Dans une tribune publiée dans Le Figaro, Fabien Calvo, Jean-Luc Harousseau et Dominique Maraninchi apportent leur soutien au professeur Raoult en recommandant d’appliquer le traitement associant hydroxychloroquine et azithromycine dès l’apparition des premiers symptômes du Covid-19. Fabien Calvo, professeur émérite de pharmacologie à l’Université Paris-Diderot et ex-directeur scientifique de l’Institut national du cancer, a répondu à nos questions.
Revue Politique et Parlementaire – Vous venez de signer avec vos collègues les professeurs Maraninchi et Harousseau une tribune dans Le Figaro en faveur de l’administration sous prescription médicale du traitement associant hydroxychloroquine-azythromycine. Quels sont les éléments qui vous ont incité à prendre à cette position ?
Fabien Calvo – Cette tribune a été écrite en raison d’une incohérence dans l’autorisation actuelle de l’utilisation de ce traitement : en réanimation si les médecins le souhaitent. La proposition de Didier Raoult concerne les patients pendant la première phase de la maladie avant les manifestations sévères. Le diagnostic est proposé et s’il est confirmé le traitement suit pour faire disparaître la charge virale. Or, dans la situation actuelle les patients ne sont pas diagnostiqués par un prélèvement pour leur grande majorité et on leur recommande le confinement à la maison sans protection pour leur entourage en surveillant leur température et leur fréquence respiratoire. Il y a lieu de faire un diagnostic et de leur proposer, en particulier s’ils ne peuvent participer à un essai clinique, un traitement dont les risques sont connus des médecins.
Les patients et les médecins traitants ont besoin d’une attitude active raisonnée et raisonnable à mettre en œuvre avec les structures de soins.
RPP – Comment expliquez-vous les résistances qui semblent aujourd’hui s’opposer à l’élargissement de cette mesure ? Sommes-nous en retard d’une « guerre » ?
Fabien Calvo – Nous devons reprendre le contrôle d’une situation pandémique qui est d’ordre médical et sanitaire. Le développement et l’usage des tests diagnostics est une composante forte de cette réaction. Le confinement des patients avec des masques également. C’est une situation où les études randomisées apporteront des réponses mais le temps presse. Des données sur les résultats de l’IHU Méditerranée sont déjà disponibles, des éléments expérimentaux montrent que ces médicaments ont une synergie dans l’inactivation virale… on se doit dans ces circonstances d’accompagner malades et généralistes dans un parcours de soins qui sera utilisé. On oppose médecins chercheurs et médecins intuitifs, ce qui est absurde. Dans le SIDA de nombreux traitements ont été validés sur la diminution de la charge virale. En cancérologie des nouveaux traitements ont été acceptés sans étude randomisée préalable. On doit s’efforcer de ne pas nuire en prenant des précautions et de tenter de modifier une trajectoire. Si ce traitement, dont le coût et la tolérance sont maîtrisables, s’avérait inefficace dans les jours prochains pour des situations similaires, il serait évident de l’arrêter.
RPP – La controverse est une donnée de l’histoire de la science. Ne craignez-vous pas que l’extrême médiatisation dont la confrontation autour de la chloroquine est l’objet ne nuise à la sérénité nécessaire du débat scientifique ?
Fabien Calvo – Il est légitime que la santé des patients dans cette situation d’incertitude soit au cœur des débats publics. Les scientifiques se trompent comme les autres. Les certitudes des uns s’opposent à celles des autres. La communauté scientifique n’a que peu manifesté son intérêt aux mesures testées en Asie en son temps.
L’égalité des citoyens face à la maladie est un sujet majeur qui doit être partagé.
La situation dans les EHPAD a été un électrochoc. Nous souhaitons seulement contribuer au débat public. Nulle volonté de confrontation dans nos propos.
Fabien Calvo
Propos recueillis par Arnaud Benedetti