Christophe de Courson, entrepreneur, expert du digital, et représentant d’Agentic Group en France, un consortium d’entreprises dédié, notamment, au développement de la Blockchain, explique en quoi cette technologie révolutionnaire pourrait impacter les finances publiques…. et la démocratie.
Tout d’abord, qu’est-ce qu’Agentic Group ?
Agentic Group LLC (NYC) est un consortium mondial d’entreprises basé sur ses membres pour une complète objectivité, créé pour développer la compréhension et l’innovation dans les technologies émergentes autour de la BlockChain et des devises digitales. Il comprend plus de 30 sociétés technologiques, fonds d’investissement privés et les dirigeants les plus influents. Nous planifions la trajectoire de ces technologies dans leurs développements et leurs exécutions à un niveau global.
Au-delà de mettre en avant nos membres et d’ouvrir notre réseau, nos missions reposent sur trois piliers : explorer, conseiller, exécuter. Nous avons une réelle connaissance de la façon dont la monnaie digitale et la Blockchain transforment tous les secteurs de l’économie. Nos événements sont là pour mettre en lumière ces changements profonds et débattre avec différents acteurs. Nous conseillons les entreprises et les gouvernements sur la vision qu’ils pourraient mettre en œuvre autour de la Blokchain. Enfin, nous développons des stratégies et des solutions business liées à la Blockchain pour les entreprises et les associations.
Vous organisez un événement le 20 juin au Palais Brongniart, avec notamment Jean-Louis Borloo. De quoi s’agit-il ?
Le but de Agentic France est de mettre en avant des intervenants Européens du même niveau que notre homologue Américain le fait. Etre le Hub U.E. leader dans la stratégie et le développement de la BlockChain et construire une base solide de membres basés en France. Pour marquer la création de la division Française, nous organisons un 1er colloque en France, à Paris le 20 Juin 2016 au Palais Brongniart. Cet événement réunira deux panels de discussion composés de nos membres sur la Blockchain et la révolution des modes de paiement en France, aux Etats-Unis et dans les pays émergents. Des participants de renoms seront présents. Notamment Jean Louis Borloo, qui soutient l’action d’Agentic Group, qui viendra présenter son initiative pour électrifier l’Afrique et échangera sur les bienfaits des nouvelles technologies et leurs impacts au niveau sociétal. Deux startup françaises seront présentes : LemonWay représenté par son co-fondateur et CEO Damien Guermonprez et Stratum avec Richard Caetano, co-fondateur et CEO. Rik Willard, fondateur et président d’AgenticGroup sera modérateur de cet événement exceptionnel. (Programme et inscription)
Si la Blockchain est devenu un buzzword, elle reste souvent complexe pour la plupart des gens. En quoi consiste cette technologie révolutionnaire ?
Pour faire simple, imaginez des blocs qui rassemblent un certains nombres de transactions liées à la création de jetons numériques d’authentification appelés Token, parfois comparés aux « cryptomonnaies », dont le processus le plus connu reste le Bitcoin. Chacun de ces blocs est digitalement signé et sécurisé pour continuer vers le bloc suivant et former ainsi la chaîne de blocs.
La Blockchain peut ainsi se définir par un registre de données qui maintient en permanence une liste croissante de transactions enregistrées et sécurisées contre la falsification et le remaniement.
Comment ça marche ? C’est un système décentralisé, un logiciel communautaire mondial et libre qui rend les utilisateurs autonomes. C’est une mise en relation directe avec un autre utilisateur concerné par le même sujet sans être confronté et ralenti par un quelconque intermédiaire. Avec la Blockchain, la technologie se suffit à elle-même.
Quels sont les avantages d’une telle technologie ?
Ils sont nombreux : une plus grande transparence, la sécurité, l’automaticité, l’autonomie retrouvée des acteurs de l’économie, mais aussi la réduction des coûts. Autant d’atouts qui bénéficient aux consommateurs et aux citoyens.
Grâce à la succession d’authentifications décentralisées, l’information devient une cible mouvante et multiple. Ce qui réduit considérablement le risque de fraude et de falsification des identités. Par ailleurs, l’utilisation d’un jeton digital, le Token dont je parlais plus haut, représente une sécurité au niveau mondial pour des titres, actions, obligations, fiducie ou même un certificat d’authenticité pouvant être déplacé de compte à compte. En matière de rapidité et de réduction des coûts, un exemple illustre très bien l’intérêt de la Blockchain. Aujourd’hui, quand une entreprise ou un particulier fait un virement vers un compte à l’étranger, il y a une personne physique qui valide la transaction. Ce qui explique qu’aucun virement n’est effectué les week-ends et jours fériés. Il faut en moyenne entre trois et cinq jours pour que les fonds arrivent à son destinataire. Pendant ce temps cet argent n’est pas profitable au marché mondial. Or, il existe des sociétés privées utilisant la Blockchain qui proposent de s’occuper de ces transferts de fonds en garantissant l’arrivée des fonds dans la devise que l’on souhaite en une journée maximum. Uphold a ainsi déjà transféré 940 millions de dollars. Si c’était généralisé aux banques cela permettait de mettre sur le marché des centaines de milliards de dollars de liquidités dans l’économie réelle, ce qui accélérerait les transactions, réduirait les commissions de chaque virement et le risque dans certains cas, de la fluctuation du taux de change d’une devise à une autre.
La Blockchain place tous les acteurs devant leur responsabilité. Car, pour reprendre l’exemple que je viens de donner, les banques devront justifier leurs frais. Et la corruption et la falsification devenant plus difficile, l’argent, notamment public, ne pourrait plus être détourné à d’autres fins que celles prévues.
Enfin, grâce à la Blockchain, il n’y a plus besoin de tiers de confiance pour enregistrer, authentifier et sécuriser une transaction ou un échange de valeurs. C’est ce que l’on appelle le Smart Contract. Tous les secteurs d’activités sont concernés, de l’immobilier, au droit de propriété intellectuelle en passant par les assurances. Les notaires, les experts comptables, les avocats, etc, seront inévitablement impactés. Il ne s’agit pas de les faire disparaître, contrairement à ce qu’on lit beaucoup. Leur métier devra en revanche évoluer.
Justement, comment la Blockchain pourrait-elle bénéficier aux finances publiques ?
Ce qui se passe dans le domaine privé pourrait être transposable au niveau des Etats.
A court terme, la technologie Blockchain pourrait être utilisée pour améliorer la confiance et l’exactitude des registres et documents public, dans le but de réduire les temps de transaction et minimiser la fraude pour les titres de propriété et le dépôt des brevets enregistrés. À l’avenir, la Blockchain pourra servir lors d’élections, dans les secteurs des transports, de l’énergie…
En France, le paiement des différents impôts pourrait être amélioré grâce à la Blockchain. L’argent serait prélevé de manière plus sûre, sans erreur ou falsification possible, et plus rapidement.
Il pourrait ainsi être réemployé de manière plus efficace. Il ne s’agit pas d’une utopie. A titre d’exemple, Le gouvernement Luxembourgeois a l’ambition internationale de digitaliser le pays tout entier, “Digital Luxembourg Initiative”, avec une question : Quelles sont aujourd’hui les avancées économiques, sociétales et politiques permises par les nouvelles technologies? La réponse pour la partie économique se trouve chez Agentic Group, et c’est dans ce contexte que le consortium a été sélectionné comme conseil spécial pour la technologie BlockChain.
Il reste beaucoup de pédagogie à faire avant que les pouvoirs publics utilisent la Blockchain. Comment convaincre ?
Il faut démystifier la Blockchain. L’aspect technologique ne doit pas faire peur. Ce qui importe le plus est que les responsables politiques, au niveau français et européen, s’emparent du sujet dès maintenant pour réguler de manière intelligente cette technologie. A défaut, le risque est de prendre dans l’urgence des mesures pour l’encadrer, qui seront inévitablement de mauvaises solutions. C’est un changement radical de culture qui s’opère avec la Blockchain. Il faut l’accompagner pour qu’il soit le plus efficace et bénéfique possible. Evitons la situation que l’on a connue entre les taxis et Uber. Car je pense profondément que la Blockchain est porteuse de création d’emplois et remettra de l’argent dans l’économie réelle grâce à la fluidité qu’elle permet. Dans la finance, par exemple, plutôt que de briser des carrières ou de supprimer des postes définitivement, la Blockchain, appliquée largement, permettrait un redéploiement des forces de travail propice à l’évolution moderne du secteur.
Préparons l’économie à ce chamboulement mondial qui peut représenter un bond technologique sans précédent.
Avec la Blockchain, des populations entières tenues à l’écart du progrès faute d’institutions, structures ou victimes de l’insécurité, se retrouveraient désormais raccrochées à la chaîne du progrès.
Ce déverrouillage technologique global pourrait être l’amorçage d’une croissance mondiale d’ampleur comparable à la révolution industrielle. A condition aussi que les politiques anticipent le changement, à défaut de le subir.
Propos recueillis par Laure Kepes