Quels que soient les sentiments qu’il inspire, il faut éviter de commettre plusieurs erreurs s’agissant de l’élection du 45e président américain, Donald Trump.
L’une d’elles serait de considérer qu’il s’agit d’une aberration historique, fruit des aléas d’un mode de scrutin indirect et qui n’a aucune chance de se reproduire. L’autre de penser que, possiblement écarté à la prochaine élection présidentielle, voire, pour les plus imaginatifs, poussé par des révélations à une démission anticipée – l’impeachment s’éloignant pour cause de renforcement de sa majorité au Sénat – les problématiques que son mandat aura mises en exergue disparaîtront avec lui. Plusieurs raisons, intérieures américaines comme internationales, incitent à penser, qu’avec ou sans Trump, le « trumpisme » ou certains de ses avatars sont sans doute plus qu’une parenthèse.
Vers un monde « trumpien » ?
De l’angoisse « légitime » à l’insurrection « légale »
En interne tout d’abord : initialement réticent et le considérant comme illégitime dès le lendemain de son élection, le parti républicain s’est, volens nolens – par opportunisme ou conviction – majoritairement rallié à lui lors des « midterms » de novembre 2018 dont les résultats – léger recul à la Chambre des représentants, légère progression au Sénat – se situent dans les moyennes habituellement constatées à mi-mandat. Bousculant un « Grand Old Party » en proie aux doutes depuis les années Bush junior, le désastre de la guerre en Irak et la révolte interne du Tea Party, Trump a réussi à fédérer les trois électorats – nationalistes identitaires, évangéliques, conservateurs néo-libéraux1 – condition sine qua non d’une victoire républicaine aujourd’hui. Mais dans les années 80, les républicains de Ronald Reagan en promouvant la Silicon Valley et la créativité entrepreneuriale vendaient de l’espoir ; aujourd’hui le même parti rallié à Trump reflète – et exploite – les interrogations existentielles d’une classe moyenne blanche inquiète de sa marginalisation économique, exaspérée par le terrorisme intellectuel et sociétal des minorités ethnico-religieuses et sexuelles et angoissée par la pression migratoire. À de multiples reprises, le politologue Mark Lilla2, a souligné – et stigmatisé – la survalorisation des électorats minoritaires par la gauche libérale3 qui est en train de détruire le grand récit américain ; la segmentation de la société qui en est résultée au détriment d’une authentique conception du bien commun est un des facteurs qui a mené au trumpisme. La sphère publique américaine expérimente ce qui est enseigné depuis près de deux siècles dans les facultés de droit européennes : l’intérêt général n’est pas la somme arithmétique des intérêts particuliers.
À l’international ensuite : les démocratures et autres démocraties illibérales ont le vent en poupe et la fascination de Trump pour le charme vénéneux de quelques dirigeants nationalistes a souvent été soulignée.
Sans méconnaître les spécificités de chaque situation, d’Erdogan à Bolsonaro – lui aussi proche des évangéliques – et de Salvini à Orban, en y incluant la Pologne du P.i.S., l’Israël de Netanyahou, les Brexiters durs et quelques autres, sa façon d’appréhender les problèmes du monde fait école. Même si elle constitue un sujet ressassé depuis des décennies, jamais l’intrication des problèmes internes et internationaux n’aura sans doute été aussi étroitement génératrice d’effets directement constatables. Le monde qui s’annonce est celui dans lequel l’Europe et les États-Unis auront perdu non seulement leur avance technologique, leur centralité économique et culturelle mais aussi le monopole de la contrainte armée légitime pour résoudre les conflits d’envergure. Il est sans doute trop tôt pour en évaluer l’impact exact sur l’évolution des mécanismes de sécurité collective. Une réforme des processus décisionnels onusiens toujours évoquée – et sans cesse reportée – ne pourrait que relativiser un peu plus la puissance conjuguée de l’Europe et des États-Unis. En attendant, Trump ne cesse d’afficher son mépris pour l’ordre international issu du second conflit mondial et la galaxie onusienne en particulier ; mais est-il en cela si éloigné de ce que firent en leur temps Georges W. Bush, Dick Cheney ou Donald Rumsfeld ? Dans un Occident qui se caractérise aujourd’hui, plus que toute autre région de la planète, par son pessimisme, Trump ne représente sans doute que le désarroi de la civilisation occidentale face aux évolutions du monde.
Une crise existentielle du monde occidental ?
Dans un essai d’histoire politique publié en 1935, Paul Hazard s’était attaché à décrire « La crise de la conscience européenne ». Mais c’est sur une véritable crise des valeurs fondatrices de l’Occident que se développe aujourd’hui le trumpisme et les phénomènes qui lui sont comparables. Crise du système de références morales gréco-judéo-chrétiennes d’abord : la colonisation, la barbarie des totalitarismes européens, les deux conflits mondiaux et le génocide ont fissuré l’exemplarité éthique du monde dit civilisé. Crise de la pensée scientifique ensuite : les dérives de la démiurgie technologique et des révolutions anthropologiques qu’elles permettent ont amené à une crise du progrès dont les aspects bénéfiques, hormis peut-être en médecine, ont perdu de leur évidence. Crise du matérialisme et des finalités de l’économie enfin : les dérives du capitalisme financier, en concentrant la moitié des richesses du monde entre les mains de quelques centaines de personnes, détruisent non seulement les fondements des sociétés mais aussi le biotope de l’homme, considéré comme une simple variable d’ajustement. La mondialisation a permis de faire sensiblement reculer depuis deux ou trois décennies le taux de pauvreté dans le monde ; elle lui a substitué une aggravation spectaculaire des inégalités à l’intérieur de chaque État, du nord comme du sud, créant ainsi ce sentiment d’un « village planétaire » à l’intérieur duquel la vraie « summa divisio » sépare les inclus, riches, – qui ont fait sécession – des exclus du processus. La destruction accélérée de ressources irremplaçables fait de l’habitabilité de la planète un véritable défi pour les générations à venir. Pour reprendre l’expression de Paul Valéry, « le temps du monde fini commence ».
Il en résulte une interrogation identitaire – et une insécurité culturelle ou sociétale – qui prospèrent sur une crise démographique.
« Demography is destiny » disent volontiers les Américains et les statistiques onusiennes sont sur ce point explicites. L’irréversibilité n’est pas acquise – la baisse actuelle de la population chinoise le montre – mais la dénatalité dans les pays occidentaux va produire, compte tenu de l’inertie de ces problématiques, des conséquences lourdes à terme. En Europe des pays tels que l’Italie, l’Allemagne ou la Hongrie, entre autres, sont particulièrement concernés mais les situations russe ou japonaise ne sont guère plus enviables. Aux États-Unis mêmes, la population d’origine européenne ne devrait plus être qu’en situation de majorité relative – en fait la plus grosse minorité – à l’horizon 2050. Symbole fort même s’il ne relève que d’une simple coïncidence, pour la première fois, trois des dirigeants des plus grands États européens (France, Allemagne, Royaume-Uni) n’ont pas d’enfants. Banaliser les phénomènes migratoires en les présentant comme des constantes historiques ou des nécessités économiques ne suffit pas à rassurer. En coordonnant au sein de l’ONU la rédaction du Pacte de Marrakech sur les migrations, la canadienne Louise Harbour n’imaginait sans doute pas les remous qu’elle allait provoquer, allant jusqu’à la chute d’un gouvernement belge. Les arguments déployés par les défenseurs du texte – droit mou, juridiquement non contraignant, préservant la souveraineté des États en la matière – sont restés sans effets ; les opposants, au sein desquels on compte les États-Unis mais aussi le Brésil, la Hongrie ou Israël craignent que certaines dispositions ne finissent, sous la pression de groupes proactifs ou d’habiles avocats, par prendre valeur de droit positif.
Les risques d’une altération de la démocratie
Sigmund Freud avait réalisé une psychanalyse rétrospective, peu flatteuse et même inquiétante, du président Woodrow Wilson dépeint comme un dangereux illuminé. On se perd en conjectures sur les résultats qu’un tel exercice effectué dans quelques années pourrait révéler sur l’actuel locataire de la Maison Blanche. Le débat sur sa rationalité est vain et confine à l’aporie puisqu’il est largement une question de point de vue. À l’aune des références et des codes existants, l’homme apparaît brutal et imprévisible et beaucoup de ses décisions irréfléchies et dysfonctionnelles. C’est oublier qu’il est un transgressif, un disruptif qui exprime la colère d’une base électorale plus proche de la mentalité insurrectionnelle du Tea Party que des analyses sophistiquées des néo-libéraux. Puisque rien n’est possible du fait de la doxa dominante et des cadres établis, l’objectif devient alors de s’en affranchir en renversant la table pour reformuler la règle de jeu. Piétiner le politiquement correct qui domine depuis trois décennies, l’amène à s’affranchir de la politesse langagière la plus élémentaire qui était jusqu’ici de mise. La culture transpartisane du compromis, partie intégrante de la vie politique américaine, est délaissée et c’est à un retour à une forme de radicalité première, originelle, à laquelle nous convie le président actuel. Il va de soi qu’une telle approche, de par son impulsivité et son impréparation, comporte son lot de contradictions et d’effets imprévus ou contreproductifs, alimentant de façon récurrente le procès en incompétence. L’effet de contagion extérieure était inévitable ; l’étonnant est que quelque six décennies de construction communautaire n’aient pas réussi à l’inhiber au sein même de l’Union européenne.
Le bras de fer en cours sur le mur à la frontière du Mexique et le « shut down » budgétaire qui en est résulté participent de cet état d’esprit. La cascade de nominations, certes légales, de juges conservateurs – celles de Neil Gorsuch et de Brett Kavanaugh à la Cour suprême ne constituant que la pointe de la pyramide – en est l’aspect policé. Mais que dire de l’injonction présidentielle faite, sans succès, à Mitch McConnell, chef de la majorité républicaine au Sénat, de changer sur le champ les règles qui imposent une majorité qualifiée pour y faire adopter un projet de loi ? De même certains se sont-ils alarmés du limogeage en mars 2017 du procureur fédéral de New-York menant une enquête risquant d’atteindre des proches du président. Dans un pays parfois décrit comme étant aujourd’hui aussi divisé qu’il le fut au temps de la guerre de Sécession, la démocratie américaine, l’une des plus solides au monde, pourrait-t-elle se fragiliser ? C’est ce que craignent certains politologues américains tels que Yascha Mounk, enseignant à Harvard, qui s’inquiète d’une dénaturation des institutions sous l’effet d’un populisme désinhibé4 ; de son côté l’ancien ambassadeur Jeffrey Hawkins s’interroge sur la multiplicité d’altérations qui, des tentatives de délégitimation des media « mainstream », traités « d’ennemis du peuple » par le président, aux restrictions insidieuses du droit de vote – dont le « gerrymandering » à la main des gouverneurs – constituent autant de coups de canif au pacte constituant. Enfin est-il besoin de rappeler que les États-Unis sont le laboratoire du monde occidental et que ce qui s’y expérimente finit par arriver tôt ou tard en Europe ? C’est à la personnification au sommet de la première puissance mondiale des peurs et des doutes collectifs enfouis au plus profond de l’univers mental occidental que l’on assiste. Francis Fukuyama s’est trompé et la fin de l’Histoire n’est pas pour demain ; mais la « fatigue démocratique » est perceptible dans nombre de pays où la démocratie ne sait offrir comme horizon que sa propre perpétuation avec ses qualités… et ses lacunes.
L’Europe : la possibilité d’une sortie de l’histoire
Une cible toute désignée du « trumpisme »
En décembre 2018, lors des cérémonies d’hommage organisées pour l’ancien président George H.W. Bush décédé, David O’Sullivan, représentant l’Union européenne à Washington, découvre par hasard qu’il est passé de la 27e à la 173e place dans l’ordre protocolaire. Sans l’annoncer publiquement ni même le lui notifier, le Département d’État avait retiré à l’intéressé sa qualité d’« ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire » pour le ramener à celle de chef de délégation, à l’instar du représentant de l’Union africaine. La justification en est claire : pour l’équipe en place, l’Union européenne ne peut avoir un statut égal à celui d’un État – ce que lui avait accordé en 2016 l’administration Obama – mais le simple rang d’organisation internationale. Bruxelles garde l’espoir d’une réversibilité de cette décision, aux conséquences pour l’instant essentiellement protocolaires mais le symbole est fort de quelques thématiques récurrentes du discours actuel : celle de la « restauration du rôle de l’État-nation dans l’ordre libéral international », développée par Mike Pompeo dans un discours prononcé en décembre 2018 à Bruxelles ; celle d’une critique de l’UE, « groupe de pays assemblés pour tirer avantage des États-Unis » dans les tweets du président.
On connait l’aversion de Donald Trump pour toutes les formes de multilatéralisme, plus encore lorsqu’elles échappent au contrôle américain. La litanie des épisodes conflictuels opposant Washington à l’Unesco, à la Cour pénale internationale, au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, récemment au Programme alimentaire mondial, sans oublier les palinodies sur l’Otan, est là pour en attester. En ce sens il n’est pas inimaginable de penser que tout traité ou institution internationale perçu comme menaçant ou entravant la liberté d’action états-unienne soit à l’avenir ignoré ou neutralisé d’une façon ou d’une autre par l’actuel président américain. Trump n’aime pas l’Union européenne. Son état présent lui offre il est vrai – comme le soulignait récemment l’ancien Premier ministre français Dominique de Villepin – des leviers de choix : alors que le Brexit distille ses effets délétères, était-il nécessaire comme l’a fait le président français, de s’auto-proclamer, dans la perspective des élections de mai 2019, champion de l’Europe des progressistes contre celle des nationalistes ? Ce faisant a été offert à un Trump déjà par trop enclin à flatter les nombreux dirigeants du vieux continent tentés par des replis identitaires, les clés de la division et de la neutralisation de l’Union européenne. Le président américain a vite saisi les opportunités que lui offrait un tel climat, en incitant – sans succès jusqu’à maintenant – durant la première année de son mandat, à des sorties de l’UE facilitées par des « deals » bilatéraux avantageux avec les États-Unis.
L’extraterritorialité du droit américain, perçue désormais comme l’expression d’un impérialisme décomplexé, y compris à l’encontre des alliés les plus proches, et l’impunité fiscale des Gafam, symbole en Europe d’un délitement des démocraties par l’inégalité devant l’impôt, ont servi de révélateur. Bruxelles et les capitales européennes ont découvert, mais un peu tard, qu’elles ne pouvaient rien dans le premier cas5 et probablement pas grand-chose dans le second. Les efforts, louables, du ministre français de l’Économie et des Finances, pour soumettre, a minima, ces multinationales – américaines dans leurs objectifs de domination mondiale mais fiscalement hors sol – à des prélèvements proportionnés aux chiffres d’affaires réalisés sur place auront du mal à se concrétiser. Les rentrées fiscales escomptées – quelque 500 millions d’euros pour la France – restent d’ailleurs modestes. Dans une Europe paralysée par la règle de l’unanimité en matière d’impôt, les paradis fiscaux irlandais, luxembourgeois ou néerlandais – auxquels il faudrait adjoindre quelques réticences danoises et suédoises6 – s’accommodent de la manne qu’ils recueillent tandis que l’Allemagne, inquiète d’éventuelles rétorsions états-uniennes sur ses exportations d’automobiles, prône une prudence propice à l’inaction. Dans sa forme actuelle l’Europe est impuissante sur les thèmes qui importent aux citoyens du vieux continent. Ceux-ci sont las d’être importunés en permanence sur leurs modes de vie traditionnels ou sur des sujets marginaux voire anecdotiques par des institutions européennes démunies face aux enjeux cruciaux.
La lancinante interrogation sur la pertinence du modèle
Imaginé avant la Seconde Guerre mondiale, le fédéralisme à compétence limitée fondé sur l’approfondissement continu d’intégrations fonctionnelles, pour autant qu’il ait jamais été adapté à la nature profonde du vieux continent, trouve aujourd’hui ses limites. Le déficit démocratique est avéré et on ne dira jamais assez les dégâts créés par la remise en cause du résultat – pourtant sans appel (55 % – 45 %) – du référendum français de 2005 sur le Traité constitutionnel européen, qui demeurera l’archétype de l’authentique déni de démocratie. Le débat, récurrent, entre souverainistes acceptant une Confédération d’États-nations et partisans d’un État fédéral s’en est trouvé exacerbé. Les contempteurs de la confiscation des souverainetés rappellent souvent, pour le dénoncer, le fait que 80 % de la législation votée par les parlements nationaux est une reprise de la réglementation édictée par l’UE ; encore oublient-ils de préciser que celle-ci découle largement de l’activisme intrusif de lobbystes, représentant pour beaucoup des intérêts américains, plus nombreux à Bruxelles que les quelque trente-trois mille fonctionnaires de la seule Commission7.
L’agressivité trumpienne a relancé sans le savoir et peut-être sans le vouloir le débat ontologique de la construction européenne : le contrat initial – certes relevant du non-dit – était certainement que les citoyens acceptaient de transférer la charge des protections dont ils bénéficiaient du niveau national vers le niveau européen ; en ce sens l’échec est patent mais les meilleurs connaisseurs et praticiens de la chose européenne affirmeront que l’Europe n’a pas été conçue pour protéger. Comment le pourrait-elle alors que ni sa continuité historique et civilisationnelle – ignorée du fait de la négation de ses racines chrétiennes – et encore moins ses frontières ultimes, atteintes ou à venir, ne sont acceptées et définies ? Mais nier une identité empêche tout simplement une identification.
L’histoire des nations européennes démontre, depuis la féodalité jusqu’à la constitution des États-nations au XIXe siècle, l’importance du lien entre les facteurs élémentaires qui permettent de faire communauté : solidarité économique, défense et sécurité, affinités culturelles et allégeance politique ne peuvent être durablement dissociées sans déséquilibrer l’ensemble.
Les crises des micro-nationalismes européens – dont la Catalogne est le dernier exemple en date – pour diverses et complexes qu’elles soient, s’inscrivent dans cette logique. En présence d’institutions communautaires en évolution permanente, tout en restant illisibles pour les non-initiés, il demeure illusoire d’imaginer qu’une tentative de transposition au niveau européen d’un patriotisme constitutionnel « à la Habermas » puisse faire office d’identité de substitution.
Les exemples abondent de ce que les citoyens européens ressentent comme des trahisons si ce n’est comme des forfaitures : les « implants files » ont révélé un laxisme abyssal et peut-être meurtrier en matière de sécurité médicale ; mais les mêmes remarques peuvent être formulées sur la sécurité sanitaire et alimentaire (pesticides, glyphosate), environnementale (normes de pollution, diesel gate) ; et que penser de l’application provisoire – pour 90 % de son contenu – du traité CETA, si décrié, avant même tout processus de ratification ? Quelques avancées réelles mais très isolées, tel le RGPD, sur la protection des données numériques personnelles ne peuvent occulter les lacunes d’ensemble. Imaginée pour reproduire au niveau communautaire le modèle social le mieux disant, l’Europe s’est ouverte sans protections et sans véritable contrepartie au libéralisme le plus débridé exposant non seulement ses salariés mais ses fleurons industriels, parfois affaiblis par la réglementation bruxelloise sur l’abus de position dominante de l’article 102 du TFUE. La faillite d’une gestion collective des flux migratoires due à l’absence de politique commune et à l’insuffisance initiale de Frontex8 est lourde de conséquences qui pourraient mettre à mal la cohésion et partant l’avenir même de l’Union.
Une institution en perpétuel approfondissement ou intrinsèquement inadaptée ?
L’histoire – ou la légende –, veut que la psyché française n’ait, aux origines de l’Europe des six, accepté la construction communautaire qu’à la condition de la dominer et de la mettre au service de la grandeur nationale. Mais l’addition de vingt-huit faiblesses ne fait pas une force et l’échec de l’effet « démultiplicateur de puissance » est évident. L’euro est certes plébiscité par des consommateurs européens pour les simplifications introduites dans la vie courante mais son succès macro-économique dans les rapports avec l’extérieur est moins assuré ; sa marginalisation dans les mécanismes de compensation l’a dénué de toute utilité dans la protection des entreprises européennes en butte aux sanctions unilatérales de Washington pour cause de non-respect des embargos. Comment pourrait-il en être autrement alors que les assises traditionnelles – puissance fiable et identifiable et unicité de politique économique – qui fondent la confiance en une monnaie font ici défaut. L’absence de cadre institutionnel approprié – achèvement de l’union bancaire, unification des marchés de capitaux – s’ajoute ici à l’activisme de Pékin qui tente, notamment en Afrique, d’imposer son renminbi. Au final, avec 62 % des réserves des banques centrales et 70 % des émissions obligataires, contre respectivement 20 % dans les deux cas en euros, la domination du billet vert est actuellement à un niveau inégalé depuis les accords de Bretton Woods.
Il en va de même en matière de défense où la diversité des intérêts industriels et des tropismes géostratégiques, la divergence des cadres constitutionnels, des budgets et des capacités, le poids des traces laissées par la guerre froide, l’importance inégale des affinités otaniennes et les statuts des forces nucléaires britannique et française créent une hétérogénéité difficilement surmontable.
Donald Trump ne s’y est pas trompé qui, en jouant sans fard la carte d’une Otan utile aux États-Unis qu’en tant que marché pour les ventes d’armes américaines – avions pour la Belgique ou hélicoptères pour la Pologne – a contribué par cette forme de vassalisation affichée à accentuer les dissensions européennes. L’Alliance atlantique, en quête d’une légitimité renouvelée – et dont le rôle historique va bien au-delà d’une simple alliance militaire – s’en est trouvée inutilement fragilisée. L’unilatéralité de la décision de retrait – certes progressif mais entamé – des forces américaines de Syrie, sans consultation ni même information des Britanniques ou des Français pourtant présents sur place a choqué ; elle illustre le peu de cas fait par Washington de capacités alliées considérées comme marginales ou supplétives. Même s’il sera compensé par le renforcement de coopérations spécifiques telles qu’actées par les accords de Lancaster House de novembre 2010, le départ de la Grande Bretagne est constitutif d’un affaiblissement stratégique net, accentué par la perte d’un des deux droits de veto « européens » au Conseil de sécurité des Nations unies. Il semble que ce soit, entre autres, à ces conséquences d’un Brexit devenu difficilement gérable et incertain que le nouveau traité franco-allemand d’Aix la Chapelle signé le 22 janvier 2019 veuille remédier.
En retard sur l’évolution du monde pour certains, en avance pour d’autres, trop petite pour viabiliser un grand marché ou trop grande pour garder une cohérence idéologique et géostratégique, les critiques, parfois contradictoires, fusent, attestant en creux de la centralité du projet à défaut d’atteindre l’unanimité sur les modalités et les finalités. Le débat institutionnel, pour essentiel qu’il soit, ne saurait cependant occulter celui de l’adaptation à un environnement international qui n’a plus rien à voir avec celui du Traité de Rome de 1957. Le monde post-guerre froide, devenu pour certains « apolaire », s’estompe au profit d’un antagonisme – ou duopole ? – sino-américain qui, avec ou sans Trump, devrait tendre à l’exclusivité. S’agissant des rapports de l’Europe avec un monde russe qui, par bien des aspects, en constitue au moins jusqu’au Caucase et à l’Oural, le prolongement oriental, y a-t-il eu erreur d’évaluation de la part des Européens dans les années qui ont suivi la chute du communisme ? Depuis la fin de la guerre froide la relation de l’Europe avec la Russie ne cesse d’interroger ; entre un Eltsine demandant à Bill Clinton de « lui donner l’Europe » (sic)9 et un Trump qui semble – pour des raisons qui restent à préciser – jouer les intérêts de Moscou en déconsidérant l’UE et en menaçant de quitter l’Alliance atlantique, quelle devrait être la réponse européenne ? Les basculements démographiques et économiques doivent mener à s’interroger sur les moyens de la puissance au XXIe siècle : depuis plus de vingt ans, la croissance du vieux continent est à la moitié de la croissance mondiale assortie de constantes pertes de marché ; face aux Brics et assimilés, le risque est que les membres de l’Union ne deviennent des puissances « immergeantes ». Dans un monde durci par les verrouillages nationalistes, les compétitions militaires et technologiques et le capitalisme financier, l’Europe peut-elle minorer le risque de décrochage, en matière d’intelligence artificielle ou d’espace par exemple ? Un continent de 510 millions d’habitants ne peut ignorer la prégnance du rapport de force et chercher à y substituer systématiquement la coopération technique et le soft power. Dans son dernier ouvrage, Benjamin Haddad10 souligne cette évidence : l’Union européenne, qui a cru pouvoir échapper au tragique en en déléguant le traitement à l’Amérique, devra abandonner son innocence géopolitique.
La dissidence est-elle l’avenir du monde occidental ?
Un nationalisme de repli
Proche des méthodes d’Andrew Jackson et de Theodore Roosevelt, le « trumpisme » n’est cependant pas un nouvel avatar de la « manifest destiny », théorisée au XIXe siècle et qui resurgit sous des formes diverses jusqu’à nos jours. Si, à l’intérieur des États-Unis, l’idéal de la « nouvelle Jérusalem » ne fonctionne plus du fait d’une immigration massive qui modifie les données du pacte national états-unien, à l’extérieur la confrontation à l’altérité civilisationnelle commence à poser question. Le trumpisme n’est pas un isolationnisme ou du moins pas l’isolationnisme traditionnel énoncé par George Washington ; celui-ci avait pour but de préserver les États-Unis des agissements néfastes de puissances européennes perçues comme concurrentes ou inamicales mais partageant néanmoins le même référentiel de valeurs. Le monde qui compte s’est depuis étendu aux dimensions de la planète et il s’agit de faire face à des puissances émergentes qui ambitionnent de façonner, mieux, de devenir le nouvel ordre interétatique. Reposant sur une vision sombre, quasi hobbesienne, de la société internationale, il est un interventionnisme agressif de prévention mais aussi de repli obsidional au profit d’un égoïsme sécuritaire. Nombre d’observateurs en ont souligné un élément essentiel : le mot de « leadership » n’apparaît jamais dans les discours de l’actuel président. On se trouve en présence d’un prolongement à l’étranger d’une politique à vocation interne destinée à répondre aux angoisses de l’électorat trumpien. L’originalité n’en est pas l’élément central ; les considérations de politique intérieure ont toujours pesé sur la politique étrangère américaine. À sa façon, c’est-à-dire avec une politesse et une urbanité plus abouties, Obama était arrivé à des conclusions similaires, à savoir que l’Amérique ne peut pas tout régenter ; ses regrets sur l’affaire libyenne de 2011 comme son refus de bombarder la Syrie à l’été 2013 en attestent.
L’analyse vaut pour la politique menée dans le monde arabo-musulman. Trump, contre l’avis du secrétaire d’État à la Défense James Mattis – qui de ce fait a démissionné – a engagé le retrait des troupes américaines de Syrie parce qu’il estime que les dangers – en l’occurrence Daech – qui y menaçaient la sécurité des États-Unis sont éliminés. Que l’Europe soit encore vulnérable à cette menace et plus encore l’allié français, présent militairement sur place, n’entre pas pour lui en ligne de compte ; que les Kurdes qui ont tant combattu pour défaire l’État islamique se sentent trahis et en danger d’élimination par Ankara n’a guère plus d’importance. Mais le chef du Pentagone n’est pas le seul déçu d’une telle décision ; le conseiller à la Sécurité nationale, John Bolton, attendait beaucoup plus de la présence des 2 000 militaires engagés en Syrie dont, à plus long terme, l’éviction du pays de l’armée iranienne et de ses supplétifs. Et que dire du Premier ministre israélien ? Dans une interview récente, l’ancien ministre Hubert Védrine laissait entendre qu’en dépit des apparences, Trump ne portait qu’un intérêt limité aux desiderata d’Israël. Vue sous cet angle, la politique iranienne – retrait du JCPOA, embargo, sanctions, menaces de frappes – du président américain pose désormais question ; est-elle destinée à satisfaire les inquiétudes et les visées régionales israéliennes ou ne répond-elle pas d’abord et avant tout à des impératifs de sécurité tels que perçus par l’opinion publique américaine ? Pour cette dernière, Daech et le nucléaire iranien sont vendeurs ; la présence des Pasdarans en Syrie beaucoup moins.
Antagonisme destructeur ou duopole structurant ?
Le même raisonnement vaut pour la Chine vers laquelle – péché irrémissible aux yeux de Trump – Obama avait en quelque sorte fait « pivoter » la politique étrangère américaine au détriment de l’Europe. L’inflexion s’inscrivait certes dans le temps long d’une politique qui avait commencé avec Kissinger et le voyage de Nixon à Pékin en 1972 et s’était poursuivie sous Clinton, pour aboutir, sous G.W. Bush, à l’entrée en décembre 2001 de la Chine à l’OMC. Les États-Unis en espéraient un débouché pour leurs exportations et un rééquilibrage de leur balance commerciale ; le résultat fut exactement inverse avec son cortège de délocalisations, une forte désindustrialisation, la hausse du chômage, la stagnation du salaire médian, l’insécurité juridique de l’économie chinoise et sans doute la crise de la dette. Au final, les États-Unis et avec eux le monde occidental découvraient tardivement quelques vérités dérangeantes : l’économie chinoise est, si ce n’est un capitalisme d’État, du moins un capitalisme au service de l’État, un pseudo-libéralisme qui ne respecte qu’optiquement les règles de l’OMC et qui ne conduit pas, jusqu’à nouvel ordre, à la démocratie politique.
Mais l’essentiel est peut-être ailleurs et décembre 2018 restera sans doute une date dans les relations entre la Chine et le monde occidental. L’arrestation par les canadiens le 1er du mois, à l’aéroport de Vancouver, de Mme Meng Wanzou, à la demande de la justice américaine qui réclame son extradition, a pris l’allure d’un symbole. Le motif tel que présenté par les États-Unis est d’une grande banalité puisqu’il repose sur l’accusation de contournement des sanctions unilatérales prises par Washington contre l’Iran. La personnalité de l’interpellée et ce qu’elle représente l’est beaucoup moins puisque Mme Meng n’est autre que la fille ainée et héritière présumée du PDG et fondateur de Huawei, fleuron de la haute technologie chinoise, groupe dont elle assure actuellement la direction financière. Avec ses 190 000 salariés de par le monde, Huawei, à la pointe du développement des réseaux et des plateformes qui porteront demain la révolution de la 5G, est devenu un vecteur de conquête et d’influence chinoise dans le monde. Pour les observateurs avertis c’est la bataille pour l’hégémonie technologique – et donc militaire – de demain qui se joue derrière cette affaire ; c’est l’interprétation que la Chine veut retenir ; celle aussi de quelques patrons de services secrets occidentaux qui ont, pour des raisons de sécurité nationale, demandé à leurs gouvernements que Huawei soit exclu des marchés relatifs à la 5G. Dans ce qui prend l’allure d’une véritable crise « géo-technologique », où Américains et Européens ne sont déjà plus sur la même ligne, le sort réservé par la justice états-unienne à Mme Meng peut générer des conséquences internationales dont il serait hasardeux à ce stade d’imaginer les effets.
La fin de l’année 2018 fut riche d’autres enseignements : le 18 décembre Xi Jinping dans un discours prononcé à l’occasion de la célébration des quarante ans de réformes chinoises tirait quelques leçons de la réussite de son pays où un capitalisme débridé et jusqu’à présent efficace continuera d’aller de pair avec un strict contrôle social et politique aux mains du Parti communiste. La démocratie ne constituant pas le stade ultime du développement, la Chine estime apporter une contribution majeure au progrès de l’humanité. Souhaitant s’opposer à l’hégémonie du plus fort (sic) elle dispose de son propre modèle de réussite, confucéen ou non, qu’elle entend bien exporter afin de jouer progressivement un rôle central sur la scène mondiale. Comme pour étayer le bien-fondé de ces aspirations, le 3 janvier, Pékin réalisait une première spatiale en réussissant à poser une sonde d’exploration sur la face cachée de la Lune. L’avenir dira si l’effet produit sera équivalent à celui du lancement du premier Spoutnik par les russes le 4 octobre 1957, déclenchant, via la course à l’espace et aux missiles intercontinentaux, la rivalité américano-soviétique. Puissance ascendante contre puissance établie ; le passage de témoin est à coup sûr l’enjeu de la lutte ; du dossier nord-coréen aux incidents aéronavals en mer de Chine méridionale11, les prétextes à escalade ne manquent pas. Après les déports successifs de puissance de la France vers l’Angleterre et de celle-ci vers les États-Unis, c’est sans doute à un nouveau basculement de « l’économie-monde » auquel on doit se préparer. Le désormais célèbre « piège de Thucydide » cher à l’historien Graham Allison est-il en train de se refermer ?
La dissidence comme sauvegarde ?
Lorsqu’en décembre 2018, pour justifier le retrait de Syrie, Donald Trump évoque lors d’une visite aux troupes américaines en Irak, lieu en l’occurrence symbolique, que son pays ne peut « plus être le gendarme du monde », l’abandon du « regime change » des néo-conservateurs des années 1990-2000, visant à répandre la démocratie par contagion est patent ; seuls semblent faire exception, à ce jour, les dossiers vénézuélien et iranien. Dans ces deux cas et plus que tout dans le dernier, le prurit interventionniste qui se manifeste au travers des gesticulations actuelles semble plus le fait des deux néo-conservateurs de l’équipe, Mike Pompeo et John Bolton12 que du président lui-même. Il n’empêche : la montée des tensions autour de l’Iran fait craindre un dérapage découlant d’une erreur d’appréciation ou d’une manipulation13. Les emprunts doctrinaux du président, partiels et inconstants, sont donc divers ; ses approximations et ses revirements illustrent sa difficulté à stabiliser une vision cohérente de politique internationale qui pourrait lui survivre. Il n’en demeure pas moins que dans la classification de W. R. Mead14, Trump est pour l’essentiel un épigone du président Andrew Jackson (1829-1837) dont le portrait trône, paraît-il, depuis son investiture dans le bureau ovale de la Maison Blanche. Or comme le rappelle justement Benjamin Haddad15 « Les jacksoniens ne croient pas aux croisades morales, les États-Unis doivent défendre les intérêts de la nation américaine, avec brutalité si nécessaire. Comme Trump, leur définition de ces intérêts est étroite : la défense de la frontière, la sécurité physique, et le bien-être économique du territoire américain ». Les contempteurs du président constatent, pour le déplorer, l’abandon de l’exceptionnalisme américain et de la dimension morale qui lui est consubstantielle ; Trump ne prétend certes pas mettre le moralisme au cœur de sa politique étrangère mais faut-il aller, comme l’ancien néo-conservateur Robert Kagan, jusqu’à dire que les États-Unis actuels sont un « rogue super power » ?
Au travers de ces épisodes moyen-orientaux ou chinois se profilent les linéaments du scénario de la rupture ou de la dissidence au cœur de la genèse des États-Unis.
Rupture et dissidence que celle qui a vu, au XVIIe siècle, les « Pilgrim fathers » fuir l’Europe de l’absolutisme politique et de l’intolérance religieuse ; rupture également que celle qui, à la fin du XVIIIe, entraîne les treize colonies à faire juridiquement sécession de l’Angleterre certes, mais aussi politiquement du reste du monde, en proclamant une série de droits, d’abord pour elle-même, se différenciant ainsi d’une révolution française conçue dès son origine comme universaliste. Et, plus près de nous, certains observateurs de rappeler les anciennes préconisations d’un certain Donald Trump de fermer les États-Unis à tous contacts avec les pays africains en proie, il y a quelques années, à une épidémie de fièvre Ebola ; thématique du mur et du repli défensif déjà…
Lorsque s’esquisse aujourd’hui, à Washington, un consensus de politique étrangère autour du célèbre concept de Georges Kennan de « containment », visant jadis l’URSS mais appliqué cette fois à la Chine, la prise en compte par les États-Unis de la volonté de l’Empire du Milieu de s’approprier une centralité restée au cœur de son imaginaire collectif est évidente. L’inversion dans les esprits des places respectives de la partie et du tout, du centre et de la périphérie, n’est pas neutre. Véritable révolution copernicienne autant qu’affaiblissement significatif et peut-être irréversible de l’Occident, elle signifierait la relativisation de toutes ses valeurs jusqu’ici présentées comme un absolu à atteindre ou à préserver. Les États-Unis et à leur suite le monde occidental se trouveraient dans l’obligation d’adopter la posture de la dissidence pour maintenir leurs acquis civilisationnels. Saisissant paradoxe qu’a, à maintes reprises, souligné Charles Zorgbibe : d’ordinaire, dans l’histoire, les puissances dissidentes sont, comme le fut la Libye de Kadhafi, des puissances marginales ; dans le cas présent, c’est la puissance dominante qui entraînerait ses alliés traditionnels dans cette voie. On n’en est pas là mais le trumpisme pourrait en être, parmi d’autres, un signe avant-coureur.
Alain Meininger
Administrateur hors classe
Directeur de projet (ER), ministère de la Défense
- Voir l’article de Sylvie Laurent, Célia Belin et Paul Zajac dans Le Débat, janvier-février 2018. ↩
- Mark Lilla , La gauche identitaire ; l’Amérique en miettes, Stock, 2018, 160 p. Voir aussi l’entretien avec Alexandre Devecchio, Le Figaro, 15 novembre 2016. ↩
- Sur son site internet, le parti démocrate segmente l’électorat américain en dix-sept groupes. ↩
- Dans leur ouvrage La mort des démocraties édité chez Calmann-Lévy, les politologues Daniel Ziblatt et Stephen Levitsky évoquent la situation américaine tout en reconnaissant in fine que la démocratie états-unienne, à la différence d’autres, est trop solide pour être vraiment menacée. ↩
- L’annonce fin janvier 2019 de la mise en place du mécanisme « Instex », fondé sur le troc et excluant des marchandises essentielles telles que le pétrole a une portée essentiellement symbolique. Il ne concerne d’ailleurs à ce jour que les trois pays européens (Allemagne, France, Grande Bretagne) signataires du JCPOA. ↩
- La Suède est soucieuse de protéger son propre « Gafam », Spotify, (valorisé à hauteur de 30 milliards de dollars à la bourse de New-York en 2018) d’un alourdissement de la fiscalité. ↩
- Cinquante-six mille si l’on prend en compte l’ensemble des institutions européennes et les agences spécialisées. ↩
- Six cents gardes-frontières au lieu d’un minimum nécessaire de dix mille ; la montée en puissance est désormais engagée. ↩
- L’Obs, 23 novembre 2018 ; entretiens bilatéraux Eltsine-Clinton de la période 1993-1999, déclassifiés. ↩
- Benjamin Haddad, Le paradis perdu. L’Amérique de Trump et la fin des illusions européennes, Grasset, 2019. ↩
- La France n’est pas épargnée : le 7 avril dernier, une frégate de la marine française, « Le Vendémiaire », a été interceptée par la marine chinoise dans le détroit de Taïwan que Pékin considère comme étant à 100 % chinois. La France y défend au contraire le principe de la liberté de navigation. ↩
- Respectivement secrétaire d’État et conseiller à la Sécurité nationale. ↩
- Rappelons les incidents du Golfe du Tonkin d’août 1964 lors de la guerre du Vietnam. ↩
- Walter Russel Mead, historien, chercheur au Hudson Institute de Washington. Il distinguait dans une étude publiée en 2003 quatre écoles de pensée susceptibles d’orienter la politique étrangère américaine : jeffersoniens, hamiltoniens, jacksoniens et wilsoniens. ↩
- Entretien avec Eugénie Bastié, le FigaroVox, 26 avril 2019. ↩