L’État de droit protège les libertés, mais sa juridicisation croissante interroge la souveraineté populaire et la capacité d’action des élus. Dans cet entretien croisé, Jean-Éric Schoettlet Anne-Charlène Bezzina examinent les défis d’une démocratie où les juges gagnent en influence, au détriment du politique, et avancent de possibles réformes pour restaurer la confiance.
Revue politique et parlementaire – Le débat sur l’État de droit semble aujourd’hui cristalliser les tensions, mais n’est-il pas avant tout une affaire de malentendu ? Ce qui nous oppose, n’est-ce pas davantage la définition de l’État de droit que son existence ?
Jean-Éric Schoettl – Le terme « État de droit » n’apparaît dans la littérature juridique française qu’à une époque récente. Il est emprunté à l’allemand Rechtsstaat qui, historiquement, ne veut rien dire d’autre que la soumission du fonctionnement de l’État à un système cohérent de règles. Il n’a pas de contenu programmatique ou moral précis.
Cependant, en France comme ailleurs en Europe, le terme d’État de droit est devenu un mot valise, qui a une signification tantôt technique, tantôt philosophique, voire transcendantale. Dans cette dernière acception, il devient une religion dont les droits de l’homme sont le credo, le juge le grand officiant et les groupes militants les prédicateurs. Telle la statue du Commandeur, la notion d’État de droit est brandie face au gouvernement et au législateur pour leur interdire, lorsqu’ils traitent de sécurité, de justice ou d’immigration, toute modification de l’état DU droit, dès lors qu’elle porterait ombrage aux droits individuels.
On peut toutefois tirer de la tradition républicaine une définition de l’État de droit plus conforme au bien commun, comme à la souveraineté populaire, c’est-à-dire à la capacité des représentants élus de la nation de formuler la volonté générale. Elle comporterait les éléments suivants : le pouvoir politique procède du suffrage universel ; pour éviter l’arbitraire, l’État est soumis à des normes hiérarchisées entre elles ; l’État doit garantir la sûreté, par la force légitime comme par la justice pénale ; les libertés publiques sont respectées ; enfin, en vertu du principe de séparation des pouvoirs, trois pouvoirs spécialisés (législatif, exécutif et juridictionnel) interagissent pour se tempérer mutuellement, mais aussi pour coopérer et sans qu’aucun ne puisse mettre les autres sous sa coupe.
Ainsi défini, l’État de droit n’impose pas d’ « effet cliquet » au bénéfice des droits individuels. L’état du droit peut être modifié dans le respect des procédures dans lesquelles s’incarne l’État de droit. La loi peut être modifiée par les élus de la nation dans le respect de la procédure législative. La Constitution elle-même peut être modifiée selon les formes qu’elle prévoit pour sa révision. Assimiler la volonté de modifier l’état DU droit dans le respect du cadre institutionnel – à une volonté de porter atteinte à l’État DE droit est soit une étourderie, soit un procédé rhétorique destiné à diaboliser les évolutions qui déplaisent.
Anne-Charlène Bezzina – L’État de droit n’est à mon sens pas « contestable » dans son principe. En effet, dans son épure, il consiste à ce que l’État accepte de voir son pouvoir limité par le droit, ce qui encadre son arbitraire historique.
Néanmoins sa définition, comme toute définition en science sociale, présente un caractère largement asymptotique par rapport à la réalité.
L’État de droit pourrait être défini dans un sens à la fois formel et matériel :
Formellement, il s’agit de limiter l’État par le droit avec le respect de la hiérarchie des normes (Constitution, traités, lois) et une séparation des principaux pouvoirs. C’est en cela que l’État de droit s’est historiquement construit en opposition à l’État de police.
Quant à son aspect matériel, il est possible d’inclure énormément de concepts et c’est ici qu’un désaccord d’ordre politique peut apparaître : s’agit-il d’y voir le respect des droits fondamentaux (si oui, lesquels) ? ou s’agit-il d’inclure non seulement les droits mais également la garantie de ses droits notamment par les juges. La France semble pencher pour cette option étant donné la rédaction de l’article 16 de notre Déclaration des droits de 1789 qui proclame que toute société dans laquelle la garantie des droits et la séparation des pouvoirs ne sont pas assurées, n’a point de Constitution.
Le nœud gordien de la contestation vient sans doute du renforcement sous la Ve République, des éléments juridictionnels de garantie des droits fondamentaux.
• Le contrôle de constitutionnalité du Conseil constitutionnel s’est perfectionné grâce à l’élargissement de sa saisine à l’opposition parlementaire (en 1974) et aux citoyens (en 2008).
• Le contrôle du juge pénal s’est également élargi à plusieurs titres. D’abord avec l’extension continue du nombre de groupements pouvant se constituer partie civile (article 2.1 et suivants du Code de procédure pénale) ou encore du fait de la spécialisation des parquets : antiterroriste, PNF.
• Le contrôle du juge administratif s’est élargi avec le contrôle du respect des libertés en urgence tel que l’a ouvert la loi du 30 juin 2000.
Cette montée en puissance du contrôle juridictionnel résulte d’une action des juges qui est en accord avec les évolutions des textes législatifs ou constitutionnels. C’est donc le législateur qui a signé l’acte de confiance dans la justice et qui a, durant la Ve République, contribué au perfectionnement de l’État de droit.
La contestation qui naît autour de l’obligation européenne de la France résulte également d’une incompréhension du principe de souveraineté : la France participe à l’Union européenne et à la Convention européenne des droits de l’homme dans les limites de son consentement. Pour sanctionner le respect des textes, le juge de l’UE peut certes prononcer des amendes et la Cour européenne des droits de l’homme a également considérablement perfectionné l’autorité de ses décisions. Il s’agit là des conséquences d’accords internationaux auxquels la France a souscrit.
RPP – À trop vouloir faire garantir le droit par les juges, ne limite-t-on pas le champ de la démocratie et ne fragilise-t-on pas la confiance nécessaire envers le politique ?
Anne-Charlène Bezzina – Je pense au contraire que démocratie et État de droit se complètent.
D’abord, l’État de droit ne remet pas en cause le principe démocratique qui repose sur une règle : les élections libres et régulières disputées dans la pluralité, qui se déroulent dans le respect de la sincérité et l’universalité du scrutin.
Ensuite, la démocratie n’est pas entravée par l’État de droit puisque les organes représentatifs de la volonté du peuple récupèrent le dernier mot en toute matière :
• Une loi peut être modifiée par une autre loi.
• La Constitution peut toujours être modifiée suivant la procédure de l’article 89 de la Constitution. C’est ce que le doyen Vedel avait théorisé sous le terme de « lit de justice » en hommage à la pratique d’Ancien régime. Par ce terme, Vedeldésigne la procédure qui est offerte au constituant de modifier la Constitution dans un sens contraire à une décision du Conseil constitutionnel. C’est ce qui s’est passé en matière d’immigration en 1993.
• Les engagements internationaux également peuvent être modifiés, l’État peut poser des réserves et même proposer des clauses d’opting out (c’est- à-dire refuser à ce que l’on lui applique certains éléments d’un Traité comme le Danemark en matière d’immigration au sein de l’Union européenne).
En réalité, ce qui fragilise les vieilles démocraties résulte du constat que font les citoyens d’un manque « d’efficacité » de l’État et de son action.
Au fond, ontologiquement, la démocratie est condamnée à être déceptive : elle promeut un idéal de liberté, d’égalité et de fraternité qui se heurte aux réalités de la vie sociale. Internationalement, la démocratie est également affaiblie par le parallèle avec les autocraties qui ne rencontrent aucunes limites dans leur action étant donné que leurs dirigeants concentrent tous les pouvoirs.
En réalité, l’inefficacité constatée de l’ac- tion de l’État vient très souvent de l’origine même des problématiques qui s’avèrent largement supranationales, voire plané- taires : dérèglement climatique, endettement, migrations.
L’État de droit vit certes lui aussi une crise puisqu’il produit des malfaçons comme celle, particulière à la France, qui consiste à avoir une superposition de normes imparfaites, bavardes, instables et mal articulées. Cela nécessiterait en réalité non pas un changement de textes mais une plus grande autodiscipline de la part des pouvoirs.
Jean-Éric Schoettl – L’extension du contrôle juridictionnel est en grande partie l’œuvre du législateur (référé libertés devant le juge administratif ) ou du constituant (institution de la « question prioritaire de constitutionnalité » en 2008 ; autorisation de ratifier les traités européens avec son corollaire : la soumission à la Cour de justice de l’Union européenne). Dans cette mesure, elle a été largement consentie, c’est vrai, par le politique.
Mais elle est aussi le fait du juge lui-même. C’est ainsi que le Conseil constitutionnel a décidé en 1971 qu’il contrôlerait la conformité de la loi à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, au Préambule de la Constitution de 1946 et aux « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ». Ainsi encore, le Conseil constitutionnel a pris sur lui d’enjoindre au juge du fond, en 1975 (IVG), d’écarter la loi contraire au traité, même lorsqu’elle lui était postérieure. Ainsi toujours, en 2020, il s’octroie le pouvoir de contrôler, au regard des droits et libertés constitutionnellement garantis, les ordonnances non ratifiées (lesquelles contribuent aujourd’hui, pour une part substantielle, à la production normative).
L’État de droit doit rester le correctif de la souveraineté, non dévitaliser cette dernière. Certes, au travers de la défense des droits fondamentaux, le juge agit en faveur des citoyens. Toutefois, ni les textes, ni la jurisprudence ne doivent négliger les intérêts indivis de la société, le Bien commun. Gare à une vision des droits fondamentaux qui servirait l’individu abstrait, mais non la généralité des citoyens réels. Gare au déni de réalité accompagnant si souvent le maniement de ces grands mots dont la doxa contemporaine fait des impératifs catégoriques. Or tel est bien le chemin que nous parcourons depuis des décennies, car, en magnifiant des droits dont ils ont une vision de plus en plus absolue, les textes et la jurisprudence, s’influençant mutuellement, perdent le sens de l’intérêt général et grippent les mécanismes de la démocratie représentative, suscitant l’incompréhension de nos concitoyens.
Cette vision est en outre myope. Faute de voir au-delà des droits individuels, elle méconnaît les besoins permanents et globaux de la population ou néglige le coût social des mesures. Faute de s’intéresser aux effets différés et collatéraux des politiques publiques, polarisée qu’elle est par l’incidence directe de ces politiques sur les droits individuels, cette vision n’attache plus le prix suffisant aux intérêts supérieurs de la société et néglige le long terme. Ainsi, en matière répressive, les droits de la défense occupent tout son champ de vision. Obnubilée par la protection légale du fauteur de troubles et du prévenu, elle place au second plan les intérêts de la société et le sort des victimes, actuelles et potentielles.
Notons que, dans la France contemporaine, les élites et les gens ordinaires se font une conception fort différente de l’expression « État de droit ». Pour la majorité de nos compatriotes, l’État de droit est un état de la société dans lequel la puissance publique « fait en sorte que le citoyen n’ait pas à craindre des autres citoyens » pour reprendre la formule de Montesquieu. Or la défense intransigeante des droits individuels contre la puissance publique, fondée sur un contrôle de proportionnalité vétilleux, conduit à brider les moyens de régulation, de prévention et de répression dont dispose l’État, en même temps qu’à soumettre les pouvoirs procédant de l’élection à la tutelle d’instances non élues. La bien pensance applaudit au nom de la sauvegarde de l’ « État de droit ». L’opinion, elle, ne se sent plus protégée.
RPP – Les responsables politiques ajoutent des principes flous dans les textes fondamentaux et se plaignent ensuiteque les juges en fassent quelque chose. Ils votent, comme lors de la loi immigration, des dispositions dont ils savent qu’elles seront censurées, pour ensuite désigner le juge comme un obstacle. Le problème ne vient-il pas davantage de l’instrumentalisation du droit par les politiques que de l’interprétation des juridictions ?
Jean-Éric Schoettl – Les termes aux contours imprécis sont inévitables dans les textes de portée générale, a fortiori s’il s’agit, comme dans le cas des textes constitutionnels ou conventionnels, d’énoncés porteurs de valeurs, d’aspirations, de proclamations, de grandes orientations. C’est au juge, lorsqu’il en fait directement application, d’observer la retenue sans laquelle le jeu de la séparation des pouvoirs serait faussé aux dépens des pouvoirs issus du suffrage populaire. Ce « self restraint » juridictionnel consiste en particulier à ne pas trahir l’intention des auteurs de la norme, à ne pas conférer une portée impérative à ce qui n’est qu’un « principe inspirant », à ne pas chercher à toute force à appliquer un texte à un contexte étranger à ceux qu’il vise, à ne pas échafauder de jurisprudences prétoriennes sur des assises textuelles incertaines.
Les exemples abondent, pourtant, de sur interprétations juridictionnelles. Regardez la cathédrale jurisprudentielle que la Cour européenne des droits de l’homme (et, à sa suite, les juges nationaux) ont édifiée sur la notion de « respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance » (article 8 de la CEDH) dans des domaines comme le droit des étrangers, la procédure pénale ou le traitement des données personnelles. Regardez quel parti la Cour de justice de l’Union européenne tire de la simple mention de la notion d’État de droit parmi les « valeurs de l’Union » énumérées par l’article 2 du Traité sur l’Union européenne. Regardez quelle portée normative inédite le Conseil constitutionnel a conférée au troisième terme de la devise de la République dans sa décision du 6 juillet 2018.
S’agissant de la décision du 25 janvier 2024 du Conseil constitutionnel censurant une trentaine d’articles de la loi immigration comme issus d’amendements constituant des « cavaliers législatifs », je m’inscris en faux contre l’idée qu’elle allait de soi. Des sujets comme la condition de durée de séjour régulier pour obtenir une prestation sociale ou comme les règles d’acquisition ou de déchéance de la nationalité sont en lien avec la thématique de l’immigration. D’autant que, sur la recevabilité des amendements en première lecture, la révision constitutionnelle de 2008 a entendu non pas durcir, mais au contraire assouplir la jurisprudence antérieure du Conseil constitutionnel, qui se satisfaisait déjà du fait qu’un amendement ne soit pas « dépourvu de tout lien avec le texte en discussion ».
Anne-Charlène Bezzina – Plus les principes juridiques sont importants, plus ils sont flous. La Constitution ne peut pasrentrer dans le détail des problèmes politiques et juridiques que l’État peut rencontrer au quotidien, ce n’est pas son rôle et cela ne serait ni productif ni efficient.
Le plus grand risque dans l’évolution de nos normes vient sûrement de leur instabilité du fait du trop-plein de l’activité du législateur (une loi immigration et une loi pénale presque tous les ans depuis 1958).
Mais l’élément qui me préoccupe le plus dans le débat concernant l’État de droit vient du déplacement des responsabilités du politique vers le juridique avec un risque d’instrumentalisation politique du droit qui a, certes toujours existé, mais qui prend une ampleur de plus en plus préoccupante. Les « démocraties illibérales » ont favorisé l’émergence d’un discours sur le droit faisant des textes juridiques des éléments de blocage de la liberté des pouvoirs élus en dressant les citoyens contre leurs juges constitutionnels. Seulement, la diffusion de ce type de discours n’est plus aujourd’hui le fait des seuls partis populistes, comme le démontre l’année 2024 en France avec :
• L’élaboration chaotique de la loi immigration où l’exécutif a attendu du Conseil constitutionnel qu’il exerce son office à des fins politiques.
• Le risque de plus en plus grand d’une obstruction parlementaire doublée d’un discours politique mettant en cause les armes constitutionnelles destinées à contrer cette obstruction en criant au déni de démocratie.
Il est donc primordial de nourrir le débat public d’une meilleure connaissance des éléments juridiques qui sous-tendent une question politique, comme le démontre l’exemple récent des questions d’inéligibilité des élus où la réalité du droit a été mise à mal dans le discours politique.
RPP – Quelles réformes pourriez-vous proposer pour réconcilier opinion publique, démocratie représentative et État de droit ?
Anne-Charlène Bezzina – Je ne crois pas qu’une réforme intégrale de la Constitution pour une VIe République soit une solution étant donné que la crise politique actuelle n’est pas institutionnelle. Néanmoins, je crois que la Ve République doit s’adapter à son temps et que plusieurs éléments de confiance dans la démocratie pourraient être proposés.
En matière référendaire, les conditions du référendum d’initiative partagée sont aujourd’hui tellement étroites qu’elles verrouillent trop cette initiative. De même je crois qu’il est possible de réfléchir à un élargissement des lois pouvant être soumises au référendum ainsi qu’à la possibilité d’un référendum abrogatif.
Je crois profondément au modèle des conférences citoyennes avec un renforcement du rôle du Conseil économique, social et environnemental. Une condition très importante devrait être fixée : il faut qu’un travail soit fait sur le résultat de ces initiatives qui devraient systématiquement donner lieu à une proposition de loi déposée sur le bureau des assemblées. Il faut que démocraties citoyenne et représenta- tive s’articulent sans défiance.
La composition du Conseil constitutionnel devrait être revue pour supprimer la présence des anciens présidents de la République et poser des conditions à la nomination des juges (en calquant ces conditions sur celles exigées pour un juge européen des droits de l’homme, à savoir « les juges doivent jouir de la plus haute considération morale et réunir les conditions requises pour l’exercice de hautes fonctions judiciaires ou être des jurisconsultes possédant une compétence notoire »).
Il faudrait aussi que la responsabilité pénale des ministres puisse être engagée devant le juge de droit commun, le privilège de juridiction qu’offre la CJR a vécu. Pour éviter tout conflit juridico-politique, il me semble que la commission de filtrage des recours devrait être conservée mais supprimons la CJR et sa formation de jugement composée de parlementaires, qui donnent un sentiment d’entrisme avec des politiques à la fois juges et parties.
Je souhaiterais enfin que la Constitution retrouve son objectif de garantie des droits du citoyen dans son époque : avec
un véritable habeas data pour encadrer les données, l’usage des réseaux sociaux, protéger la jeunesse. Mais également avec une réflexion sur les biens communs (eau, énergies, etc..) engagée dans la Constitution.
Pour finir, la voix de la France doit être mieux entendue au sein de l’UE avec des partenariats plus volontaristes avec ses alliés notamment en réaffirmant l’existence du « bouclier constitutionnel français », comme l’Allemagne le fait déjà, tout en continuant à promouvoir l’harmonie des systèmes juridiques dans la liberté que laisse l’Union européenne (comme en matière d’immigration où la marge d’action du législateur est bien plus grande que les élus de tous bords ne le laissent entendre).
Jean-Éric Schoettl – Le rétablissement de la souveraineté parlementaire peut être recherché dans le pouvoir donné au Représentant de « reprendre la main », selon une règle de majorité qualifiée, après une décision de justice.
À cet effet, la Constitution pourrait disposer ce qui suit :
« Une disposition législative déclarée contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel, ou ayant fait l’objet de réserves d’interprétation par ce dernier, ou jugée contraire à un traité par une juridiction française ou européenne statuant en dernier recours, est maintenue en vigueur si, dans l’année suivant cette décision ou ce jugement, elle est confirmée par une loi adoptée dans les mêmes termes par la majorité des députés et par la majorité des sénateurs.
La loi de confirmation précise selon quelles modalités la disposition en cause demeure en vigueur ou reprend vigueur.
Elle ne peut faire l’objet d’aucun des re- cours prévus aux articles 61 et 61-1 ».
Une telle règle permettrait au politique de reprendre la main en toute connaissance de cause, sans avoir (comme pour le droit d’asile en 1993) ni à convoquer le Congrès, ni à modifier la Constitution à chaque « lit de justice ».
Anne-Charlène BEZZINA et Jean-Éric SCHOETTL