Après la décision de Decathlon de retirer le hijab de running de la vente, un collectif de femmes musulmanes, dans une tribune publiée par Libération, demande à la marque “de ne pas céder aux intimidations”. Réaction de Laurence Taillade, fondatrice de l’Observatoire de la laïcité” du Val d’Oise, qui oeuvre depuis plus de dix ans pour le respect et la promotion des principes républicains. Auteur de L’urgence laïque1 et co-auteur d’Une France soumise2, elle a fondé Forces Laïques, un mouvement politique issu d’états généraux de la laïcité dont la conclusion a été l’abandon des principes au profit d’un clientélisme généralisé.
Dans une tribune publiée hier, un collectif de femmes musulmanes enjoint Decathlon à résister à la bronca provoquée par leur cagoule de running, destinée exclusivement aux femmes, puisqu’ils la nomment, eux-mêmes hijab.
Ces femmes, qui se désignent par l’expression “musulmanes voilées”, s’appuient sur des témoignages dont l’objectif unique est de désigner la République et ses institutions comme racistes et discriminantes. Prenant volontairement à l’envers la question centrale du voile, comme symbole politico-religieux revendicatif d’une appartenance à un groupe, elles désignent la neutralité de l’Etat comme empêchant leur liberté. Or, c’est bien la contrainte de neutralité de l’Etat et de ses fonctionnaires, la laïcité, qui permet à chacun (et donc à tous) de se savoir appartenir à une Nation indivisible, dans laquelle la citoyenneté est le dénominateur commun et le ciment.
C’est cette citoyenneté qui permet à chacun de s’assurer de ne subir aucune discrimination d’une quelconque nature, aucune pression à pratiquer ou ne pas pratiquer.
Ce n’est pas en cherchant à nous faire accepter par la force du statut victimaire des contournements des lois de 2004, celles encadrant les fonctionnaires du service public ou les règlements intérieurs des infrastructures sportives, que nous serons dupes d’une manœuvre bien grossière.
La République est la même pour tous. Il n’y a pas d’exception à faire pour une communauté qui n’a d’existence que dans le cerveau malade de certains élus ou de leaders d’associations rêvant d’une fragmentation de la Nation au profit d’un communautarisme d’Etat, encouragé par la calinothérapie en direction des religions du gouvernement Macron.
Cette séquence, vécue la semaine dernière autour du cas Decathlon soulève de nombreuses interrogations importantes.
D’abord celle de la place du sport. Historiquement, l’Olympisme, est une épreuve de sport mettant en avant la beauté des corps. En effet, les épreuves “gymniques” (γυμνικοί ἀγῶνες / gumnikoí agỗnes) c’est-à-dire, au sens propre, “nues” se pratiquent entièrement dénudés, des pieds à la tête. Nulle question de revenir à ces pratiques antiques, mais l’on voit bien que nous sommes loin de l’état d’esprit d’origine, promouvant, comme le revendique le CIO “Une philosophie de la vie, exaltant et combinant en un ensemble équilibré les qualités du corps, de la volonté et de l’esprit.”
Le sport a pour principe l’universalisme des pratiques.
Or, en acceptant un apartheid sexiste par le tissu, on casse cet universalisme au profil d’une idéologie sexiste, rétrograde, dont ces associations, qui ont fait de la victimologie islamophobe leur fonds de commerce, sont les idiotes utiles, au mieux, les idéologues, du PIR(e).
Dire que la France ne peut qu’assister muette à cette gangrène qui mine les corps et les esprits est une contre-vérité. Et la réaction digne de Mesmer, engluée dans des arguments confus, dont a fait preuve madame Schiappa, avec sa légèreté habituelle ne peut que décevoir les féministes, dont je considère faire partie.
En effet, la France a aujourd’hui l’occasion unique de reprendre le flambeau des lumières, qu’elle a abandonné depuis tant d’année. Elle a le devoir urgent de dire non à ce spectacle désastreux de l’Olympisme qui cède sous la pression islamiste. Car, oui, l’Olympisme a basculé, plongé dans l’acceptation de la perversion du sexisme revendiqué, par l’acceptation, sans condition, années après années, depuis 1996 – date de la première athlète voilée sur les stades olympiques – de l’apartheid sexiste lors de ses épreuves.
Ces femmes ne sont pas l’image de la libération des femmes musulmanes, mais bien les étendards vivants de pays qui pratiquent une loi intrinsèquement sexiste, une organisation les bannissant au stade de sous-citoyennes.
Et le CIO accepte, voire encourage par ses compromissions successives, cette soumission de la moitié de l’humanité, allant à l’encontre même de sa propre charte, prévoyant, dans son article 50, la neutralité politique, philosophique et religieuse des stades.
La France devrait, et ce serait le rôle de cette secrétaire d’Etat de paille, demander l’exclusion de pays qui ont fait de l’apartheid sexiste une doctrine : l’Iran et l’Arabie Saoudite devraient être interdits de compétition, comme l’Afrique du Sud au moment de son apartheid raciste. Mais il faut croire que le racisme est une cause plus noble à défendre que la condition des femmes… Priorité clientéliste dans les causes à défendre.
Les femmes ne valent pas d’être défendues, semble-t-il, toutes les femmes. Car la France ne doit pas, non plus, abandonner ou oublier toutes les Katia Bengana du monde, passées, présentes et futures. Celles qui portent ce voile de la honte, de l’indignité, de l’exclusion de l’effacement, de l’appropriation. Celles qui ont été passées à l’acide, emprisonnées, assassinées, avec la bénédiction des régimes en place. On ne peut pas dignement défendre le voile ici et les regarder en face là-bas. Et ce n’est pas faire preuve d’une attitude post-coloniale avec des valeurs de blancs que de dire cela. Personne, nulle part, ne devrait avoir honte de son sexe. Personne, nulle part, de devrait se soumettre à la domination d’un autre individu. J’attends de mon pays qu’il l’affirme haut et fort, ce qui sera la meilleure façon de mettre un terme à ce type d’offre commerciale, de revendications indignes, de remises en causes de nos principes.
Laurence Taillade
Présidente Forces Laïques