À pas comptés, l’exécutif entend amorcer le retour très progressif à une vie normale. Y parviendra t’il ? La conférence de presse de ce jeudi du Premier ministre a dans tous les cas voulu ouvrir la voie à cette hypothèse.

Le Président comme le Premier ministre veulent y croire apparemment, nonobstant un “plateau” qui reste haut. Le plus important pour eux est de tenir cette ligne d’espoir, malgré le doute émis par certains scientifiques qui jugent les mesures d’endiguement insuffisantes et craignent un nouveau trou d’air épidémique. Le déconfinement murmuré du bout des lèvres reste enveloppé encore à ce stade d’un halo de clair-obscur, même si certaines annonces sont quelques peu esquissées : déplacements non limités , terrasses possiblement ouvertes , lieux de culture qui pourraient rouvrir. Tout ceci reste sous conditions et, bien entendu, rien de surprenant à cette prudence. L’avenir, collectivement, reste malgré les efforts communicants du gouvernement empreint d’un doute existentiel sur cette “suite française” dont nous ne savons que peu, tant sur le plan sanitaire que sur ses conséquences sociales et économiques qui gonflent le sentiment mêlé de lassitudes, d’inquiétudes et de scepticisme qui emplit l’atmosphère nationale.
La réalité c’est que quoiqu’il arrive, le bilan français sera sans doute jugé sévèrement, tant les retards accumulés depuis un an ont fragilisé la gestion sanitaire. La trilogie du malheur logistique – masques , lits , vaccins – aura hanté l’Etat durant toute cette pandémie qui, hélas, n’est pas encore derrière nous. Le plus frappant dans ce moment paroxystique, c’est finalement ce que cette crise aura révélé du déclassement français dont, force est de le dire, l’actuel exécutif n’est pas l’unique responsable, même si, ingratitude du pouvoir, il sera en première ligne celui qui devra en rendre compte. Sans doute aura t-il aggravé la situation par une communication malencontreuse à plus d’un titre, n’apprenant que peu de ses erreurs et des critiques ; sans doute surtout aura t-il donné l’impression de courir après les événements et d’adopter des dispositifs nécessaires après en avoir douté. Ce fut encore le cas ce jeudi avec, entre autres, les propos de Jean-Michel Blanquer n’excluant plus, comme l’a fait remarquer le spécialiste de communication Philippe Moreau-chevrolet, l’usage des capteurs CO2 et des purificateurs d’air dans les établissements scolaires.
La question des frontières a illustré, elle, jusqu’à l’incandescence et encore tout récemment avec le sujet du variant brésilien cette difficulté à prendre en temps et en heure les dispositions adéquates. Pour un exécutif qui avait fait de la modernisation et de la modernité le sceau de son mandat, cette pandémie aura été un épouvantable crash-test. On peut lui pardonner la défaillance des moyens dont il n’est que l’un des comptables ; on ne peut en revanche que difficilement l’absoudre sur son absence de réflexe et sur une communication bien plus de posture que de vérité et d’efficacité. En faisant de la vieille politique, la génération Macron aura dissipé, à l’épreuve de la pandémie, une partie de sa promesse initiale…
Arnaud Benedetti
Rédacteur en chef