ExxonMobil soutient l’Accord de Paris et a annoncé en début d’année son ambition d’atteindre la neutralité carbone pour ses opérations d’ici 2050. C’est un challenge colossal, auquel nous, filiale française du groupe, adhérons pleinement ! Nous sommes en effet convaincus que les secteurs du raffinage et de la pétrochimie font partie de la solution, notamment grâce à nos infrastructures et nos savoir-faire dans le domaine de l’approvisionnement en énergie à grande échelle. Malgré son engagement à offrir une énergie fiable, abordable et durable à nos concitoyens, notre industrie souffre d’un déficit d’image que nous souhaitons corriger en communiquant davantage sur notre mission, nos atouts et nos besoins.
1. Notre stratégie pour réduire les émissions de gaz à effet de serre des secteurs les plus émetteurs est concrète et repose entre autres sur trois technologies : les carburants liquides bas carbone, l’hydrogène bas carbone et le CCS (Captage et Stockage de CO2). Compte tenu des enjeux, la mise en place de ces solutions bas carbone demandera de lourds investissements. Le groupe ExxonMobil va engager 15 milliards d’euros sur les cinq prochaines années au niveau mondial. Les différentes filiales du groupe sont en concurrence pour attirer ces investissements. Les décisions seront prises en évaluant les cadres nationaux, règlementaire, fiscal et social, qui font partie des critères les plus importants pour ces choix stratégiques. Même si la situation s’est améliorée, la France reste en retrait par rapport à ses principaux concurrents en Europe notamment à cause d’un manque de visibilité et de stabilité règlementaire et fiscale.
Quand vous investissez pour quinze ou vingt ans, compte tenu des prises de risques, il serait souhaitable que ces règles, même contraignantes, soient résilientes aux alternances politiques.
2. La fiscalité : dernier exemple en date, l’amendement du projet de loi de finances 2023 concernant la taxation des superprofits : cette décision est perçue comme une injustice après des années de pertes dans les secteurs du raffinage et de la chimie, en particulier pendant la crise sanitaire, alors que notre industrie doit investir massivement dans la transition énergétique.
Cette mesure vient casser la dynamique fiscale favorable aux entreprises mise en place lors du quinquennat précédent.
Changer les règles en plein milieu du jeu crée un déficit de confiance qui n’incite pas les entreprises à investir, d’autant que la France est toujours derrière ses principaux concurrents européens en matière fiscale.
3. La politique énergétique : les réglementations européennes et françaises ont tendance à imposer les solutions technologiques de la transition énergétique comme par exemple la voiture électrique. De telles décisions, souvent idéologiques, ferment la porte à des solutions alternatives permettant d’atteindre les mêmes objectifs environnementaux. Les carburants liquides bas carbone que nous savons fabriquer et qui nécessitent peu d’investissement en termes d’infrastructure permettraient, par exemple, une transition plus rapide et moins coûteuse. L’urgence climatique est là, nous avons besoin d’un cadre réglementaire qui soit vecteur d’accélération mais qui doit laisser aux industriels les choix technologiques.
L’attractivité industrielle se construit aussi dans la concertation et le partage des risques.
L’État doit être aux côtés des industriels et prendre sa part, grâce notamment à des mécanismes qui offrent une rentabilité minimum aux investisseurs, alors que les conditions de marché sont très incertaines, par exemple l’accès aux énergies renouvelables ou encore le niveau de prix du carbone.
Enfin, le dernier point que je souhaite aborder est celui du climat social, qui nuit fortement à l’attractivité de notre pays. Je ne reviens pas sur l’actualité de ces derniers mois mais il y a dans notre pays une culture de la grève préventive dure et destructrice, voire politique, qui fait fi des accords majoritaires et qui est désastreuse pour notre image. Malgré les avancées des lois sur le travail, il reste beaucoup à faire pour réformer notre dialogue social et restaurer un nécessaire équilibre.
La France a l’opportunité de prendre le leadership européen dans la transition énergétique en s’appuyant sur son mix énergétique, son implantation géographique, ses infrastructures, ses talents et son influence politique.
Si notre pays n’agit pas rapidement en faveur de réglementations énergétiques et fiscales lisibles et efficaces, d’une approche pragmatique ouverte à toutes les technologies et faisant la part belle à l’innovation, associées à un partage des risques équitables, tout ceci dans un climat social apaisé, alors ces projets industriels dont nous avons tant besoin pour pérenniser notre industrie et notre souveraineté énergétique s’implanteront ailleurs. Ne ratons pas cette opportunité.
Charles Amyot
Président directeur général de Esso SAF
Président des sociétés du groupe ExxonMobil France