À quelques heures du scrutin, les sondages ne mettent plus que jamais le doute sur l’hypothétique identité du vainqueur dans la course à l’élection suprême. Dans des études toutes aussi serrées les unes que les autres, Kamala Harris et Donald Trump semblent impossibles à départager. Qui parviendra à gagner 270 grands électeurs ?
En juillet dernier, tous les signaux étaient électoralement au vert pour Donald Trump, avec des sondages le donnant même en tête du vote populaire face à Joe Biden. Depuis que l’actuel titulaire de la Maison Blanche s’est retiré, et avec l’émergence rapide de Kamala Harris, nommée dans la foulée, les dynamiques se sont très rapidement inversées. Le camp démocrate prend aisément les devants dès le mois d’août, avant de se faire à nouveau rattraper par Donald Trump dès le mois d’octobre. D’après le statisticien Nate Silver, Kamala Harris serait en avance, à la veille du scrutin, de seulement 0,8 point au niveau national.
Sous allures de « micro-dynamiques », aucun des deux candidats n’arrive à prendre le devant sur l’autre, notamment dans les sept « swing-states », ces fameux États pivots et indécis qui feront basculer l’élection en faveur de l’un ou de l’autre.
Selon l’agrégateur de sondages FiveThirtyEight, Donald Trump serait devant en Arizona (+2,3), en Géorgie (+1,1), en Caroline du Nord (+1,0) et dans le Nevada (+0,3). Kamala Harris, elle, pourrait compter sur les États de la « Rust Belt », où elle serait devant dans le Wisconsin (+1,0) et le Michigan (+0,9). Quant à la Pennsylvanie, État qui donnerait une victoire presque assurée à celui qui l’emporte, les deux candidats sont parfaitement à égalité (47,8 %). Incertitude totale jusqu’au bout, donc, bien qu’Allan Lichtman, historien aux prédictions pratiquement toute correctes, et ayant même anticipé la victoire de Donald Trump en 2016, voit Kamala Harris accéder à la Maison Blanche. Raison ou tort comme lors de l’élection présidentielle en l’an 2000 ? Le temps le dira.
Tout le monde se souvient des sondages, qui, en 2016, étaient complètement passés à côté de la victoire du camp républicain, avec 346 des 376 sondages donnant Hillary Clinton en tête, selon un graphique du Huffington Post. Même erreur en 2020, où les enquêtes avaient toujours sous-estimé la performance de Trump. Suite à ces antécédents, la logique revenait à simplement supposer que, si les sondages se trompaient à nouveau cette année, c’était en défaveur de Kamala Harris.
Pourtant, l’hypothèse d’une sur-estimation du vote Trump est loin d’être à négliger.
Pour limiter ces risques, les sondeurs pourraient avoir redressé le vote en sa faveur, en prenant en compte des électeurs ne prononçant jamais dans les enquêtes d’opinion aux États-Unis, et enclins à aller voter. En 2022, à l’occasion des élections de mi-mandat, les instituts avaient anticipé une vague rouge… Qui s’est transformé en vaguelette, au profit des démocrates. Si tel était à nouveau le cas, l’issue de l’élection pourrait se révéler moins serrée qu’attendue, avec Kamala Harris raflant tous les swing-states et gagnant potentiellement 319 grands électeurs.
Évidemment, cela pourrait être également le cas inverse, offrant dans ce cas-là une victoire acquise facilement à Trump.
Un indice pouvant mettre le doute sur une éventuelle sur-estimation de Donald Trump, c’est ce sondage « choc », sorti récemment pour des Moines Register et Mediacom. Kamala Harris y était donnée en tête dans l’Iowa, fief traditionnellement républicain. S’il est bien le seul institut à la donner gagnante dans cet État, et s’il permet de s’interroger et de semer encore plus le doute sur le nom du vainqueur, c’est parce qu’il a été réalisé par Ann Selzer (Selzer & Co), sondeuse ayant acquis le respect grâce à des sondages rarement erronés dans l’Iowa. Si Harris y est favorite, c’est notamment grâce au gain du vote des femmes plus âgées ou politiquement indépendantes, préférant se tourner vers le camp démocrate et la candidate.
Les femmes avec Harris et les hommes avec Trump ? Selon le dernier sondage de la chaîne NBC, Kamala Harris serait en avance de 16 points au sein de l’électorat féminin, quand Donald Trump le serait de 18 points chez les électeurs masculins. Cet immense “gender gap” pourrait avoir un gros impact sur l’issue du scrutin.
La raison ? Contrairement aux précédentes élections, le droit à l’avortement, remis en cause dans de nombreux États, est l’un des thèmes principaux de la campagne, permettant à Harris de capter massivement les femmes.
Quid du vote anticipé ? À ce jour, près de 77 millions d’Américains auraient déjà voté, soit 49 % du total de 2020. D’après le dernier décompte de TargetSmart, datant de la semaine dernière, 53 % des électeurs ayant voté à l’avance sont des femmes, et 44 % des hommes. Une mobilisation du camp féminin qui serait – si l’on en croit les enquêtes – pour l’instant favorable au camp démocrate.
Vous l’aurez compris, il est aujourd’hui impossible de prédire avec certitude le vainqueur de l’élection. L’incertitude plane et planera jusqu’au dépouillement et à l’annonce des résultats. Trump ou Harris à la Maison Blanche ? Rendez-vous mercredi 6 novembre.
Clément Macchi
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