Les nouvelles du jour charriées inexorablement ad nauseam par les médias ne prêtent guère à sourire en dépit du réveil de la nature et illustrent plus que jamais l’incertitude de l’heure, les épreuves à venir et la sensation diffuse mais tenace d’une perte de boussole et de cap dans une France confrontée comme le reste de l’Europe et du monde aux soubresauts d’une pandémie dont on ne voit plus la fin.
Qui sera notre Leclerc aujourd’hui pour nous signaler l’heure de la délivrance et nous inciter à tenir bon sans succomber au découragement et au renoncement ?
Dans un petit village de l’Ouest de la France privé cette année de la grand-messe du Salon de l’agriculture, seuls les très anciens masqués et résignés ronchons se souviennent peut-être encore de la phrase rédigée par Emmanuel Berl à l’intention d’un discours célèbre du Maréchal Pétain – la terre, elle, ne ment pas – et il est bien singulier et révélateur que finalement c’est dans la glèbe des sillons si malmenée et mise en danger par la folie des hommes du monde nouveau que beaucoup cherchent une réponse pour apaiser leur angoisse…
Cette phrase qui a traversé les années, associée à un courant dit réactionnaire et chargé de tous les anathèmes, prend une résonance particulière sur fond de délitement généralisé et de défiance de la parole publique et d’une communication politique tellement prolixe qu’elle en devient inaudible et suscite tous les rejets en créant toutes les suspicions, terreau de toutes les aventures…
Pas un jour ne se passe sans annonces ou déclarations changeantes ou contradictoires sur les indicateurs de la pandémie, les mesures prises pour la combattre, le statut de la campagne de vaccination, son état réel d’avancement, les remèdes mis à disposition de la population dans son ensemble et leur efficacité, les perspectives de sortie de cette période de contraintes et de restrictions qui pèsent de plus en plus lourd sur l’économie du pays et le moral de ses habitants… Couvre-feu ou confinement déguisé, plus personne ne comprend réellement les stratégies retenues et beaucoup s’affranchissent des règles sanitaires au fur et à mesure où le jour rallonge, tandis que de l’autre côté du Rhin, les autorités allemandes manifestent leur méfiance sur les mesures prises en France en contrôlant strictement l’accès des frontaliers mosellans sur leur territoire national…
Pas une journée non plus sans mesurer le degré de déliquescence du corps social à travers l’explosion d’une violence sauvage qui ravage les éléments les plus vulnérables de sa jeunesse et contribue au désespoir de ceux qui paieront le prix le plus fort de cette crise sans précédent. Dans les médias également, telle une litanie, s’égrène la liste de personnalités publiques accusées de manquements élémentaires au respect de l’intégrité et de la dignité d’autrui, comme si on avait percé tous les égouts de la société dans un vertige nauséabond, qui nous renvoie à des temps plus lointains où les Empires se sont écroulés sous les coups de boutoir des barbares, avant de disparaître…
Et comme si cela ne suffisait pas, la justice vient alimenter des doutes sur son impartialité et sur son indépendance vis à vis du calendrier électoral par des verdicts où il est question de faisceaux d’indices et non de preuves avérées pour d’ores et déjà contribuer à dresser le décor de la joute à venir en 2022… Les uns sont condamnés tandis que les autres bénéficient du sursis des lenteurs d’un système qui n’inspire hélas plus aucune confiance tant il est pollué par les a priori médiatiques, sans prendre garde au fatal danger pour la démocratie d’alimenter un peu plus le rejet de la classe politique par une portion de plus en plus grande de la société (Tous pourris, tous coupables…).
Alors oui, la terre semble l’ultime refuge pour échapper à la dureté des temps, et sa beauté, en dépit des blessures infligées par l’homme dans sa course aveugle au profit, parvient printemps après printemps à nous faire oublier que l’heure tourne inexorablement et que se rapproche le moment fatidique de rendre des comptes tôt ou tard. Les cohortes de citadins venus chercher l’apaisement en bord de mer, à travers champs ou sur les pentes enneigées, en cette année frustrée de Salon de l’agriculture, sont aussi le reflet d’une attente.
A la croisée des chemins et du pari des politiques, entre espoir et colère contenue, la voie est très étroite et les semaines à venir semées d’embûches.
Souvenons nous de la poignée de soldats réunis autour de Leclerc un 2 mars il y a 80 ans à Koufra…