Depuis le 17 mars, la France est confinée en raison de l’épidémie de coronavirus. Pierre Larrouy, économiste et essayiste, tient pour la Revue Politique et Parlementaire, un journal prospectif.
Pour le dire crûment…, mardi 24 mars, suite
Les réflexions disruptives, que je lance parfois, comme dans ma chronique sur l’adaptabilité créative de nos organisations, tire sa légitimité de l’absence de choix.
On ne s’en sortira pas en prenant l’option d’une continuité adaptée.
La question de cette période est sa vitesse. Et, en contrepoint, l’inertie. Cette société est en tension extrême. Dans son organisation et dans l’intime collectif. La fragilité est forte. L’hôpital est là, hélas dans ces conditions, pour nous le rappeler.
Si nous ne pouvons ou voulons choisir les réponses autoritaires, il faut opter pour le courage. Une sortie de « guerre » ne laisse pas de temps. Les vainqueurs se servent, les autres pleurent, transigent mais se soumettent.
Seule la vitesse de la créativité peut combattre celle de la puissance coercitive.
En fait, nous le savons et tout le monde a peur. C’est vrai pour l’heure sur le niveau de confinement et les principes de précaution. C’est vrai, très vite, pour l’appréhension du futur.
Nous sommes structurellement fragiles et socialement aux portes de la rupture. Après les « gilets jaunes », le conflit des retraites, l’épidémie éclaire l’injustice croissante dans ce si beau pays. C’est, paraît-il pire ailleurs. Peut-être, mais ce n’est pas ce qui constitue la fierté de l’imaginaire français.
Les inégalités sont criantes devant la crise actuelle – le logement, l’incertitude financière, les moyens éducatifs, la santé… bref ce qui donne la confiance ou produit le sentiment de précarité. Ce qui vient interroger la dignité.
Les fluctuations, autour de la rigueur du confinement, sont les résultantes de notre relation ambigüe à l’autorité.
Est-ce que ça va tenir ?
A minima, que nos responsables actuels et futurs rompent avec les normes de leur « quant à soi » soporifique et de leurs urgences immédiates de continuer leur route, à court terme.
La suite du journal, d’ici quelques jours, y sera confrontée.
Pour le futur et l’économique, il en va de même. Il faut rompre avec la doxa.
Pour ceux qui voudraient… Oskar Morgenstern, le concepteur avec John Von Neumann de la Théorie des Jeux, en 1965, a commis un article sur la compressibilité des systèmes1. C’est ancien, mais d’une grande actualité, pour comprendre la nature et les contraintes de la mutation d’une économie de guerre.
Il faut des mesures de court terme, économiques et sociales, mais, tout autant, imaginer le futur proche et ses possibles pour éviter la soumission nationale ou européenne et la révolte citoyenne.
En fait, Terra Incognita, est bien un journal éphémère, libre et prospectif mais, tout autant, projectif. Plus que jamais il faut comprendre l’état de l’inconscient collectif, avoir des intuitions puis se projeter.
Pierre Larrouy
Economiste et essayiste
- La compressibilité des systèmes économiques, Oskar Morgenstern, Princeton 25 octobre 1965 ↩