En avril dernier, Valéry Giscard d’Estaing avait accordé un long entretien à la Revue Politique et Parlementaire dans lequel il revenait sur sa rencontre avec le général de Gaulle et les relations qu’il entretenait avec lui, sur sa présidence de 1974 à 1981, ses successeurs, la crise du Covid-19 et sa vision de l’avenir de l’Europe. Il s’agit là du dernier interview accordé par l’ancien Président de la République à une revue.
Revue Politique et Parlementaire – Dans quelles circonstances s’est déroulée votre première rencontre avec le général de Gaulle ?
Valéry Giscard d’Estaing – J’ai rencontré Charles de Gaulle en France pour la première fois lorsqu’il est rentré de Londres, après le débarquement. Il avait créé son mouvement politique et a tenu une réunion, je crois me souvenir dans l’Est parisien. J’y ai accompagné ma mère qui était très gaulliste. Nous étions placés au pied de la tribune. C’est là que j’ai eu mon premier contact avec le Général.
RPP – Vous avez été ministre des Finances et des Affaires économiques pendant la plus grande partie de sa présidence. Pourriez-vous revenir sur votre rôle et la manière dont vous avez conçu le retour à l’équilibre budgétaire ?
Valéry Giscard d’Estaing – C’était une période intéressante et très constructive de la politique budgétaire française que nous n’avions pas connue avant et que nous n’avons pas retrouvée souvent, depuis 1981. Les finances publiques françaises avaient été marquées par la guerre et par l’Occupation et il fallait reconstruire le système. L’administration française a toujours été de culture étatiste c’est-à-dire qu’elle comptait sur la légitimité et le financement de ses actions. Or, le total ne peut dépasser à un moment donné les ressources budgétaires du pays et c’est ce qui s’est produit dans les années 1950. Mon idée, qui était tout à fait normale et que j’ai conservée depuis, c’est qu’il faut situer les finances publiques au voisinage de l’équilibre avec un léger excédent ou une légère insuffisance en fonction de la conjoncture et que normalement, les finances publiques doivent être à l’équilibre. C’était aussi l’idée du général de Gaulle car selon la conception des militaires, les moyens dont ils disposent doivent toujours correspondre à la mission. Mais ce n’était pas du tout celle du milieu politique français qui vivait en plein déséquilibre budgétaire ni celle du Premier ministre, Georges Pompidou, qui n’était pas un praticien des finances publiques mais avait, au contraire, une culture et une expérience du monde bancaire et donc du crédit et de la création monétaire.
J’ai dû me battre pour convaincre le système politique français qu’il fallait présenter et exécuter un budget à l’équilibre. J’ai eu pour cela le soutien explicite du général de Gaulle. Un jour, en Allemagne, précisément en juillet 1964, dans la résidence de l’ambassadeur de France, nous avons eu une conversation assez curieuse avec Ludwig Erhard, le Chancelier allemand, qui a interrogé de Gaulle pour savoir s’il pensait que la France pouvait connaître l’équilibre budgétaire. Le Général s’est tourné vers moi et lui a dit : « le ministre des Finances est là, il peut vous répondre ». Georges Pompidou, qui était à côté du Président, me faisait de la main un signe négatif pour que je n’entre pas dans ce schéma mais j’ai répondu de la façon suivante : « mon Général, si vous m’en donnez l’instruction, on peut présenter un budget en équilibre ». Et nous avons présenté et exécuté le budget de 1965 à l’équilibre. Celui-ci a été maintenu l’année suivante mais peu à peu nous sommes revenus aux pratiques politiques françaises et y avons renoncé. À l’heure actuelle nous en sommes, comme vous le savez, très loin.
L’équilibre budgétaire était un sujet sur lequel le Général m’approuvait et me soutenait. En revanche, nous étions en désaccord sur les questions monétaires.
Le général de Gaulle avait rencontré Jacques Rueff pour lequel il avait beaucoup d’admiration et de considération. Rueff était partisan d’un système monétaire qui était l’étalon-or. Nous étions alors dans l’étalon-dollar qui hérissait le général de Gaulle car il se méfiait des interventions américaines, mais qui a fonctionné de façon utile jusqu’en 1965. Le général de Gaulle voulait en sortir et revenir à une monnaie objective, neutre et il écoutait les théories de Rueff qui était partisan du retour à l’étalon-or. Lors de la préparation de sa conférence de presse sur le budget et la monnaie, un peu après le milieu de son septennat, il m’a fait venir à l’Elysée. Dans sa conférence de presse il prévoyait de proposer l’adoption de l’étalon-or. Je lui ai dit que malheureusement c’était peu réaliste car dans le monde tel qu’il était devenu du fait de la guerre, l’or n’avait plus la valeur universelle qu’il avait eue auparavant. Le Général m’a écouté, a pris des notes et il a rayé, plus ou moins, de son texte l’expression étalon-or. Mais lorsqu’il s’est retrouvé à la conférence de presse, la question lui a été posée et il est revenu sur sa position en faveur de l’étalon-or. Cela n’a pas eu de suite parce que nous n’avons pas pris d’initiative dans ce domaine et que nous nous sommes davantage préoccupés de réformer le système monétaire. Mais sur ce sujet, je n’approuvais pas la position du général de Gaulle.
RPP – La question européenne n’était-elle pas également un sujet de divergences ?
Valéry Giscard d’Estaing – Pas tellement parce que nous n’en n’étions qu’au stade initial de la question européenne qui ne concernait alors que les relations commerciales. Il n’y avait pas encore de considérations sur le sujet de la souveraineté. Nous ne savions pas si le Général déciderait d’accepter le Traité de Rome. Lui-même ne se prononçait pas et nous en étions donc réduits à des hypothèses. Dans sa réflexion personnelle il a choisi de mettre en œuvre le processus européen à partir du 1er janvier 1958. C’est donc Charles de Gaulle qui nous a fait entrer dans le système européen.
RPP – Pouvez-vous nous parler de la relation particulière que vous avez entretenue avec Charles de Gaulle ?
Valéry Giscard d’Estaing – Malheureusement elle a été rompue en 1966. En tant que ministre des Finances et des Affaires économiques, je devais aller inaugurer la première exposition commerciale française en Chine depuis la guerre. Cette inauguration était prévue en décembre 1965 au moment de l’élection présidentielle. Dans les milieux politique, journalistique et universitaire, la réélection du général de Gaulle était tenue pour acquise, aller en Chine à ce moment-là ne posait donc aucun problème. Mais au premier tour, de Gaulle a été mis en ballotage. Il m’a demandé de ne pas partir en Chine pour participer à sa campagne entre les deux tours. J’ai accepté. Au deuxième, il a été réélu. Un nouveau gouvernement a été constitué. J’étais ministre des Finances depuis plusieurs années, je pensais que cela continuerait mais j’ai été prévenu par Georges Pompidou que je ne conserverais pas ce ministère. La raison en était que le Général voulait que Debré, ancien Premier ministre, revienne dans son équipe mais celui-ci n’acceptait d’entrer au gouvernement qu’en tant que ministre des Finances. Le Président a donc décidé de nommer Debré ministre des Finances et que je resterais au gouvernement dans un poste technique. Il pensait aux Travaux publics ou à un autre grand ministère technique. C’est ce qui m’a été proposé et c’est ce que j’ai très franchement refusé. Je m’intéressais beaucoup à la politique des Finances publiques. Je la connaissais assez bien puisque depuis ma sortie de l’École nationale d’administration c’est sur ce sujet que j’avais principalement travaillé et je ne me sentais pas porté à m’investir dans un autre ministère technique. Cette initiative venait-elle du général de Gaulle, de Pompidou, ou des deux ? Je ne le sais pas, mais elle ne venait pas de moi. Quelques mois plus tard lorsque j’ai revu le Président il m’a dit qu’il regrettait ce qui s’était passé.
RPP – Que se passe-t-il pour vous au moment où vous quittez le gouvernement en 1966 et comment évolue votre position par rapport au général de Gaulle ?
Valéry Giscard d’Estaing – Je reviens dans la vie parlementaire française classique, je siège à l’Assemblée nationale et je suis dans la majorité qui soutient le général de Gaulle. Contrairement à la légende à aucun moment je n’ai été contre. Je reste dans la majorité, mais la majorité parlementaire. Et je considère que celle-ci peut, sur un sujet ou sur un autre, exprimer une préférence ou une critique. Je prononce donc quelques discours en 1967 et 1968. Pendant ce temps la situation politique en France se dégrade beaucoup et aboutit à la crise de 1968. Je n’étais plus au gouvernement depuis 1966 et naturellement je n’ai joué aucun rôle dans la crise de 1968. C’est Georges Pompidou qui a joué un rôle avec d’ailleurs beaucoup d’énergie et de compétence et qui en est, en quelque sorte, sorti vainqueur ce qui a entraîné la dégradation ultime de ses rapports avec de Gaulle. Après les législatives de juin 1968, le Président nomme Couve de Murville à la place de Pompidou alors que ce dernier souhaitait rester Premier ministre, ce qui l’a amené à s’éloigner du Général.
Pendant ce temps là, j’avais été réélu dans la majorité qui venait de naître mais j’étais plus proche de ceux qui avaient soutenu Pompidou que de ceux qui soutenaient le nouveau gouvernement qui était assez compliqué car il était dirigé par un homme qui, en fait, n’avait pas le savoir-faire de la direction politique de la France ce qui a abouti au référendum de 1969.
Concernant ce référendum, beaucoup de commentateurs font une erreur en disant que j’étais contre le général de Gaulle.
Ce n’est pas du tout ce qui s’est passé. En 1969, de Gaulle voulait retrouver un signe fort de confiance de l’opinion publique française. Il pensait qu’en 1968 son camp avait gagné, mais c’était plus Pompidou que lui et il voulait qu’en 1969 ce soit lui-même qui, d’une façon très visible et très catégorique, retrouve la confiance et le soutien de la majorité du peuple français. Il a donc accepté l’idée d’un référendum pour le printemps 1969. Cette idée a été soutenue non pas par les gaullistes historiques mais par une frange qui s’était ralliée au système en 1968. Lorsque j’ai vu cela je me suis dit que c’était très risqué pour le général de Gaulle, et qu’il fallait qu’il retrouve le pouvoir qui lui avait en partie échappé. Or, le retrouver par une élection dans une période où il y avait des problèmes économiques, sociaux ce n’était pas évident, par un référendum c’était inapproprié.
J’ai demandé à aller voir le général de Gaulle, mais le secrétaire général de l’Elysée, Bernard Tricot, qui était très obstiné, refusait de me donner un rendez-vous. Finalement je l’ai obtenu trois semaines avant le référendum. Je lui ai dit que ce référendum m’inquiétait car c’était une forme politique que les Français n’aimaient pas et que très souvent ils répondaient non. Qu’il y avait un danger lorsqu’il ne portait pas sur un sujet très populaire et évident. Le référendum sur la politique algérienne s’était bien passé parce que les Français partageaient sa vision sur ce sujet, mais qu’un référendum sur les questions politiques était très risqué. Je lui ai suggéré de poser deux questions, l’une sur la réforme du Sénat où il aurait l’opinion publique avec lui et l’autre sur l’organisation territoriale qu’il prévoyait dans le système administratif français où il aurait, ou non, la majorité mais que cela ne remettrait pas en cause sa souveraineté.
De Gaulle m’a dit qu’il pensait que j’avais raison mais que c’était trop tard. Je lui ai répondu qu’il pouvait reporter la date comme il le souhaitait, mais j’ai compris que le général de Gaulle s’était enfermé dans ce système et dans ce choix. Il a donc maintenu sa proposition. Il a perdu et il est parti.
RPP – Votre présidence s’inscrit par de nombreux aspects dans la continuité de celle du général mais s’en démarque assez radicalement sur d’autres. Pouvez-vous évoquer justement cette présidence ?
Valéry Giscard d’Estaing – Le temps passe, les difficultés changent. J’avais des problèmes nouveaux essentiellement économiques, monétaires et européens qui se sont précipités sur la vie de la France à ce moment-là. Les ex-gaullistes se sont divisés en deux camps. D’une part ceux qui restaient fidèles à la pensée du général de Gaulle mais qui ont été très atteints et bouleversés par sa disparition ; d’autre part ceux qui ont choisi délibérément de trahir sa pensée et ont participé à l’élection de Mitterrand en 1981. Comme vous le savez, le général de Gaulle avait une aversion profonde pour Mitterrand comme il l’a montré en 1969. Il était prêt à tout faire pour l’empêcher d’arriver au pouvoir.
Quelques dirigeants issus du milieu gaulliste, qui n’étaient pas gaullistes en pensée mais par opportunité, tels que Jacques Chirac ou Charles Pasqua, ont travaillé dans l’ombre pour faire élire Mitterrand, c’est-à-dire celui dont le général de Gaulle ne voulait à aucun prix.
Cela a créé un paysage politique différent et s’est traduit par l’élection de Mitterrand qui n’aurait sans doute pas eu lieu sans ces manœuvres. J’en ai été le témoin puisque j’ai interrogé moi-même par téléphone des responsables au siège du RPR pour savoir quelle consigne de vote le mouvement gaulliste leur avait donnée. Avec une grande naïveté, ils m’ont répondu de voter pour Mitterrand, ce qui est maintenant connu et reconnu par les historiens. Donc la période post-gaulliste n’existait plus. Il y avait encore d’anciens gaullistes qui étaient des personnalités très estimables comme par exemple Olivier Guichard, Robert Galley, le maire de Troyes et comme une série d’hommes politiques de l’Ouest de la France qui étaient individuellement gaullistes. Mais le gaullisme avait disparu parce que le parti qui était prêt à agir pour continuer la politique du général de Gaulle, en fait, n’existait plus.
RPP – Cela signifie t-il que les gaullistes historiques vous ont plutôt soutenu ?
Valéry Giscard d’Estaing – Oui. Ils avaient perdu leur chef puisque c’était après la mort du Général. Le mouvement était très divisé parce que ceux qui tenaient les leviers étaient peu gaullistes. D’ailleurs, la plupart n’a jamais fait partie des gouvernements sous la présidence du général de Gaulle. Le système était donc très affaibli et j’ai pensé qu’il fallait donner une base nouvelle.
RPP – Vous avez parlé de l’aversion du général de Gaulle pour Mitterrand. Quelles en sont, selon vous, les raisons et les déterminants ?
Valéry Giscard d’Estaing – Cette aversion était profonde et il l’a exprimée par des mots très durs en qualifiant François Mitterrand d’adjectifs extrêmement sévères. Mais surtout il s’était trouvé en conflit avec Mitterrand lors de la première élection présidentielle puisque celui-ci n’a pas hésité à chercher le soutien communiste dans sa démarche contre de Gaulle. Or, le soutien communiste de l’époque, ce n’était pas le soutien communiste actuel qui peut être idéologique ou économique. C’était un soutien dans l’équilibre politique mondial puisque nous étions encore, à l’époque, dans le communisme soviétique. Les communistes ont complètement supporté la candidature de Mitterrand contre le général de Gaulle.
RPP – Après la démission du général de Gaulle en 1969, n’avez-vous pas pensé à vous porter candidat à la présidence de la République ?
Valéry Giscard d’Estaing – Non parce que je souhaitais que la politique de la France, dans son système, soit continue, qu’elle ait des évolutions, des inflexions mais s’inscrive dans une continuité. Durant la présidence de Pompidou, la politique française a été à peu près maintenue. Mais lors de la campagne qui s’est ouverte après le décès du président Pompidou, la question a été de savoir si nous restions dans cette ligne en l’adaptant, le cas échéant, ou si au contraire nous allions dans une direction totalement différente avec la coalition socialiste et communiste. Je crois que dans ce domaine, la France souffre beaucoup depuis les vingt dernières années de l’instabilité et de la faiblesse de sa doctrine économique ! D’ailleurs, l’opinion est embarrassée pour la décrire. Moi, j’ai toujours dit que j’étais pour « le changement dans la continuité » c’est-à-dire le groupe de pensées, de réflexions, de propositions qui constitue la matière politique française qu’il faut faire évoluer au lieu de le détruire. C’était mon slogan de campagne en 1974. Il reprenait celui de Pompidou en 1969.
RPP – Que reste-t-il aujourd’hui du message du général de Gaulle ?
Valéry Giscard d’Estaing – Hélas, il n’en reste qu’un souvenir lointain. Les acteurs ont disparu pour la quasi totalité, les événements ont tourné, les problèmes centraux français sont devenus différents. La référence au général de Gaulle n’a plus de force d’entraînement politique aujourd’hui mais garde tout son sens historique et idéologique.
RPP – Dans le contexte très particulier que nous vivons et notamment la crise sanitaire que nous traversons, comment percevez-vous l’évolution de l’Europe ?
Valéry Giscard d’Estaing – Dans le contexte sanitaire de l’épidémie, l’Europe n’a pas agi en groupe, mais au final, il y a quand même le désir d’avoir une action commune. Par exemple nous devrions nous-mêmes être plus actifs pour aider l’Italie et l’Espagne. En revanche, il y avait dans l’esprit l’idée que l’Europe devait avancer, que le monde s’organisait autour de grands continents, les États-Unis d’Amérique bien entendu, mais aussi la Chine qui était un « nouveau continent », la Russie libérée de son système soviétique, etc. Il fallait que l’Europe démocratique, la nôtre, s’organise davantage. J’y étais très favorable. Il y a cinq ans, j’ai écrit sur ce sujet et je crois que cela reste une idée centrale ! Si les circonstances le permettent, si les hommes et les femmes au pouvoir le souhaitent, ils peuvent y arriver. J’ai été très heureux de la nomination d’Ursula von der Leyen, candidate modérée allemande, à la présidence de la Commission européenne. C’est une femme tout à fait remarquable et qui peut agir dans ce sens. Le nouveau président du Conseil européen, Charles Michel, est également favorable à un progrès de la construction européenne.
Cela suppose une grande habileté parce qu’il y a deux facteurs qui compliquent les choses. Le premier c’est qu’il y a en Europe, à côté des grands pays fondateurs comme la France, l’Allemagne, l’Italie, le Benelux les autres États qui ont rejoint la communauté plus tard. Il faut arriver à ce que la relation entre les pays fondateurs et les autres soit régulière et facile. Le deuxième facteur c’est l’apparition de nouveaux sujets de discussion. Dans les années d’origine de la construction européenne, les problèmes portaient sur les rapports entre les États européens et on les a à peu près résolus, du point de vue commercial, juridique, monétaire.
Mais le monde actuel fait surgir de nouvelles difficultés et notamment celles des puissances continentales contre lesquelles l’Europe devrait pouvoir présenter une structure plus homogène. Elle doit donc, dans certains cas, sur certains sujets, être dotée de pouvoirs et de compétences plus étendus. Si les temps étaient plus calmes, je crois qu’on le ferait. Mais actuellement, nous sommes troublés par l’éprouvante situation épidémique et quelques problèmes de génération dans certains pays. En effet, nous connaissons un changement de génération en Allemagne, en Italie mais la trajectoire va, à mon avis, redevenir la même parce qu’elle correspond à la réalité des faits : le monde actuel s’organise autour de continents. L’Europe est un continent encore imparfaitement organisé et doit se prendre en main pour vivre mieux parmi les autres. Je pense qu’un personnage aux vues longues et désintéressées comme le général de Gaulle aurait fait ce choix et conduit une telle politique dont nous bénéficierions aujourd’hui.
Valéry Giscard d’Estaing
Président de la République (1974-1981)
Membre de l’Académie française
Propos recueillis par Arnaud Benedetti et Éric Anceau