Ce dimanche, tous les yeux étaient tournés vers les États-Unis, ce qui a presque invisibilisé deux interviews savoureuses : Jean-Luc Mélenchon sur RTL, et Raphaël Glucksmann sur France Inter, toutes deux révélatrices de l’état d’épuisement, politique et idéologique, du canal historique de la gauche française : Le Parti socialiste. Retour sur une faute politique.
Olivier Faure a dû hésiter longuement : Censurer Bayrou ou pas ? Cette question était malheureusement une fausse question, uniquement dictée par les ambitions personnelles de quelques-uns. Le choix qu’il a fait in fine, celui de ne pas censurer – et donc indirectement de soutenir –, a été une faute politique. La question, en effet, n’était pas : Faut-il censurer ?,mais : Faut-il fissurer (le NFP) ? Deux ans seulement nous séparent de 2027, à condition que le gouvernement Bayrou, s’il venait à trébucher d’ici quelques semaines, n’entraîne pas Emmanuel Macron dans sa chute. Le délai est court, très court. Qu’aurait dû faire Olivier Faure, et plus largement le Parti socialiste ? Acter l’épuisement politique et idéologique du courant social-démocrate.
Pour le dire autrement : Acter qu’il n’est d’autre choix pour le PS que d’être inféodé à LFI.
Pour comprendre cela, il faut écouter Raphaël Glucksmann, bien décidé à engager un « rapport de force » avec Jean-Luc Mélenchon en portant haut ce qu’il estime être l’idéal de la gauche sociale-démocrate, une gauche qu’il entend assurément incarner : «
Il n’y a que la gauche sociale-libérale façon Emmanuel Macron pour se revendiquer d’une telle idéologie… ou bien Raphaël Glucksmann, qui est en vérité le digne héritier du Macron de 2016…
En faisant le choix de la non-censure, Olivier Faure a gommé l’essentiel de ce qui rattachait encore le PS au socle de l’électorat de gauche. Et il a ravivé inutilement le spectre des compromissions et des arrangements entre amis en laissant entendre que sa proximité, voire son amitié, avec le ministre de l’économie et des finances l’avait conduit à pousser plus avant dans les « négociations ». La vérité, c’est que le PS a perdu sa boussole, et que Jean-Luc Mélenchon est le seul qui dispose, à gauche, d’une boussole en parfait état de marche. Conclusion : soit le PS revient rapidement à la raison, fait son autocritique publique – comme durant les heures glorieuses de la politique stalinienne –, et il pourra alors espérer récupérer quelques circonscriptions lors des prochaines élections législatives, soit il se condamne à poursuivre l’errance entamée sous le quinquennat de François Hollande, et dont on sait à quelles hauteurs il est parvenu à se hisser en 2022 : 1,75%.
Par Frédéric Saint Clair, politiste, auteur de L’extrême droite expliquée à Marie-Chantal (Éditions de la Nouvelle Librairie)