“Peut-être que l’erreur a été de ne pas être assez présent pour donner une constance et porter cette réforme moi-même” déclarait Emmanuel Macron, lundi 24 avril face aux lecteurs du Parisien. Cela sonne comme un nouveau mea culpa de la part du chef de l’Etat.
Pressé de tourner la page de cette longue et périlleuse séquence, le président de la République promet de “se réengager dans le débat public”. Pour quoi faire ? Et surtout dans quel intérêt ?
Revenons d’abord à la réforme des retraites. Il est important de rappeler que le président-candidat envisageait à l’époque de décaler l’âge légal à 65 ans. Jugée trop brutale par les leaders Républicains, Emmanuel Macron optera finalement pour un passage à 64 ans couplé d’une accélération de la durée des cotisations (43 annuités).
Reconduit le 24 avril 2022, pour un nouveau quinquennat, le président de la République a chargé sa Première ministre de conduire cette réforme majeure de son décennat. Tel est le fonctionnement du couple Elysée-Matignon sous la Ve République en période de fait majoritaire.
A quoi fait donc référence Emmanuel Macron en déclarant ne pas s’être assez mouillé la chemise ? Aurait-il voulu défendre le projet lui-même devant les députés et sénateurs ? Aurait-il voulu multiplier les matinales radios et télé à la place de ses ministres ou cadres de sa majorité ? Pis, aurait-il voulu mener lui-même le dialogue social ?
Chaque chose en son temps. La campagne a été l’occasion pour le président-candidat de convaincre. Tout au long de ce temps social et parlementaire, le gouvernement devait être seul face à ses responsabilités.
Le problème n’est pas de ne pas avoir été assez présent, mais plutôt de ne pas avoir nommé une personnalité plus politique pour porter ce projet.
Un président ne peut pas tout faire et ne doit pas tout faire. Cette auto-flagellation ne sert donc à rien.
Ensuite, sur son réengagement dans le débat public : il est tout à fait normal et légitime que le président s’exprime et rende des comptes aux citoyens. Toutefois, dans ce brouhaha médiatique, la parole présidentielle doit être nécessaire et utile. Elle doit surtout apaiser et rassembler.
Or, Les dernières déclarations du chef de l’État semblent mettre de l’huile sur le feu.
“Ce ne sont pas les casseroles qui font avancer la France”, “les casseroles et les oeufs c’est pour faire la cuisine”. Si Emmanuel Macron entend se réengager dans le débat public de cette manière, la partie semble mal embarquée voire déjà perdue.
Avec 47 % de très mécontents selon le dernier sondage IFOP pour le JDD, le chef de l’Etat gagnerait à adopter une attitude d’humilité dans son approche avec les Français – même Pierre Rosanvallon, pourtant nuancé dans ses prises de position, dénonçait “l’amour-propre du Président” sur le plateau de Quotidien le 17 avril.
On le sait, Emmanuel Macron n’est pas intéressé par la popularité. Mais derrière ce fort rejet de sa personne se cache un réel risque : celui que la fonction présidentielle elle-même soit rejetée complètement.
Mieux vaut donc parler peu et agir.
Carlyle Gbei
Journaliste politique