Le troisième débat des Républicains n’a rien apporté de très nouveau, à l’exception d’une séquence fort révélatrice, où les candidats ont été amenés à commenter la diatribe ultra-violente du centriste UDI Jean-Christophe Lagarde à l’encontre d’Eric Zemmour : « M. Zemmour, si Pasqua était là, il te filerait une balle dans la tête. » Petit retour sur une série de vilénies et d’hypocrisies bon teint.
La soirée de dimanche sur Cnews s’est déroulée à vrai dire sans grand relief – les deux premiers débat ayant déjà permis de situer programmatiquement les uns et les autres. Même la gestion de la crise guadeloupéenne n’a pas permis de distinguer un Xavier Bertrand d’une Valérie Pécresse ou d’un Michel Barnier. Une séquence en revanche, a jeté une lumière crue sur ce que l’on pourrait appeler le « code de l’honneur » des candidats Républicains. Une séquence à vrai dire désolante de médiocrité et de compromission. Une séquence où l’on rappelle qu’un responsable politique en appelle, via un tiers défunt, Charles Pasqua, au meurtre d’un (proto)candidat à l’élection présidentielle. Une séquence où l’on demande à ceux qui prétendent à la plus haute fonction de l’Etat et qui passent leur temps à s’indigner de l’ultra-violence qui gangrène la société française de se prononcer sur un cas très spécial où cette ultra-violence, verbale, émane d’un responsable politique, élu de la République, patron d’un parti centriste traditionnellement allié à la droite républicaine. Qu’en pensent les principaux intéressés ? Rien ! Tous passent l’éponge. Tous absolvent le gentil Jean-Christophe « qui s’est excusé ». Tous ? Non, seul Eric Ciotti s’est montré digne, vertueux et courageux en soulignant l’ignominie des propos de Jean-Christophe Lagarde et en refusant de l’excuser.
Pour les quatre autre ? Circulez, y a rien à voir. Lorsque la violence émane du peuple, ou alors de ceux qu’ils qualifient de responsables politiques d’extrême droite, tels Eric Zemmour ou Marine Le Pen, alors ils n’absolvent pas, ils condamnent, ils lynchent, ils en rajoutent même une couche. Mais là… Rien ! La raison ? C’est Alain Duhamel qui en a parlé le mieux sur BFMTV : « Hier, en regardant le débat, j’ai été choqué que seul Eric Ciotti ait dit « C’est inexcusable et je n’excuse pas. » Tous les quatre autres ont tourné autour du pot parce qu’en réalité ils espèrent que les centristes de l’UDI prendront position en leur faveur avant le scrutin. C’est pas glorieux ! »
Le fait de renoncer vilement à son honneur dans le seul but de capter un certain électorat ressemble assez fort aux compromission que les Français déçus de la politique dénoncent habituellement.
A ce clientélisme aussi divers qu’abject, que les quatre responsables politiques ont habilement mis en œuvre, draguant les militants UDI en excusant l’appel au meurtre proféré par leur patron. Alain Duhamel a raison : C’est pas glorieux ! Ni gloire en effet, ni même courage. Et pourtant, la gloire, ou la grandeur qui est son synonyme politique, n’est-elle pas ce qu’on attend à la fois de son pays et des responsables politiques qui prétendent présider à ses plus hautes destinées ? La grandeur d’âme, la grandeur morale, la grandeur intellectuelle, la grandeur spirituelle même. Dimanche soir, chez ces quatre candidats, rien !
Quelques minutes plus tard, Eric Ciotti évoquera l’importance du courage politique, sur un sujet tout autre. Le courage de mettre en œuvre un programme. Le courage d’accomplir ce que l’on a promis. Le courage d’aller jusqu’au bout pour conduire les réformes dont le pays a besoin, même si c’est difficile. Le courage de ne pas céder à la bien-pensance et au politiquement correct. Ce courage a manifestement manqué à quatre des candidats sur les cinq. Le courage, et la grandeur, et l’honneur aussi. Il fut un temps, en France, où ce seul manquement à l’honneur aurait suffi à disqualifier ces quatre prétendants. Dans notre époque moderne, où, depuis Mandeville et sa fameuse Fable des abeilles, nous croyons que les vices privés font les vertus publiques, il n’en est plus ainsi. Il sera intéressant de voir où les militants LR placent la vertu et l’honneur dans leur échelle de valeur au moment du vote.
Frédéric Saint Clair
Ecrivain, Politologue