur rien : seuls les humains, scientifiques ou non, parlent, parlent d’elle ou pour elle, et l’engagent dans des prophéties. Il faut donc raffoler des raccourcis rhétoriques pour oser prétendre qu’elle nous aurait personnellement trahis.

Étienne KLEIN
Physicien, philosophe des sciences

  1. Albert Einstein, Œuvres choisies, Paris, Le Seuil/Éditions du CNRS, 1991, vol. 5, p. 165. ↩
  2. F. Nietzsche, La Naissance de la tragédie (1872), Coll. Folio, Gallimard, 1989, p. 234. ↩

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