La question de la liberté est à l’agenda de la Revue politique et parlementaire. Dans son dernier numéro où nous posons la question « Aimons-nous encore la Liberté ? » et durant l’événement que nous organisons du 30 septembre au 2 Octobre à Saint-Raphaël où nombre d’intervenants, intellectuels, politiques, entrepreneurs, chercheurs débattent d’un enjeu qui est au cœur de l’émancipation de l’homme moderne et des régimes démocratiques et libéraux.
À y regarder de loin, nous n’avons jamais été aussi libres en Occident : de nos choix de vie, de nos expressions, de nos opinions etc. ; à y regarder de près, cette liberté multidimensionnelle est possiblement aussi le fruit d’un effet d’optique. La crise sanitaire a rappelé que la peur des menaces, pandémiques pour la circonstance, conjuguée à l’habitude de la domestication des risques portée par les progrès scientifiques et techniques, pouvait forger une « économie psychique » pour reprendre le mot de Freud, malléable à des injonctions aussi intrusives que contraignantes.
La liberté ne va pas de soi. Elle est un plan en équilibre qui peut, selon les époques, se modifier au fur et à mesure de l’évolution des sociétés et des événements qui percutent ces dernières. Rien en conséquence n’est jamais acquis.
Mais la liberté est en soi une idée complexe à définir. Les libertés politiques, collectives telles qu’elles se sont développées avec l’Etat-nation et la démocratie parlementaire en Europe, sont désormais entrechoquées par la globalisation. Souvent les libéraux d’aujourd’hui oublient le testament de leurs glorieux ancêtres. Les libertés individuelles, celles qui touchent à l’autonomie du sujet, oscillent entre libération et contrôle, les droits sociétaux ne cessant de s’élargir alors que dans le même temps, la puissance publique s’immisce de manière normative ou suggestive dans nos conduites les plus personnelles.
Là aussi les interrogations nécessitent d’être d’autant plus explorées qu’à l’heure de la technique triomphante, ce que nous gagnons en facilités peut se payer parfois au prix de nos vies intérieures – ce que Bernanos dans « La France contre les Robots » avait entrevu dès 1947 – mais également de nos vies privées et quotidiennes. Le sondage réalisé pour le compte de notre Revue sur cette importante question montre dans tous les cas l’attachement des Français à la liberté, leur inquiétude quant à ce qu’ils perçoivent ces dernières années comme un recul, mais aussi leurs contradictions entre la demande d’autorité et l’adhésion aux principes constitutifs de nos régimes libéraux. Plus que jamais, à l’heure où les fausses controverses parasitent parfois l’espace public, il convient d’en revenir aux enjeux fondamentaux. Ceux relatifs aux libertés le sont plus que jamais, y compris dans nos sociétés ouvertes.
Arnaud Benedetti
Rédacteur en chef de la Revue Politique et Parlementaire
Professeur associé à l’Université Paris Sorbonne