Le second tour des municipales soldera une drôle de séquence électorale. La crise sanitaire a fini d’embrumer une élection qui l’était déjà initialement. A la balkanisation nationale des rapports de forces politiques, le Covid a rajouté une exceptionnelle démobilisation citoyenne dans une consultation qui traditionnellement demeure une élection des plus mobilisatrices, quoique en recul depuis plusieurs scrutins.
Sans anticiper sur l’issue du second tour, il est néanmoins d’ores et déjà possible d’extraire plusieurs enseignements de ce renouvellement municipal. Il se traduira d’abord par une confirmation, assez inédite au regard de l’histoire politique récente : rarement parti présidentiel sera apparu aussi peu “territorialisé” que La République en marche. Un amortisseur néanmoins corrigera à la marge ce déficit d’ancrage, celui de ses alliés, le MoDem principalement et des élus “divers” dont certains sont des “apparentés” locaux de la majorité. Cet ajustement ne saurait néanmoins occulter la faiblesse du macronisme municipale.
Une seconde caractéristique tend à s’imposer : les “marques” nationales, à l’exception vraisemblable et notable d’Europe écologie-les verts, n’ont jamais semblé aussi peu porteuses sur le terrain. Ce sont principalement les personnalités, le lien direct avec les administrés, le bilan pour les sortants qui structurent la relation politiques/citoyens, bien plus que le label d’une formation, renforçant de la sorte le poids des notables et de la notabilisation à l’échelle du territoire. Tout se passe comme si la politisation par l’enjeu local l’emportait sur la politisation par l’affiliation partisane.
Reste un troisième élément et non des moindres : celui de la participation qui s’annonce faible. Cette démocratie de basse intensité dont l’abstention figure un signal préoccupant n’est pas sans poser problème : elle dit que les élus municipaux et communautaires seront désignés par un corps électoral peu mobilisé, peu concerné par une consultation cannibalisée par les suites de la crise sanitaire. Dans un pays et dans un moment où la crise de la représentation mine l’adhésion aux institutions, l’échelon local, seul épargné jusque là par la défiance qui frappe le politique, risque d’être confronté à son tour à l’infléchissement de son capital de légitimité, du fait d’une élection…”introuvable”…
Arnaud Benedetti
Rédacteur en chef