Le gaullisme est pris dans l’étau de la dialectique libéral/illibéral et menace d’en être broyé. Il est navrant d’avoir vu tout au long de cette élection ce courant politique se démonétiser, et ses troupes faire défection, pour rejoindre les berges ennemies, que ce soit le camp libéral d’Emmanuel Macron, ou le camp illibéral d’Éric Zemmour. Il convient désormais d’assumer que le clivage libéral/illibéral a structuré cette présidentielle, et que la Sion politique de cette campagne n’était pas à Paris, mais dans la capitale technocratique belge, ou dans sa rivale populiste hongroise.
Le gaullisme est pourtant la réponse de droite à cette dialectique de notre temps. L’état-nation gaulliste, n’est ni l’état libéral, ni l’état illibéral ; De Gaulle s’opposait tout autant à Pétain qu’à Roosevelt. Le gaullisme est un réalisme, ce n’est ni un lendemain fantasmé, ni un hier idéalisé. C’est aussi un équilibre, dans son rapport en particulier à la volonté de puissance de la nation, qui ne conduit ni à une abdication fédéraliste, ni à une exacerbation impérialiste. C’est encore une réserve, qui ne porte ni à une xénophilie nombriliste, oublieuse de son peuple, ni à une xénophobie obsessionnelle, qui stimule les bas instincts. C’est une probité, qui ne séduit ni ne ment, en vendant une prospérité factice et à crédit, ou la pureté cristalline d’une société couleur sépia. C’est l’esprit de résistance, face aux forces du moment, face à ces deux puissants courants qui vont structurer le XXIème siècle. C’est en somme et surtout, une éthique aristocratique, qui ne tolère ni le mépris du peuple et le délaissement de sa culture, ni la haine des élites et le discrédit des institutions.
Le libéralisme n’a pas le monopole de la raison, pas plus que l’illibéralisme n’a celui de la nation. Les Républicains portent donc cette responsabilité historique d’incarner la réponse à cette grande question posée aux démocraties occidentales, qui est celle du chemin à prendre, entre ces deux gouffres que sont le libéralisme et l’illibéralisme. De Gaulle a su trouver sa voie à travers la dialectique de son temps, celle qui opposait capitalisme et communisme. Aux républicains de trouver la leur, et de faire en sorte que Paris, qui avait réussi à tracer sa route entre Washington et Moscou, montre désormais le chemin, entre Bruxelles et Budapest.
François-Xavier Roucaut
Psychiatre
Professeur adjoint de clinique à l’université de Montréal