Il est entendu que les partis politiques français sont actuellement défaillants pour exprimer des idées et des principes clairs, compréhensibles pour favoriser et améliorer la vie commune de tous. Aucun d’entre eux ne propose un programme simple et mobilisateur auquel les citoyens pourraient adhérer en toute connaissance de cause. Face à cette vacuité, il est logique que l’abstention et la perte de sens civique ne cessent de se développer. Et quand, ici ou là, on ose s’étonner publiquement de cette situation et en regretter les effets délétères, c’est au risque d’être taxé de putschiste ou d’extrémiste de droite, voire de gauche parce qu’on porterait atteinte au sacro-saint « politiquement correct », censé suppléer à toute réflexion de fond et à garantir le maintien du couvercle sur une société au bord de l’ébullition.
Alors, n’est-il pas du devoir de chacun de tenter d’apporter sa pierre à l’édifice branlant pour le conforter et lui permettre de se maintenir quelques décennies encore?
On pourrait ainsi proposer que la France soit une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ; qu’elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion, afin de respecter toutes les croyances et que nul ne soit inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi. Aussi nul ne pourra être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances.
La loi favorisera l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales, car elle garantira à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme. On affirmerait ensuite que, quelles que soient les modes et les snobismes du moment, la langue de la République serait le français car elle est un élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France ; à ce titre, elle est la langue de l’enseignement, du travail, des échanges et des services publics. Plus largement, dans la désignation, l’offre, la présentation, le mode d’emploi ou d’utilisation, la description de l’étendue et des conditions de garantie d’un bien, d’un produit ou d’un service, ainsi que dans les factures et quittances, l’emploi de la langue française serait obligatoire. Les mêmes dispositions s’appliqueraient à toute publicité écrite, parlée ou audiovisuelle et toute inscription ou annonce apposée ou faite sur la voie publique, dans un lieu ouvert au public ou dans un moyen de transport en commun et destinée à l’information du public et qui devrait être formulée en langue française.
Dans le but d’établir des fondements politiques, sociaux, économiques et culturels solides, la devise de la République serait “Liberté, Égalité, Fraternité” et son principe en serait : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. La souveraineté nationale appartiendrait à ce dernier qui l’exercerait par ses représentants et par la voie du référendum. On veillerait scrupuleusement à ce qu’aucune section du peuple ni aucun individu ne puisse s’en attribuer l’exercice, notamment le Président de cette République. Seuls seraient électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques.
Dans cette société, les Hommes y naîtraient et y demeureraient libres et égaux en droits.
Les distinctions sociales ne pourraient y être fondées que sur l’utilité commune et la libre communication des pensées et des opinions étant un des droits les plus précieux de l’Homme, tout Citoyen pourra donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.
Pour pallier la carence actuelle en la matière, les partis et groupements politiques concourraient à l’expression du suffrage. Ils se formeraient et exerceraient leur activité librement. Bien entendu, ils devraient respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie. Le but de ces associations politiques serait la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’Homme ; étant entendu que ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression.
À défaut d’imaginer dans l’immédiat un système plus démocratique (voir plus haut), un Président de la République veillerait au respect de la Constitution. Il assurerait, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État. Enfin, il serait le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des traités. Toujours à titre provisoire dans l’attente de l’établissement d’un dispositif moins susceptible de permettre l’exercice d’un pouvoir trop personnel, il serait élu pour cinq ans au suffrage universel direct mais nul ne pourrait exercer plus de deux mandats consécutifs. C’est lui qui nommerait le Premier ministre, comme il pourrait mettre fin à ses fonctions sur la présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement. Sur la proposition du Premier ministre et uniquement de cette manière, il nommerait les autres membres du Gouvernement et mettrait fin à leurs fonctions.
Quand bien même ce Président de la République présidera le conseil des ministres et sera le chef des armées, c’est le Gouvernement qui déterminera et conduira la politique de la Nation. Pour ce faire, il disposerait de l’administration et de la force armée et serait, en contre partie de ces éminents pouvoirs, responsable devant le Parlement. C’est ainsi que, seul, le Premier ministre pourrait diriger l’action du Gouvernement, serait responsable de la Défense nationale et assurerait l’exécution des lois. Pour l’essentiel, il exercerait le pouvoir réglementaire et nommerait aux emplois civils et militaires.
Parce que le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation, nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. La Loi étant l’expression de la volonté générale, tous les Citoyens auraient le droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle devrait être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Aussi, dans le strict respect de la séparation des pouvoirs, le Parlement voterait la loi. Or, la liberté consistant à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi. Celle-ci n’aurait le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui ne serait pas défendu par la Loi ne pourrait être empêché, et nul ne serait contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas.
Le Parlement contrôlerait aussi l’action du Gouvernement et évaluerait les politiques publiques. Afin de prévenir toute influence occulte ou minoritaire sur les parlementaires et autres élus, tout mandat impératif serait nul et le droit de vote des membres du Parlement serait personnel. L’équilibre entre pouvoirs législatif et exécutif serait établi en reconnaissant l’égalité d’initiative des lois, concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement.
Dans une telle société, ainsi réorganisée et assainie, où les Citoyens seraient réellement égaux, ceux-ci pourraient accéder à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. Par ailleurs nul homme ne pourrait être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et selon les formes qu’elle aura prescrites. Ceux qui solliciteront, expédieront, exécuteront ou feront exécuter des ordres arbitraires, devront être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi devra obéir à l’instant : il se rendrait coupable par la résistance. Concrètement, les droits assurés à tout citoyen concerneront notamment la liberté d’association, les droits de la défense, la liberté individuelle, la liberté d’enseignement notamment la liberté académique et l’indépendance des professeurs et des maîtres de conférences d’université, la liberté de conscience ainsi que l’indépendance de la juridiction administrative. En contre partie, la Loi n’établira que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne pourra être puni qu’en vertu d’une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée. De même, tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté aura droit d’asile sur les territoires de la République.
Certes, la garantie des droits de l’Homme et du Citoyen nécessite une force publique mais cette force sera instituée pour l’avantage de tous et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée et, pour son entretien ainsi que pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable mais elle sera également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. Ceux-ci auront le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de cette contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée ; ils pourront aussi demander compte à tout Agent public de son administration.
Pour pouvoir bénéficier effectivement de l’exercice de tous ces droits, le peuple français a bien conscience qu’il est impératif d’y associer le respect de principes politiques, économiques et sociaux tels que chacun ait le devoir de travailler et droit d’obtenir un emploi, de défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale, d’adhérer au syndicat de son choix et d’exercer le droit de grève dans le cadre des lois qui le réglementent. Afin d’éviter l’accaparement par des particuliers d’instruments économiques vitaux, tout bien, toute entreprise, dont l’exploitation a ou acquiert les caractères d’un service public national ou d’un monopole de fait, deviendra la propriété de la collectivité.
Face au défi créé par la dégradation du milieu naturel et pour assurer aux générations futures la possibilité de vivre dans les meilleures conditions possibles, le peuple français proclamera que chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé mais que toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement ; notamment en prévenant, dans les conditions définies par la loi, les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences. Chacun contribuera à la réparation des dommages qu’il aura éventuellement causé. Les politiques publiques promouvront un développement durable. A cet effet, elles concilieront la protection et la mise en valeur de l’environnement, le développement économique et le progrès social.
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Le lecteur attentif et averti n’aura pas manqué de relever que toutes les mesures proposées dans ce pseudo « programme électoral » font déjà partie de ce que, dans le jargon des facultés de droit, on appelle « le droit positif ». En bref, elles relèvent déjà du droit qui devrait être appliqué en France…sans qu’il soit besoin de ne rien y ajouter.
En conclusion, le vrai programme électoral consisterait à…appliquer la Loi. « Lourde tâche », aurait pu prédire le Général !
Hugues Clepkens