Un seul portefeuille vous manque et tout un gouvernement est dépeuplé… Quarante et un membres mais aucun ministre, ministre délégué ou secrétaire d’État dédié aux PME ! Pour ces dernières, le risque est donc celui d’un gouvernement Barnier fort lourd mais peu agile.
Bons et loyaux services
Pourtant, depuis que le portefeuille est apparu en 1969, à l’époque sous la forme d’un Secrétariat d’État à la moyenne et la petite industrie et à l’artisanat sous le gouvernement de Jacques Chaban-Delmas, le ministère chargé des petites et moyennes entreprises (PME) a rendu de bons et loyaux services à l’économie française. Avec une communauté de plus de 150 000 entreprises de 10 à 250 salariés, c’est le ministère des PME qui s’occupe d’assurer pour leurs dirigeants et salariés un environnement administratif, financier, fiscal et normatif aussi favorable que possible.
C’est aussi ce ministère qui promeut la cause de l’entrepreneuriat et du développement des entreprises, un enjeu si important pour un pays comme la France qui peine encore à faire grandir ces PME pour les faire devenir des entreprises de taille intermédiaire (ETI), destinées à renouveler le tissu productif français autour du CAC 40.
C’est encore ce ministère qui fait tout pour que ces entreprises, qui pèsent tant dans l’emploi hexagonal, continuent à faire prospérer les villes moyennes et un certain nombre de territoires urbains mais aussi ruraux qui vivent de l’essor local de ces PME, dont chaque année un plus grand nombre – bien qu’encore trop limité – parvient à se projeter sur les marchés étrangers et à faire briller la France à l’international.
C’est toujours ce ministère qui dialogue au quotidien, au même titre que le ministère du Travail, avec les principales organisations patronales, le MEDEF et la CPME, ainsi que les organisations représentatives des salariés réunies dans une même volonté de défendre la compétitivité, l’emploi et les conditions de travail dans ces entreprises petites et moyennes qui regorgent de créativité et sont sources d’innovation.
Absence symbolique, bridage concret
Cela laisse toujours un vide quand un organigramme ministériel présenté sur le perron de l’Élysée ne comporte pas de ministère chargé des PME, comme c’est aujourd’hui le cas. Certes, ce n’est pas la première de l’histoire récente. Mais hormis sous les deux septennats de François Mitterrand (1981-1995), les absences furent ponctuelles. Et le fauteuil de ministre des PME fut souvent occupé par des personnalités politiques d’envergure, à l’instar d’Alain Madelin, Jean-Pierre Raffarin ou Hervé Novelli, le père du régime de l’auto-entrepreneur, et dernièrement encore Olivia Grégoire.
Bien sûr, les PME ont bien un ministre de tutelle. Au terme d’une étude attentive de la composition du gouvernement et des décrets d’attribution, c’est Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la Ruralité, du Commerce et de l’Artisanat, qui a la charge des PME.
Mais l’absence de ministère dédié va plus loin qu’une simple dépriorisation symbolique : elle bridera très concrètement, au plus mauvais moment, la conception, la réalisation et le suivi des politiques publiques dont les PME ont pourtant urgemment besoin.
Pour affronter les tempêtes que traversent les PME françaises depuis ces crises en cascade qui les privent souvent de tout leur souffle, pour les amener aussi avec volontarisme vers les nombreuses transformations – numérique, écologique, financière, etc. – à accomplir, et sans lesquelles elles ne pourront prétendre aux premiers rangs sur la scène nationale et internationale, nos petites et moyennes entreprises méritent un ministère qui leur soit entièrement dédié.
Alors, Monsieur le Président de la République, sur proposition du Premier ministre, nous espérons que vous ferez très prochainement aux PME toute la place qu’elles méritent dans ce gouvernement. Car il n’y aura pas de réussite française sans celle des entreprises et il n’y aura pas de réussite des entreprises sans celle des PME.
Bernard COHEN-HADAD,
Président fondateur du think tank Étienne Marcel, auteur de « L’avenir appartient aux PME » (Dunod, 2024)
François PERRET,
Vice-président du think tank Étienne Marcel, auteur de « Non, votre salaire n’est pas l’ennemi de l’emploi ! » (Dunod, 2022)