Ce que ces événements ont laissé apparaître également ce sont deux lectures qui s’affrontent et dont les lignes recoupent peu ou prou le bon vieil affrontement droite/gauche que le Président de la République aspirait à transcender : d’un coté une lecture sociale qui avec un dégradé de nuances tend à rechercher dans des inégalités structurelles les racines de cette explosion émeutière ; de l’autre une vision culturelle qui voit dans l’enchaînement de ces événements l’expression d’un défaut d’assimilation, voire d’un sécessionnisme. Emmanuel Macron entre ces deux interprétations parait chercher sa voie, cheminant sur une ligne de crête où entre imputation aux réseaux sociaux, aux parents et aux insuffisances de la politique de la ville il s’efforce de livrer des clefs d’explication susceptibles de rassurer et d’attester qu’il est en mesure de contrôler la situation. A voir…
Il pourra toujours se satisfaire d’avoir eu à éviter le recours à un état d’urgence à l’instar de ses prédécesseurs en 2005, comme il pourra toujours arguer d’un retour au calme quelques jours seulement après le début des violences. Pour autant, il s’agit là d’un retour à la normale dont chacun pressent qu’il demeure bien précaire.
Les racines profondes du problème demeurent, ce sont celles d’un modèle républicain qui n’a pas su, pu et surtout voulu protéger contre les effets corrosifs d’une globalisation qui désarticule tant notre ordre social que notre ordre civique.
Faute d’une réappropriation de notre histoire profonde et de notre paradigme agrégateur, il est à craindre que perdure et s’aggrave une tendance lourde de balkanisation qu’aucune politique publique d’essence technocratique ne pourra contenir. Seule une réactivation de nos fondamentaux sera en mesure d’inverser le cours des choses : la République, toute la République, rien que la République.
Arnaud Benedetti
Rédacteur en chef de la Revue Politique et Parlementaire
Professeur associé à l’Université Paris Sorbonne