Certains parlent de révolution, d’autre d’avancée technologique majeure. Dans tous les cas, la blockchain semble avoir conquis de plus en plus d’experts à tel point que même les parlementaires s’intéressent à la question. La CSSPPCE a organisé récemment un colloque à l’Assemblé nationale pour débattre des potentialités de cette technologie.
Fin mars était organisé par la Commission Supérieure du Service Public des Postes et des Communications Electroniques (CSSPPCE) un colloque à l’Assemblée nationale autour du phénomène « blockchain ». Intitulée « Blockchain : Disruption et Opportunités », la journée avait pour objectif de « sensibiliser en priorité les parlementaires, les hauts fonctionnaires, les dirigeants d’entreprise, les relais d’opinion et les enseignants à la technologie blockchain, à ses usages et à la transformation numérique de l’économie par cette nouvelle technologie. »
Pour la commission, la blockchain va provoquer dans les mois qui viennent « un bouleversement de l’économie d’internet » et plus largement de l’économie mondiale. L’enjeu était donc de se saisir politiquement de ce sujet en réfléchissant à ces applications multiples, mais aussi aux nécessaires régulations.
La blockchain : une révolution
Les principes de la blockchain ont été posés en 2009 par un anonyme (ou un collectif), « Satoshi Nakamoto« , qui publie alors sous licence libre le protocole qui permet de sécuriser les transactions en ligne de la monnaie électronique Bitcoin.
Le principe de ce protocole est d’utiliser la puissance de calcul des réseaux de serveurs informatiques afin de valider les échanges en ligne. Il s’agit d’une technologie de « stockage et de transmission d’informations transparente, sécurisée, et fonctionnant sans organe central de contrôle ». Une gigantesque base de données qui est fortement sécurisée puisqu’elle est partagée entre tous ses utilisateurs, sans intermédiaires, leur permettant ainsi de vérifier directement la validité de la chaîne. Le mathématicien Jean-Paul Delahaye explique qu’il faut s’imaginer « un très grand cahier, que tout le monde peut lire librement et gratuitement, sur lequel tout le monde peut écrire, mais qui est impossible à effacer et indestructible. »
Pas si simple à comprendre. Pour résumer, un bloc regroupe plusieurs transactions et est relié de façon irrémédiable par celui qui le précède, formant « une chaîne ». Chaque bloc est validé par un réseau d’ordinateurs décentralisés et volontaires, utilisant un calcul complexe pour s’assurer de l’authentification des parties et de la réalité des sommes échangées.
Des applications et des avantages multiples
Le caractère décentralisé de ce protocole, sa transparence, sa sécurité font que de nombreux acteurs s’y sont intéressés, au-delà du simple domaine monétaire. Cette technologie pourrait en effet remplacer demain les « tiers de confiances » (banques, notaires,…) qui existent dans de nombreux domaines par « des systèmes informatiques distribués ». Cette évolution permettra de réduire les coûts des transactions — en supprimant des intermédiaires — améliorant ainsi la productivité des échanges collaboratifs en ligne.
Les possibilités d’applications sont nombreuses et se regroupent pour l’instant en trois catégories. Celles qui permettent le transfert d’actifs (utilisation monétaire type Bitcoin, moyen de paiement décentralisé, transfert de titres, votes, actions…), celles qui créent des registres, assurant ainsi une meilleure traçabilité (traçabilité de biens, enregistrement de titres, sécurisation du stockage de données dans le cloud…) et enfin celles qui permettent d’exécuter des smart contracts. Bien plus qu’une simple transaction de paiement ou d’enregistrement, il s’agit là d’instructions plus complexes, conditionnelles et programmables.
Ne pas avoir un temps de retard
La blockchain, bien que récente, est de plus en plus utilisée. De nombreux acteurs se servent déjà cette technologie comme le gouvernement du Honduras qui développe un outil de cadastre ou encore la police néerlandaise qui s’intéresse à la sécurisation des données dans le cloud. Il s’agit donc pour la France de ne pas être en retard dans ce qui pourrait être une des évolutions majeures du 21e siècle.
Les défis autour de cette nouvelle technologie sont nombreux. À la fois politiques, économiques, juridiques…
Les députés ont donc intérêt à anticiper ces évolutions de façon à les réguler, mais aussi à encourager l’émergence d’entreprises tricolores dans le secteur.
Alexandre Gavard