L’expérience populiste de la gauche radicale grecque du Syriza (2015-2019) nous offre la possibilité d’un regard général et critique sur la manière dont elle a été menée, sur la synthèse qui en est sortie, sur ses raisons et ses techniques, son style et même son « essence ».
Car malgré les ressemblances indéniables avec d’autres cas de populisme, il convient de ne pas négliger le fait que la forme prise par le populisme de gauche grec s’inscrit dans un domaine qui lui est propre, à savoir un paysage national particulièrement enclin à de telles expériences, comme le prouve ce qu’on a nommé le national-populisme des socialistes du Pasok d’Andreas Papandreou dans les années 1970 et 19801. Et si l’on veut approfondir cette approche, on pourra rechercher la « matière première » de ce « populisme », en tant que phénomène politique, dans une culture populaire pérennisée, faite d’une inextricable imbrication entre le nationalisme culturel et ses promoteurs, au premier rang desquels se trouvent les intellectuels, et les projets de société des différentes forces politiques tout au long du siècle dernier et jusqu’à aujourd’hui. Le cas du Syriza, comme celui des socialistes du Pasok d’hier, ne saurait être traité de manière satisfaisante en dehors d’un tel référentiel, si l’on veut comprendre les ressorts de son surgissement non comme une survivance linéaire mais comme un phénomène nouveau, dans une mondialisation chaotique et en pleine crise européenne, et néanmoins enraciné dans un héritage culturel particulier. Les lignes qui suivent sont donc un effort de présenter de façon brève, synthétique et axiologiquement neutre la dernière résurgence en date du populisme grec, celui du Syriza, tout en le situant dans un complexe plus vaste, où le politique et le culturel s’entrecroisent et se renforcent dans une tradition intellectuelle tout au long du XXe siècle.
Le modèle interprétatif du national-populisme décrit et analysé par Pierre-André Taguieff, selon lequel le national-populisme est un style politique divisant polémiquement le corps social entre le peuple et les élites – qui sont en outre, dans la rhétorique des leaders démagogues populistes, au service des étrangers – résume et explique de façon adéquate cette synthèse entre le politique et le culturel. Le peuple, vanté comme étant le foyer vertueux par excellence, est conçu en tant que peuple culturel (ou même ethnique), surtout quand ses revendications, formulées par le leadership populiste, racontent et s’intensifient d’un héritage, d’un substrat intellectuel propre puisé dans une tradition qui célèbre son identité pure et entière, millénaire et héroïque. Ce populisme, conçu dans ce domaine d’application, accentue le clivage entre « nous » et « eux », en intégrant dans les mœurs et coutumes son discours polémique. Mais comme Taguieff le remarque aussi, c’est la construction du peuple dans la perspective de la construction nationale elle-même qu’on identifie dans le discours des intellectuels qui façonnent le récit national, en tant que peuple national. En d’autres termes, la construction d’un peuple, dans l’avènement de l’État-nation, est inimaginable sans la construction du nationalisme, ce dernier étant populaire, sinon « populiste »2.
Le cas Syriza
Comme nous avons pu l’exposer ailleurs, la refondation du Syriza, petite formation altermondialiste dans les années 2000 (sa « pré-histoire » est à rechercher dans l’héritage d’un petit parti eurocommuniste des années 1970 et 1980)3, prend acte du mouvement des Indignés grecs (été 2011) en instrumentalisant les peurs de larges couches sociales résultant de la profonde crise économique d’un pays au bord de la faillite. La capacité du Syriza à canaliser les passions et les intérêts de ce « petit peuple » massivement mobilisé, son discours démagogique promettant qu’une fois au pouvoir il supprimera les mémorandums imposés à la Grèce par la fameuse Troïka (FMI, BCE, UE), ainsi que sa stratégie rhétorique accusant les élites en place d’être les seules responsables du désastre qui a conduit le pays à la perte de sa « souveraineté nationale », ont pris la forme d’un discours de résistance nationale contre les forces étrangères (en puisant jusque dans l’imaginaire de la résistance national-populaire contre l’Allemagne nazie sous l’Occupation entre 1940 et 1944). C’est ce jumelage du populaire et du national-résistantiel (au sens de la défense de la souveraineté nationale « trahie » par les élites dirigeantes), une constante du discours du Syriza d’Alexis Tsipras, qui fait que son parti sort de la marginalisation jeuniste altermondialiste et devient entre 2012 et 2015 une force politique nationale majeure qui accède au pouvoir en janvier 2015. Pour le dire autrement : son discours anti-austérité a pu fonctionner lorsqu’il a rallié un souverainisme, disons défensif, face aux « menaces » venant de l’étranger : non content de s’en accommoder, le Syriza progresse dans l’extrémisme rhétorique du nouveau clivage politique entre les « pro- » et les « anti-mémorandums » qui remplace celui qui opposait la droite et l’anti-droite (représentée à l’époque par le Pasok) et qui avait dominé depuis la fin de la dictature militaire en 1974. Ce nouveau clivage a en outre permis l’alliance gouvernementale entre le Syriza et les nationalistes de droite des « Grecs indépendants », la petite formation mouvementiste (issue elle aussi de la mobilisation des Indignés) de Panos Kammenos entre 2015 et 2018, une première pour un parti de la gauche radicale européenne. Le nationalisme a été le ciment du social-populisme anti-austérité du Syriza.
Plus exactement : c’est ce nationalisme qui lui a donné l’opportunité d’accéder au pouvoir en lui procurant la couverture qui lui a permis de s’adresser à l’auditoire national en absorbant les distinctions partisanes.
Le dépassement de l’ancien clivage a été opéré par la nationalisation du discours anti-austérité. Si le populisme, généralement parlant, se caractérise par la glorification du peuple indivisible et par le dépassement des clivages politiques traditionnels, nous trouvons ici, dans le cas du Syriza, une confirmation supplémentaire de son habileté. En ce sens, le fait que de nombreuses analyses se soient concentrées sur la « question sociale » comme étant le prétendu ingrédient par excellence des nouveaux rapports de force a voilé la vraie nature de l’antagonisme politique dans une conjoncture de crise économique et d’ébranlement de la confiance politique, un antagonisme désormais régi par une rhétorique populiste au nom de la « nation ». La nation a pu incarner le politique, la volonté politique qui, dans le discours démagogique du Syriza, jusqu’au référendum de juillet 2015, a dévié en décisionnisme politique : tout est affaire de décision politique, la reconquête de la souveraineté nationale est une simple décision d’un pouvoir politique résolu à couper tout lien avec le régime de dépendance qui a condamné le pays à un statut de « colonie ». Le populisme, dans ce sens, n’est que cette volonté nationalisée qui, au nom d’un peuple uni, peut décider de se battre contre ses « ennemis » désignés.
De ce point de vue, la « désillusion » de l’été 2015, quand le gouvernement du Syriza a dû capituler face à ses créanciers, et cela en inversant le résultat du référendum par lequel les citoyens avaient rejeté massivement le plan de sauvetage du pays, a signifié en fait l’abandon du souverainisme par le Syriza. Ensuite, le Syriza et son gouvernement allaient se borner à une gestion défensive des conséquences économiques de la crise, en accusant ses adversaires politiques, alors dans l’opposition, d’être « corrompus » et en ramenant à la surface une identité anti-droite à l’ancienne, émaillée toutefois d’une rhétorique de défense des droits individuels. Cette posture social-populiste, greffée d’une nuance sociétale, sera beaucoup plus difficile à tenir au cours des années 2018 et 2019, quand éclateront en masse les protestations nationalistes contre l’accord signé par le gouvernement du Syriza, reconnaissant la Macédoine du Nord sous cette appellation. Pour une part importante des citoyens, cet accord aura été un « mémorandum identitaire » : le Syriza est désormais coupable d’avoir trahi un héritage culturel du pays en accordant le nom de Macédoine au pays voisin au nord de la Grèce.
Sa large défaite aux élections européennes de mai 2019 est le résultat de ce double abandon : à la perte de la souveraineté nationale à cause des mémorandums s’ajoute la question identitaire engendrée par l’affaire macédonienne4.
Cette désarticulation entre le populaire et le national, et donc une certaine « dénationalisation » de son discours sont la principale cause de la seconde défaite du Syriza aux élections législatives du 7 juillet 2019. L’ultime tentative d’Alexis Tsipras, une semaine avant ces élections, de réorienter sa communication politique vers les valeurs de son auditoire, de parler à nouveau au nom de la nation (en répétant le célèbre slogan du fondateur du Pasok Andreas Papandreou : « La Grèce appartient aux Grecs », et en précisant : « La Grèce est notre âme »)5, indique clairement l’importance capitale accordée à la sensibilité nationale comme forme appropriée du populaire, ressentie par le leader populiste mais refoulée, puisque qu’il est désormais converti aux demandes de l’orthodoxie européenne.
Une « préhistoire » intellectuelle « national-populiste »
Même si le cas du Syriza est le fruit de la récente crise économique grecque, son expérience ne va pas sans rappeler celle des socialistes du Pasok tiers-mondistes dans les années 1970, prônant l’indépendance nationale et la souveraineté populaire d’un pays débarrassé de la junte militaire de la période 1967-1974. Le socialisme du Pasok inspiré des théories du « développement inégal » de la nouvelle gauche américaine des années 1950 et 1960, considérant la Grèce, « pays périphérique du capitalisme mondial », comme une colonie de l’impérialisme américain, prônait la conquête de l’indépendance nationale comme condition de la sauvegarde de la souveraineté populaire qui, à son tour, était la condition de l’avènement du socialisme, qui serait une invention grecque (« aux couleurs grecs »), au-delà des dogmes et des modèles hérités. Andreas Papandreou lui-même ne comptait pas le Pasok dans la gauche dite traditionnelle, il ne voyait pas en lui un parti mais un mouvement des non-privilégiés dépassant les anciens clivages partisans, le considérant comme la forme actuelle de la synthèse national-populaire entreprise par l’EAM (le FLN grec sous l’Occupation allemande des années 1940-1944). Éclatante ressemblance, pour ne pas dire identification, du moins aux yeux de leur auditoire, avec le modèle inspirant Alexis Tsipras quelques décennies plus tard, qui lui aussi voulait un Syriza s’inspirant de l’expérience national-populaire du FLN grec.
Mais cette inextricable imprégnation du populaire et du national n’est pas seulement une opération rhétorique populiste guidée par des démagogues : elle est aussi fondée sur un long héritage culturel dépassant les clivages politiques.
Si le slogan d’« essence » nationaliste, « La Grèce appartient aux Grecs », est de provenance communiste, scandé pour la première fois en décembre 1944 lors de l’intervention de l’armée anglaise aux côtés des forces grecques contre les communistes grecs insurgés à Athènes (un slogan repris par A. Papandreou dans les années 1960), il résulte aussi de la célébration du peuple nationalisé par de grands intellectuels progressistes, communistes ou démocrates-libéraux du siècle dernier. Le mouvement même de la « modernisation » grecque est traversé par le fil de la célébration national-populaire, précieux héritage de la synthèse d’une grécité mythique, qui prend une forme particulière au début du XXe siècle avec le mouvement de promotion de la démotique, la langue parlée par le peuple. De grands poètes, écrivains et divers savants ont su façonner un retour permanent à la culture populaire inventée, à ses chants démotiques, mais aussi et surtout à sa langue dite vulgaire (la démotique), parlée par le peuple, contre la langue puriste ou savante (la katharevoussa). Ce long conflit, inauguré avec une solennité et une véhémence particulières à la fin du XIXe siècle (et qui n’a pris fin que dans les années 1970 avec l’adoption définitive de la langue populaire comme langue officielle), a rassemblé, malgré leurs différences de classe et de sensibilité politique, de nombreux libéraux, la majorité des nationalistes et tous les socialistes dans le même camp de la défense de la démotique. Mais la plupart de ses partisans ne se limitaient pas à la seule promotion de la dite langue du peuple. La promotion combative de la démotique va de pair avec la quête de l’identité grecque et coïncide, si elle n’en fait pas partie intégrante, avec le courant de modernisation économique, sociale et politique qui sera exprimé par la « révolution bourgeoise » militaire de 1909 (à la tête de laquelle se trouvera le libéral Eleftherios Venizelos)6, tant pour les nationalistes et les libéraux que pour les socialistes, même si ces derniers y ajoutent un parfum de classe, le tout formant une synthèse inextricable qui puise dans l’exaltation de l’authenticité du peuple national face aux maux venant d’en haut et/ou de l’étranger, de la défense stérile de la pure savante, du culte excessif des ancêtres de la part des élites intellectuelles dirigeantes mais aussi de la menace d’une occidentalisation mimétique. Pendant les trois premières décennies du XXe siècle, tous ces grands esprits grecs de sensibilités différentes se retrouvent dans les pages d’une même revue, O Noumas, où ils débattent de leur langue préférée. C’est ce clivage-là, imprégné d’un démotisme dit « moderne », d’une modernité dite démotique, aux formes parfois violentes7, qui génère les inconditionnels de la démotique, qu’il convient d’interroger pour commencer à comprendre la frontière politico-culturelle qui sera lourde de conséquences sur le développement politique particulier du pays tout au long du XXe siècle et même jusqu’à aujourd’hui.
Identité démotique et ethnisme païen
Jean Psichari (1854-1929), linguiste (professeur titulaire à l’École des langues orientales de Paris de 1904 à 1928) et fervent dreyfusard, gendre d’Ernest Renan, ami personnel d’Hippolyte Taine et de Victor Hugo8, ne se contentera pas de fabriquer une grammaire à lui pour la langue du peuple, dans une démarche devant permettre à celui-ci d’« apprendre » sa culture et sa langue (son fameux essai Mon Voyage, paru en 1888, en fut un point de départ)9, mais deviendra un thuriféraire inconditionnel du peuple, des peuples en tant que tels, toujours vertueux : « Les peuples ne sont jamais fautifs. La faute aux têtes. »10 Pour lui, la lutte anti-élitiste pour la langue vivante populaire est l’équivalent du combat de « l’armée pour les frontières naturelles »11 d’un pays. De son côté, le poète Kostis Palamas (1859-1943), peut-être le plus grand intellectuel grec de la première moitié du XXe siècle, nationaliste, partisan de la continuité millénaire de la « civilisation grecque », avec des influences nietzschéennes, considérant lui aussi la démotique comme une frontière imaginaire nationale, la conçoit comme une Renaissance à la grecque. Incarnant, selon La Grande Revue parisienne, « l’hellénisme intégral, mais non exclusif », Palamas n’hésitera pas à s’incliner devant le populisme littéraire français en le rattachant à la vie même de la nation. Son article paru dans La Grande Revue en 1931, dans le cadre de l’« enquête internationale sur le populisme » publiée par ce périodique, postule que le populisme grec se rapporte « à notre vulgarisme », la langue populaire, tout en précisant que « le peuple grec, par sa langue, ses mœurs, son caractère, sa vie et ses hommes, en pénétrant dans les simples histoires paysannes, dans les romans plus compliqués et plus vastes encore de la vie bourgeoise, a fait merveille. » Le mouvement littéraire populiste est, pour Palamas, une « réaction nécessaire et justifiée » face, surtout, aux excès d’un roman bourgeois souvent centré sur « des exceptions malsaines », « de la psychologie pathologique », « des sujets monstrueux » qui « se séparent de la réalité ». Au contraire, « le populisme a l’ambition de substituer à cela le rythme et la marche d’une psychologie sociale, afin de créer et de faire revivre des personnages et des héros, humbles et élevés, représentatifs, qui jaillissent de la vie collective, de la vie de la Nation, de la totalité (…) »12. Par ailleurs, c’est à ce poète (avec son « lyrisme ethnique »), que La Grande Revue considère comme « le plus grand écrivain de la Grèce contemporaine et, actuellement, le plus grand poète de l’Europe ! », et en qui, quelques années plus tard, l’hebdomadaire Les Nouvelles Littéraires voit « une sorte de Mistral ou un Yeats de la Grèce moderne »13, qu’on doit ces deux remarques majeures concernant la culture grecque : son paganisme, qui, à travers son démotisme, a su remplacer les dieux anciens qu’étaient Apollon et Athéna par Saint Georges et la Vierge Marie14, tandis que les chants démotiques puisent aussi, en fait, au culte de la nature fille du soleil15, renforçant ainsi la caractéristique fondamentale de la culture grecque qu’est le « ethnisme païen »16. En caractérisant les habitants des campagnes, cette autre Grèce, comme une « escouade de simples paysans rusés »17, Palamas livre une description incomparable sur le sujet vivant de son « national-populisme » tant littéraire que culturel. Aux funérailles de Palamas en février 1943, en pleine occupation nazie, cérémonie qui fut l’occasion d’un immense rassemblement populaire contre les Allemands, le grand poète mystique (avec des influences bouddhistes, selon l’historien N. Svoronos)18 Anghelos Sikelianos, initiateur du rétablissement des « fêtes Delphiques », dédiera à « l’enfant de la Grèce » qui avait su incarner l’hellénisme éternel un émouvant poème, « Retentissez, clairons… Cloches tonitruantes, sonnez… ». Dans « La Marche de l’esprit » (1945), le mystique Sikelianos, toujours hanté par le paganisme19, tout en étant un universaliste convaincu20, chante : « Aidez-nous à lever le soleil au-dessus de la Grèce/aidez-nous à lever le soleil au-dessus du monde », un poème mis en musique par Mikis Theodorakis et qui allait devenir l’un des chants les plus populaires en Grèce après la chute de la dictature des colonels en 1974 et l’hymne informel des socialistes du Pasok, dont le logo était un soleil levant vert.
C’est ce poète nationaliste et humaniste à la fois qu’était Palamas, selon André Thérive (le confondateur avec Leon Lemonnier de l’ «école populiste» francaise dans l’ entre les deux guerres), mais aussi « anarchiste » (dans son livre célèbre, Les Douze Paroles du Tzigane, on peut lire ce « Fi donc ! et encore fi les patries !»), et peut-être anarcho-nationaliste (puisque son Tzigane, selon le poète surréaliste Andreas Empeirikos, n’est autre que l’« ethnie grecque »)21, que le leader communiste grec Nikos Zachariadis va tenter de « récupérer ». Zachariadis, le plus stalinien, mais aussi le plus « charismatique » des communistes grecs, va lui consacrer un essai politique rédigé en 1937 et publié en 1943, où il voit un Palamas parlant au nom de la « nation des travailleurs », au vrai peuple, à la « bourrasque populaire vivante des montagnes » qui va « balayer » la ploutocratie grecque et étrangère, un poète s’adressant aux « forces national-populaires vives », selon les propres mots de Zachariadis, contre l’« ancienne moisissure et pourriture », ramenant sur le devant de la scène et légitimant à gauche le discours décadent d’une certaine extrême droite grecque intellectuelle fin de siècle22, mais aussi contre ces intellectuels bourgeois qui prônent « l’imitation des étrangers » et la « décadence »23.
Un modernisme piégé
Cependant, Kostis Palamas est politiquement un « centriste », et même, à sa façon, un « pro-européen », fervent partisan du leader politique, libéral et nationaliste à la fois, Eleftherios Venizelos (pour qui il ira jusqu’à écrire des poèmes !), une référence fondatrice pour le centrisme, et même pour le centre-gauche grec, qui promouvait la dite « Grande Idée », à savoir la « libération de l’hellénisme d’Asie mineure » (rêve qui tourna au cauchemar après la défaite, la « catastrophe » de 1922), tout comme est un libéral convaincu et politiquement centriste le romancier et essayiste Georges Theotokas, le représentant par excellence de la « génération littéraire des années trente » : ces poètes et écrivains (parmi lesquels se détachent les deux prix Nobel de la littérature grecque, le poète Georges Séféris, prix Nobel en 1963, et le poète Odysseus Elytis, prix Nobel en 1979, tous deux politiquement plutôt « libéraux mélancoliques ») qui voulaient rétablir une symétrie entre l’Europe moderne et progressiste et une « identité grecque » à réinventer. Cette génération des années trente esthétise l’identité grecque, la pense « par analogies », comme essaye le faire Theotokas par son essai Esprit libre (paru en 1929), voulant moderniser son « archétype » gréco-ancien, et elle entend ainsi provoquer la rupture avec la génération précédente incarnée par Palamas (dont Theotokas considère l’œuvre comme la haute expression intellectuelle des deux mouvements rénovateurs du XXe siècle, le démotisme et le libéralisme incarné par Venizelos)24 et immergée dans l’éthographie et le romantisme populaire d’inspiration herderienne25. Toutefois, le centriste-libéral Theotokas, malgré sa première ouverture vers l’acceptation de la culture occidentale et moderniste dans les années 1930, va finalement appeler, au cours des décennies suivantes, à un retour à l’Orthodoxie chrétienne face à un « homme [occidental] qui a perdu ses racines » spirituelles.
De son côté, le poète Georges Séféris (politiquement de centre-droit et se réclamant moderniste), par l’éloge des hommes simples26, de leur « patience inexpérimentée » face aux conditions sociales défavorables auxquelles ils sont confrontés, et de l’authenticité de leur vie, autant d’éléments qui engendrent une autre sorte de communication humaine, considère la « lumière grecque » comme le véritable fondement de la différence grecque : « Je suis fou de ce pays, chaque jour plus emporté par cette ivresse. La mer, la danse immobile des montagnes. (…) Je suis fou de ces réalités, dans cette lumière. Et tu vois la lumière du soleil, comme disaient les anciens. »27
Par ailleurs, Séféris va réinventer le général Macriyannis, héros fameux de la guerre d’indépendance grecque contre l’Empire ottoman en 1821. Pour Séféris, Macriyannis symbolise le Grec par excellence : la simplicité, l’humilité, la résistance héroïque. Macriyannis, pauvre et illettré, qui se bat avec héroïsme contre les Turcs, est érigé en modèle de vie frugale et juste, illustrant la résistance populaire combative qui n’exclut pas la ruse contre l’ennemi (qu’il s’agisse du Turc ou de la domination étrangère incarnée par le roi Othon et ses Bavarois, maîtres de la Grèce après la Révolution de 1821), et il fournit au poète l’occasion de vanter le ressourcement dans le peuple : « Je ne fais pas l’éloge de Macriyannis parce qu’il n’a pas appris à lire et à écrire, mais je loue Dieu très-bon qui ne lui a pas donné les moyens d’apprendre », sinon ses célèbres Mémoires seraient une chronique historique et non « un fragment de l’histoire de l’hellénisme », « une histoire des sentiments du peuple ». Conclusion : « Chaque fois que notre race se tourne vers le peuple, demande au peuple de l’éclairer, elle est refaçonnée par le peuple, elle poursuit la tradition qui a pénétré triomphalement dans la conscience de la Nation avec la Révolution grecque »28. Mais si Macriyannis est, selon Séféris, « un de ces vieux troncs d’olivier de chez nous »29, on peut en conclure, en suivant Pierre Vidal-Naquet et selon ses termes, que ce général mythifié est un « démocrate populiste » et « un patriote jusqu’à l’extrême limite du possible »30. Et cela dans un cadre historique plus large, marqué, toujours selon P. Vidal-Naquet, par la quête de l’« identité grecque » surdéterminée par la conjonction de trois éléments : la lutte contre la « xénocratie », la guerre langagière et l’aménagement du territoire urbain selon les modèles parisiens, londoniens ou munichois. En réalité, en exaltant ici en Macriyannis le « gardien de la patrie », Séféris célèbre le moi inexistant de l’homme prémoderne, identifié de manière absolue au vécu social collectif conçu en tant qu’ une « individualité » : « L’homme est ce qu’il ressent »31 : tel sera le commentaire pertinent du philosophe Stelios Ramfos, disséquant le « paradigme » vécu de Macriyannis.
L’autre prix Nobel grec de littérature (1979), le poète Odysseus Elytis, va trouver lui aussi dans la lumière « transparente » de la mer Égée, dans son soleil et dans l’authenticité de ses habitants, le mystère même de la vie vraie. Une lumière cosmogonique, contre la nuit qui attire les autres Européens et Occidentaux, est à l’origine de la célébration des racines grecques comme contre-exemple au modèle standardisé, techniciste et artificiel, presque concentrationnaire, de l’Occident32, p. 467 (en grec).]. L’« antirationalisme » d’Elytis, hérité, selon ses propres termes, de sa période surréaliste dans les années 1930 et 1940, en lui procurant l’« irrationalisme » nécessaire pour contrer la raison occidentale, l’aide à redécouvrir la « vérité grecque » dans une nature immuable (« la continuelle pénétration de la mer dans les montagnes, qui était à la fois une avancée des montagnes dans la mer ; la transparence des eaux où le fond était à la fois un toit au-dessus de nos têtes »), « immobile et éternelle » : et « la fontaine de pierre sur la grand-route, un petit Parthénon quotidien »33, p. 327 (en grec).] ; mais symbolisée aussi par l’humilité des gens simples, qui va de pair avec un sentiment devenu naturel de revendication de justice, et même un sentiment de « sainteté » du lieu grec : « (…) Un paysage n’est pas, comme le croient certains, un simple ensemble de terre, de plantes et d’eaux. C’est la projection de l’âme d’un peuple sur la matière (…). C’est une langue dont la grammaire est très stricte, fabriquée par le seul peuple dès l’époque où il n’allait pas encore à l’école. Et il l’a conservée avec un attachement religieux et une résistance remarquable au cours des siècles les plus difficiles. Jusqu’à ce que nous arrivions, avec les diplômes et les lois, pour l’aider. Et nous l’avons presque fait disparaître. D’un côté, nous avons dévoré les restes de son écriture, et de l’autre, nous avons rogné sa substance même, nous en avons fait un petit bourgeois (…) »34, p. 8, 9-10 (en grec) (souligné dans le texte).] Pour Elytis, la venue d’un « artiste » issu de la « Grande École de la Nation [grecque] », à savoir de la tradition orthodoxe, capable de réorganiser spirituellement le pays sinon le monde, apportera la solution, et le poète se laisse aller à l’esthétisation polémique de son attente salvatrice : « [Cet artiste] devra réfléchir toute la lumière sur les ténèbres de l’Europe que nous enterrons aujourd’hui en vue d’une autre qui semble naître. Sans distinction. Sur les noires chênaies, sur les monstres de Chartres et du Duomo, les Descartes et les Calvins, les Kant et les Marx, le pape – Dieu leur pardonne. »35 Son poème Axion Esti (« Cela mérite d’être glorifié », ou « Il est Digne »), publié en 1959, issu de la liturgie orthodoxe byzantine mais non sans ingrédients païens, dont des extraits ont été mis en musique par Mikis Theodorakis, a connu un énorme succès populaire36, surtout dans les premières années qui ont suivi la chute de la dictature des colonels en 1974, devenant pour l’essentiel un deuxième hymne national pour la jeunesse révoltée « contre l’impérialisme » et pour ce petit peuple humilié et exclu du système politique après la guerre civile de 1946-1949 : « Justice intelligible, ô soleil mental / et toi fervent myrte de la gloire / non je vous en supplie non / ah n’oubliez pas ma patrie ! » C’est ce même grand poète Elytis qui, avec d’autres intellectuels grecs, va s’élever contre la reconnaissance par la Grèce de la République de Macédoine en 1990 avec le slogan : « Pour nous, notre âme est notre nom ! », considérant que le nom de Macédoine appartient au patrimoine grec. Et c’est Mikis Theodorakis qui, au début du mois de février 2018, s’adressant à une foule immense qui manifestait à Athènes contre la reconnaissance de ce petit pays au nord de la Grèce, va déclarer, tout en condamnant les élites grecques dominantes « national-nihilistes » : « La Macédoine est une, et elle a été, est et sera toujours grecque ».
D’un autre côté, le poète communiste Yannis Ritsos (1909-1990), prix Lénine de poésie en 1977 (Louis Aragon prononcera un discours au Kremlin lors de la cérémonie de remise du prix), exalte lui aussi dans Grécité (poème également mis en musique par l’incontournable Mikis Theodorakis et chanté par des milliers de jeunes de gauche après la chute de la dictature militaire) la nature grecque, le soleil et les montagnes, l’ouvrier et l’Église, les rochers de la mer Égée, la Sainte Vierge, et même la continuité culturelle grecque (« Dans ce pays, chaque porte possède un nom gravé dans le bois depuis trois mille ans ») : « Ne pleure pas la grécité, quand elle va plier / le couteau dans l’os et la laisse au cou / La revoilà qui s’élance et se renforce et se déchaîne / et harponne le fauve du harpon du soleil. »37 Jacques Lacarrière souligne à juste titre que Ritsos exprime le verbe grec38, la transformation des valeurs naturelles « divines », en tant que valeurs par excellence civilisatrices, en valeurs sociales, en associant harmonieusement les valeurs du modèle grec comme communauté « de vivants et de morts » à la révolution.39 Mais Ritsos le communiste chante aussi les « enfants immortels de la Grèce », les nationalistes Palamas et Sikelianos, et bien sûr Macriyannis, la Passion et la Résurrection, et, se demandant : « que veulent chez nous les étrangers ? »40, il va fêter, dans une apostrophe de sa théologie politico-poétique et toujours solaire, le saint par excellence, le « Saint Peuple » : « La chapelle blanche sur le versant bien face au soleil / de sa petite fenêtre étroite fait feu / Et sa cloche attachée haut dans le platane / elle l’accorde toute la nuit pour la fête du Saint Peuple. »
Un imaginaire chrétien-païen
Si le point de départ du « national-populisme » intellectuel grec se situe dans le démotisme linguistique du début du xxe siècle, fondé sur l’idéalisation éthographique d’une Grèce des campagnes authentique et vertueuse, les modernistes des années 1930 échoueront, en fait, à en sublimer la substance. L’esthétisation de l’identité national-populaire apportera le résultat contraire, renforçant de la sorte son influence politico-culturelle décisive, consolidant son hégémonie de valeur : comme « topos » ou comme « archétype »41, la grécité « démotique » restera ce qu’elle « est », un vécu indéracinable. L’historien de gauche Philippos Iliou avait repéré avec clairvoyance la généalogie « national-populiste » : « Le fait est que le populisme ultérieur dans tous ses avatars, progressistes, conservateurs et réactionnaires, a été fortement et efficacement alimenté par l’amalgame culturel généré par le démotisme combattant, du fait de la dichotomie artificielle qu’il a voulu imposer entre les couches populaires et les autres. »42 Le problème avec le nationalisme « démotique » mais aussi avec la dite « génération des années trente » (qui a renouvelé et esthétisé l’éthographie national-populaire traditionnelle, bref, qui l’a décomplexée en la repoussant, dans certains cas, encore plus en arrière que le démotisme « moderniste ») est que ce n’est pas un « nationalisme » en ce qui concerne son aspect tourné vers l’intérieur du pays, mais un « culturalisme », un imaginaire culturel chrétien-païenne qui n’est pas limité à un petit courant idéologique isolé dans le cadre d’un hellénocentrisme de droite, comme semble le penser le philosophe (de sensibilité schmittienne) Panayotis Kondylis dans un remarquable essai consacré à la culture grecque et aux causes du sous-développement grec43, mais est un phénomène horizontal, diffus et « politisé » (une culture qui, dans ses cristallisations anthropologiques extrêmes, est figurée comme « superstitieuse », ayant incorporé dans le corpus orthodoxe une multitude d’éléments païens et suggérant, finalement, que le « mal » se trouve en dehors du moi national-religieux, en face, dans le monde extérieur qui le menace)44 (en grec).], et c’est la raison pour laquelle il est congénitalement incapable de communiquer avec le monde occidental. Son idée fixe est le réenchantement du monde, selon les propos d’Elytis, sa « re-viergation »45, mot utilisé par le poète pour décrire son état psychique quand, jeune, et pour la première fois, il était pressé de lire un livre sur Paul Éluard, un livre qui verserait dans sa vie le « sérum de la Magie ».
En guise de conclusion : la modernisation contre la modernité
Ce démotisme endogamique qui est le « populisme » intellectuel et culturel grec, fondé par des intellectuels liberaux-centristes et même de gauche, à travers ses métamorphoses de « modernisme » esthétique, a hypothéqué l’enjeu de sa relation, ainsi piégée, avec la modernité, comme l’a bien remarqué le philosophe français d’origine grecque Kostas Axelos dans les années 1950 : « Pour que la Grèce devienne véritablement moderne, il faudrait qu’un mouvement provenant de sa propre essence la pousse non pas vers la “modernisation”, mais la modernité. »46, p. 27.] Cornelius Castoriadis, de son côté, souligne exactement le même problème, quand il parle de l’inexistence d’une « communauté politique » en Grèce47, parlant de l’absence de fait inaugural dans la tradition sociale grecque, comme une « révolution » (comme, selon ses propres mots, « la Révolution française »), pour imposer des droits individuels et collectifs, la pratique même de la responsabilité individuelle, pour l’entrée du pays dans la modernité démocratique48. Ces deux grands penseurs grecs, malgré leurs différences idéologico-politiques, pointent avec perspicacité ce que les modernisateurs grecs, tant intellectuels que politiques (européistes et « populistes »), préfèrent ignorer en donnant dans un mimétisme de l’Occident, de l’Europe, sans souci de réforme intellectuelle touchant la « mentalité national-populiste » qui reproduit un sous-développement prioritairement politique, lequel est à la base des problèmes économiques, comme la récente quasi-faillite financière du pays. Ce que les deux penseurs veulent dire en utilisant les concepts de « modernité » (Axelos) ou de « communauté politique » (Castoriadis), c’est que la Grèce ne s’est pas constituée en nation civique contractuelle et, de ce fait, nous sommes justifiés à conclure que sa perpétuelle infortune, sa particularité, son « exception » sont précisément dues à son sous-développement politique, à l’atrophie de l’élément politique. C’est en ce sens que Castoriadis tournera en dérision, à fort juste titre, la « pasokocratie » des années 198049, le séjour au gouvernement du Pasok qui, sous Andreas Papandreou, a dominé non seulement électoralement mais aussi culturellement la scène politique, faisant entrer le pays dans une modernité consumériste unidimensionnelle, et en ce sens « corrompue ». La « modernisation », entendue principalement comme assimilation économique à l’Occident, voire même comme un établissement d’ une symétrie institutionnelle graduelle et uniquement formelle avec les évolutions en Europe (« parce que nous ne pouvons pas faire autrement… »), indépendamment des intentions de ses acteurs (intellectuels et politiques), échoue constamment parce que ses conditions modernistes font défaut. De Psichari et Palamas à Elytis et de Papandreou à Tsipras, personne n’est contre la modernisation, mais tous sont, idéologiquement ou aussi pratiquement, contre la modernité politique, dont ils ne font valoir que l’aspect instrumental.
Ainsi la modernisation populiste et les modernisateurs du centre et de la gauche s’avèrent-ils la meilleure défense contre la « menace » de la modernité.
Mais les démagogues du centre et de la gauche n’agissent pas, comme nous l’avons vu, dans un vide social et culturel : au contraire, ils s’alimentent aux sources d’un héritage inépuisable et, dans les moments de crise politique, économique ou nationale majeure, quand ces élites politiques comprennent que le pays se trouve en faillite et qu’elles décident alors d’aller contre la « volonté nationale-populaire » dominante, elles perdent automatiquement leur légitimité sociale et culturelle et sont traitées de « traîtres à la nation ». C’est ce qui s’est passé avec le Pasok au moment où le premier et le deuxième mémorandums ont été imposés à la Grèce (2011-2015), c’est ce qui s’est passé avec le Syriza quand il a renoncé à la revendication de « souveraineté national-populaire » à cause des mémorandums mais aussi quand il s’est de lui-même soumis à ce qu’on a appelé le mémorandum identitaire (2018-2019), à savoir l’initiative qu’il a prise de reconnaître la Macédoine du Nord.
Andreas Pantazopoulos
Politiste, Associate Professor, Université Aristote de Thessalonique
- Andreas Pantazopoulos, « Le national-populisme grec, 1965-2004 », Les Temps Modernes, no 645-646, décembre 2007 ; Andreas Pantazopoulos, « Andreas Papandreou », dans Kevin Featherstone and Dimitri A. Sotiropoulos (dir.), The Oxford Handbook of Modern Greek Politics, Oxford University Press, 2020. ↩
- Pierre-André Taguieff, L’Illusion populiste. Essai sur les démagogies de l’âge démocratique, Paris, Champs/Flammarion, 2007 ; Id. La revanche du nationalisme. Néopopulistes et xénophobes à l’ assaut de l’ Europe, Paris, PUF, 2015. ↩
- Andreas Pantazopoulos, « L’ illusion national-populiste en tant que ‘pathologie’ du politique : le cas grec et au-delà », dans La Modernité disputée. Textes offerts à Pierre-André Taguieff, Paris, CNRS Éditions, 2020, p. 540-546. ↩
- Sur le poids symbolique de cette dénomination, voir le récent ouvrage de Pascal Ory, Qu’ est-ce qu’ une nation ? Une histoire mondiale, Paris, Gallimard, 2020, p. 220-223. Andreas Pantazopoulos, « Le populisme de gauche est-il un ‘vrai populisme’ ? », Revue Politique et Parlementaire, no 1092, juillet-septembre 2019, p. 263-275 (p. 267-269) ; Andreas Pantazopoulos, « Syriza: l’ autre défaite du populisme de gauche », Telos.eu, https://www.telos-eu.com/fr/politique-francaise-et-internationale/syriza-lautre-defaite-du-populisme-de-gauche.html (6/6/2019). ↩
- Andreas Pantazopoulos, « Élections grecques : un ‘dégagisme’ libéral contre le Syriza populiste qui résiste », Telos.eu, https://www.telos-eu.com/fr/elections-grecques-un-degagisme-liberal-contre-un-.html (8/7/2019). Voir aussi notre article synthetique, Andreas Pantazopoulos, « Grèce: entre populisme et autoritarisme », Institut Montaigne, https://www.institutmontaigne.org/blog/democraties-resilientes-grece-entre-populisme-et-autoritarisme (22/7/2019). ↩
- Nicolas Svoronos, Histoire de la Grèce moderne, Paris, Presses Universitaire de France, 1964, p. 106-110. ↩
- Olivier Delorme, La Grèce et les Balkans, vol. II, Paris, Gallimard, 2013, p. 737. ↩
- Voir Emmanuel Kriaras, Psichari. Idées, Combats. L’Homme, Athènes, Hestia, 1981, p. 63-79 (en grec). Selon Psichari, Hugo lui a dit un jour : « Toi, tu es grand ; moi, que suis-je ? » (p. 71). ↩
- Jean Psichari, Mon voyage, dir. : Alkis Angelou, Athènes, Ermis, 1987 (1971) (en grec) ; Germaine Rouillard, « Jean Psichari. Notice biographique », Annuaires de l’École pratique des hautes études, année 1930, pp. 3-11, https://www.persee.fr/doc/ephe_0000-0001_1930_num_1_1_3256. ↩
- Jean Psichari, Textes critiques, vol. 1, Athènes, Fondation Kostas et Eleni Ouranis, Athènes, 1997, p. 183 (en grec). ↩
- Cité dans Ad. Pepelassis, « Psichari et la transformation bourgeoise », Nea Hestia, janvier 1980, p. 7 (en grec). Dans son récent ouvrage sur la « fabrique de l’ écrivain national », Anne-Marie Thiesse considère « Mon Voyage » comme « la première prose en grec moderne (démotique) » venant d’une « petite nation » accédant à la « reconnaissance internationale », Anne-Marie Thiesse, La fabrique de l’ écrivain national. Entre littérature et politique, Paris, Gallimard, p.130. ↩
- Kostis Palamas, Entretiens et enquêtes, vol. 27, Athènes, éd. Frères G. Vlassis, p. 271-275 (en grec ; le passage cité est en français dans le texte). ↩
- Les Nouvelles littéraires, 15/10/1935, p. 2. ↩
- Kostis Palamas, Œuvres complètes, vol. 6 (Lettres C), Athènes, Gkovostis, p. 496-497 (en grec). ↩
- Kostis Palamas, Études et articles, vol. 13, Athènes, éd. Frères G. Vlassis, p. 300 (en grec). ↩
- Kostis Palamas, Études et articles (1926-1939), vol, 25, Athènes, éd. Frères G. Vlassis, p. 300 (en grec). ↩
- Cité dans Mario Vitti, La fonction idéologique de l’éthographie grecque, Athènes, Kedros, 1980, p. 74, 77 (en grec). ↩
- Nicolas Svoronos, Histoire, op. cit. ↩
- Angelos Sikelianos, Sermon d’héroïsme, dir. littéraire : Kostas Mpournazakis, Athènes, Ikaros, 2004, p. 78-79 (en grec). ↩
- Andreas Karantonis, « Réflexions sur la poésie d’Angelos Sikelianos », Nea Hestia, Noël 1952, p. 22-30 (en grec). ↩
- Cité dans Aristos Kambani, Histoire de la nouvelle littérature grecque, Athènes, Hestia, 1948, p. 245 (en grec). ↩
- Pantelis Voutouris, Idées de dureté et de bonté. Nationalisme, socialisme, racisme (1897-1922), Athènes, Kastaniotis, 2017, p. 93 (en grec). ↩
- Nikos Zachariadis, Le vrai Palamas, Athènes, Glaros, 1986 (en grec). ↩
- Cité dans Di. Plakas, « Kostis Palamas. Le poète de son temps et de sa Nation », Tetradia Efthinis, no 21, novembre 1983, p. 99-117 (p. 104) (en grec). ↩
- De l’aveu même de Palamas, voir Kostis Palamas, Études et articles (1926-1939), op. cit., p. 302. ↩
- Yorgos Giannoulopoulos, Le Modernisme et les essais de Georges Séféris, Athènes, Polis, 2011, p. 528-551 (en grec). ↩
- Georges Séféris, Pages de Journal (1925-1971), Traduction du grec, choix, présentation et notes par Denis Kohler, Paris, Mercure de France, 1988, p. 334. ↩
- Georges Séféris, Un Grec – Macriyannis, Athènes, Ikaros, 1975 (en grec). ↩
- Georges Séféris, Quelques points de la tradition grecque moderne, Postface : Dimitris Daskalopoulos, Athènes, Aiora, 2016 (édition bilingue grec/français). ↩
- Préface de Pierre Vidal-Naquet dans : Général Macriyannis, Mémoires, Traduction, introduction et notes de Denis Kohler, Paris, Albin Michel, 1986, p. 1-10. ↩
- Stélios Ramfos, L’Inconcevable Rien. Racines philocaliques du nihilisme grec moderne. Essai d’anthropologie esthétique, Athènes, Armos, 2010, p. 447 (en grec). ↩
- Odysseus Elytis, Blanc-seing, Athènes, Ikaros, 2011 [1992 ↩
- Odysseus Elytis, Cartes sur table, Athènes, Ikaros, 2017 [1987 ↩
- Odysseus Elytis, Choses publiques et choses privées, Athènes, Ikaros, 2016 [1990 ↩
- Ibid., p. 38-39. ↩
- Voir la préface de Xavier Bordes dans : Odysseus Elytis, Axion Esti, suivi de L’Arbre lucide et la quatorzième beauté, Traduction: Xavier Bordes et Robert Longueville, Paris, Poésie/Gallimard, 2017. ↩
- Yannis Ritsos, Grécité, suivie de Après l’épreuve, Traduction : Jacques Lacarrière, Paris, Éditions Bruno Doucey, 2014. ↩
- Ibid. ↩
- Eratosthénis Kapsomenos, « Le rôle de Ritsos dans la formation de la culture grecque moderne », dans Yannis Ritsos. Toujours présent à l’appel de l’époque. Congrès scientifique, Organisation : Comité Central du Parti Communiste Grec (KKE), 21-22/11/2009, Athènes, Syghroni Epohi, 2011, p. 66-82 (en grec). ↩
- Yannis Ritsos, Les Chants des camarades. Pour les 40 ans de l’EAM, Athènes, Syghroni Epohi, (3e éd. complétée), 1988, p. 106, 118, 146 (en grec). ↩
- Contrairement à ce que soutient dans une importante étude Dimitris Tziovas, Le Mythe de la génération des années trente. Modernité, grécité et idéologie culturelle, Athènes, Polis, 2011 (en grec). ↩
- Ph. Iliou, N. Svoronos, « La notion de peuple dans l’historiographie grecque moderne. Continuités et ruptures », Bulletin de la Société d’Études de la culture grecque moderne et de l’éducation générale, t. 4b, 1980, p. 76-98 (p. 84, 85) (en grec). ↩
- Panagiotis Kondylis, Les raisons du déclin de la Grèce moderne, Athènes, Themelio, 2011 (en grec). ↩
- Voir l’excellente étude anthropologique de Charles Stewart, Démons et Diable en Grèce, Athènes, Taxideftis, 2008 [1991 ↩
- Ibid., p. 337. ↩
- Kostas Axelos, Le Destin de la Grèce moderne, Paris, Éditions Les Belles Lettres, 2013 [1954 ↩
- Cornelius Castoriadis, Nous sommes responsables de notre histoire, Entretiens, traductions, direction : Teta Papadopoulou, Athènes, Polis, 2000 (en grec). ↩
- Cornelius Castoriadis, Considérations sur la Grèce moderne, https://collectiflieuxcommuns.fr/?536-considerations-sur-la-grece&lang=fr (3/10/2011). ↩
- Ibid. ↩