Pour le CESE la transition énergétique doit être une réponse aux enjeux climatiques, écologiques, économiques et sociaux. Elle consiste à s’engager de manière volontariste dans la voie d’une société sobre en énergie et en carbone que seule une volonté politique forte permettra de construire. Jean-Paul Delevoye, président du CESE nous fait part de ses réflexions sur le projet de loi de transition énergétique.
Revue Politique et Parlementaire – Quelles sont d’abord vos réflexions sur les vœux du président de la République et la façon dont il inscrit la transition énergétique dans le panorama général de notre modèle économique ?
Jean-Paul Delevoye – Il faut d’abord souligner une évolution importante dans l’intitulé de ces vœux. L’année passée, il s’agissait des vœux aux partenaires sociaux, cette année c’étaient les vœux aux acteurs de l’entreprise et de l’emploi. Cela signifie qu’il y a une orientation politique très clairement affirmée par le président de la République. Par ailleurs, il a fait état d’une conjoncture internationale favorable à la croissance. Les baisses du prix du pétrole, des taux d’intérêts et de l’euro, l’allègement des charges pour le CICE, le dispositif “zéro charge” pour les rémunérations au Smic devraient doper l’économie française. Cependant, si en face de l’allègement des charges il n’y a pas de perspectives de demande, ce à quoi nous assistons aujourd’hui, il est légitime de s’interroger sur l’efficacité de notre modèle économique.
Le deuxième élément important, c’est qu’une stratégie politique a été confirmée par le président de la République. On est ou non d’accord avec cette stratégie, mais elle est équilibrée puisqu’il s’agit d’agir à la fois sur l’offre et sur la demande en allégeant l’impôt pour les ménages à faibles revenus afin de préserver la demande de consommation et d’alléger les charges sur l’offre. François Hollande a indiqué que la BCE allait racheter des dettes souveraines et qu’elle l’annoncerait prochainement. Ce que Mario Draghi a fait.
Cela signifie qu’il y a la perception, y compris au niveau de l’Europe, d’un risque de déflation et que la thèse, à laquelle je ne cesse de croire, sur la monétisation de la dette et donc sur sa mutualisation est quelque chose qui s’impose de plus en plus. Chacun sait que la Grèce ne pourra pas rembourser sa dette et que l’Italie est aujourd’hui en grande difficulté.
Le vrai défi pour l’Europe aujourd’hui est d’avoir une gouvernance économique à la dimension de sa zone monétaire. C’est un sujet stratégique majeur dans la mesure où la BCE, à l’instar des autres banques américaine, japonaise et anglaise, est un prêteur en dernier ressort, mais à leur différence, ne peut émettre de la monnaie.
En définitive, il s’agit là d’une approche responsable d’autant que le président de la République a mis l’accent sur la compétitivité des entreprises par l’allègement des charges, l’attractivité et l’innovation. Soixante dirigeants de filiales de groupes étrangers étaient d’ailleurs invités à ces vœux. Il s’agit du groupe “Entreprendre pour la France”, que nous recevons tout au long de l’année au CESE.
François Hollande a rappelé la réussite d’un certain nombre d’entreprises françaises et notamment que la première entreprise en termes de développement à l’échelle du monde dans le secteur du numérique était une startup française. L’une des réflexions que je me fais à ce propos est celle-ci : comment se fait-il que nous ayons tous les talents et fonds d’amorçage pour développer des entreprises et des startups mais que le passage à l’entreprise intermédiaire soit compliqué et que la levée de fonds ait lieu sur d’autres places financière que celle de Paris ?
Le président de la République a enfin évoqué les questions liées à l’insertion et la volonté de développer un certain nombre d’emplois pour les personnes écartées du système –notamment les jeunes et les chômeurs de longue durée. En effet, on s’aperçoit que cette compétitivité, cette innovation, cette dynamique sont en train de créer des fractures au sein de la société. Le vrai sujet politique aujourd’hui concerne bien la société dans laquelle nous entrons : comment construire cette société, quelle est la place de chacun par rapport au travail, à ses parcours, dans la redistribution des richesses créées ?
J’ai entendu un discours qui mettait en avant le dialogue social pour répondre à cette problématique. Il y a sur ce point deux thèses. Certains estiment en effet que les organismes intermédiaires n’ont pas leur place et que les solutions passent par un référendum direct ou par la négociation dans chaque entreprise plutôt – et c’est la deuxième thèse – que par une réflexion collective. Cette deuxième thèse, vous le savez, est la mienne. Car c’est en réalité l’avenir des pactes collectifs qui est sur la table, l’avenir des retraites, l’avenir des systèmes d’allocations chômage. Ainsi, ai-je été satisfait de comprendre que le président de la République souhaitait moderniser la conférence sociale puisqu’au lieu d’avoir une grande messe annuelle, nous aurons des ateliers avec des préparations, avec des débats de fonds. Je trouve que cela est tout à fait pertinent.
Je crois qu’il est important qu’au-delà de la nécessaire unité nationale les débats politiques soient au niveau des enjeux et échappent aux postures. Je pense que c’est ce qu’a tenté de faire le Président lors de la séquence des vœux.
RPP – Le CESE a beaucoup travaillé sur la transition énergétique. Que pensez-vous du texte de loi sur ce sujet ?
Jean-Paul Delevoye – Fin 2015, la France présidera la 21e Conférence des Parties de la Convention Cadre des Nations unies sur les changements climatiques. La France doit être un acteur déterminant pour essayer de réussir cette Conférence internationale. Si les États ne parviennent pas à la signature d’un accord, je crains que la communauté internationale aille au devant de lendemains compliqués. Le maintien de l’élévation de plus de deux degrés peut en effet créer des traumatismes lourds à l’échelle de la planète dans les cinquante années qui viennent.
Aussi ai-je la conviction que le changement climatique est une formidable opportunité pour nos acteurs économiques. Nous avons en effet dans ce domaine des champions mondiaux, des innovations importantes et nous nous sommes déjà engagés, bien avant d’autres, dans cette nécessaire transformation des modes de consommation et de production caractérisant toute transition énergétique.
Cette loi est-elle à la hauteur ? Comme toutes les lois, c’est un point d’étape. Il y a un certain nombre d’insuffisances par rapport aux objectifs, mais il convient d’avancer progressivement. Le CESE était d’ailleurs intervenu sur ces questions notamment au moyen d’un avis sur la transition énergétique intitulé : Un avenir à bâtir, une voie à tracer, avis dont les rapporteurs furent Mme Tissot-Colle et M. Jouzel.
Mais il faut d’abord savoir comment parvenir à construire une réflexion et une stratégie européenne de l’énergie. Il s’agit d’un sujet lourd. On voit par exemple la déstabilisation qu’entraîne le conflit avec la Russie, notamment à propos de la fourniture de gaz, et la problématique d’un renforcement des connexions nécessaires à la circulation de l’énergie infra européenne. L’Espagne, le Portugal et un certain nombre de régions françaises rencontrent des difficultés. Même l’Allemagne importe du charbon américain qui produit du CO2. Nous avons donc un vrai problème concernant l’énergie et la croissance, l’énergie et la production industrielle par rapport à cette géopolitique mondiale qui est déstabilisée par la chute des prix du pétrole et qui va entraîner une nouvelle répartition de la production industrielle à l’échelon de la planète.
Pourra t-on encore, demain, en Europe, conserver des entreprises grosses consommatrices d’énergie comme les cimenteries ou les raffineries ? Il s’agit là d’un vrai sujet stratégique qui n’est malheureusement pas abordé. La question de la connexion entre une production d’énergie stable par des infrastructures lourdes – nucléaire, par exemple – et une production d’énergies renouvelables, par définition instable, n’est pas elle non plus posée. Ainsi, en Allemagne, il y a des phénomènes d’instabilité et de coûts pour les consommateurs qui deviennent aujourd’hui difficilement supportables. La facture risque, en effet, de peser plusieurs centaines de milliards d’euros puisque ce sont des subventions sur vingt ans à hauteur de 50 milliards d’euros par an.
Je pense que cette réflexion sur la transition énergétique doit être très clairement posée à l’échelon européen, y compris pour ce qui concerne le marché du CO2, qui est aujourd’hui beaucoup trop faible pour être efficace.
En France, il y a un certain nombre de débats qui restent ouverts, notamment la part du nucléaire. En effet, d’un côté, on nous annonce la fermeture de la centrale de Fessenheim et de l’autre, on voit bien la volonté gouvernementale de prolonger la durée de vie des centrales.
Au-delà de la première réflexion sur la stratégie européenne, il convient aussi de s’interroger sur la diminution de la consommation énergétique par rapport à la croissance. Certains pensent que les chiffres annoncés ne sont pas atteignables d’autant plus que l’économie numérique pèse déjà près de 2 % de la consommation mondiale. Et que plus nous rentrons dans le numérique, plus nous aurons d’autres modèles de consommation. Ainsi y a-t-il – y compris en Afrique – un développement de la consommation d’énergie en raison du réchauffement climatique et de la climatisation. Il y a donc toute une série de phénomènes prospectifs qui ne sont pas très clairement abordés. Également, mais de façon plus positive, il faut explorer toutes les pistes concernant la réhabilitation énergétique.
Le CESE a d’ailleurs étudié cette question, notamment sur l’émergence de filières professionnelles et de techniques de financement – avec le chèque rénovation thermique par exemple – permettant que les économies puissent rembourser les fonds dépensés par les propriétaires et les locataires, avec une responsabilité forte des collectivités locales car nous avions souhaité que les collectivités locales soient tiers secteur afin de porter ce type de projet à la place des habitants. L’aspect sans doute le plus intéressant de la contribution du CESE c’est qu’en réalité, dès la révision constitutionnelle et dès la nouvelle mandature, les environnementalistes étaient présents : il a fallu presqu’un an pour que l’ensemble des membres du conseil s’approprient les enjeux environnementaux et que les environnementalistes s’approprient les enjeux économiques exprimés par les syndicats salariés et patronaux. En d’autres termes, le CESE a permis de mettre “à niveau” les différentes parties décisionnelles pour qu’ensuite elles amorcent une co-construction d’un certain nombre d’avis qui ont été signés par “les trois mondes” : patronal, environnemental et syndical. Nous avions d’ailleurs rendu deux ou trois avis sur l’efficience énergétique, l’industrie économe en matière première avant même que Mme Batho pose la première loi environnementale et que Mme Royal ne présente au CESE sa loi sur la transition énergétique. Nos deux rapporteurs Mme Hézard et M. Jouzel – dont la contribution présentée plus loin complètera mon propos – ont été entendus par l’Assemblé nationale comme par le Sénat et les avis émis par le CESE ont été intégrés dans le texte parlementaire.
Mais ce que j’ai appris grâce au CESE – et c’est bien ce qui pose problème à la société – c’est que sur ces sujets qui sont très techniques, à l’évidence il y a souvent des débats entre des personnes qui maitrisent la technique et des citoyens qui ne la maitrisent pas nécessairement. Il peut ainsi exister de fortes incompréhensions à l’origine de tensions et d’oppositions suscitant la peur du lendemain et des résistances. Et c’est la mission du CESE de faire en sorte que la France retrouve collectivement et avec enthousiasme le chemin de la transformation.
La transformation c’est l’adaptation à un avenir qui sera meilleur par les évolutions et les changements que l’on va apporter ; ce n’est pas une punition parce que l’on n’a pas été responsable vis à vis d’une planète qui est aujourd’hui limitée dans ses moyens. Il faut absolument que cet état d’esprit pénètre nos concitoyens, nos politiques, nos acteurs économiques : la transformation est nécessaire et c’est parce qu’elle sera réussie qu’on sera meilleur demain dans le concert des nations.
Et je pense que les entreprises françaises ont des opportunités économiques extrêmement intéressantes qui s’ouvrent à elles d’autant qu’elles sont souvent parmi les leaders mondiaux. La situation de la France sur le plan climatique et les efforts qu’elle fait sur ce plan risquent d’ailleurs d’être jalousés par beaucoup de monde. Nous n’aurons pas d’émigration climatique parce que nous manquerions d’eau, nous n’aurons pas des chaleurs insupportables et la France sera encore dans un climat tempéré avec un schéma de protection de l’environnement tout à fait passionnant.
Aussi la France peut-elle apporter dans les négociations internationales une contribution forte, une volonté farouche et c’est la raison pour laquelle au CESE nous mettons tout en œuvre pour contribuer à notre place et avec nos moyens, en liaison avec le comité européen, les comités régionaux et la mobilisation citoyenne, à la réussite de cette COP21, réussite nécessaire pour engendrer des changements de comportements.
RPP – Quels devraient être les modes de fonctionnement d’un pays comme le nôtre pour que l’on passe d’un paradigme à un autre ; quels seraient les mécanismes et les solutions à mettre en œuvre pour adapter notre État aux changements du XXIe siècle ?
Jean-Paul Delevoye – Pour la première fois, les défis sont de nature mondiale. Avant, les questions étaient au niveau d’un territoire, d’un prince, d’une religion et chaque pouvoir souhaitait maîtriser sur son territoire l’adhésion des citoyens, un mode de croyance, et l’on enfermait dans des territoires et des frontières bien déterminés une économie, une monnaie, des échanges, une fiscalité, etc.
Qu’apportent les nouvelles technologies et la révolution numérique ? La disparition des frontières. Aujourd’hui plus personne ne maîtrise la circulation des capitaux, la circulation des idées, des hommes et des marchandises. Et l’on voit bien que de la gestion d’un territoire il faut passer à l’attractivité d’un territoire. Quelles sont les offres territoriales, que dois-je mettre en œuvre pour faire en sorte que les capitaux du monde entier aient envie d’investir sur mon territoire, que les jeunes du monde entier aient envie d’investir chez moi ?
L’autre transformation profonde, c’est que de l’exploitation des sols et des sous-sols qui faisait que l’économie était ancrée sur un territoire, nous sommes passés à une exploitation de l’information et des connaissances. Aujourd’hui plus aucune économie n’est ancrée sur un territoire et même la finance s’est déconnectée de l’économie. Ce qui est important, ce n’est donc pas de fonder des fiscalités sur les ressources, mais de capter des fiscalités sur les valeurs ajoutées. Et l’on voit bien que la localisation de la valeur ajoutée sur la chaine de valeur devient un enjeu de compétitivité et d’attractivité mondiales. Les politiques qui restent encore dans un schéma d’enfermement, de “clôtures” ne sont donc plus du tout en adéquation par rapport à la donne du XXIe siècle.
Il convient au contraire de réfléchir en termes d’attractivité : asiatique, américaine, africaine et européenne. D’où l’enjeu de l’Europe qui aujourd’hui a créé une zone monétaire, mais n’a pas créé de gouvernance politique. C’est le débat sur le rôle de la Banque centrale européenne par rapport à l’émission de la monnaie.
Mais si nos frontières étatiques disparaissent en même temps, nous aurons besoin d’une proximité affective, de protection et d’identité, donc de frontières identitaires qui peuvent être extrêmement préjudiciables pour la cohésion d’une nation en termes de ciment culturel.
Dans le fond, ce qui est très clairement en cause dans le monde du XXIe siècle, c’est un mode de société. Mme Merkel l’évoque souvent, l’Europe c’est 6 % de la population mondiale, 20 % du Pib, 50 % des transferts sociaux. C’est à dire que contrairement au modèle anglo-saxon ce n’est pas le chacun pour soi, mais qu’au contraire il y a des pactes générationnels qui ont été construits après la Seconde Guerre mondiale au travers de l’esprit du Conseil National de la Résistance et qui consistait à dire que pour qu’une économie fonctionne bien il fallait que ses ouvriers soient bien et que pour que les ouvriers soient bien il fallait compenser leur rupture de revenu pendant les ruptures de maladie, d’accident de travail. Telle a été l’amorce des premiers pactes de sécurité sociale et des premiers pactes collectifs de la gestion des systèmes de retraite. Aujourd’hui, le vrai sujet politique c’est quel est le modèle de société que l’on propose par rapport au XXIe siècle, à un moment où, contrairement à la Seconde Guerre mondiale, le poids générationnel des personnes âgées va l’emporter.
Car si nous n’y prenons pas garde, les jeunes diront “pourquoi paierions-nous un système de retraite dont nous ne bénéficierons jamais” ? Il peut donc y avoir un conflit d’intérêts générationnel. Il peut y avoir aussi avec la médecine prédictive, avec l’extraordinaire évolution des objets connectés, une relation nouvelle avec le lieu de travail, l’horaire et la nature même du travail. Dans ces conditions, que signifieront les conventions collectives, les protections individuelles, le contrat de travail, etc. ?
Il y a donc urgence à réfléchir aujourd’hui sur notre manière de “faire société”. Doit-on aller vers le système américain, mais qui est en train de montrer ses limites puisque même M. Bernanke disait qu’il présente un risque de “dislocation sociale” ? Ou au contraire doit-on “pousser” le rêve de Keynes qui consiste à produire de la richesse avec des robots et donc sans le travail des hommes ?
Quelle est la place ou la socialisation de l’homme par rapport à une activité, quelle est la solidarité que l’on doit avoir sur un territoire donné pour partager entre ceux qui sont faibles et ceux qui sont bien portants, entre ceux qui ont un travail et ceux qui n’ont en pas, ceux qui ont un revenu et ceux qui n’en ont pas, ceux qui sont jeunes et ceux qui sont vieux… ?
Ce sont des sujets politiques extrêmement importants et intéressants, avec probablement une émergence de ce qui fait ciment c’est à dire “la culture”. Je reviens en définitive à ce que disait Jean Monnet et que je trouve pertinent : nous aurions probablement dû démarrer l’Europe par la culture et non par le charbon et l’acier.
Je pense que la France aujourd’hui a plus que jamais cette capacité de porter à l’échelon du monde le rôle que peut avoir l’Europe dans la moralisation de la mondialisation, d’ailleurs nous risquerions d’avoir un éclatement des frontières et des sociétés si nous n’agissons pas rapidement dans ce sens.
Tout le débat du Moyen-Orient, par exemple, c’est l’éclatement des frontières qui avaient été dessinées par les puissances britanniques et françaises après la Seconde Guerre mondiale. Et lorsque l’on regarde la disparition de l’empire Ottoman, on retrouve l’émergence de frontières identitaires qui n’ont rien à voir avec des frontières qui avaient été dessinées en fonction des matières premières et des intérêts des puissances continentales.
C’est intéressant de voir cette volonté identitaire s’affirmer, y compris sur notre continent. Ainsi, dès que le mur de Berlin est tombé, les frontières identitaires sont “réapparues” ; le problème de la Crimée, ou de l’Ukraine en est une preuve parmi d’autres. À cet égard, plutôt que d’humilier M. Poutine, je pense que l’Europe aurait dû réfléchir avec la Russie au soutien d’un projet fédéral avec une autonomie forte de la partie russophone de l’Ukraine, permettant ainsi de concilier et la puissance russe et la puissance européenne.
En définitive, tout est en train d’être revisité. On va connaître des gens qui vont vivre jusqu’à 120 ans, une médecine prédictive qui peut créer un phénomène assuranciel différencié selon les individus ou, au contraire – et c’est là mon objectif – des pactes collectifs qui garantissent l’égalité des citoyens dans l’égalité des parcours.
Ce sont donc des vrais sujets qui sont sur la table et qui nécessitent une vision de la société à moyen terme, une capacité à nourrir des débats. Et je pense que les politiques n’ont pas compris à quel point les citoyens aujourd’hui vont s’approprier de plus en plus une place dans ces débats à caractère politique.
Les événements tragiques que nous avons connus ne doivent pas créer une illusion d’unité. Je pense que les Français se sont réunis parce qu’ils ont perçu que l’un des ciments de notre vivre ensemble, une des valeurs de la démocratie, c’était la liberté et que cette privation de liberté d’expression était totalement insupportable ; mais ils ne vont pas non plus accepter demain que l’on restreigne leur liberté de choix. À l’évidence cette unité va se diviser très naturellement sur des sujets comme la liberté d’expression : jusqu’où peut-elle aller ?
Jean-Paul Delevoye, président du Conseil économique, social et environnemental