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dans Hors série HEIP, Politique

Réflexions sur quelques enjeux socio-philosophiques de l’espace public et ses métamorphoses à l’ère numérique

Pierre-Antoine ChardelParPierre-Antoine Chardel
14 juin 2021
Ere numérique

La notion d’espace public est au cœur de l’organisation démocratique. Elle définit un espace intermédiaire entre la société civile et l’État. On ne saurait toutefois parler d’un tel espace aujourd’hui sans tenir compte de la complexité de la réalité technologique qui le définit.

Les médias numériques permettent de créer un espace beaucoup plus large qu’autrefois, en redéfinissant les rapports entre citoyenneté et territoire. Leur développement provoque en effet une dislocation des concepts traditionnels de l’État et du citoyen dans leur lien à l’actualité d’un territoire strictement défini par ses frontières physiques. Les flux d’informations passent les frontières, le lien entre le politique et le local se trouve mis en question. Le développement des technologies dites du virtuel intensifie et accélère un processus de déterritorialisation et de délocalisation1. L’utilisation des médias numériques transforme également les modalités de l’action collective, en favorisant des formes plus spontanées et directes de participation. La mise en réseau de l’espace public permet-elle toutefois d’affirmer des formes significatives de sociabilité et d’engagement dans la sphère collective ? Qu’est-ce qui se joue, d’un point de vue socio-philosophique, dans les métamorphoses de l’espace public à l’ère numérique ?

L’internet : une espèce d’espace

Une analyse de l’évolution de l’espace public au travers des nouveaux médias doit se garder d’idéaliser les logiques de flux qui sont censées libérer la parole, celles-ci n’échappant pas selon la nature des régimes politiques en place à des mécanismes de surveillance et de censure, comme c’est le cas par exemple en Chine : si des formes de militantisme et de dissidence émergent avec la Toile, elles peuvent être à tout moment strictement contrôlées et étouffées. La libération de la parole qui intervient à certains moments n’équivaut pas à l’exercice de la liberté2. Sur un autre plan, à l’heure du capitalisme de surveillance, les espaces publics qui émergent avec les réseaux sociaux numériques sont davantage comparables aux espaces des centres commerciaux où l’attention des consommateurs est constamment sollicitée, où les comportements des usagers sont perpétuellement épiés. Si l’internet est bien plus qu’un média, comme l’a justement noté le philosophe américain des techniques Andrew Feenberg3, il n’est toutefois pas un espace public comme un autre ; il pourrait être défini davantage comme une espèce d’espace. Car si les réseaux permettent d’accentuer des formes d’engagement collectif, ce sont aussi des modes d’expression pulsionnelle et des passions tristes qui sont attisées dans les sphères publiques en ligne, à plus forte raison lorsque les effets de déresponsabilisation interviennent dans la télé-présence. Un sentiment d’impunité est aussi engendré par l’invisibilité que les technologies numériques de la communication permettent de créer. On est ici loin de l’espace public désignant un lieu où des personnes sont rassemblées pour discuter de l’organisation du vivre-ensemble. Historiquement, cette idée prend naissance dans l’Europe moderne, dans la constitution des espaces censés intervenir pour contrer le pouvoir des monarchies, en renvoyant à un idéal philosophique que l’on rencontre chez Emmanuel Kant, à la fin du XVIIIe siècle. L’espace public est un lieu où s’exerce la citoyenneté, en s’incarnant dans des lieux qui favorisent les échanges et les débats d’idées ; il est ainsi associé à la place publique d’un village, ou même aux cafés où se côtoyaient diverses catégories sociales, lieux propices à la circulation des idées ainsi qu’à l’émergence de mouvements politiques4.

Avec la virtualisation des modes de transmission et le développement des technologies de l’information, le principe même de publicité s’est considérablement élargi, tout en s’appauvrissant du fait que les médias de masse sont devenus des lieux de manipulation et de contrôle des affects.

Mais après les médias de masse (radio et télévision), nous assistons à l’avènement de modes de réception actifs et individualisés de l’information : « L’époque des mass médias fondés sur la communication pyramidale à sens unique, qui a nourri la théorie du spectacle, fait de plus en plus de place à un sujet interactif, à une communication individualisée, autoproduite… »5. Le déploiement des nouveaux médias numériques provoque en ce sens un changement assez décisif par rapport aux médias plus traditionnels, tels que la radio et la télévision. Cela dans la mesure où nous n’avons plus accès à un seul canal d’information, mais à une multitude de sources, avec surtout la possibilité d’échanger et de partager, par exemple, des images d’événements, en les mettant en commun via les réseaux sociaux. Les formes d’engagement dans la sphère publique que l’on voit s’intensifier avec les technologies numériques s’affranchissent des ordres établis, qu’ils soient politiques, culturels ou religieux. En offrant aux individus la possibilité d’être tour à tour émetteurs, récepteurs et relais d’information, les nouveaux médias permettent des échanges et des interactions en tout lieu et à tout instant. Susceptibles d’être mieux informés, d’interagir plus rapidement, les citoyens peuvent s’ouvrir à des sphères d’influence plus déterritorialisées. Les événements de 2011 en Tunisie ont justement fait ressortir ces dimensions. Par les réseaux numériques, de nouvelles modalités d’expression et de résistance politiques ont vu le jour, confortant l’idée que le pouvoir n’est plus seulement celui des États mais qu’il est susceptible de réapparaître dans leurs interstices, au travers de formes de dissidence qui sont amenées à se renouveler sans cesse.

Plus qu’un espace, le numérique ouvre un monde

La vitesse des réseaux et la simultanéité des échanges d’informations contribuent ainsi à redessiner les contours d’un activisme politique transnational. Et s’il existe une frontière très poreuse entre les mobilisations en ligne et celles de la rue et des places publiques, ces mobilisations virtuelles font face à ce que la techno-sociologue Zeynep Tufekci nomme une « paralysie tactique6 » qui s’illustre par une difficulté à transformer certaines revendications au niveau politique, faute de pouvoir faire émerger des figures de proue ou des leaders. Par ailleurs, le fait de pouvoir rejoindre un mouvement social en ligne, en exprimant un sentiment d’indignation ou de colère, ne donne pas nécessairement lieu à un engagement sur le long terme7. Mais plus qu’un espace, le numérique ouvre un monde. Un monde avec ses spécificités affectives, existentielles et symboliques, constituant un environnement à part entière, avec ses effets de contraintes qui ne disent pas leur nom mais qui le caractérisent pourtant bel et bien. Une conséquence des logiques d’instrumentalisation qui lui sont inhérentes est, entre autres, que nous assistons au développement de sphères privatisées. Les technologies numériques contribuent à une valorisation des individus ainsi qu’à la création de bulles informationnelles. Les informations reçues sont adaptées aux goûts des individus, à leur statut social, à leurs habitudes : c’est ainsi la figure de l’homme qui se transforme, ou plus exactement, qui confirme sa volonté de personnaliser son rapport à l’espace immédiat tout autant qu’au monde extérieur.

Chacun a désormais le sentiment de tout avoir virtuellement sous la main et de pouvoir ainsi rester dans son monde, en restreignant ainsi l’effort de se confronter au monde extérieur.

Car c’est par le registre du propre que s’opère l’ouverture à ce qui est censé être extérieur, ce qui génère un mode très ambivalent d’ouverture : nous pouvons être pleinement dans le monde mais sans les autres, c’est-à-dire sans avoir à nous confronter à eux dans l’expérience d’un face-à-face.

On est ici étonnamment proches de la situation que décrivait Günther Anders dans L’obsolescence de l’homme, où il analysait la volonté de l’individu de réduire au minimum la friction entre le monde et lui, en souhaitant ainsi produire un monde qui lui aille toujours mieux, voire parfaitement, « un monde qui lui aille comme un vêtement8 ». Il semble bien que nous nous rapprochons aujourd’hui d’un tel idéal, comme sans doute jamais auparavant, par des bulles produites par des algorithmes de filtrage et de sélection de contenus. Or il y a ici un risque de perdre le sens de l’agir commun, à force d’évoluer dans des environnements virtuels, dans une télécommunication permanente, qui contribuent à nous enfermer dans nos sphères subjectives en nous épargnant la confrontation directe avec autrui9. Vis-à-vis de ces risques d’appauvrissement du vivre-ensemble et du sens de l’agir collectif, il est important d’avoir à l’esprit ce qui se joue dans le passage d’un espace public physique à un environnement numérique. Les règles du jeu y sont tout à fait différentes d’un point de vue phénoménologique, en particulier relativement à la perception que nous avons d’autrui. Cela nécessite aussi de redéfinir les bases d’un contrat social élargi à ces sphères virtuelles qui facilitent la déresponsabilisation tout autant que des formes d’expression pulsionnelles. Par rapport à un tel état de fait, une éducation morale à l’ère numérique serait une manière de réintégrer des principes fondamentaux du vivre-ensemble. Cela imposerait aussi de ne pas se laisser séduire par l’ivresse que les technologies numériques procurent et des pièges qu’elles nous tendent (en nous faisant, par exemple, confondre le temps technique et le temps humain). Mais déjouer ces pièges nécessite de pouvoir effectuer un travail de décryptage et d’analyse des logiques d’influence que les réseaux numériques sont susceptibles de faire advenir. La métamorphose que nous vivons appelle en ce sens le développement d’un jugement critique, et plus précisément d’une techno-critique. La capacité d’agir des citoyens est à ce niveau en jeu dans une époque où une forte inculture numérique domine en générant encore beaucoup d’infantilisme dans la construction de ces espaces politiques d’un nouveau genre qui s’épanouissent avec le numérique.

Pierre-Antoine Chardel
Philosophe et sociologue
Professeur à IMT-BS (Institut Mines-Télécom Business School)
Chercheur à l’Institut Interdisciplinaire d’Anthropologie du Contemporain
IIAC / LACI, UMR 8177, CNRS / EHESS

  1. Voir à ce sujet : Jacques Derrida, L’autre cap, Paris, Minuit, 1991 ; Jacques Derrida et Bernard Stiegler, Échographies de la télévision, Galilée/INA, 1996. ↩
  2. Nous reprenons ici, et dans les pages qui suivent, des éléments de réflexion de l’ouvrage suivant : Pierre-Antoine Chardel, L’empire du signal. De l’écrit aux écrans, Paris, CNRS Éditions, 2020. ↩
  3. Andrew Feenberg : « … il faut analyser internet en tant qu’espace public plutôt qu’en tant que média qui aurait une mission bien précise, comme la radio ou la télévision. Comparer, comme on le fait parfois, internet et les médias professionnels, comme les journaux, par exemple, est tout simplement réducteur ». Andrew Feenberg, « La pensée de la technique : pour une approche humaniste », Entretien avec Pierre-Antoine Chardel, Esprit, n° 390, décembre 2012, p. 58. ↩
  4. Cf. Thierry Paquot, L’espace public, Paris, La Découverte, 2009. ↩
  5. Gilles Lipovetsky et Jean Serroy, L’écran global. Culture-médias et cinéma à l’âge hypermoderne, Paris, Seuil, 2007, p. 286. ↩
  6. Cf. Zeynep Tufekci, Twitter et les gaz lacrymogènes, Forces et fragilités de la contestation connectée, traduit de l’anglais (États-Unis) par Anne Lemoine, C&F Éditions, 2019. ↩
  7. Je me permets ici de renvoyer à : Pierre-Antoine Chardel, « S’engager dans un monde complexe. Quels défis pour la philosophie morale ? », Eco-ethica. The Journal of the Tomonobu Imamichi Institute for Eco-ethica, Editor Robert Bernasconi, vol. 9, Philosophie Documentation Center (Charlottesville, Virginia), à paraître. ↩
  8. Günther Anders, L’obsolescence de l’homme. Sur l’âme à l’époque de la deuxième révolution industrielle (1956), traduit de l’allemand par Christophe David, Paris, Éditions de l’Encyclopédie des nuisances/Éditions Ivrea, 2002, p. 223. ↩
  9. Cf. Pierre-Antoine Chardel, « La communication et ses écarts. Réflexions sur les limites de l’idéalisme technologique », in Les incommunications, revue Hermès, Paris, CNRS Éditions, 2019, pp. 31-37. ↩

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