Alors que le conflit en Ukraine entre dans son deuxième mois et que le monde assiste impuissant à la destruction systématique de ce pays ami et voisin, la situation géopolitique semble se dégrader encore malgré le courageux périple du Président Zelensky qui parcourt le monde via ZOOM pour demander de l’aide en armes, et une no-fly zone. 

Si les armes arrivent de pays amis, si l’ONU, l’Union européenne ressuscitée comme l’OTAN ont pris des résolutions fortes et unanimes, la situation sur le terrain inquiète.

Elle inquiète évidemment en raison de la violence des combats, du ciblage des civils et des destructions massives des infrastructures ukrainiennes.

Elle inquiète aussi car le Président Poutine, qui manifestement ne s’attendait pas à une telle résistance, semble faire feu de tout bois pour recruter de la chair à canon.

On a évoqué les bataillons du sinistre Tchéchène Kadyrov, les bataillons de mercenaires Wagner, des Djihadistes venus de Syrie et d’Irak et voici que dans ce « melting pot » de la mort on parle de l’arrivée d’un bataillon de « soldats » du Hezbollah libanais.

Si le chef du Hezbollah a nié l’intervention de ses « troupes » il y a quelques jours dans tous les médias¹, il semble bien qu’il n’ait pas vraiment tenu parole.

Le site d’information ukrainien Strana indique que des troupes du Hezbollah seraient sur le terrain en appui aux troupes russes en perdition².

Cette information, si elle est vérifiée, peut changer la nature du conflit.

Elle entraîne le Liban vers une participation à une guerre illégale condamnée par presque toute la communauté internationale.

Chacun connaît le rôle et la place du Hezbollah dans la vie politique du Liban, pays qui jusqu’à ce jour n’est pas un ennemi de l’Ukraine.

On rappellera le rôle des militaires ukrainiens dans le déminage du pays après le retrait des troupes israéliennes.

Le Liban, à mon sens, et je ne pense pas être démentie, a bien assez de soucis pour voir une partie de sa population s’engouffrer dans une guerre illégale, avec l’intervention de troupes du Hezbollah, classé, il faut le rappeler, sur la liste des organisations terroristes dans de nombreux pays – sauf la France qui continue de distinguer Hezbollah politique et Hezbollah militaire…. 

En dehors du caractère illégal de cette intervention, les conséquences pour le Liban d’une participation effective de membre d’un parti au gouvernement et très puissant serait purement suicidaire.

Il faudrait alors appliquer des sanctions au Liban qui ne vit, pour l’instant, encore que de l’aide internationale alors que ses institutions sont fragilisées depuis des décennies par des conflits entre puissances dont il est le théâtre privilégié des opérations.

Omar Harfouch, candidat aux élections à Tripoli, a réagi sur ses réseaux contre cette intervention qu’il est pour l’instant le seul à dénoncer ; on respecte son courage et sa clairvoyance.

Le Liban est déjà bien assez meurtri pas des années de guerre par procuration entre l’Arabie Saoudite et l’Iran, Israël et les USA restant en embuscade vigilante, et les libanais bien assez punis et victimes d’une situation qui leur échappe par suite de la confiscation des procédures démocratiques par une nomenklatura corrompue.

Le Hezbollah en Ukraine, c’est aussi le signe de l’alliance Russie-Iran sur un théâtre d’opération voisin de l’Europe à quelques encablures de la Turquie.

C’est une alliance qui ne devrait pas laisser les Israéliens indifférents, car par le jeu de la réciprocité cela pourrait laisser penser que la Russie et l’Iran pourraient soutenir le Hezbollah à la veille des élections législatives programmées au Liban dans quelques semaines.

Si ces faits sont avérés, ils sont d’une gravité extrême et pourraient conduire à un conflit généralisé entre puissances.

L’Ukraine pourrait alors devenir, non pas une zone neutre mais bien au contraire une zone de non-droit aux frontières de l’Europe.

En plus du risque de troisième guerre mondiale, déjà anxiogène, se dessine le risque de ruine et de disparition du Liban, pays ami, pays frère de la France.

Nathalie Goulet
Sénateur de l’Orne